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Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra. [Valilouvée]

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Luxienne et Myriade

Humain(e)

« Bonjour à tous, et bienvenue au centre de l'OESA, l'Organisme d'Exploration Spatiale Avancée. Je suis Theris, votre hologramme de présentation durant tout le temps de cette visite, durant laquelle vous seront présentés les bienfaits de notre organisme, nos buts, ainsi que l'avancement de nos actuelles recherches en terme du voyage au delà de Terra. Notre directrice, Luxienne Mueller vous souhaite une bonne visite, et espère qu'elle saura vous communiquer son engouement, et son savoir, au travers de ce tour merveilleux où se mélangeront émerveillement, découverte, mais surtout une évolution technologique majeure pour nous toutes, peuple libre Tekhan. Mais cessons ici cette introduction, et suivez-moi en direction de l'une des plus grandes avancées techniques de notre temps. Suivez-moi, et découvrez en ma compagnie le fleuron de la technologie de nos laboratoires, tous utilisés pour un seul et unique but : la découverte de l'infinie étendue stellaire de notre monde. »


Fiche Technique


Nom : Mueller

Prénom : Luxienne

Surnom ; Titres : Chef de L'OESA, Grande directrice du pôle spatiale.

Âge : 32 ans, et aucun complexe

Sexe : Féminin

Race : Humaine (Tekhane pure souche non-améliorée)

Orientation Sexuelle : strictement homosexuelle

Expérience : Nombreuses, la femme n'ayant que peu l'aspect prude de sa famille.



Description physique :

   Luxienne Mueller est une femme d'une beauté générale évidente, et si elle n'avait pas pour elle le grade, il ne serait pas à douter que bon nombre de personnes seraient un poil plus directes avec elle, le désir et l'envie étant commune mesure chez les femmes qu'elle rencontre. Il se dégage d'elle cette impression de charme volontaire et maîtrisé, étant donné que cela fait maintenant de nombreuses, bien nombreuses années qu'elle a put faire la découverte des capacités de son élégance, et qu'elle n'hésite pas à en faire la démonstration directe dès qu'elle en a l'occasion, ayant réussi plus d'une fois à offrir à son but, et ses projets, les fonds nécessaires grâce à un contact plus qu'intime avec celles qui faisaient affaires en sa compagnie.

   D'une manière plus précise, la femme est d'une bonne taille, avoisinant le mètre soixante-quinze, qu'elle rehausse bien généralement de talons pour finalement pouvoir offrir à tous une vue généralement agréable sur une longue paire de jambes aussi musclées que douces. Son corps est bien en chair, mais jamais trop, la femme ne supportant pas d'avoir une rondeur en excédant, si bien qu'elle offre d'elle une vision aussi voluptueuse que charismatique, des pieds à la tête, où les yeux des visiteuses peuvent longuement se perdre pour y contempler quelque promesse d'une passion future, au contact d'une femme des plus plaisantes à côtoyer. Des fesses rebondies, fermes, et une poitrine tout aussi rebondie, malgré une taille à faire pâlir plus d'une consœur, sont autant d'atours dont elle sait faire usage, et qui ont bien tendance à attirer encore une fois l’œil désireux des Tekhanes qui osent la rencontrer sans s'être prémunies des effets de sa beauté. Le tout est couronné d'un visage aux angles fins, entouré lui-même par une chevelure brune qui a plus tendance à être un brin désordonnée, écho d'une nuit un peu plus folle que les autres, ou d'un petit bout de charme sauvage sûrement volontaire, autre moyen de faire tomber dans son piège celles qui ne sauraient faire assez attention quand elles viennent à demander un rendez-vous. Vous l'avez sûrement deviné à ce point, mais beaucoup de son travail esthétique est présent pour servir sa cause, pour surprendre les invitées, pour délier les langues, et s'assurer une réussite commune au travers parfois d'un plaisir bien souvent peu prévu par celles qui s'approchent d'elle. Mais il serait bien triste de résumer la femme à cela :

   Car, au delà de son apparence franchement provocatrice, étudiée pour l'être même, la femme a bien conscience que seuls, ses beaux atours ne sauraient obtenir tout l'impact qu'elle aimerait leur donner. Elle n'est pas belle pour être une femme de charme, elle est belle car elle peut se le permettre, car elle est aussi intelligente que splendide, et pour celles qui travaillent avec elle, ce charme est souvent éclipsé par d'autres éléments, auxquels la femme donne beaucoup plus d'attention. Ses goûts vestimentaires d'abord sont toujours en convenance avec ce qu'elle doit faire, et si une réunion importante doit se dérouler, ses cheveux seront redressés, tirés en arrière, et son corps magnifique se recouvrera d'un tailleur somme toute travaillé pour lui laisser autant de liberté de mouvement que possible, tout en soulignant l'élégance de ce qu'elle peut cacher en dessous. En revanche, si elle est en plein travail, adieu la rigueur, et elle se parera bien souvent d'une tenue ouverte, la laissant libre dans l'intégralité de ses mouvements, une blouse généralement aussi large que peu excitante, par-dessus un pantalon tâché de café, et un haut complet combiné à une pull à col roulé du plus bel effet. Être belle n'est possible que si elle n'a rien à faire d'autre que l'être, mais son sérieux l'amène à laisser derrière elle ce travers quand la situation l'exige, et toutes celles qui travaillent donc à ses cotés la voient bien plus souvent affublée de cette tenue décontractée, où elle paraît même parfaitement semblable à toutes ses autres consœurs chercheuses, se fondant dans la masse, hormis la broche indiquant qu'elle est chef de section.

   Et si la différence entre ces trois « phases » de son élégance n'était pas suffisante, sa gestuelle aussi a tendance à connaître moult changements selon ses occupations : Provocante et sensuelle en privé, elle devient rapidement méthodique et simple une fois qu'elle est aux prises avec les rats du secteur financier, la présentant ainsi comme une femme rigoureuse, claire, et experte dans son domaine, des gestes très rapides et allant droit au but se combinant avec un visage neutre, capable de faire blêmir les plus grands joueurs de poker. Plus encore, quand elle travaille à l'intérieur même de son secteur, elle endosse son rôle de chef à la perfection, ses directives s'accompagnant de gestes droits, symboliques, impérieux, la mettant en scène comme une force à l'intérieur des laboratoires, sans en faire trop, de manière à conserver le respect de ses alliées et élèves, sans pour autant rentrer dans la tyrannie. Elle est, en somme, une femme aux multiples visages, mais le véritable est bien souvent celui qui paraît le moins évident pour les autres, car elle possède au plus profond d'elle ce désir lascif d'être une femme de volupté, et elle le laisse ressortir que bien peu souvent au vu de la rigueur de son poste. Ses charmes, elle souhaite les offrir, les montrer, bien sûr sans jamais perdre la main sur la domination de sa situation, mais toujours avec l'intime plaisir de pouvoir laisser ses gestes se perdre en caresses, en coquetteries, en taquins baisers, et la seule information qui pourrait permettre de le savoir, est sa lingerie, toujours élégante, toujours princière, un mélange certain de broderies et coquets ajouts, le tout sur un tissu qui a bien tendance à être dix fois trop ajouré pour que sa peau ne sois pas visible en dessous.

   En toute économie de mots, elle est une femme propre à sa beauté, mais qui, tous les jours, dissimule cela sous différents atours convenant aux situations qu'elle traverse. Un corps de Vénus accompagné d'un esprit digne des plus grands génies des siècles à venir.



