IRL des SJW [Lissandre Verrières] [TERMINE]

 Kara est arrivée en avance à l’heure du rendez-vous. C’était une habitude d’angoissée, ça, de prévoir toujours un bon quart d’heure de marge partout où elle allait. Ou une déformation professionnelle : arriver tôt, pouvoir choisir sa place assise, observer suffisamment les alentours, le contexte, les gens autour, percevoir ses chances de vente.
Oui, bon, d’accord, là c’était différent… Ce n’était pas vraiment Kara qui avait rendez-vous, cet après-midi-là.

Cela faisait quelques jours qu’elle avait renoué avec ses anciens démons, et qu’elle traînait sur des chats bidons, pour tromper l’ennui monotone de sa vie. Elle était dans une période épineuse, où les résultats de l’entreprise qui l’employait n’étaient pas si bons, et le Conseil d’Administration râlait pas mal, puisque les dividendes n’allaient pas assez augmenter. Du coup, toute la hiérarchie s’en prenait sur le coin de la figure, et en bas de cette pyramide, Kara et les autres commerciaux devaient assurer un max pour éviter la porte.
Dans un contexte de concurrence hautement déloyale, elle avait donc passé bien trop d’heures au bureau ou sur la route, et quand elle rentrait chez elle le soir, le sommeil la délaissait. Alors, ben… Elle avait cédé aux sirènes de son passé et avait cherché du lien social virtuel, puisqu’elle n’avait ni le temps, ni l’énergie de voir des amis, ou faire des rencontres.

Se nourrissant de crème glacée, tout en tenant au café et aux cigarettes, Cassandre avait donc pris possession de toutes les nuits de Kara, encore. Elle avait évidemment été abordée par de gros relou, mais c’était laissé tenter, en manque flagrant d’affection et de valorisation. Cependant, rapidement, elle avait été prise à partie quand on l’avait traitée d’allumeuse, et même sur des groupes de parole censés être bienveillants et amicaux…
Pas avare en insultes, elle s’était défendue bec et ongle, en dépits de l’absurdité d’avoir à s’énerver contre ces idiots. Dans son combat, Cassandre avait pu compter sur un soutien surprenant. Une certaine KokoroLatex était venu à son aide à plusieurs reprises, pour donner une leçon à ces petits emmerdeurs.

De fil en aiguilles, réalisant qu’elles se connectaient souvent aux mêmes horaires et naviguaient sur les mêmes salons, Cassandre avait commencer à lui parler, la remerciant d’abord, et elles avaient semblé instauré une sorte de sororité de super-héroïnes. C’était rassurant de pouvoir compter sur d’autres femmes, et l’Office Girl avait besoin de relations sociales.
Une nuit, alors qu’elles s’échangeaient des memes idiots à base de chat et de sous-entendus sexuels, KokoroLatex annonça à tout le chanel qu’elle travaillait dans l’industrie du X. Des films, même, d’après ce qu’elle disait. Evidemment, une armée de pauvres types s’étaient précipités, tantôt pour la draguer, tantôt pour l’insulter… C’était d’un pathétique.

Rendue hardie par leur complicité, Cassandre avait lutté avec sa nouvelle Sis pour remettre poliment -non, Cassandre avait plusieurs fois manqué l’exclusion en étant grossière- ces tocards à leur place. Ils se sentaient tous en droit d’émettre un jugement, une critique, ou juste un avis sur la profession de KokoroLatex… Ca la mettait hors d’elle !
Cette nuit-là, Kara n’avait pas beaucoup dormi, tant elles avaient discuté. Curieuse, Cassandre avait des centaines de questions en tête, mais n’avait pas forcément envie d’ennuyer sa nouvelle copine avec là, d’autant que beaucoup ne se gênaient pas pour lui poser toutes les questions les plus intimes, sans prendre de gants.

Au petit matin, Cassandra réaffirma son soutien à KokoroLatex, qui lui proposa quelque chose de totalement inattendu.

- Eh, ça te dit qu’on aille se boire un café demain ?

Euh. Kara n’avait pas l’habitude de se genre de choses, en vérité. Mais cette invitation était fort à propos, et après tout, elles s’entendaient vraiment bien. Avec la vie qu’elle menait, la Working Girl n’avait pas vraiment de temps à consacrer à ses proches, si elle en avait deux, trois éventuellement. Alors, un peu de sociabilité ne lui ferait pas de mal.

« Ouais mais… Comment je vais te reconnaître ? » Avait tapé Cassandre au clavier, frénétiquement. La réponse était étonnante, mais finalement, au vu de son pseudo… pas tant que cela !

- Ah ah, TKT, je porte une combinaison en latex rose.

Kara avait cru que c’était une blague.
Et dans le petit café de la gare où elles avaient rendez-vous, la jeune femme bientôt trentenaire aperçut un petit brin de gonzesse menue, toute moulée dans ce vêtement qu’elle avait annoncé porter… Ah ça, c’était clair : on ne pouvait pas confondre, en effet.

Avec un sourire hilare face à tant d’audace et d’assurance, elle songea d’abord à une farce de KokoroLatex.
Face à la blondinette, assurément, elle passait inaperçue, elle. Son tailleur était bon marché, et noir. Elle repoussa sa frange en soufflant négligemment dessus, et leva le bras pour lui faire signe.

« Hé ! Hé KokoroLatex ! Je suis Cassandre ! »

IRL des SJW [avec Kara Desco] – réponse n°1

« Hey ! »

Comme une adolescente, Lissandre faisait de grandes signes de main à sa nouvelle copine d’internet. Elle avait un grand sourire et était véritablement heureuse de la rencontrer en réelle. Avec Cassandre, elle avait l’impression d’avoir déjà vécu des moments forts et importants. En fait, c’était étrange. Elle avait autant la sensation de ne pas la connaître et en même temps de partager beaucoup.

*C’est cool ! *

Sans s’arrêter dans sa lancée, Lissandre posa sa main sur l’épaule de Cassandre et lui colla une bise sur chacune des joues. Puis elle s’assit en face et regarda dans les alentours. C’était un petit café de gare. Ce n’était pas un lieu qui respirait l’opulence. Par contre, ça respirait la convivialité. Les conversations allaient bon train. Il y a des sourires et des rires dans les alentours. Lissandre s’y sentait bien.

