Le cosmos, l’univers, l’espace. Une dimension d’infinité, de grandeur mais surtout, de ténèbres. Le vide peuplant de grand espace le laissant froid et morne. Un monde stérile et dangereux où par moment, la réalité même semblait ne plus faire aucun sens. Par endroit l’on pouvait douter de tout. Mais pourtant, ce grand vide n’était rien en comparaison avec un vide encore plus grand et vaste ; le Multivers. Parler de vide à cette échelle n’avait pas beaucoup de sens car, il existait en son sein des infinités d’univers différents, parallèles les uns aux autres. Mais en dehors de ces bulles ? En dehors des règles de chaque univers, de chaque réalité ? Qui ou quoi subsistait ?
Les légendes étaient nombreuses. Grands Anciens, Dei, des noms et des concepts qui revenaient ci et là dans des recueils anciens ou même des prophéties. Le monde était vaste, et son ancienneté était impossible à évaluer réellement. Tant de choses ont pu s’y produire. Tant de créatures sont nés, ont vécu puis ont mourut. Mais d’autres subsistent, encore et encore. Ils résistent face à la dureté des millénaires, face au plus grand ennemi de tous ; le temps. Car ceux-ci étaient en dehors de celui-ci. En dehors de cette notion qui affectait tout ... Sauf eux. Parmi ces étranges créatures, il y en avait une qui demeurait aussi silencieuse que le vide spatial lui-même.
Une entité méconnue. Une forme de vie étrange car elle ne vivait pas. Elle pensait, songeait, existait car de fait, la notion d’existence avait du sens. Une créature mystique, en dehors de tout temps, univers, dimension. Un être emprisonné en-dehors de la prison. Une entité qui ne vivait que pour apprendre, pour observer, pour comprendre. Comprendre la prison dans laquelle elle n’avait pas sa place et dans laquelle, elle observait tant et tant. Rien ne pouvait l’atteindre mais, en contrepartie, elle ne pouvait rien atteindre non plus. Tel était sa malédiction ... Ecartée de l’existence elle-même. Ainsi, elle ne faisait qu’observer et veiller sur cette cage et ses habitants, attendant le jour où il en vaudra la peine d’ouvrir la porte pour y entrer.
Après une éternité, depuis le début du temps et même avant, ce jour était néanmoins arrivé ... Et promettait de changer à jamais cette créature seule, silencieuse et froide en lui apportant une vision qu’elle n’avait, paradoxalement, jamais encore eu jusqu’à présent.
Une dimension à part
Si une créature en deux dimensions venaient à visiter un monde en trois dimensions, comment ferait-il ? Comment parviendrait-il à appréhender cette dimension en plus ? En soit, il lui était impossible de faire un tel exploit. Cependant l’exercice était moins dur dans le sens inverse. C’était ce que venait de réaliser la Voyante Silencieuse. De sa dimension en dehors de toute forme de dimension, elle était parvenue à appréhender un monde nouveau. Un monde fait de trois dimensions. Dans quel but ? Elle-même, malgré toute sa sagesse, malgré sa colossale expérience, ne le savait guère.
Silencieuse, presque perdue, elle était encore en train de comprendre comment cette réalité fonctionnait quand elle finit par s’y intégrer totalement, parvenant enfin à lui arracher de force une place qui lui avait depuis l’éternité, refusée. Tout cela pour venir voir d’un œil plus matériel et physique une étrangeté qui depuis tant de temps, l’avait d’abord un peu surprise puis, l’avait obsédée. L’intéressée était une Reine, une créature à la puissance incommensurable. De là où la Voyante était, de sa prison en dehors de la prison, elle avait senti la présence de cette femme. Jusqu’à cet instant, elle ne sut ce qu’était d’ailleurs une femme mais sa matérialisation ici, dans ce monde, lui avait fait connaitre ce concept – et tant d’autres – de manière intuitive. L’intéressée ne se rendrait compte de sa présence qu’en sentant une légère brise dans son dos, quelque peu glaciale malgré la bonne température.
Mais surtout, à l’entente d’une étrange voix fantomatique et aux légères réverbérations. « Lucinda. » Fut ainsi les premiers mots de la Grande Voyante dans ce monde, dans cette réalité, dans cette dimension. Le don de la parole lui fut accordé spontanément. Elle lançait doucement sa voix qu’elle découvrait en même temps que Lucinda, plus connue comme étant la Reine Noire dans ce monde. Son enveloppe charnelle terminait de se former, donnant naissance à une bien étrange silhouette qu’on aurait presque dit alien. Une peau bleutée, de longs cheveux flottants d’eux-mêmes dans le vide et un regard ténébreux et profond.