Description Mentale :

   Comme dit au-dessus, la femme est un génie de son temps, et rien, absolument rien ne peut dire le contraire, malgré des défauts qui sont présents ! Elle est d'une vive intelligence, d'une connaissance pointue sur de nombreux domaines, et comme si cela ne lui suffisait jamais, elle continue de se perfectionner dans d'autres domaines, même après en avoir maîtrisé certains des plus complexes, comme les théories quantiques, la robotique de pointe, ou la physique des atomes. Rien ne saurait arrêter sa soif de découverte, et toutes nouvelles rencontres ne sont parfois à ces yeux que la possibilité de découvertes encore plus importantes, de nouvelles pistes de recherches à étudier, voire même de potentielles ouvertures vers un domaine encore inespéré de ses propres expériences, si bien qu'elle ne cesse jamais d'essayer de rencontrer toute forme de vie existante. À cette occasion, il est commun, et courant, qu'elle aille faire de bien étranges visites à la prison Eternum, faisant fi de tous les dangers qu'elle pourrait y trouver, y préférant le frisson implacable d'y trouver avec un peu de chance LA personne capable de l'aider à accomplir ses buts, que ce soit par quelques conversations, ou une étude plus approfondie d'une composition moléculaire méconnue du grand public. Il faut qu'elle sache, vite, et efficacement le moindre détail qui lui serait nécessaire, en toute circonstance, et pour cela elle déploie tous les efforts possibles, ainsi qu'une grande partie de son temps, soit dans un voyage rapide mais absolument nécessaire, soit dans une opération lucrative pour obtenir des dossiers normalement perdus, où se trouvent les plus grandes informations controversées de l'histoire Tekhane.

   Ce faisant, elle s'est créée un esprit analytique hors normes, produisant généralement chez les sujets de sa curiosité la désagréable impression qu'elle est capable de lire directement dans leur esprit, alors que finalement, elle est surtout capable de lire les plus petits messages dans les plus petits mouvements produits par ceux qu'elle observe, en faisant une véritable reine en terme de diplomatie. Discuter avec elle, c'est se perdre lentement dans un labyrinthe dont on ne peut ressortir vainqueur, et où l'échange d'informations sera toujours inégal, car elle gagnera bien plus de connaissances que l'autre partie, et surtout, elle sera en capacités de démêler le vrai du faux avec une aisance spectaculaire. Ses mots sont d'ailleurs aussi complexes que son esprit, et bien souvent, ses paroles en cachent d'autres, mais bien moins faciles à saisir. Au final, échanger avec elle est à peu près aussi plaisant que trompeur : on pourrait croire évidemment que l'on a mené la discussion, que l'on a su se défaire de ses entraves et de ses tournures alambiquées, d'être le plus intelligent dans l'histoire, pour finalement apprendre trois semaines plus tard que tout ce qui a été prononcé dans cet  échange produit un clair fossé entre les deux parties, Luxienne gardant haut-la-main le trophée final. Une femme d'exception donc, mais qui use de son talent simplement pour ses intérêts, et ne viendra jamais livrer les informations sensibles à qui que ce soit, hormis la seule personne dont elle est proche, et à laquelle elle fait confiance : Myriade Sang-Clair. Ce clair manque de confiance envers autrui est d'ailleurs l'un de ses nombreux défauts, et si celui ci ne l'handicape pas trop dans la vie de tous les jours, les autres, plus sérieux, ont le don de parfois lui porter sévèrement préjudice :

   Car la femme ne gagne pas tout à être l'intelligence faramineuse qu'elle est, et cela s'accompagne d'une flopée de mauvais traits qu'elle n'a jamais su corriger, et ce dans toute la fatalité que cela implique : elle a la malheureuse tendance d'être passablement apte au mensonge, à force de se dissimuler en permanence auprès de tous, et ainsi, même ses paroles les plus honnêtes perdent de leur charme, comme si un voile perpétuel se trouvait devant ses lèvres, déformant une bonne partie de ses dires pour les rendre plus clairs, mais aussi bien moins vrais qu'elle n'aimerait qu'ils le soient. Elle a aussi le sacré défaut d'être complètement incapable de faire attention à elle, ou aux potentiels dangers, pêchant d'une envie bien trop importante d'atteindre ses buts, et d'une abnégation à toute épreuve, ce qui finit par donner un caractère imprudent, généralement proche d'un « essayons d'abord, posons-nous les questions après », ce qui peut lui valoir parfois des échecs cuisants, qu'elle jette par dessus son épaule comme un manque clair de compétences de la part de certaines de ses subordonnées, avant de reprendre le tout depuis le début avec des calculs encore plus complexes à reproduire pour ses camarades de travail. Car oui, elle est aussi particulièrement orgueilleuse et sûre d'elle, incapable de se remettre en cause suite à une erreur ou un chaos sur le chemin de sa grandeur, produisant parfois un stress notable sur son équipe, qui du coup a le malheur de devoir travailler avec des exigences extrêmement importantes, et qui provoque parfois un certain mécontentement parmi le personnel le moins compétent du service.

   Mais, plus que tout, Luxienne est une femme passablement fatiguée d'elle-même, et de son devoir de chef. Que cela ne soit pas mal pris, elle a accepté ce travail qui fait sa fierté, et elle est tellement passionnée que rien ne saurait noircir le tableau de ses grands projets, mais malgré tout, elle est de plus en plus atteinte par une certaine forme d'épuisement moral, car entre ce que son esprit lui intime, et ce que son corps lui demande, il y a un large fossé. Alors, au delà de tous ses mauvais comportements, certaines choses bien plus tendres, bien plus délicates font surface, et notamment son attachement pour sa plus grande amie, sa compagne de tous les jours, sa merveille, qui est présente sous la forme de Myriade, et qui est sûrement la seule femme capable de lentement s'insinuer dans les fêlures de la dirigeante du OESA pour y trouver tout autant de faiblesse qu'un besoin sincère de connaître parfois autre chose que les perpétuels rapports de force qu'elle se doit d'accomplir jour après jour. Seule Myriade connaît son plaisir pour les bons repas, qu'elle ne peut quasiment jamais consommer à cause du manque de temps libre. Seule Myriade connaît aussi le plaisir que ressent Luxienne lors d'une douce soirée à regarder un match de boxe devant une télévision haut-de-gamme. Et seule Myriade connaît les véritables désirs de la femme en terme sexuel, ce besoin de soumission total et complet, cette impossibilité de riposter alors que son corps est utilisé comme un jouet laissé aux désirs de sa compagne. Plus que tout, Luxienne tient avant tout au bonheur et à la vie de son alliée et sa camarade la plus proche, et même si cela ne tient pas de l'amour, il tient toutefois de la nécessité absolue à ses yeux.

   Aussi incroyable qu'elle est, aussi passionnée qu'elle soit, aussi rude en tant que chef, et désireuse comme amante... Luxienne est avant tout une femme qui trompe tout le monde, même elle-même, et dont la seule personne actuellement capable de lui prouver ses torts est celle qu'elle chérie plus que toute autre chose.




Nom : Sang-Clair

Prénom : Myriade

Surnom ; Titres : Première pilote spatiale du OESA, petite rigolote, championne, petit lapin rose.

Âge : 19 ans

Sexe : Féminin

Race : Créature (Sujet d'expérience inconnu)

Orientation Sexuelle : Pansexuelle

Expérience : Nombreuses, uniquement homosexuelles.



