Comme tout bon marché aux esclaves, les allées de celui là puaient.
C'était un bouquet subtil qui mêlait les effluves délicates de la vieille pisse rance aux extraits de sueur vieillie et de merde séchée. On y retrouvait, en fin de nez, un relent discret de sang frais et de mort décomposée. A certains étals, les parfumeurs les plus émérites ajoutaient une délicate touche de foutre séché sur la peau, ce qui faisait toujours sensation quand la viande proposée sur leur étal était pourvue d'ovaires -ou d'au moins de quelque chose d'un tant soit peu féminin dans l'allure. Une méthode de vente comme une autre, où une façon pour un vendeur de faire passer la frustration d'une mauvaise journée. A défaut de se remplir la bourse, on pouvait toujours vider les siennes. Il fallait bien que la bidoche invendue quand même serve à quelque chose, pas vrai ?
Comme partout ailleurs, les étals se ressemblaient. Des chaînes rouillées, parfois grasses de matières qu'il était plus sage de ne pas chercher à identifier. Des cages sales et abîmées dans lesquelles personne de foncièrement sain d'esprit ne mettrait même un chien vérolé, où s'entassaient des corps amaigris par la privation et esquintés par les mauvais traitements. De la viande avariée, jetée en pâture à quelques gardes corrompus ou offerte en cadeau à l'issue d'une transaction plus honorable. Ici, à côté de la planche jetée sur deux tonneaux pour figurer un pauvre comptoir, les plus belles pièces dont on huilait parfois un peu les attributs pour les mettre en valeur : muscles saillants et mamelles rondes s'alignaient sous les têtes basses ou les regards de défi.
Certains finiront gladiateurs, d'autres vulgaires objets sexuels. Les plus défiants, souvent... Histoire de briser toute ombre de fierté. Les femmes ? Ah ! Personnel de maison et défouloir de vices, parfois reproductrices parallèles ou monnaie d'échange. On raconte même que certaines sont données à quelques formiens en guise de sacrifice rituel. Un sort fort peu enviable, mais en est-il un qui fut prometteur pour ceux qui portent l'acier de la soumission comme étendard ?
Là, sur le podium qui détermine ce qui fait office de place centrale. Un marchand qui monte, tirant sa barbaque à la laisse pour la faire se mettre en rang derrière lui pendant qu'il s'éclaircit la voix d'une rasade de cet immonde picrate qu'on trouve dans toutes les tavernes à coupe-gorge. Lui, c'est un vendeur de bidoche un peu moins malheureux que les autres vu qu'il peut se payer un passage sur l'estrade. De quoi vendre sa camelote de chair avec une meilleure visibilité. D'ailleurs, les badauds s'amassent déjà, derrière les nobles venus chercher le moyen de dépenser quelques sous. Ils feront monter les enchères pour se défier mutuellement et cela assurera le spectacle ainsi qu'un revenu probablement confortable au pourvoyeur.
Celui-là à d'ailleurs été malin : il a proposé un alignement de beautés dont il a prit soin. Pas d'hommes à l'horizon... Du moins pas encore. Mais son achalandage attire de plus en plus d'yeux et donc, d'argent et d'or.
Il beugle avec aisance, vendant les mérites de ses produits. Celle là produit de belles montées de lait, tandis que la rousse mouille abondamment ou que la brunette a le cul le plus confortable du continent. Elles viennent de l'Est comme de l'Ouest, de provinces ennemies et de contrées lointaines. Si elles sont fertiles ? Evidemment ! Sportives et travailleuses, sans parler de leur docilité sans pareil, fruit d'un long et patient élevage. L'homme connaît son affaire et les filles s'arrachent comme des petits pains, à des tarifs frôlant l'hérésie. De l'épicerie de luxe, tout ça ! De quoi servir dans n'importe quelle cour ! Et à vrai dire, une fois décrassées et un peu vêtues, les femmes donneront à cette assertion tout les aspects d'une pure réalité.
Peu-à-peu, l'estrade se vide. Ne reste qu'une marchandise un peu âgée, qui partira pour un peu moins d'argent que les autres. Et, alors que la foule se disperse, un rabatteur hêle le marchand. "Pas d'mâle ?", fait-il d'une voix glavioteuse.