« Tu as déjà commandé quelque chose ? »

Il y avait tant d’énergie dans son petit corps engoncée dans tout ce latex rose moulant que Lissandre leva un bras et interpella un serveur. L’homme lui sourit, pointa un doigt un instant pour lui demander d’attendre qu’il serve les deux cafés dans son plat. Puis il vint et lui souhaita une bonne journée. Même pas une remarque sur sa combinaison. Bon, il y avait bien eu un regard observateur. Mais le serveur restait diplomate et tout sourire.

« Ce sera deux cafés gourmands. Merci beaucoup ! »

Posant ses coudes sur la table, son visage dans ses deux mains, Lissandre observa Cassandre. Elle était jolie dans son tailleur. Elle avait un beau corps. Un beau visage. Lissandre aimait bien sa nouvelle amie. Que ce soit de mots ou de formes. Oui, elle sentait qu’elle allait passer de bons moments IRL !

« Bon, je vois dans tes yeux que tu as cent questions à me poser. Je te laisse l’initiative. De toute façon, je crois que j’en ai suffisamment révélé sur les chats, non ? »

Elle sourit en se souvenant de toutes les questions indiscrètes, intimes et autres qui étaient tombés comme une avalanche. Elle avait reçu tellement de notifications qu’elle avait dues les shunter.

« Je sais que tu as été assez discrète sur les chats. Je ne pense pas que ça soit parce que tu n’étais pas intéressée. Je pense plutôt que c’était parce que tu me respectais et que tu respectais ma vie privée si je peux dire. Mais là, on est que toutes les deux et je t’aime bien. N’aie pas peur de poser des questions taboues. De toute façon, ça se voit que je suis une fille débridée, non ? »

Un morceau de langue coincée dans la commissure de ses lèvres. Un clin d’œil complice. Lissandre ne pouvait pas être plus mutine et chaleureuse envers sa nouvelle amie.

« J'suis super contente qu'on se rencontre ! »

C’était si étrange. Cette fille n’était pas encore associée dans la tête de Kara à cette KokoroLatex avec qui elle chattait depuis des jours, et pourtant, son comportement, sa façon de parler même, étaient vraiment très familière, comme si elles se connaissaient en vrai depuis un bon moment. La bise la surprit, mais une seconde à peine : c’était tellement en accord avec ce qu’elle avait perçu d’elle, finalement ! Kara rit et lui rendit son salut de la même manière, en beaucoup moins exubérant, cela dit.

Lorsque Lissandre lui demanda si elle avait déjà commandé quoi que ce soit, la brune désigna du menton son café qui fumait encore légèrement. Le café. Une drogue, selon beaucoup, et c’était mieux que l’alcool, à cette heure-ci, quand on ne veut pas faire trop alcoolique, après tout. Kara cilla à la voir déborder d’énergie, bouger sans cesse, et parler assez vite, même pour pouvoir correctement la suivre.

Mais ce qu’elle dégageait était plaisant, communicatif, même, Kara souriait, et riait de la voir aussi naturelle et débridée. Assurément, la tenue n’était pas du tout une blague, c’était exactement fidèle à ce qu’elle était ! Elle se sentit observée mais c’était de bonne guerre, puisqu’elles se connaissaient… sans s’être jamais vues ; Alors, à son tour, elle détailla cette petite blonde qui était tout à la fois extravagante et cliché. C’était assez fascinant, et même, plutôt revigorant ! On rencontrait peu de personnes comme elle, c’était assuré. Le contraste entre les deux femmes était poignant.

Alors que le serveur rapportait la commande d’un air vraiment aimable, Kara ne pouvant s’empêcher de lui lancer un regard, comme pour l’évaluer – jolies épaules- Lissandre continuait de parler, avec une fraicheur d’une vivacité étourdissante. Wow, elle carburait à quoi, exactement ? Kara pouffa de rire, mais KokoroLatex avait vu juste cependant…

« Ah, ouais… oui, c’est vrai. » Elle prit la tasse, qu’elle sirota distraitement, trop occupée à échanger avec sa nouvelle amie.

« J’voulais pas paraître intrusive, oui, alors que ces gros pervers sautaient déjà sur l’occasion pour sous-entendre que ton métier faisait de toi une fille facile. » Ce genre de raccourcis pouvait faire enrager autant Cassandre que Kara, à vrai dire. Derrière son PC, elle les insultait à l’oral plus encore qu’à l’écrit.

« Remarque, ça doit t’arriver tout le temps, non ? Tu joues dans des films, c’est ça ? On imagine pas vraiment une nana faire ce boulot par plaisir… enfin. » Elle haussa les épaules. « Je sais pas, en fait. »

Il fallait avouer qu’elle n’avait jamais rencontré de pro du X, elle se contentait d’en consommer, mais cela s’arrêtait à une suite de mots clés, des scrolls, des déceptions la plupart du temps. Et puis, jamais elle ne s’était dit « hé tiens, plus tard jveux être actrice de porno » ou « hey si je filmais des gens en train de baiser ? »
Pas farouche pour deux sous, c’était cependant un univers qu’elle ne connaissait absolument pas, et Kara était somme toute très classique, comme sa tenue, sa coupe de cheveux, sa façon de parler pouvaient le démontrer.

« Mais c’est vrai que ça se voit oui… Tu as l’air d’assumer vraiment qui tu es, et ce que tu aimes… J’admire ! » Rit-elle, sincère. Cette fille était hallucinante.

IRL des SJW [avec Kara Desco] – réponse n°2

« Impossible pour moi de vivre ma vie comme un mouton aux couleurs terne. J’ai besoin d’aller où je veux quand je veux ! Je veux que le monde soit couleurs et joie ! Est-ce que c’est trop demander ? »

Malgré son jeune âge et son choix de carrière disons insolite, il pouvait arriver que Lissandre parle comme une philosophe. Peut-être qu’au contraire de beaucoup de monde, elle avait osé ouvert les yeux et décidé qu’elle ne pouvait plus les refermer. Son objectif de vie était d’améliorer le monde entier. Son arme était la carrière pornographique. Après tout, un outil en valait un autre, non ?