Description physique :

   Myriade Sang-clair est une jeune femme dont le corps s'est non seulement développé bien vite, mais a surtout gagné un charme certain avec les dernières années, la laissant vite devenir non pas une adolescente aux airs innocents, mais une jeune adulte pleine de fraîcheur et de charme, même si elle n'en fait pas encore pleinement usage, préférant encore rester loin des feux de la scène. Peu grande, les bienfaits de sa croissance ayant préféré se faire sur d'autres domaines, elle reste souvent bien inférieure en taille à ses camarades, mais cela ne vient nullement porter ombrage à l'équilibre flagrant de son corps, le tout ayant connu une mise en valeur qui ne saurait être ignorée, non sans parler parfois de ce genre d'attirance naturelle qui ne peut empêcher ceux qui la rencontrent à laisser lentement voguer leur esprit vers quelques pensées plus ou moins chastes. Elle ne s'en offusque pas pour autant, et préfère d'ailleurs que les autres la voient comme une belle jeune femme plutôt qu'une femme d'intellect, pour la simple et bonne raison qu'il n'y a rien de bon à être crainte pour sa finesse d'esprit, et que nombreuses sont celles qui se laissent ainsi piéger par son seul beau minois, sans jamais douter qu'elle est largement plus fine et réfléchie qu'elle ne le laisse croire, lui laissant toujours une marge d'avance dans la vie. Une femme belle donc, mais qui ne se limite pas à cela. Toutefois, nous sommes ici pour parler du physique, et c'est ainsi que nous procéderons, alors continuons donc ce petit effort de détails, et plongeons-nous dans l'observation de cette chair aussi intéressante que trompeuse :

   Donc assez petite, ne dépassant pas le mètre soixante, Myriade présente au premier coup d’œil une certaine forme de fébrilité naturelle, malgré un corps qui ne convient pas forcément à une telle façon de se mouvoir et d'agir. Comme si elle avait peur d'une potentielle maladresse, tout objet qu'elle tient se retrouve généralement écrasé contre sa poitrine, généreuse, et chacun de ses pas se trouve être assez réduit en distance, et le plus prudent possible pour qu'elle n'ait pas à souffrir d'une chute malencontreuse, qui ne saurait que la faire tomber, encore une fois, sa poitrine en première. Deux mentions de suite, nous nous devons d'en parler, mais sa croissance fut flagrante aux alentours de ses atours mammaires, la femme étant passée d'une poitrine lisse à un bonnet D des plus flagrants, une lourde poitrine des plus fermes, qui n'a même pas besoin de se trouver d'excuse pour se tenir droite et bien rebondie, la musculation de son corps, et l'habitude de ne porter de soutien-gorge offrant à ceux-ci une tenue fière et provocante. Le reste de son corps suit la même logique, un entraînement fréquent lui ayant offert autant de fermeté de que de douces courbes, l'excès n'ayant jamais été dans ses habitudes, et ce ne fut pas sans produire ce fameux physique pour lequel elle se fait reconnaître, le tout de sa chair étant une invitation à y porter la main, ou les lèvres, afin de profiter d'une jeune femme qui est, en sus, d'une nature trop calme pour protester. Du moins de l'avis de ceux qui observent son manège habituel de petite souris de laboratoire mal assurée, s'avançant avec cette méfiance absolue d'elle-même, et du manque de contrôle d'un corps qu'elle ne semble pas si bien maîtriser et connaître, contrairement à sa belle tutrice.

   Mais si elle agit de manière aussi prudente tous les jours, c'est tout autant pour dissimuler les atours de son corps derrière une préoccupation presque enfantine de ce que l'on peut percevoir d'elle, que pour limiter la capacité d'autrui à percer les détails qui se cachent sous ses tenues légères. Car des secrets, elle en possède un grand nombre, et cela commence tout simplement par les capacités enfouies dans son corps, des forces que nul ne saurait douter de l'existence, et qui furent d'ailleurs la fierté de cette femme aux cheveux roses et aux yeux bleus, tandis qu'elle avait encore la faculté d'en faire usage chaque jour, avant qu'on lui apprenne à faire plus attention à l'expression de ceux-ci. Résultat étrange d'un programme d'augmentation cellulaire Tekhan, elle fut à l'occasion poussée vers une amélioration constante de ses capacités, et de ses limites, et cela se dévoile quand elle quitte ses agissements de gentille petite aide de camp de Luxienne pour la défendre contre quelques attaques, ou personnes malintentionnées : des muscles invisibles sous le velours de sa peau, aux tendons à la réactivité surhumaine, tout en passant par des os d'une résistance hors du commun, ses gestes se modulent soudainement par ces éléments corporels pour lui permettre de pratiquer des assauts d'une vivacité hors normes, et de déplacer son corps en une danse létale, où chaque caresse devient un écho de mort. Aussi fébrile peut-elle donc paraître, ce n'est jamais qu'un jeu d'acteur finement étudié au fil des années pour lui servir de couverture, presque au point qu'il soit naturel, laissant parfois l'impression d'un véritable dédoublement de personnalité entre la jeune femme serviable et honnête, et la Myriade tueuse au ballet funeste.

   Mais tous ces changements de comportement physique se doivent de posséder des tenues à l'aune de cette nécessité permanente d'être capable d'agir vivement dans les pires possibilités, et ainsi, la femme dut revoir sa garde-robe il y a quelques années, afin de conformer son évolution corporelle avec son double-jeu permanent. Ainsi, adieu les étranges t-shirts généralement bien trop élimés et difformes pour l'aider dans ses mouvements, vu que cela ne saurait que desservir son rôle de charmante employée, mais adieu aussi les vêtements longs ou étriqués qui ne sauraient être acceptables au cas où elle se doive de réagir à une situation critique, où sa chère tutrice, ou ses camarades de travail, finiraient en danger. Non, elle vint faire le choix de porter principalement des chemises, à manches longues bien généralement, afin de couvrir un minimum sa peau sans pour autant entraver ses mouvements, et accompagne celles-ci d'un mantelet à la couleur criarde qui semblerait trop petit pour elle dans la plupart des situations, si l'on ôte le fait qu'il s'agit là d'un cadeau de Luxienne auquel elle tient tout particulièrement. Quant à ses jambes et son bassin, elle préfère s'en vêtir de collants épais, hormis les périodes chaudes, et recouvre le tout d'une jupe assez courte pour ne pas venir lui ôter la maîtrise de ses mouvements au cas où ceux-ci deviendraient nécessaires ! Au final, cela lui permet de rester libre dans sa manière de se comporter, tout en lui permettant d'assumer pleinement le charme de son corps d'adulte, et elle aime tout particulièrement son choix, fait sous les conseils éclairés de Luxienne.

   Voilà qui elle est physiquement. Une femme aux courbes fantastiques, fermes et musclées, mais qui prend soin de ne pas trop le montrer, derrière des agissements dignes d'un rat de bibliothèque mal dans sa peau, et d'une tenue certes porteuse d'un certain charme, mais qu'elle porte de manière professionnelle, de manière à ne pas exacerber cet aspect de son être... But God ! Show me that body of yours, Darling !