Le maître de cérémonie n'attendait pas moins que cette question. Un sourire de requin vissé sur la gueule, il claque violemment des mains et ce geste parvient à retenir les départs.
- BIEN SUR QUE SI ! Il était donc capable de beugler encore plus fort. UN SEUL ! MAIS UN COLOSSE ! QUE DIS-JE ? UN TITAN !
Ce n'est pas qu'il soit à court d'allégories, mais il sait que si il en fait trop, la foule se lassera. Et puis, autant ne pas ruiner sa propre mise en scène. Théâtral, le pourvoyeur de bidoche se tourne alors vers l'escalier au pied du podium. Viennent d'y apparaître trois hommes solidement armés, de hauts gaillards à la peau noire et à la ganache d'étron renfrogné. D'une poigne de fer, ils tirent sur une chaine plus épaisse que celles qu'on connaît d'habitude sur le marché et font apparaître une silhouette qui dépasse d'une bonne tête ses geôliers pourtant déjà impressionnants. La silhouette fait courir une rumeur à voix basse sur l'attroupement de badauds, qui attend avec une forme d'excitation enfantine de savoir si oui ou non l'estrade de bois aux lattes qui grincent douloureusement va tenir sous le poids du morceau de boeuf qui monte vers l'étal.
Il se hisse pourtant et la structure, si elle paraît plier un peu, ne rompt pas.
Le spectacle est saisissant, pour tout dire. L'homme est un mastard comme on en voit rarement parmi les humains. Il plafonne aisément à plus de deux mètres et affiche probablement cent-trente kilos au bas mot. Et on parle ici d'une viande foutrement nerveuse ! Les muscles, qui saillent sous la peau comme autant de câbles tendus sous un cuir léger, en sembleraient presque hypertrophiés face au commun des mortels. Voici une véritable armure organique, impressionnante de puissance sous-entendue. Le roulis que cette parure purement virile propose à la vue est à la fois hypnotisant et déconcertant : c'est comme voir la notion de puissance physique prendre corps sous une chair tellement ordinaire qu'elle en paraît vulgaire malgré les cicatrices qui la défigurent ça et là. Si le monde doit être porté un jour, ce sera assurément par ces épaules là, larges et imposantes. Et s'il doit être broyé, ce sera par ces mains qu'on imagine sans nul mal capables de compresser le charbon pour en faire du diamant. Est-il nécessaire de parler de ces jambes ? D'une foulée, ces guiboles pourraient sûrement relier Ashnard à Nexus sans que cela ne représente un effort.
Au moins, le vendeur de corps n'avait pas menti. Vêtu d'un pauvre
subligaculum en fort piteux état, son clou du spectacle est bel et bien un colosse. "Et sa queue ?" gueule un quelconque énergumène, ce qui déclenche quelques gloussements dans l'assistance.
Quand le tissu crasseux est ôté, la réponse est donnée. Elle pendouille même mollement au bout d'une dose presque double de décimètres, promesse de prouesses phalliques sans équivoque. Et c'en est presque absurde.
La bête est nue, livrée aux crocs des vicelards et des curieux. Voyez, elle n'a pas été tondue ! De son bas-ventre remonte un filet pileux qui s'épanouit sur son poitrail mais également sur ses tibias et ses avant-bras. La gueule de la bête est noire, elle aussi. La barbe est hirsute, le cheveux long et gras. On imagine un visage taillé par le burin des épreuves de la vie, mais peut-on en être sûr ?
La seule chose qu'on discerne vraiment, pour peu qu'on cherche un peu, c'est son regard d'un fantastique et profond azur. Un bleu levé depuis le début de ce grand guignol, presque bucoliquement, sur celui du ciel.
A quoi rêvent les géants ?