« Et donc, pour te corriger, je ne joue pas dans les films. Je les créer. Il y a une différence. Je n’ai pas décidé d’embrasser cette carrière pour multiplier les partenaires et découvrir ma sexualité. Bon, il est vrai qu’il y a quelques années, quand je me suis intéressé au X, c’était pour ne pas être la dernière de mon groupe de copines à rester vierge et sans connaissances dans ce domaine. Ce n’est que par la suite que mes ambitions ont changé. »

Dès que la conversation portait sur elle, Lissandre s’enflammait et pouvait asséner des monologues plein de fougue à son interlocutrice. Là, Cassandre fut sauvée par l’odeur alléchante de la tasse de café. Sans compter les petites friandises servies dans une assiette à côté. Elle décida de s’intéresser à la langue de chat pour commencer.

« Tu sais, si tu ne veux pas découvrir toute ma vie dans les prochaines dix minutes, il va falloir m’arrêter. »

Elle plongea ses yeux dans ceux de Cassandre. C’était plus fort qu’elle maintenant, toute personne qu’elle croisait devenait source de créativité. Dans son tailleur noir et pourtant sobre, Lissandre imaginait des sous-vêtements de toutes les couleurs. Oui, ce serait parfait un tel contraste entre noir et couleurs. Elle esquissa un petit sourire à l’image mentale qu’elle se faisait de sa copine d’internet partiellement nue. Mais ce sourire pouvait tout aussi bien être l’expression de sa joyeuseté perpétuelle.

« Je dirais même que la bonne excuse pour que je ne te dise pas tout de moi tout de suite serait de parler d’un peu de toi. Et attention, je ne veux pas entendre que tu es une fille banale. Que tu n’as rien à raconter. Ou pire encore : que tu es un mouton qui suit comme tous ces autres ! »

Ce n’était pas une critique méchante. C’était plutôt une pique amusée pour la faire réagir. Preuve en était de son sourire malicieux. Lissandre baissa la tête pour replonger ses lèvres dans le café. Avec la petite nuit qu’elle avait passée, elle imaginait avoir des cernes horribles. Heureusement que le maquillage était un outil dévastateur pour les femmes ! Elle se fit alors la réflexion de savoir comment Cassandre usait de maquillage. Ça pouvait permettre d’apprendre des choses sur une femme ce genre de détails. Un peu comme l’une d’entre elles qui arboraient des tatouages sur son corps.

*Est-ce que Cassandre est tatouée, d’ailleurs ? Je ne peux pas lui demander de me montrer, elle va croire que je veux déjà la déshabiller. Hi hi ! *

Ça fusait encore, laissant toujours Kara hilare et réceptive aux sourires de Lissandre qui croquait visiblement la vie à pleines dents ! Elle était invitée à parler d'elle et son nez se fronça à ses remarques, qu'elle aurait assurément mal pris venant de quelqu'un d'autre. Mais sa nouvelle copine avait le don de faire passer les sarcasmes en vannes juste un peu taquines, faisant un peu ciller ses yeux noisettes sous sa frange.

La blondinette avec un tel peps, qu'à côté, Kara devait paraître amorphe, en tous cas, cela jouait un peu sur sa confiance en elle : face à une tornade, on se sent toujours un peu... petite, non ? C'était en tout cas ce qu'elle pouvait ressentir, légèrement, ceci-dit, tant sa bonne humeur prenait le pas sur cette pensée. Pensée qui, de toute façon, était toujours sous-jacente chez elle, et qui s'effaçait pas mal lorsqu'elle était Cassandre, sur le net.

Wew... comment parler d'elle-même sans lui dire qu'elle était juste un mouton ?
Assurément, Kara estimait qu'elle allait vachement décevoir son interlocutrice. Mais mentir n'apporterait rien non plus, et puis, elle n'en ressentait aucunement l'envie. Evidemment, en tant que commerciale, c'était un art qu'elle pouvait maîtriser, ça, enjoliver la réalité pour vendre des trucs inutiles à des vieux... Mais quel intérêt de mentir à des amis ? Après tout, elle n'avait rien à perdre : si KokoroLatex était finalement déçue d'elle, elles se quitteraient après un café, et il suffirait de ne plus se parler sur des chats, après tout. Et puis... Kara estimait que Lissandre ne s'encombrait pas des gens qu'elle n'aimait pas, ça se sentait, elle lui dirait tout de suite qu'elle n'est pas intéressante, et s'en irait en rigolant, c'était presque certain.

« Meeerde, tu vas me détester, tu sais. » Elle eut un petit rire, nerveux, et haussa les épaules, avant de boire une gorgée de café, puis reprendre. « J'ai une vie de merde, un travail bidon où on m'exploite, pour pas grand chose niveau salaire, mais j'suis pas censée t'en parler, secret pro. »

Elle se mit à rire, en lui faisant un clin d’œil malicieux. C'était stipulé dans son contrat, elle avait un devoir de réserve, et ne devait bien sûr pas dénigrer sa société. Seconde gorgée de café.

« J'ai même pas de mec attitré, je coupe toute seule ma frange et j'ai déjà colorié au feutre un de mes cheveux blancs. » Elle décrivait assez bien la loose de sa vie, mais cela ne l'empêchait pas de sourire tout de même, assez joyeuse pour ne pas déprimer de tout cela. « J'passe juste mon temps libre sur le web. » Et à boire, aussi, mais il valait mieux ne pas passer pour trop minable d'un seul coup, si ? Kara se gratta le coin de l'oeil, yeux qui étaient en effet maquillés, simplement et assez classique, de toute façon. Un léger trait de liner, une tentative de mascara pour tenter d'avoir des cils de biche, un anti-cerne qui faisait l'affaire sans être des masses efficace non plus... Cette fille était d'une banalité sans nom, à priori.

Ce faisant, elle sortit son smartphone et pianota, avant de relever son petit nez vers la blonde, un large sourire aux lèvres.