Description Mentale :

   La jeune femme ne présente pas forcément de mentalité précise au premier abord. Bien au contraire, on pourrait presque croire qu'elle ne fait que partie du grand monde qui l'entoure, et qu'elle n'a ainsi développé qu'une manière simple de penser et de faire les choses, se contentant d'être une assistante exemplaire, et la demoiselle exemplaire qu'on lui demande d'être, sans jamais venir chercher plus loin dans ses besoins, ou ses applications. Ce serait bien mal la juger, ou la connaître, car rappelons le, la femme joue un rôle, et si cela est déjà remarquablement bien fait dans sa façon d'agir, c'est encore plus vrai quand on parle de sa psyché, et de l'évolution de celle-ci au cours du temps, même si ici, seul le présent nous intéresse d'une quelconque manière. En tout cas, de visu, elle ne semble en effet par faire preuve de quoi que ce soit qui vienne la faire sortir du lot : elle apprécie son travail, ainsi qu'accomplir les différents travaux qui lui sont demandés afin de remplir ses obligations envers le monde Tekhan, et en dehors de cela, elle semble apprécier la vie simple de citoyenne avec un franc sourire sur le visage, comme si rien n'était capable de la rendre un peu plus maussade que nécessaire, ni un peu plus joyeuse. Pas de cas réel de souci majeur, ni de plaisir intense, aucun souvenir particulier chez ses collègues d'un moment où elle aurait révélé une affection particulière, elle est simplement une « jeune femme comme les autres », et c'est le terme qui viendra rapidement aux lèvres de toutes celles qui travaillent au OESA. Mais permettons-nous de creuser un peu en dessous des apparences, hum ?

   En effet, la femme possède un esprit bien plus particulier que celui qu'on lui prête, et cela commence par un détail que peu de monde estime malgré l'évidence clair de celui-ci : elle est passionnée d'astronomie. La tête perdue dans les étoiles, la seule chose qui lui permet de vraiment se séparer d'un monde où elle ne se retrouve pas sont les longues étendues spatiales qui se trouvent enfin à sa portée, et s'il ne tenait réellement qu'à elle de faire le choix, elle serait déjà sûrement partie loin, très loin dans les confins de l'univers, sans prendre plus de temps pour se préparer. Mais elle est sérieuse, et terriblement attachée à Luxienne, sa tutrice, à tel point que les propos de la femme sont de la plus haute importance à ses yeux, et que de manière bien naturelle, elle n'ira jamais à l'encontre de ceux-ci, non pas par obéissance, mais bien par respect. Elle trouve en cette femme une pensée égale à la sienne, une assurance fantastique aussi, mais surtout le goût certain qu'elle possède elle aussi pour le secret, si bien qu'elles ne sont finalement qu'un duo étrange où l'autre permet de quitter ses beaux jours pour enfin se laisser aller à un naturel parfois bien maladroit, mais enfin plaisant à vivre. Si ce n'était pour elle, Myriade aurait bien rapidement quitté les ordres militaires, et les expériences douteuses, pour enfin voguer parmi les flots stellaires, mais elle se doit d'être honnête avec elle-même sur un point : sans Luxienne, elle se sentirait rapidement seule, et ne saurait supporter à nouveau la vie de cette manière.

   Car oui, si calme, simple, et assurée peut-elle paraître, Myriade est avant tout une femme présentant nombre de blessures, de caractère émotionnel principalement, et ces blessures sont encore capables aujourd'hui de laisser entrevoir la difficulté face à laquelle elle est mise pour ne pas perdre l'esprit face à des choses toutes bêtes de la vie. Son inconfort face au monde n'est pas si feint que cela, et parfois une simple crise de panique peut se produire chez elle parce qu'elle ne comprend pas comment ouvrir un paquet de chips avec marqué « ouverture simple » dessus. Il s'agit dans le fond d'une grande angoissée, qui ne comprend pas bien le monde extérieur, et qui, bien qu'elle fasse d'énormes efforts pour ne pas le laisser paraître, possède une certaine crainte de se tourner en ridicule face à des choses toutes simples de la vie, alors qu'elle peut maîtriser des situations où n'importe qui perdrait son sang froid. Elle est une reine tueuse et en est fière, mais plus le temps passe, et plus elle aimerait pouvoir définitivement quitter ses mauvais penchants pour finalement ne se laisser aller qu'à cette vie douce et calme à laquelle elle aspire tant depuis qu'elle a commencé à partager son histoire avec Luxienne, aussi vous comprendrez pourquoi se retrouver maladroite devant une boîte de cornichons peut l'effrayer : la simple peur de ne pouvoir jamais agir comme les simples êtres humains de ce monde, et tout particulièrement les femmes de Tekhos, qu'elle a tendance à idéaliser bien malgré elle, à cause de son parcours relativement atypique.

   Donc son mimétisme, son envie de bien faire, son envie d'être vue comme une femme normale n'est pas qu'un camouflage de confort, il s'agit surtout de ce qu'elle aimerait être, et si elle offre autant d'efforts à conserver cette couverture, c'est simplement dans l'espoir qu'un jour cela devienne naturel, et non pas un moyen de faire ami-ami avec ses collègues. Et c'est bien pour cela qu'elle a aussi besoin, quand c'est trop et que son moral faiblit au terme d'une rude journée, de pouvoir agir normalement aux cotés de Luxienne, redevenant cette tueuse orgueilleuse et supérieure, non sans perdre désormais la douceur et l'affection qu'elle a mis tant de temps à mettre en place dans son comportement de tous les jours. Et d'ailleurs, en ce sens, les deux femmes s'entendent très bien, et ainsi, alors que beaucoup des femmes de l'OESA pensent encore que les deux sont un couple interdit où Luxienne tire les ficelles, Myriade est celle qui, au foyer, se retrouve à dominer sa patronne, l'amenant à être la plus forte des deux, et passablement celle qui aide à recadrer la dirigeante de l'organisation quand celle-ci part dans des idées trop farfelues. Dans le fond, si la brune est une génie qui ne sait jamais s'arrêter de penser, la jeune femme en rose en est le carcan, le rappel généralement brutal de la réalité et de ses devoirs, un rôle qu'elle a d'ailleurs endossé tout naturellement, et qui ne dérange en rien sa compagne, même si elles sont bien d'accord pour ne jamais développer plus que cette relation de tutrice dominée/fille dominante, et amante à l'occasion, pour que finalement elles puissent aussi trouver détente et réconfort dans les bras l'une de l'autre.

   Et ainsi est Myriade : une femme droite, réfléchie, en quête d'une normalité qu'elle espère un jour acquérir au contact des camarades de l'OESA et sa tutrice, et ce même si cela en devient bien souvent une source intense d'un stress quasi-incontrôlable. Mais elle fera tous les efforts nécessaires pour accomplir son but, et d'ici là, continuera son jeu d'actrice, quitte à s'épuiser.


Histoire

Chapitre 1 : La venue d'une Génie.


   Tout commence avec Luxienne. Seconde fille de la famille Mueller, cadette de Dénève qui, à l'époque de sa naissance, commence déjà des études largement supérieures à son niveau normal d'étude, elle est la petite demoiselle dorlotée de la famille, couverte par une mère aimante, et une sœur qui a la fâcheuse tendance à quitter ses propres leçons pour avoir l'occasion de prendre un peu soin d'elle, quitte à rattraper ses leçons dans la nuit, au grand désespoir de sa chère maman. Les premières années ne sont pas particulièrement remarquables pour la jeune fille, ce qui est tout à fait normal quand on sait qu'un bébé n'a pas vraiment les capacités pour se faire remarquer, mais elle restera avant tout une demoiselle des plus sages, des plus calmes, n'ayant vraiment d'occasion de faire entendre sa voix que lorsque ses dents auront décidé de pousser, créant un véritable chaos dans la maisonnée le temps que cette période puisse passer. Mais finalement rien ne viendra vraiment perturber la douce quiétude de cette famille Tekhane, et si la mère prit le temps de prendre soin de la cadette aux premiers mois de sa vie, elle retourna au travail au bout d'un temps avec elle entre ses bras, continuant de s'occuper de celle-ci tandis qu'elle continuait ses recherches informatiques, en tant que simple agente à l'intérieur de la bureaucratie policière de Tekhos. Il n'est pas à oublier de mentionner que cette charmante petite enfant ne tarda pas à attendrir une bonne partie des membres du bureau, ne manquant pas de l'entourer d'une foule de personnes aimantes.

