Bordel de merde. Rappelez-moi pourquoi je laisse mes gars faire la basse besogne, comme refiler la marchandise par exemple ? Ah ouais. Peut-être parce que j'ai la flemme d'alpaguer tous les japonais en manque de came et que, de toute façon, je pourrais pas être plus productive que cinquante gaillards sur une journée ? Ouais, c'est un peu ça. Seulement, ce genre de délégation des tâches apporte très souvent son lot de problèmes, notamment quand un d'mes bleus se fait chourer la marchandise par un type un peu plus costaud que lui. Ouais, ils sont parfois aussi cons que ça. Je les avais prévenu, ils devraient se balader armés. Mais non ! "Gna gna gna les flics", "j'ai pas envie de me faire coffrer pour port d'arme blablabla". Que des princesses.
M'enfin. Aujourd'hui, j'ai pas vraiment le choix. On m'donne tous les renseignements qu'il faut et je vais casser la gueule de ce type qui se permet de voler ma came pour la revendre. Et je vais bien sûr faire en sorte qu'il se souvienne qu'on fait pas chier les Visconti, encore moins sur leur terrain. Mes gars ont passé les derniers jours à enquêter pour finalement trouver la planque du voleur inconscient et l'ont heureusement trouvée. Si ça n'avait pas été le cas, je crois que j'aurais cassé deux ou trois gueules en plus. Bref ! J'enfile ma veste en cuir favorite, celle qui est décorée d'un crâne et de texte dans le dos.
"Blood, flesh, bones,
I'll rip you to the core"
Un style très glamour, comme vous l'aurez compris, que j'affectionne particulièrement. En général, ça fait son effet et ça dissuade les plus lâches de s'en prendre à moi. Les autres ? J'leur pète les dents. D'ailleurs, le premier pétage de dents de la journée est sur le point d'être effectué. J'me ramène dans la rue qui sert de repaire à l'autre abruti, en espérant qu'il soit là bien sûr, et bingo ! Grand, assez musclé, le teint légèrement halé. On dirait un japonais sous stéroïdes. Bref. Je m'avance en souriant, je me retiens sérieusement pour ne pas éclater de rire et me foutre de sa gueule puis l'interpelle en posant une main sur son épaule. Il se retourne, me dévisage et se rend immédiatement compte que j'suis pas une bleue. En tout cas, c'est ce que je déduis après qu'il me propose ma propre came.
– T'es con, autiste, trisomique ou attardé ? Ou p't'être que ta mère t'a juste bercé trop près du mur.
Visiblement, ça lui plaît pas beaucoup. Preuve étant qu'il essaye directement de me frapper. Wow. Même pas de pitié pour les femmes ? Tant pis pour lui. Je suis pas mal entraînée et sa carrure l'aide pas vraiment niveau vitesse. J'ai juste à me baisser et dans la seconde qui suit, je lui attrape les couilles et les serre sans la moindre gêne.
– C'que tu vends là c'est mon produit, pauv' con. J'espère que tu tiens pas à tes boules parce que... Oh. Trop tard. J'ai pressé trop fort chef.
Et c'est vraiment le cas. Je les ai écrasées avant même que ma phrase se termine. Le voilà en train de chouiner au sol. Putain, quelle plaie. Je rajoute un bon coup de rangers dans la gueule pour le faire taire. Il est pas K.O mais quand même pas mal sonné. Dernière étape : je m'accroupis pour être à son niveau, je pose une main sur son crâne et je lui lave le cerveau. Enfin, je lui fais seulement oublier à quoi ressemble ma voix, quelle trogne j'ai, et à quelle heure cet incident s'est produit. Quand il se réveillera, il se rappellera juste d'un individu mystère venu lui casser la gueule sous prétexte qu'il vendait son produit. Bref, un boulot vite fait bien fait. Enfin presque ! Il ne me manque plus que ma marchandise. Où est-ce qu'il l'a planquée, ce con ? Je me redresse et balaye la rue du regard. Personne pour le moment. J'devrais le fouiller ? À part dans les poubelles ou les bouches d'égout, je vois pas vraiment où est-ce qu'il a caché ma came. Je m'apprête donc à le désaper toujours sans gêne quand une voix m'interpelle. Hop hop hop. Qui a osé m'appeler par mon nom en plein public ? Enfin... la rue est déserte puisque malfamée, mais quand même. Je me retourne et aperçois une petite blonde en uniforme policier. Eh merde, sérieux ? Là c'est le moment où j'dois pas faire trop de vagues, pas tant que je choppe pas la certitude qu'elle est seule.
– Ola ! Du calme ! lui dis-je en levant mes mains en l'air, pour prouver que j'suis pas armée. Je lui souris, de façon hypocrite certes, mais ça reste un sourire. Je crois que je cherchais une blague à faire sur votre taille, madame l'agente, mais j'ai pas trouvé. Désolé. Pas de présentation comique pour cette fois.
Bon, j'abuse. Elle doit faire quoi ? Allez, un mètre soixante peut-être. C'est pas une naine, elle est juste... petite. Et j'aime bien me foutre un peu de la gueule des gens plus petits que moi, en général ça les vexe. Bref ! Je dois vite trouver un prétexte pour expliquer la situation. Après tout, y'a un grand gaillard au sol et y'a que moi comme témoin ou suspect. En attendant, je respecte quand même la demande de l'agente. Carte d'identité, passeport, carte grise... je donne tout ce que j'ai à disposition. En vrai, ça se résume donc à une de mes nombreuses cartes de crédit. Ouais, j'avais que ça sur moi. Décidément, j'arrange pas mon cas.
– Bref. J'ai trouvé ce type ici, j'sais pas ce qu'il foutait là mais il est en sale état. Sans me vanter, j'aurais pu lui faire ça. Mais c'est pas moi pour le coup. C'est pas votre travail de chercher des preuves, maintenant ?
C'est ça, va examiner le corps, essaye de le réveiller. Pendant ce temps, je t'assomme et j'me barre. Vas-y blondie, va voir le beau monsieur !