« Aller, tu signes tes films sous quel nom ? Que j'aille télécharger tout ça. Je suis curieuse de voir ce que ça donne, une femme qui tourne des pornos... c'est rare non ? » Elle lui tira la langue d'un air mutin.

IRL des SJW [avec Kara Desco] – réponse n°3

« Oui, tu as raison. C’est rare une femme qui tourne dans le X. Mais il ne faut pas s’arrêter à cette vieille info Il y a de plus en plus de femmes qui s’y mettent. Le problème, comme toujours, c’est que nous les femmes n’avons pas la même visibilité que- »

Elle ne peut pas terminer sa phrase. Elle est prise d’un petit rire en repensant à ce qu’elle vient de dire.

« Tu te rends compte de ce que je dis ? Les femmes n’ont pas la même visibilité que les hommes dans le porno ? Alors que plus de 90% des films montrent le visage et les lèvres intimes des femmes. Sans compter le fait que les hommes sont des hommes effrayés qui ne peuvent pas tourner s’ils n’ont pas la tête brouillée. C’est vraiment nul de leur part. Ils devraient assumer. »

Parfois, Lissandre ne comprend pas pourquoi les hommes ont peur d’être vu et reconnu. Est-ce que le sexe est une chose taboue ? Non, absolument pas. C’est une chose naturelle qui permet, à la base, de faire de petits enfants. Mais le sexe est aussi une expérience comme une autre –courir, peindre, etc.- d’avoir des sensations et du plaisir. Est-ce que le plaisir est un mal ? Est-ce que prendre du plaisir nous emmènera en Enfer ? Est-ce que les Enfers existent seulement ? Heureusement que Cassandre n’est pas dans la tête de Lissandre. Elle ne s’en sortirait pas de ces cents idées à la minute autrement. Cette pensée étire un nouveau petit sourire.

« Mais je n’ai pas répondu à ta question, désolé. Si tu veux me trouver sur internet, écris Lissandre Verrières. Je n’ai pas pris de pseudo. J’aime beaucoup mon prénom-nom. Puis, c’est aussi une façon d’emmerder mes parents et ma grande sœur ! »

La langue sort de ses lèvres, elle ferme les yeux et affiche un « V » de la victoire avec ses doigts de la main droite. Parfois, Lissandre ressemble encore énormément à une adolescente. Mais elle ne voudrait pas en redevenir une. A quoi bon revenir à un âge précédent ? Elle ferait les mêmes « erreurs ». Elle vivrait sa vie avec les impératifs de son âge et de son époque. Pour qu’il y ait un changement, il faudrait qu’elle revienne dans son corps passé avec son expérience présente. Il n’y aurait que comme ça que les perspectives pourraient changer.

Elle boit une gorgée de son café et décide d’attaquer une nouvelle friandise de son café gourmand. Sa main hésite et choisit le petit moelleux au chocolat.

Soudainement, Lissandre se remet debout et penche son buste vers Cassandre. Elle lui dépose un baiser sur ses lèvres et se retire rapidement avec un grand sourire.

« Je ne te déteste pas. On s’en fout pas que tu n’es pas de mec et que tu ne suives pas le schéma type de la vie. Et si tu as envie de te teindre les cheveux en rose ou autre, appelle-moi. »

Lissandre se rassoit. Ce rendez-vous n’est après tout qu’à son commencement.

Kara écoutait la petite blonde parler très vite, sans aucune gêne, de son métier, se fichant éperdument des autres clients du bar. Après tout, ils la regardaient déjà tous pas mal, moulée dans sa combinaison flashy, et s’ils avaient encore des doutes, ce qu’elle venait de dire confirmait bien qu’elle travaillait dans le X. Cela entraîna quelques messes-basses à côté d’elles, des froncements de sourcils outrés un peu plus loin, mais aussi des regards très intéressés.

Kara, quant à elle, n’avait pas vraiment parlé fort, sans doute sans s’en rendre compte, puisqu’en général, ce genre d’industrie était assez taboue, et restait du domaine de l’interdit, de la déviance. Pour elle, ceci-dit, c’était assez naturel. A l’heure actuelle, ceux qui clamaient ne jamais consommer de porno étaient des hypocrites, selon la working girl, ou éventuellement des culs-serrés. Elle avait elle-même pas mal de tabous, n’irait pas crier sur tous les toits qu’elle se masturbait ou juste raconter ses coups d’un soir, mais de là à rougir quand on en parle… Non.

Et puis, cette société hypocrite qui sexualisait les femmes dans chaque publicité et qui faisait les gros yeux au Hard, c’était assez pathétique, selon elle. Pianotant rapidement sur son téléphone le nom de « Lissandre Verrières », surement avec des fautes d’orthographe (merci le moteur de recherche et ses suggestions de correction), elle scrolla distraitement pour visionner les petites miniatures des vidéos qu’on lui proposait, hochant la tête avec intérêt, riant à sa petite pique parentale.

« T’es une sorte d’ado rebelle mais vachement plus mâture que ce qu’il n’y paraît, hein ? » Lança Kara, en plantant son regard dans le sien.

Au moment où Lissandre se lève d’un bond, l’office girl sursaute presque, tant cela est soudain, se demandant déjà quelle mouche l’a piquée. A-t-elle un souci ? Mais elle ne s’attendant pas du tout à cela… « Qu… ?! »

Ok, elle vient de lui coller un smack sans aucune gêne devant tout le monde, et lui sourit comme si c’était totalement naturel… Kara ne peut s’empêcher de rougir légèrement, plus parce que les démonstrations d’affection en public ne lui sont pas familière et que… ben, c’est une fille qui vient de l’embrasser.

Chamboulée, mais avec un sourire un peu crispé aux lèvres, elle a du mal à choisir si elle a finalement aimé ou pas. C’était furtif après tout… Mais c’était aussi la première fois qu’elle avait un baiser d’une autre femme. Les smacks avant l’adolescence ne comptaient pas dans son équation, évidemment. Les relations homosexuelles ne l’avaient jamais véritablement attirée, même si elle s’en trouvait curieuse, intriguée, même.