A ses pieds, on glousse d'excitation ou on crache de dégoût. De la donzelle défaille parfois un peu, mais ça reste bien rare. Comme le vendeur essaie de le supposer sur un ton qui dégouline de libido sans subtilité, quelques entrecuisses s'humidifient et d'autres se raidissent sous une pulsation d'excitation toute animale. Est-ce là le choc que provoque l'Alpha d'une meute ? Il est vendu comme un combattant hargneux, comme un parfait reproducteur. Un étalon qui montera le monde, pour peu qu'on lui en donne l'ordre. "Et qui fourrera n'importe quel trou !", ajoute le négociant en s'esbaudissant devant un pauvre type qui astique nerveusement son manche devant la marchandise déballée. La scène déclenche quelques rires, y compris celui du branleur aux joues rossies par le désir. "J'ai du mal à croire qu'un morceau comme ça fourrera un cul d'homme !" proteste un client potentiel. On peut le comprendre : qui pourrait imaginer qu'une citerne à testostérone comme l'esclave au regard perdu puisse envisager de pénétrer autre chose qu'une chatte bien grasse ? Et surtout, qui pourrait l'y forcer s'il décide de refuser ? Ce qui amène d'ailleurs une autre question : pourquoi ne se libère t'il pas sur l'instant ? On le sent capable de briser ses chaînes. Pour le peu qu'il bouge, l'acier cliquette et nombre de regards se posent dessus pour s'assurer que les poignets du titan ne vont pas tordre certains maillons. Et ses geôliers n'en sont pas moins prudents. Mise en scène ou réelle prudence ? Les plus observateurs auront vu que l'orateur, lui aussi, semble parfois retenir son souffle.
Pour repartir de plus belle, toutefois, dès la menace de l'orage dissipée.
- IL FOURRERA ! Assure le vendeur d'une voix forte pour s'assurer l'attention générale. Le dressage fut pénible, mes amis ! Oooooh oui ! Mais la méthode de Déciméticus, votre serviteur, est im-pa-ra-ble ! Regardez le, mais regardez le ! A t'il seulement bougé une oreille ? ET BIEN NON ! IL SAIT OU EST SA PLACE, MÊME SI ON DÉCIDE QUE C'EST DANS LE CUL D'UN NOBLE SODOMITE ! Imaginez, jolies dames et beaux messieurs, ce golgoth vous ravager les entrailles ! Même Aphrodite vous enviera le plaisir qui vous prendrez sur cette bûche ! Ah, pour sûr, vous ne marcherez plus très droit quelques jours ! Mais le plaisir d'une saillie barbare vaut bien de boîter un peu !
On rit de nouveau. Déciméticus se joint à tous les autres mais sait, au fond de lui, qu'il ne dit pas toute la vérité. Le géant baisera qui on lui dit de baiser, mais refusera de l'être. Un
garde avait essayé, une fois, à la faveur d'une nuit pendant le transport des marchandises. Il s'était faufilé dans le box du colosse alors enchaîné, l'avait délesté de son subligaculum pour exposer son cul, prêt à y fourrer sa pine malodorante. A peine le gland avait-il fait semblant d'effleurer l'interstice anal que le géant s'était retourné pour attraper de sa main le visage du violeur et, sans le même geste, lui exploser le crâne contre les lattes en bois de la cage à plusieurs reprises. Au matin gisait là un corps presque étêté, qui baignait dans une marmelade de matière grise, de sang à peine sec et d'éclats d'os. Le plus étonnant avait toutefois été le fait que l'esclave reste sur place alors que son forfait avait laissé la porte de sa cage grande ouverte. Mieux encore, les clefs de ses fers étaient encore à la ceinture du mort ! A ce moment là, Déciméticus n'avait eu qu'une seule question en tête :
A quoi rêvent les géants ?
C'était une question qui devenait légitime. Presque obsédante. L'esclave, depuis sa capture, n'avait jamais semblé cesser de rêver. Déciméticus l'avait cueilli quelque part aux pieds des puissants monts qui déterminaient l'entrée du domaine du Grand Nord, là où quelques rumeurs situaient un pseudo royaume de terranides libres organisés en nation. Le colosse errait sans but, vêtu des restes d'une armure qu'un des hommes lancés pour la capture avait identifiée comme étant sûrement originaire des tribus barbares qui peuplaient les Contrées du Chaos. Un bien long voyage et un état complètement piteux. Malgré l'épée (certes brisée mais toujours capable d'éventrer un homme) qu'il tenait en main, le vagabond n'avait même pas esquissé l'ombre d'un mouvement de résistance lorsqu'on lui avait passé les fers. Pas davantage lorsqu'on l'avait débarrassé des vestiges de sa vie passée d'homme libre pour le foutre à poil. Enchaîné avec les autres, il avait suscité de bien naturelles réactions mais Déciméticus avait constaté qu'elles étaient plus plus vives et instinctives chez les terranides. La plupart s'étaient serrés les uns contre les autres et s'étaient écartés au mieux du nouveau venu. Quand le vendeur de bidoche les avaient interrogés, il n'avait d'abord obtenu qu'un mot en réponse, prononcé du bout de lèvres tremblantes : "Yuki-onna..."