   Ce fut un peu plus tard, aux alentours de sa quatrième année, que le vif esprit de la jeune femme vint à produire enfin ses premiers effets, aidant tous ceux qui l'entouraient à se rendre enfin compte qu'elle n'avait pas affaire à une simple fillette, mais à une demoiselle qui semblait posséder des capacités intellectuelles qui n'avaient rien à envier à son aînée. L'exemple le plus notable fut le premier, car malheureusement les remontrances de sa mère vinrent à la bloquer un peu sur sa nature réfléchie, mais alors que celle-ci était partie pour se faire un café, laissant la jeune fille batifoler dans son bureau, elle quitta les jouets qui la passionnaient tant à cette époque, et vint à monter maladroitement sur la chaise de sa mère pour observer les documents qui se trouvaient ouverts sur son écran, et se mit rapidement à les fouiller sans le moindre souci. Oui, elle savait déjà lire, elle avait d'ailleurs pris le temps d'apprendre avec les vieux cahiers de sa sœur, et si pas mal de mots lui échappaient encore, ce ne fut pas pour lui être fatal, car rapidement, elle se mit à fermer les documents qui ne l'intéressaient pas pour se focaliser sur une suite de petits crimes au cœur de la capitale, jusqu'à être surprise par sa mère qui, de peur qu'elle soit tombée sur certaines des photos particulièrement terrifiantes qui se trouvaient parmi les différents rapports, vint à hausser la voix d'un coup, et lui faire la morale sur le fait qu'elle ne devait pas regarder le travail de maman, que cela pourrait être très dangereux pour elle !

   Mais une fois la jeune fille en pleurs, puis réconfortée par sa douce mère, les choses vinrent à reprendre un cours normal jusqu'à ce que cette dernière vienne se rasseoir devant son moniteur, et contempler avec surprise ce que venait de produire sa seconde enfant : tous les documents concernant une vague de délits mineurs étaient rangés, par dates, mais surtout, par gravité du crime, et de manière quasi-professionnelle, tous les éléments qui pouvaient être mis en relation lors de ces différents événements avaient été surlignés par la jeune fille, permettant ainsi de mettre en valeur une piste encore non-observée par les différentes enquêtrices du bureau : le fait qu'il puisse s'agir du même groupe de personnes à chaque fois. Le regard que porta l'adulte envers sa fille fut un étrange mélange de surprise, de joie, et de crainte, car si elle ne savait pas trop si elle l'avait vraiment fait en conscience de ce qu'elle était en train, ou non, de lire, elle ne pouvait faire l'impasse sur une bien étrange réalité qui venait de lui sauter aux yeux : la jeune demoiselle, en dix minutes de temps libre, avait peut-être fait progresser cette enquête d'un pas de géant, et ce alors même qu'elle n'avait que quatre années de vie. Si cela vint forcément provoquer un certain élan d'orgueil de la part de la mère, elle ne put qu'accepter un fait particulièrement troublant à ses yeux : elle qui souhaitait pour une fois avoir le droit à connaître une vie normale en compagnie d'une jeune fille tout à fait classique, elle avait une nouvelle fois mis au monde une petite génie, à l'instar de l'aînée, et il allait sûrement falloir qu'elle commence à se soucier une nouvelle fois de l'éducation de sa fillette dans les années à venir...

   Mais elle n'était pas au bout de ses peines, loin de là, quand elle vint finalement, une bonne année plus tard, rencontrer une collègue, une particulière dans le domaine des affaires criminelles, afin de lui demander d'étudier les capacités de son enfant. Ryelle ne fut pas pour en rire un peu, ayant presque l'impression que la mère exagérait les capacités de sa deuxième fille, vu qu'elle avait déjà pu croiser la première qui se présentait comme une brillante membre de la caste scientifique, mais ne vint pas à rechigner, et se décida d'accepter de faire une petite analyse à Luxienne, se munissant des outils nécessaires pour l'observation de l'intelligence d'un enfant, avant de se retrouver seule avec elle dans une des pièces les plus éloignées du district criminel où travaillait la mère de la jeune fille :

« Bonjour Luxienne. Tu te souviens de moi ?
 -  Oui, t'es Ryelle, non ? La copine de maman.
 -  C'est cela mon ange. Ta maman aimerait que je joue un peu avec toi, ça ne te gêne pas ?
 -  Hum ? Non, non pas du tout, je m'ennuie souvent en plus. »

   A cette occasion, la collègue de travail vint à lui présenter une petite feuille, un simple coloriage avec des opérations de calcul plus ou moins complexes. Elle sortit ensuite quelques crayons de couleurs, puis lui offrit un doux sourire avant de finalement lui expliquer ce premier test, où elle souhaitait observer le plus clairement possible la rapidité d'esprit de la fillette :

« Alors pour ce jeu, chaque couleur est égale à un nombre, et chaque morceau du dessin a un calcul qui te permet d'avoir le nombre correspondant ! Je veux que tu mettes un trait de la couleur correspondante dans chaque case, et si tu ne te trompes pas, tu as le droit de colorier tout le dessin, d'accord ?
 -  Oui d'accord, mais... J'ai le droit à un autre dessin si je le fais vite ?
 -  Ça marche, si tu le fais très rapidement, je te donne un autre dessin, se permit-elle de dire avec le sourire aux lèvres, doutant que la jeune fille puisse déjà faire un sans-faute. »

   Elle ne manqua pas de pester contre son manque de foi. Non seulement elle vit la jeune fille prendre tous les crayons en main, mais surtout, elle la vit produire un spectacle fascinant, séparant les crayons en parts égales dans chacunes de ses mains, puis sortant le crayon correspondant à la couleur souhaitée d'un mouvement de pouce pour en placer un rapide trait dans chaque case, et ce simultanément de sa main droite, et de sa main gauche. En quelques secondes, sans même que la jeune fille ne présente la moindre hésitation durant toute la durée de l'exercice, le dessin était complété, sans que la moindre erreur n'ait été faite, et alors que Luxienne, avec un sourire tellement élargi que l'on n'aurait pu la croire moins heureuse, posait les crayons sur la table tranquillement, sûre d'elle, Ryelle vint à se passer la main dans les cheveux, ébahie par ce qu'elle venait de constater. Dénève, son aînée, était elle aussi passée entre ses mains, mais alors qu'elle avait neuf ans, et elle se sentait presque mal en constatant que la jeune demoiselle se trouvant face à elle en cet instant avait été encore plus rapide que sa sœur, avec plusieurs années d'écart. C'était stupéfiant, et il lui fallut bien un geste très délicat de Luxienne pour retrouver un contact logique avec la réalité, car impatiente, et tout à fait naturel dans sa logique, considérant qu'elle avait été bien assez rapide, la fillette avait tendu sa main par dessus la table pour lui demander silencieusement le deuxième dessin qui lui avait été promis. Un geste rapide de la part de la psychanalyste criminelle, et un deuxième dessin du même style offert à la petite, la femme quitta sa chaise, et lui fit un petit signe pour l'informer de ne pas bouger du bureau.