Mais Kara avait du mal à prendre cela au sérieux, dans ce contexte : Lissandre avait l’air de pouvoir embrasser qui elle veut juste pour dire ‘bonjour’, après tout. Cela ne devait sans doute rien représenter de plus qu’une illustration de ce qu’elle venait de dire. Elle ne la détestait pas, c’est tout. Encore un peu confuse, elle se planqua en buvant une grande gorgée de café, essayant de retrouver une contenance.

« Euh. Ok… » Il fallait qu’elle change de sujet, surtout qu’elle sentait les regards des clients sur elle, et que cela l’agaçait, un peu. Oui bon, ça va ! Vous n’avez jamais vu deux nanas se rouler une pelle ?!

« Ok ben. Quand tu veux pour le rose. » Quoi ?! Elle s’était entendu parler sans y avoir réfléchi et c’était une très mauvaise idée ! Se teindre les cheveux en rose ? Et puis quoi encore ?! Elle avait à rester dans une look standard pour son job, qu’est-ce qui lui avait pris ?

IRL des SJW [avec Kara Desco] – réponse n°4

Lissandre est contente de l’effet qu’elle produit sur Cassandre. D’abord sur la défensive, la voilà qu’elle prend des décisions irréfléchies. La formule magique serait-elle aussi simple et bête qu’un bisou ? Si c’est ça, Lissandre a trouvé son arme de création massive !

« En rose ? Hmm… »

Posant ses coudes sur la table et son visage dans ses deux mains, Lissandre regarde Cassandre. Elle visualise la couleur et regarde le tableau dans son entièreté. Il y a quelque chose d’intéressant, certes. C’est toujours intéressant de mettre de la couleur quelque part, de toute façon. Mais Lissandre est embêtée. Quelque chose ne va pas.

« Le rose n’est pas une mauvaise idée. Ça irait très bien avec tes yeux. Ça les ferait ressortir. Mais je pense qu’il manque quelque chose encore. »

Elle ferme les doigts de ses mains et laisse seulement le pouce et l’index dressé pour former deux « L ». Ces deux « L » se referment pour former une boite dans laquelle la réalisatrice regarde. Un truc de vidéaste. Elle fait passer sa boite de haut en bas. De la tête jusqu’à la table et inversement. Et soudainement Lissandre comprend ! Son visage s’émerveille.

« Je sais ! Ce sont tes vêtements. Ils seront bien trop ternes pour aller avec tes nouveaux cheveux. Alors voilà ce que je te propose : après notre café, on part bras dessus bras dessous faire les boutiques toutes les deux. Et- »

Impossible pour elle d’aller plus loin. Un gros lourd vient de s’immiscer dans leur conversation. En appui sur les deux pattes arrières de sa chaise, un grand sourire salace sur le visage, une petite moustache de pervers, l’homme interrompt Lissandre :

Gros lourd : « Mesdemoiselles, bonjour ! Je n’ai pas pu m’empêcher de vous écouter. »

Son regard prend bien son temps pour mater la combinaison moulante de Lissandre.

Gros lourd : « Et de vous regarder aussi. Parce que vous êtes vachement kawaii dans ce latex. Bref, je m’égare. Je disais donc que j’ai pas pu m’empêcher de vous écouter et j’aurai quelques questions concernant le métier et le porno. »

Lissandre a perdu de sa jovialité. Elle ne dit plus rien et serre les mâchoires. Avec le temps et l’expérience, elle a appris à repérer les curieux inoffensifs, les pervers sans limites et les timides à potentiel. Celui-là à la moustache fait clairement partie des pervers sans limites.

« Alors écoute-moi, toi. Si j’avais envie de tourner une scène avec un gros ringard atteint d’éjaculation précoce pour émouvoir mon audience, je te ferais signe. En attendant, je suis plutôt à la recherche d’Hercule monté comme Pégase. Donc tu vas me faire le plaisir de retourner à ta place et de retourner à ta vie de merde terne. Avec mes compliments. »

Avec le temps et l’expérience, Lissandre a également appris à ne pas rentrer dans le jeu des pervers sans limite. Au début, elle jouait avec eux. Mais dans la majorité des cas, ça ne se finit jamais agréablement. Alors Lissandre a changé de stratégie. Maintenant, elle les devance. Et cela produit deux types de réactions. Numéro un : le pervers sans limite se dégonfle en découvrant que le « petit bout de femme » a du répondant. Ca le mate et ça lui fait rentrer la queue entre les gens. Numéro deux : le pervers sans lim-

Gros lourd : « Mais ferme ta gueule, grosse pute !! »

Ca c’est la réaction numéro deux. L’homme à la petite moustache se lève et fait tomber la chaise. Il s’apprête à prendre Lissandre par les pans de son manteau…

Kara allait trouver rapidement une excuse pour se défiler, quitte à décevoir Lissandre… Elle ne pouvait pas se permettre d’être très extravagante auprès de ces clients, ni de ses patrons, c’était trop risqué, et elle avait besoin de son salaire si elle voulait éviter de finir à la rue. Son cerveau tournait à fond pour récupérer une once de convenance, encore un peu perturbée par ce baiser furtif. Elle s’en voulait, en plus, d’être aussi déboussolée juste pour un smack qui ne voulait rien dire ! Pfff !

Une espèce de pervers moustachu lui fournit cependant un petit répit, mais bien vite, Kara comprit que ce n’était finalement pas une échappatoire. Lissandre eut l’air de totalement savoir comment gérer ce genre d’énergumène, et Kara admira cette sorte de talent effronté. Elle n’avait pas froid aux yeux, de toute façon, c’était désormais évident. Là, cependant, le gros macho avait décidé que s’il ne pouvait pas avoir cette star du X, alors il devait bien sûr être injurieux, et violent.

Kara n’était jamais très à l’aise avec ce genre d’individu. Ils se sentaient toujours plus fort que tout le monde, et s’en fichait de s’en prendre à une femme, même dans un lieu public. Pour lui donner raison, les foules réagissaient peu aux agressions, c’était injuste et pathétique, mais ils étaient tous éduqués ainsi. Kara elle-même, alors elle ne pouvait pas les blâmer.