L'esclavagiste n'avait d'abord pas trop cherché à comprendre. Il ne désirait que quitter au plus vite ces contrées pour éviter les représailles contre sa seule présence. Déciméticus ne croyait pas à ses fables quant à un royaume terranide, mais n'était pas crétin au point d'ignorer que nul n'entrait sur ces landes glacées impunément. La caravane avait prestement repris sa route après la capture du géant. Géant qui, du reste, ne le mettait pas à l'aise. Même si sa capture avait été d'une simplicité enfantine, Déciméticus s'en méfiait. Si un buffle pareil se mettait à faire des siennes...
Bref, valait mieux tailler la route en vitesse.
Des incidents impliquant le géant au cours du voyage vers le plus hospitalier sud , il y en avait eu. Et Déciméticus en avait vite compris le dénominateur commun : à chaque fois, quelqu'un avait essayé de forcer un esclave à agir contre sa volonté. Des bras cassés, des mâchoires déboitées, des gorges écrasées et nombre de dents déchaussées de leurs assises. Cela avait été le prix à payer pour les gourmands qui voulaient consommer la marchandise contre sa volonté. Et à chaque fois, Déciméticus avait retrouvé le colosse dans la même position. Oh, l'homme avait bien essayé de le punir ! Mais ni le fouet ni la bastonnade n'avaient paru l'affecter. Impossible de penser à l'abîmer davantage, cela aurait diminué sa valeur. Alors l'esclavagiste avait donné des ordres stricts : tant que le géant faisait partie de la cargaison, interdiction formelle de jouer avec. Et cela avait amélioré un peu les conditions de vie des esclaves, dont certains considéraient le géant comme un protecteur muet.
Pour autant, il n'empêchait pas les ventes. Aurait-il dû le faire ? Il ne se posait pas non plus en libérateur. Il ne se posait en rien du tout, à vrai dire : il ne parlait absolument jamais.
Déciméticus avait assez d'années de vente de bidoche pour savoir que la marchandise finissait toujours par jacter à un moment où un autre. Ca aidait à passer les épreuves, ça créait des liens, ça permettait de défier autant l'esclavagiste que l'acheteur qui le suivrait au bout de la chaîne. Mais son géant, lui, ne décrocha pas un mot. Ni de plainte, ni de défi, ni pour lui lécher le cul dans l'espoir d'y gagner quelques faveurs. Impossible de savoir ce qui lui passait par la tête. Même si, de temps en temps, son attitude parlait pour lui. Il vous fixait sans raison après une action que vous veniez d'accomplir, un mot qui venait de jaillir de votre bouche. Pour vous juger. Vous pouviez en être certain, pour sûr ! Son regard bucolique devenait oeil d'aigle qui paraissait percer les secrets de votre âme. Parfois, il agissait même. Un grognement, un mouvement un peu brusque pour empêcher une action ou faire taire une gueule trop bavarde... Mais c'était tout. Certaines esclaves prétendaient qu'il entretenait une forme de douceur quasi-systématique avec toutes les femmes et les enfants, parfois avec les rares vieillards que croisaient la caravane. Une forme de protectorat attentionné mais peu impliqué de la faiblesse.
Le colosse restait pour autant toujours silencieux, avec son regard perdu de débile congénital. Est-ce qu'il ne l'était pas, d'ailleurs ? Un putain d'attardé avec le corps d'un dieu ? C'était un terranide finalement vendu quelque part dans les contrées qui bordaient les territoires de Papua et du Sultanat des Sables Blancs qui lui avait donné un élément de réponse.
- Il a été frappé du baiser de
Yuki-onna, la gardienne des esprits du Grand Nord. Son esprit vagabonde, égaré à l'intérieur de lui-même. Mais il se bat pour revenir. Il pense, comme toi et moi. La plupart du temps, ses pensées errent simplement dans le blizzard. Je ne sais pas ce qu'il a fait pour en arriver à subir cela, mais...