« Tu restes là d'accord ? Ne t'en fais pas je reviens de suite, je dois juste aller chercher deux trois affaires. »

   Au diable la prise de gants, elle allait dérouler la batterie de test entière. Si à cinq ans elle était capable de faire cela, elle comptait voir rapidement jusqu'où elle pourrait aller dans des tests bien plus complexes !

. . . . .

   Trois heures, et la femme vint à bénir la pause déjeuner qu'il lui était enfin promise après la batterie de tests qu'elle venait de faire connaître à cette Luxienne enjouée, et heureuse d'avoir eu autant l'occasion de se plaire avec une personne qu'elle ne connaissait que si peu jusqu'ici, mais qui semblait comme elle beaucoup aimer jouer ! Quoique, pour Ryelle, le tout n'avait pas été de tout repos, et alors qu'elle avait, dés le départ, pris le parti d'aller chercher des tests plus conséquents en terme de difficulté, le genre qu'elle ne va sortir normalement qu'une fois qu'elle a rencontré une adolescente avec des capacités certaines, elle se devait désormais de se rendre à l'évidence, elle avait encore mésestimé la capacité réflective de la fillette. Elles en étaient au trente-septième essai, et encore maintenant les limites de Luxienne restaient un peu floues, surtout en terme de logique, et de capacité d'adaptation, tous les « jeux » comprenant une reconnaissance de sigle, et de suites plus ou moins ardues en terme de logique ayant été violemment malmenés par la petite demoiselle. C'était simple à dire, mais bien plus à constater : tant qu'elle avait une idée de départ sur  ce qu'elle devait découvrir dans les tests, il ne lui fallait pas moins de quelques instants pour s'y conformer, au point de prouver une finesse extrême dans la vivacité de son esprit, qui avait mis bien à mal la femme pour la suivre, ayant parfois bien du mal à l'accompagner, et devant même se munir de quelques notes préalables pour ne pas finir dans une confusion plus ou moins désagréable au beau milieu de son observation.

« Bon arrêtons là pour l'instant, mais je pense que nous allons devoir nous revoir. Le midi approche, donc ta maman va sûrement venir te récupérer. Puis-je te poser une dernière question avant cela ?
 -  Hum ? Oui bien sur !
 -  Super... Dis-moi Luxienne, comment as-tu trouvé ces tests ?
 -  J'ai beaucoup aimé ! C'est pas souvent que je m'amuse comme ça, j'adore tes jeux Ryelle ! »

   Des jeux... Certaines personnes seraient sûrement là à s'arracher les cheveux avec les dernières suites logiques qu'elle lui avait présenté, sans parler de la table mathématique dont elle avait fait usage, qui est normalement utilisée pour pousser à leurs limites les personnes qui font ce test. Elle-même, malgré son utilisation plus ou moins courante des travaux logiques ne pourrait pas atteindre plus de vingt points au premier essai, la difficulté d'énumérer le chiffre présent de la suite, puis le second, le quatrième, et le sixième l'ayant précédé, sans erreur, avant d'enchaîner sur le chiffre suivant, étant un exercice de mémoire et de réflexion particulièrement vicieux... Et la jeune fille avait réussi à atteindre cinquante-six points sur les soixante, ce qui, avec les marges d'erreurs est considéré comme un sans-faute absolu. Finalement, la femme comprenait bien là le problème de ses tests face à Luxienne, elle les avait vraiment vécue comme un jeu, comme une source d'amusement tout juste bon à la distraire, et à lui offrir enfin un peu de quoi laisser son esprit se défouler...

   C'était ahurissant. Ryelle resta muette pendant un moment, marquant sur son calepin les propos de la fillette, et se perdit même un court instant dans l'observation des notes qu'elle avait obtenu jusqu'ici, se demandant si elle était vraiment qualifiée pour produire la suite des tests, qu'elle avait elle-même bien du mal à produire, et où elle risquerait d'être celle fautant dans la lecture de ces derniers. Par chance, elle vit sa collègue arriver, et en profita pour soupirer un peu avant de se redresser, et de s'exprimer avec un air doux et calme, afin de voiler le trouble qui la gagnait face à l'évidence même de la situation.

« Très bien je ne te retiens pas plus Luxienne. Ta maman t'attend dans le couloir, cours la rejoindre, dis-lui que je discuterai plus tard avec elle, d'accord ?
 -  Promis madame, bon appétit à toi !
 -  Bon appétit, petite ange. »

   Et elle l'observa quitter la pièce comme une furie pour aller rejoindre sa chère mère, qui elle lui fit un signe au travers de la porte vitrée avant de partir en direction du réfectoire en tenant la main de sa jeune enfant, tandis que cette dernière lui expliquait comme elle pouvait ce qu'elle avait fait dans la matinée. Ryelle, enfin seule, s'écroula sur sa chaise, et rangea tranquillement ses différentes notes et tests, pour enfin venir se masser le front avec soulagement. L'évidence de la situation : durant toute cette matinée, elle s'était trouvée face à une jeune fille dont les capacités cognitives la supplantent, en tout point. Une génie absolue...

. . . . .

   Finalement, sur les conseils de son amie, la mère dut rapidement prévoir de nombreux rendez-vous, une quantité astronomique, afin de vraiment pouvoir étudier plus en profondeur les avantages de son enfant, et ce ne fut pas une mince affaire, car à chaque rendez-vous enfin accompli s'en rajoutaient deux, parfois trois, produisant sûrement l'une de ses années les plus actives en termes de rencontre de psychiatres et de médecins. Le but étant de définir et de prouver l'excellence de sa fille, non pas par fierté, mais par besoin de lui offrir sous peu une éducation correcte, capable de la satisfaire, mais aussi de lui permettre de défier en permanence son esprit dont les forces réflectives semblaient sans faille, la mère chercha tant bien que mal les êtres les plus compétents possible, et parvint à force d'abandons et de conseils à trouver enfin la femme de la situation : Keyriis Strausshenn. La complexité, elle la portait autant en son nom qu'en son esprit, la femme étant l'une des élites de cette époque Tekhane, et elle avait entendu parler du cas de Luxienne par le biais d'une amie psychiatre, qui l'avait contactée face à son incapacité de trouver à la jeune fille un véritable problème qui ne puisse lui permettre finalement de répondre. Bien sûr, le coup de fil que passa la fière mère de la famille Mueller eut tôt fait d'obtenir une réponse positive, et la rencontre se fit rapidement, la cadette désormais âgée de six années rencontrant sans comprendre celle dont elle allait prendre la place quelques années plus tard, bien malgré elle :

« Bonjour à toi, Luxienne. J'ai appris de mes collègues et amis que tu étais une petite fille très intelligente, et je voudrais du coup te mettre à l'épreuve, cela ne te gêne pas ?
 -  Non, non bien sûr madame. Je suis prête dès que vous le voulez. »