Mais là, c’était un poil différent : Lissandre semblait savoir se défendre, et c’était son amie. Elles avaient toutes deux lutté contre les gros lourds sur le web, alors maintenant, place au COMBAT ! La jeune brune se racla la gorge alors que ce type commençait à agripper le blouson de la blondinette en latex, et se releva, pour paraître moins petite, et se donner aussi du courage.

« Laissez-moi vous lire vos droits, Monsieur, en attendant l’intervention de mes collègues. »

Mentir n’était pas un souci, elle le faisait chaque jour, pour vendre de la merde à n’importe qui. Dans sa poche de tailleur, elle fit mine de fouiller très calmement à la recherche de son hypothétique plaque… Elle pouvait passer pour un flic en civil, même si bien sûr on serait mort de rire en l’imaginant dans les forces d’intervention. Mais avec un aplomb assuré, elle le regardait droit dans les yeux, ce gros dégueulasse.

Il tiqua, confus, essayant d’espace d’une seconde de savoir si c’était la vérité. Mais Kara était douée dans ce domaine, et malgré l’angoisse que produisait l’altercation, elle gardait son calme et la maîtrise d’elle-même. Elle accentua encore le mensonge.

« Ou peut-être préférez-vous vous excuser immédiatement auprès de cette jeune mineure, pour que ses parents ne portent pas plainte… Je saurais être magnanime si vous quittez les lieux dès à présent. »

Elle leva le menton d’un air orgueilleux, fronçant légèrement les sourcils.

IRL des SJW [avec Kara Desco] – réponse n°5

Lissandre avait eu un temps de retard pour comprendre ce qu’entreprenait Kara. Puis, elle avait repensé aux batailles qu’elles avaient toutes deux livrées sur internet. Et c’est après qu’elle réalisa qu’elle jouait un rôle. Celui d’une femme dans les forces de l’ordre.

Elle ne put s’alors s’empêcher de sourire.

*Elle qui disait tout à l’heure que j’allais la détester parce qu’elle se prenait pour un mouton terne. Au contraire : hi hi ! *

Elle ne put s’empêcher de tiquer quand Kara continua à jouer son rôle. Voilà maintenant qu’elle n’avait plus l’âge de boire de l’alcool et de sortir toute seule ? Elle était devenue une mineure. Parfait ! Si Kara voulait la jouer de cette façon, elle allait jouer aussi.

« On avait dit que j’étais majeure aujourd’hui, nourrice ! »

Croisant les bras sur sa menue poitrine, affichant une moue comme une adolescente : Lissandre jouait la fille contrariée et infantile. Elle se demandait déjà comment aller plus loin ? Elle se demandait comment aller réagir le pervers à moustache ? Est-ce qu’il allait partir de peur de voir les vrais flics arriver ? Mais elle se demandait surtout comment son amie d’internet allait réagir !

« Et arrête de jouer à la policière, on sait toi comme moi que tu commis une faute grave et qu’on t’a retiré provisoirement ton badge et ton gun. Euh : oups ! Désolé pour la gaffe, nourrice ! »

*Vraiment désolé, hein ! Mais c’était plus fort que moi. Il fallait que je joue avec toi. Puis, je n’ai pas vraiment fait exploser ton jeu d’actrice. Je lui ai simplement donné un peu plus de profondeur. *

Quand Kara regarda Lissandre après sa dernière intervention, elle lui jeta un clin d’œil. Mais elle fit attention à ce que le pervers à moustache ne le voit pas. Ce devait être un signe complice et malicieux entre les deux filles.

En attendant, les autres clients du café ne réagissaient pas. Pour les moins pires, ils se contentaient d’ignorer la scène. Pour les pires d’entre eux : les téléphones portables étaient déjà sorties et commençaient à filmer la scène. Ils devaient tous s’attendre à une intervention musclée et une finalité avec des menottes. Si en plus c’était une femme qui maîtrisait un homme, internet allait avoir sa vidéo du jour !

 Kara écarquilla les yeux bien ronds. QUOI ?! Lissandre ne faisait pas que rentrer dans son jeu, elle en modifiait les règles, et la Commerciale avait beau savoir mentir, elle excellait lorsqu’elle maîtrisait les ficelles… Désarçonnée, elle échangea un regard appuyé avec sa nouvelle amie, voulant lui dire « Hé mais… NON ! » Mais bien sûr, elle évita de parler.

Le gros lourdaud était toujours aux aguets et il avait semblé mordre à l’hameçon des menaces à peine voilées de Kara. Cependant, quand Lissandre avait rejoint la partie, il avait froncé les sourcils, son regard désorienté passant d’une blonde à une brune en se demandant à priori si c’était du lard ou du cochon.

Lissandre semblait prendre ça à la rigolade, avec son petit clin d’œil… Ce qui laissait Kara perplexe, mais il fallut rapidement remonter en scène, au risque d’échouer dans leur petit manège. Elle se leva alors, les deux paumes sur la table du café, pour se donner plus de courage, et paraître plus agressive.

« AH ! Justement les voilà ! » Elle désigna de l’index un point derrière le harceleur, l’air déterminé et assuré. Alors, fort heureusement, il se tourna avec crainte pour regarder ce que désignait la petite working girl, peut-être flic, peut-être nourrice… ?

Sans perdre une seconde de cette ruse, Kara laissa un billet sur la table, empoigna vivement le poignet de Lissandre, et la tira. Avec une brusquerie toute relative vu son gabarit, mais l’instinct de survie étant un très bon moteur, la presque trentenaire entraîna la blondinette jusqu’à la sortie, en courant.

Elle voulait mettre le plus possible de distance entre ce type et elles, sans savoir vraiment pourquoi… La présence de nombreux voyeurs avec leurs téléphones dans la pièce l’avait fait paniquer, sans doute. Elle n’avait aucune envie d’être au centre d’une vidéo abjecte, où un gros lourd agressait deux minettes…

Dans la rue, à bout de souffle, Kara chercha à rejoindre un endroit à l’écart, afin de prendre sa respiration. Courir en tailleur, c’était difficile, il faut l’avouer… Haletante, elle se tint au mur pour essayer de calmer le feu de ses poumons, penchée en avant. Virant sa frange d’un souffle, alors, elle redressa les yeux vers Lissandre.