- Mais quoi ?
- ...mais s'il se réveille totalement un jour, va savoir comment il réagira.
De ces révélations, Déciméticus avait commencé à monter son propre scénario. Le géant était probablement un barbare qui avait rejoint une caravane d'esclavagiste en partance pour faire quelques captures dans le Nord -les terranides de là-bas comptaient comme les plus beaux et les plus rares. Puis son expédition avait été décimée par l'hiver impitoyable, qui glaçait jusqu'au sang dans les veines. Et lui, dernier survivant, avait erré jusqu'à tomber sur cette...Yuki-machin, qui devait être une sorcière à la con qui lui avait abîmé la caboche jusqu'à en faire un légume. Hagard, le type s'en était miraculeusement sorti pour se faire capturer alors même qu'il arrivait à quitter le territoire du givre éternel.
Restait cette histoire de réveil. Si le colosse perdait sa débilité du jour au lendemain et fondait un boulon ? De là, Déciméticus avait décidé de s'en débarasser au plus vite... Mais pas sans en tirer un maximum de pièces d'or.
Ce qui l'avait amené à brailler sur cette estrade sur laquelle il se tenait toujours malgré le soleil de midi qui mordait douloureusement ses épaules nues. Autant se trouver la meilleure des scènes pour refiler sa bombe à retardements en forme d'amas de testostérones.
La présentation s'acheva donc. Sur l'estrade, le géant passif n'avait pas moufté. A présent, sous la chaleur du soleil à son zénith, son corps se couvrait d'une fine pellicule de sueur qui soulignait les rares mouvements (toujours appréciés) de ses muscles d'airain. Une valeur ajoutée qui jouait pour Déméticus, qui savait que le moment était venu. Il goûtait le brouhaha de l'assemblée de badauds, détaillait discrètement les gens qui soupésaient leurs bourses pour estimer leur place dans la course à l'achat qui allait s'ouvrir sous très peu de temps. La cuisson était par-faite ; la bidoche exalhait un délicieux fumet de sueur mâle et de flouze en quantité. Il était donc temps de passer au service, pour savoir quel convive aurait les moyens de son appétit.
Une fois encore, le vendeur frappa ses paumes l'une contre l'autre, obtenant le silence.
- IL EST TEMPS ! Sa voix avait maintenant des accents de brisure immédiate. IL EST TEMPS DE PAYER POUR QUE CE DIEU DES HOMMES DESCENDE DE SON OLYMPE ! IL EST L'HEURE POUR AGGRIUS DE SERVIR UN MAÎTRE !
Aggrius. Le nom d'un roi barbare de légende, unificateur des tribus du sud. Il était resté dans l'histoire pour son assaut sur Ashnard alors que sa horde était auréolée de puissance et d'une série de victoires inattendues sur l'empire. Assaut qui s'était terminé dans un incommensurable bain de sang perpétué par les plus terribles légions noires, qui avaient ensuite crucifié les corps des barbares depuis les portes de la citadelle impériale jusqu'à, disait-on, la frontière avec Nexus. Aggrius, colossal leadeur, avait lui été dépecé vivant et sa peau offerte à l'impératrice, qui l'avait portée en manteau lors du gala célébrant la victoire. Mais le nom de ce glorieux vainqueur était resté baigné de gloire pour la force qu'il inspirait et Aggrius passait pour être le plus illustres des rebelles, dont le nom un peu oublié était tout de même prononcé avec respect jusque dans la cité d'ivoire et d'or.
Un nom parfait pour ce colosse enchaîné et jusque là anonyme, qui, aux mots de Déméticus, avait enfin eu une réaction.
Il avait abaissé le regard vers la populace agglutinée au pied du podium comme autant de mouches à merde autour d'un bel étron fumant. Et l'avait jugée, d'un regard plus implacable que le plus sifflant des blizzards nordiques.
- BELLES DAMES ET NOBLES SEIGNEURS, L'HEURE ET VENUE ! Une dernière fois, le vendeur savoura d'avance son petit effet. QUI ENTRERA EN POSSESSION DU TITAN ? LES ENCHÈRES SONT OUVERTES !
[Je reconnais avoir pris connaissance du traitement de mes données personnelles par l'hébergeur de LGJ.]