   De l'assurance, elle en avait pris, et elle en eu bien besoin lors de la série de tests qu'elle vint à passer, car la femme en face d'elle, impitoyable, ne manqua pas d'user de l'intégralité de son intellect pour trouver les moyens les plus complexes, les plus adroits, ou les plus traîtres pour tenter de tromper la vigilance et l'excellence de la petite fille, qui elle répondit coup sur coup, mais toujours en prenant de plus en plus de temps pour réfléchir, tandis que Keyriis ne cessait d'accélérer la cadence. Trois heures, ce fut le temps qu'il fallut enfin à la femme pour parvenir à placer la jeune demoiselle dans une position où elle ne pouvait plus répondre, où elle était dans l'incapacité de trouver une solution, où sa réflexion pourtant toujours en action vint enfin se percuter à un problème qu'elle était incapable de résoudre, et cette sensation nouvelle vint soudainement lui ouvrir les yeux ! Alors c'était ça, l'incompréhensible ? Elle adorait, elle voulait vraiment tomber face à plus d'incompréhensible, et ce fut avec le plus charmant des sourires qu'elle vint enfin avouer à son adversaire qu'elle n'était pas en capacité de répondre, mais de la manière la plus douce et délicate au monde ! Elle ne s'en offusquait pas, au contraire, elle venait de découvrir quelques chose de nouveau, d'incroyable, une limite qu'elle ne se connaissait pas, et tandis qu'elle observait la dame face à elle, avec l'envie profonde de la remercier plus que tout, celle-ci vint à lui offrir un air chaleureux, avant de finalement poser crayons et papiers pour lui parler avec le ton d'une personne toute aussi ravie que l'enfant.

« Tu as bien travaillé, mes félicitations, va donc jouer, j'ai besoin de discuter avec ta maman.
 -  Oui d'accord, merci madame ! »

   Sautant de sa chaise en hâte, toute excitée par sa nouvelle découverte, elle fila hors du bureau de cette incroyable personne qui venait de la battre pour la première fois sur le terrain de l'intelligence pure, et sortit de la pièce en trombe, avant de prévenir sa mère que la super femme très gentille l'attendait. Un peu surprise de la réaction de son enfant, elle ne manqua pourtant pas de passer la porte et de la refermer derrière elle avant d'échanger calmement avec Keyriis, qui ne tarda pas à s'exprimer avec un léger soupir tout d'abord, puis une voix qui ne manquait pas d'admiration envers la jeune fille :

« Madame Mueller, je crois que j'ai deux nouvelles dont je me dois de vous informer ; l'une est, je pense, plus que positive, mais l'autre bien sûr risque de l'être moins. Une préférence sur laquelle j'engage en première ?
 -  Ecoutez... Pas besoin d'y aller par quatre chemins, je saurais accepter la moindre réponse claire, tant qu'on m'en offre enfin une sur le cas de Luxienne.
 -  Je vois. Eh bien sachez que votre enfant est dotée d'une vivacité d'esprit qui est capable de me faire blêmir. Au même âge, je ne devais pas avoir le tiers de ce qu'elle possède déjà, et sa capacité de compréhension est ahurissante. C'est simple, je pense que si elle a une explication logique et graduelle, elle est dans la capacité parfaite de comprendre la moindre chose en ce monde, mais du coup... Il va falloir que ce soit rapide, où elle s’ennuiera bien vite, et finira même sûrement par se lasser. Je ne connais pas d'institution suffisamment compétente pour prendre Luxienne en charge pour son éducation, et de manière très honnête, je ne peux que vous donner ce simple conseil : offrez lui le savoir dont elle a besoin pour se nourrir.
 -  Comment cela ?
 -  Laissez-la faire d'elle-même son éducation. Donne-lui des livres, des ouvrages, et dès qu'elle en a finit un, n'hésitez surtout pas à lui en offrir d'autres si elle en fait la demande. Elle va en avoir grand besoin, les manuels scolaires seront sûrement de bien maigre contenance pour la satisfaire. Votre première fille est déjà une excellente enfant destinée à un avenir grandiose, non ?
 -  Oui en effet mais … pourquoi cette question ? »

   La femme hésita un instant puis croisa les bras de manière relativement solennelle, s'enfonçant dans le moelleux du canapé tout en fronçant légèrement les sourcils, avant d'enfin s'offrir le droit de s'exprimer à nouveau, avec un ton qui ne laissait pas de place au doute :

« Je ne connais pas les capacités de votre autre fille exactement, je me suis juste informée, mais... Je pense pouvoir dire sans mal que Luxienne ne sera nullement dans le même cas. Demandez-lui si possible de pouvoir conserver ses ouvrages scientifiques afin de les lui donner, cela aura sans doute l'avantage d'occuper votre cadette un moment.
 -  Je comprends. Merci beaucoup à vous, pourrais-je vous recontacter au besoin ?
 -  Bien sûr, il n'y a pas le moindre souci. Bon courage madame Mueller, j’espère que vous vous en sortirez avec votre fille. »

. . . . .

   S'en sortir avec elle ? Elle y parvint, non sans mal, mais elle ne put que se trouver fort heureuse d'avoir obtenu au préalable les conseils de la femme, car ceux-ci se révélèrent d'une extraordinaire aide pour accomplir dûment et parfaitement son travail de mère, en offrant à la jeune demoiselle en perpétuelle croissance les connaissance nécessaires pour qu'elle ne perde jamais l'envie de découvrir et d'apprendre. Les livres ? Rapidement, ceux-ci étaient lus, dévorés, relus dans leur intégralité pour en prendre la moindre once d'élément intéressant, si bien que Luxienne eut tôt fait de demander à sa mère de nouveaux ouvrages, au point que la majorité du budget alloué à la fillette fut rapidement attribuée à l'achat d'ouvrages plus complexes, et pointilleux sur les informations qu'ils livraient. Rapidement alors, ce fut Dénève qui vint à aider sa soeurette à trouver de quoi engranger de nouveaux sujets de réflexion, lui offrant autant d'éléments savants qu'elle en était capable, poussant toujours un peu plus les limites de ce qu'elle considérait comme acceptable pour une jeune fille pour rapidement y découvrir une sorte de jeu, où la gagnante serait celle capable de dénicher la perle rare capable de durer plus d'une semaine entre les mains de la génie assoiffée de nouveautés... Mais rien ne permit pourtant de désigner un vainqueur. Sitôt un élément débuté, il était consommé d'une traite par l'esprit vorace de Luxienne, était dépossédé de toutes ses connaissances, et rangé soigneusement dans un coin, tel le trophée évident de la jeune fille sur l'une des centaines de matières scientifiques qu'elle pouvait aborder.

   Sa treizième année sonna le glas de la lecture toutefois, car elle vint enfin à découvrir la merveille qu'était le système éducatif par assistance web, et se prit vite dans un jeu terrible où elle cherchait, encore et encore, à repousser les limites de sa connaissance sans pour autant jamais se sentir en approcher, découvrant désormais par le biais de la technologie tout ce que les livres de plus en plus coûteux ne pouvaient lui offrir. Treize ans, et elle était déjà parvenue à la fin de ses études, présentant une capacité si simple à l'apprentissage dans le moindre domaine que, finalement, Dénève et sa mère abandonnèrent l'idée de la suivre dans ce voyage qu'elle ne pouvait accomplir que d'elle-même, et se résignèrent simplement à se concentrer sur son éducation morale, pour lui offrir en tout instant les quelques remontrances nécessaires pour ne pas la laisser tomber dans un comportement trop orgueilleux, trop supérieur, qui finirait bien rapidement par lui porter préjudice. C'était particulier à vivre pour les deux autres femmes, qui se trouvaient tout simplement incapables de comprendre les tréfonds scientifiques dans lesquels arrivait à se jeter Luxienne, même en considérant que l'aînée des deux sœurs était elle-même une jeune femme renommée pour sa vivacité d'esprit, mais elle ne vinrent jamais à lui en vouloir de se perdre ainsi dans son besoin de découverte, et la soutinrent autant de temps qu'il le fallut, tout en s'assurant qu'elle grandisse en temps que jeune femme droite, certaine de ses compétences, mais jamais au point de réduire ses camarade Tekhanes ou ses amies pour la simple raison qu'elle était d'une intelligence largement supérieure à quiconque. Et bien heureusement, cet apprentissage d'une certaine forme d'humilité ne fut pas perçu d'une sourde oreille, offrant à la jeune femme bien d'autres vertus qu'elle ne manqua pas de chérir avec l'âge.