« La vache, mais t’es folle, il allait me croire … » Son cœur battait encore trop vite pour qu’elle arrive à parler d’une traite. Et finalement, devant le minois de la blondinette en latex, Kara explosa de rire, en se tenant les côtes.

IRL des SJW [avec Kara Desco] – réponse n°6

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Lissandre aussi se mit à rire. Mais contrairement à sa nouvelle amie, elle n’était pas aussi essoufflée. En effet, elle pratiquait du sport régulièrement. Ça lui permettait de prendre l’air, de tomber sur des opportunités mais aussi de faire du vide dans sa tête pour laisser place à de nouvelles idées.

« Et tu oses dire que tu n’es pas intéressante. Preuve en est que non ! Ah ah ah ! »

Le rire commençait à se dissiper. Lissandre essuya une larme de joie coincée au coin de son œil. Maintenant qu’elles avaient fui, elles se retrouvaient avec l’obligation de faire quelque chose. D’aller quelque part. Mais faire quoi ? Aller où ?

« Bon, maintenant qu’on a fini de prendre nos cafés, je- Ah ! C’est dommage. Je n’avais pas fini toutes mes petites pâtisseries. »

Braquant son index vers le visage de Cassandre, Lissandre prit une fausse moue boudeuse.

« Chère copine de l’internet, vous me devez des pâtisseries ! Et nah ! »

Très vite, elle ne put s’empêche de faire revenir un sourire enfantin sur son visage. Lissandre était vraiment positive et énergique. Elle fuyait les moutons ternes et les dépressifs. C’était eux la véritable maladie qui gangrenait la planète Terre.

« Bon, comme j’avais commencé à le dire avant de me souvenir de ce triste épisode sucré : allons faire les boutiques comme on l’avait dit. Il faut qu’on te trouve des vêtements qui iront avec tes nouveaux cheveux rose. »

Lissandre essaya de se repérer. Où est-ce qu’elles étaient ? Les boutiques intéressantes étaient où à partir d’ici ? Mais déjà une autre idée venait ralentir son processus mental. Ses yeux détaillèrent Cassandre. Elle fit quelques pas en arrière pour pouvoir l’observer des pieds à la tête et inversement.

« Tu sais quoi ? Une fois que tu seras toute belle avec tes nouveaux habits et tes cheveux colorés, on ira chez moi ! J’ai tout mon matériel là-bas et je pourrais immortaliser la nouvelle Cassandre. Ça t’intéresse ? »

Bien entendu, elle ne pensait pas du tout à ses films X. Lissandre voulait seulement passer plus de temps avec sa nouvelle amie de l’internet et lui montrer à quel point elle pouvait être belle. Car Lissandre était convaincue que Cassandre se sous-estimait. Et elle ne supportait pas ça !

 Kara loucha lorsqu’elle se retrouve avec l’index presque entre les deux yeux, se demandant surement quelles accusations elle allait subir de la part de cette petite pile électrique toute rose. Fort heureusement, la moue se transforma rapidement en sourire et en réalité, la presque trentenaire s’en trouva rassurée… Lissandre était imprévisible, qui aurait su dire si elle n’allait pas lui coller un procès au cul juste pour cela ?! Certaines personnes étaient vraiment perchées, fort heureusement, sa nouvelle amie était surtout très dynamique et enthousiaste.

Se grattant machinalement le crâne, Kara fronça un peu son petit nez et ricana.

« Ok, ok, pas de problème, mets tout ça sur ma note, je te promets que j’aime pas avoir des dettes ! » Elle hochait la tête en même temps qu’elle parlait, levant les mains bien haut en signe de paix d’une manière théâtrale. C’était un peu vrai, Kara n’aimait pas avoir des dettes, même si les factures impayées et les découverts à la banque pouvaient être considérés comme tel… Hm, tant pis. C’était pas pareil. Enfin. Ce serait bien plus facile de rembourser des gâteaux.

Mais en parlant de cela, Lissandre annonçait la suite du programme, et cette douloureuse pensée chiffonna Kara, qui se racla la gorge, gênée.

« Hm, alors… C’est pas que je veuille pas faire du shopping et tout… » Merde. Comment expliquer à sa nouvelle copine qu’elle était légèrement fauchée. Ou du moins qu’elle ne roulait pas vraiment sur l’or en ce moment. C’était un sujet toujours assez embarrassant chez les gens, Kara ne faisait pas exception. Aussi essaya-t-elle d’être franche, mais pas trop. « En fait, je vais avoir du mal à payer un relooking complet. Tu vois ? »

Après tout, Kara lui avait expliqué plus ou moins son job, elle devait se douter que ce boulot était payé le strict minimum, dans des conditions de travail abjecte. Pour Lissandre, cela semblait différent, comme si son métier était une véritable passion. Il était impensable qu’elle fasse quoi que ce soit par contrainte, songea Cassandre. Ce n’était pas le genre de fille à rester dans un job minable si cela lui déplaisait… Assez le contraire d’elle, quoi…

Mais les réflexions monétaires n’étaient pas la plus grande préoccupation de la petite blonde en latex, visiblement. Sous le feu de ses regards, Kara se sentit mal à l’aise, et sourit pour se rassurer. « Hé… ? » Lissandre avait l’air de la passer aux rayons X, c’était assez perturbant. Fort heureusement avec elle, il ne fallait pas attendre longtemps avant de savoir ce qu’elle avait en tête.

« Chez toi ? Euh. OK, si tu veux. Mais je te jure que je ne suis pas du tout photogén… » Elle s’interrompit et leva l’index. « Mais, attends, pas un truc porno, hein ? » Dit comme cela, Kara se sentit idiote, mais maintenant qu’elle commençait à connaître un peu mieux sa collègue justicière des internets, elle avait comme des doutes. Lissandre semblait capable de tout, alors il valait mieux être sûre.

IRL des SJW [avec Kara Desco] – réponse n°7

Lissandre regarda Cassandre sans rien répondre. Elle laissa planer le suspense et le silence… pendant un temps seulement. Suite à quoi elle ne put plus se retenir et étira de nouveau un grand sourire.

« Je savais que tu n’étais qu’une sale petite perverse qui voulait m’utiliser pour percer dans le métier ! Honte à toi ! Bouh ! Boooouh ! »

Bien entendu, tout était sur-joué. Lissandre ne croyait pas une seule seconde que c’était là les véritables intentions de Cassandre. Car, si c’était le cas, elle n’avait rien vu venir sur les chats sur internet.

Puis son visage se fit plus sérieux. Plus mutin.

« Par contre, sache que je ne suis pas contre un tel dérapage… »

Petit clin d’œil. Puis la main de Lissandre fit ce mouvement de « balayage » : signifiant que ce n’était pas le sujet important du moment. Il y avait plus important à discuter. Et elle pensait avoir trouvé le problème à la solution monétaire de son amie de l’internet.

« Voilà ce que je te propose. Tu viens chez moi et tu deviens mon modèle photo. Je te montrerais que tu es photogénique et belle. Je te jute que tu l’es ! Avant ça, nous allons faire les boutiques et, c’est là que ça devient intéressant pour toi, c’est moi qui paie. Donc, ensuite nous allons chez moi et je sors mon appareil photo. Je te photoshoot jusqu’à ce que tu es des étoiles dans les yeux à cause des flashs. Ou de ma beauté fatale : hi hi ! »

Nouveau clin d’œil.

« Bien entendu, tout job mérite salaire. Je peux donc te proposer en échange des photos que je garderais, de te payer les vêtements et/ou de te verser un salaire. C’est à toi de me dire. Je sais que ça peut être une question d’égo. »

Elle croisa ensuite les bras. Son visage se fit plus sérieux. Du moins, c’est l’expression qu’elle voulait jouer.

« Par contre, je serai intraitable sur un point. »

Elle laissa de nouveau planer un silence. Lissandre était bien trop baignée dans ses scénarios d’écriture et des effets qu’elle devait utiliser. On pouvait appeler ça une déformation professionnelle à ce niveau maintenant.

« Je ne paierai aucune pâtisserie. C’est TA dette : c’est entendu ? »

Elle allait tenter de conserver son sérieux le plus longtemps possible. Comme si cette histoire de pâtisserie était une affaire très sérieuse. Une affaire de vie ou de mort ? Et, en pensant à cette théorie farfelue : Lissandre se demanda si ça ne pouvait pas être le point de départ d’un nouveau scénario. Une question de vie ou de mort pour des pâtisseries. Un film ? Une série ? Peu importe. Une histoire de dette, de boulangerie et de sexe. Est-ce qu’elle pouvait écrire là-dessus ?

*Intéressant. Et, bien entendu, il va falloir que j’imagine Cassandre dans le rôle principal : hi hi ! *

Une seconde c’est vrai, Kara était tombée dans le panneau, et c’était demandé si la réplique de son amie sur ses véritables intentions en matière de carrière était sérieuse. Fort heureusement, le sourire et le ton l’avaient parfaitement renseignée, et elle pouffa de rire en fanfaronnant : « Ouais évidemment regarde-moi, j’me sens parfaitement apte à devenir une grande star en la matière ! » Sauf qu’elle se retrouva tout de suite vachement moins maligne quand le petit visage mutin de Lissandre déclara qu’elle n’était pas contre un tel ‘dérapage’.

Pris à son propre jeu, Kara déglutit, perturbée. Elle sentait bien que la petite Blonde avait un fond de sérieux dans ses mots, et c’était assez confus pour Kara, à vrai dire. Le clin d’œil appuyait ses dires, mais Cassandre se contenta le pincer les lèvres d’un air légèrement gêné, mais surtout taquin… C’était surement une blague, hein ? Hein ?

Kara ne s’était jamais imaginée pouvoir tourner juste une sextape, à vrai dire. Son léger complexe sur sa personne, et surtout, une absence totale de confiance envers ses partenaires n’aidaient pas. A coup sûr, en moins de deux, son film privé se serait retrouvé sur le net (c’était-ce pas le but de toute sextape après tout ?) et elle imaginait déjà son patron tombant dessus. C’était sûr, ça aurait été une catastrophe. Mais enchaîner les coups d’un soir, ce n’était pas vraiment l’idéal pour s’essayer à de nouvelles pratiques nécessitant la confiance.

La proposition la laissa un peu bouche-bée. « Moi ? Modèle ? » Wew. Jamais on ne le lui avait proposé, et cela lui semblait farfelu. Finalement, tout était très logique pour Lissandre, et le marché était même très honnête. Elle y ajoutait même une volonté de faire en sorte que sa copine du web se sente mieux dans sa peau… La blonde était décidément adorable, en fait !

« Je te sers de modèle en échange du relooking, on fait comme ça. » Qu’avait-elle à y perdre ?  Quelques heures si vraiment elle n’aimait ni son nouveau look, ni être sous les feux des flashes. Mais elle estimait que cela valait le coup de tenter cette aventure, Lissandre était vraiment trop enthousiaste pour lui refuser quoi que ce soit : Kara se sentait entraînée dans une tornade de barbe à papa.

Lorsque la petite en Latex imposa une séquence plus dramatique, la brune se figea. Merde, qu’ellait-elle exiger ? Please, pas de pose nue, Lissandre, ça sera horrible… Elle souffle alors, puis éclate de rire.

« Rah, tu m’as fait peur ! » Glousse-t-elle, avant de tendre la main d’un air tout aussi théâtre qu’elle, bien droite et ferme. « Marché conclu, Partner. Il en va de ma réputation de rembourser cette dette d’honneur sucrée ! »

Loin d’imaginer tout ce qui se tramait déjà dans la tête de la Blondinette, Kara, elle était prête à la diriger vers le métro le plus proche, pour s’arrêter dans l’arcade des grands magasins. Elle allait devoir se plier aux essayages, et à priori, aux tortures capillaires dictées par Mme Verrières !