   Et la voilà, l'année d'après, à une place prestigieuse de chercheuse, capable de lentement trouver solutions sur solutions au milieu d'une équipe chez qui elle ne trouve ni empathie, ni aide. Ceci fut l'instant où, lentement, la jeune femme commença à comprendre que si sa mère et sa sœur était capables de lui offrir autant de douceur et de bonté malgré sa nature, ce n'était pas le cas de toutes les femmes de Tekhos, qui la voyaient bien plus souvent d'un mauvais œil, comme si elle se trouvait être une sorte de privilégiée qui obtenait tout sans jamais faire le moindre effort. C'est à cette époque qu'elle comprit ce qu'était la jalousie, et qu'elle en était la cible permanente, non par volonté, mais bien par ce qu'elle avait considéré jusqu'ici comme étant  un don merveilleux : son intelligence.

   Elle commença lentement à déprimer, puis de manière bien malheureuse, découvrit que si son intelligence lui permettait jusqu'ici de comprendre le moindre des problèmes scientifiques qui lui étaient posés, elle n'avait pour autant pas la moindre capacité de traduire les divers comportements humains, et ce même si elle essayait encore et encore d'obtenir un moyen de converser simplement avec eux. Était-ce son âge qui lui portait tristement préjudice ? Était-ce le fait que bien malgré son intelligence, il y avait des choses qu'elle n'était capable d'imaginer dans la pensée humaine, elle qui avait été tendrement couvée par une mère aimante, et une sœur fière de ses capacités ? En deux années de ce genre de questionnements, de problèmes, la pauvre jeune femme vint rapidement à perdre toutes ses capacités de recherche, obnubilée par le besoin d'être appréciée de ses comparses, d'êtres reconnue, félicitée, et lentement perdit même le goût à ses recherches, ne voulant même plus mettre les pieds à l'intérieur du laboratoire où elle avait décrochée son premier travail. Elle ne voyait plus le soleil, ne cherchait plus le réconfort de sa famille, qu'elle avait choisi de quitter il y a de cela un an, certaine qu'elle y trouverait une certaine forme de félicité, en « s'émancipant », comme le disent si bien les adultes si certains de leurs analyses... Ainsi perdue, elle ne tarda que peu à complètement se délaisser, et rester là, dans ses appartements, prétextant maladie pour ne plus avoir à rien faire, y perdant les derniers restes de son intelligence !

   Du moins jusqu'à ce qu'un léger coup de sonnette vienne la réveiller, un beau matin, ou plutôt une belle après-midi, et qu'elle vint se lever d'un pas gauche pour se diriger mollement vers l'entrée de son lieu de vie, avant de finalement parler au travers de la porte pour s'enquérir de la nature de la visite :

« Qui est-ce ?
 -  Ouvre-moi Luxienne ! »

   La voix la rappelant soudainement à l'ordre, fut semblable à un coup de marteau violent sur son crâne, le rappel immédiat qu'elle n'était pas seule au monde, et même si la personne derrière la porte semblait fortement mécontente au ton de ses paroles, elle ne put s'empêcher de se diriger lentement vers le verrou pour commencer à l'ôter, ayant très bien compris qui se trouvait derrière. L'ouverture coulissa rapidement, mû par l'ingénierie Tekhane, et libéra à la vue de la cadette le visage de sa grande sœur, qui ne semblait pour le coup pas présente pour une visite commode, l'agacement étant pleinement lisible sur son visage, et sa posture agressive exprimant tout autant son envie de secouer celle qu'elle avait tant protégé dans son enfance, comme lui offrir la plus vive paire de baffes qu'elle n'avait jamais eu l'occasion de connaître dans sa prime jeunesse. Soudainement, Luxienne ne se sentit pas que misérable, elle se sentit pour la première fois décevante aux yeux de sa famille, rien que par ce face-à-face aussi surprenant qu'imprévu, et tandis qu'elle restait là, muette, sous le regard plein d'une impérieuse colère de Dénève, sa sœur ne manqua pas de ne pas faire le moindre geste, attendant que la plus jeune soit la première à s'exprimer, afin de juger de son comportement immédiat. Cela bien sûr, la génie ne l'avait pas compris, et elle mit bien du temps avant de se permettre de rompre le lourd silence de quelques mots bien maladroits, bien peu assumés, qui lui valurent presque la sentence que son aînée avait originellement prévue, avant qu'elle ne remette cela rapidement en question, et ne fit que répondre avec un ton toujours aussi tranchant :

« Que... Que fais-tu donc là ? Il est plus de quatorze heures, ne devrais-tu pas être à ton travail ?
 -  Et toi donc ? Que je sache, cela fait deux semaines que tu n'y as pas mis les pieds, je me trompe ? Enfin, veux-tu que nous échangions sur le pas de ta porte ?
 -  Non, pardon... Rentre grande sœur, rentre, installe-toi. »
« Modifié: samedi 06 mai 2017, 16:22:06 par Shad Hoshisora »

Luxienne et Myriade

Humain(e)

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 1 jeudi 04 mai 2017, 21:01:35

Elle tremblait face à la colère de Dénève, car non seulement elle n'y était tout simplement pas habituée, mais surtout parce qu'après de nombreux mois à se perdre dans sa lente et longue dépression, la jeune femme n'avait plus vraiment de mécanisme pour se défendre moralement, et la moindre inflexion de voix avait le don de la toucher au plus profond de son être, comme un coup de poignard cruel, une sorte d'assaut qu'elle ne pouvait contrer. Toutefois, ce fut dans un silence tout autant troublant que l'aînée entra dans l'appartement sombre, laissant le soin à sa sœur de fermer la porte, et qu'elle atteignit en quelques pas le salon où elle commença par ouvrir l'intégralité des volets électriques, laissant la chaude lumière du soleil révéler l'état pitoyable dans lequel se trouvaient les lieux, accompagnant cette contemplation d'un long soupir. De son coté, la cadette s'était échappée dans la cuisine pour lancer une cafetière, espérant que la boisson aurait au moins le don d'adoucir les mœurs de son invitée, sachant très bien qu'elle appréciait d'autant plus échanger autour d'un bonne tasse de la mixture noire qu'elle en adorait le goût. Finalement, ce fut du salon qu'elle entendit sa sœur reprendre la discussion de manière particulièrement directe, ne cherchant pas à passer par quatre chemins pour lui exprimer à quel point cette situation lui était des plus énervantes, et qu'elle devrait elle-même ne pas supporter de vivre pareil enfer :

« Non mais regarde moi ce merdier. Regarde-toi Luxienne ! Ça fait combien de temps que tu n'as pas rangé les lieux, pris le temps de nettoyer... et de te nettoyer ! Qu'est-ce qu'il se passe bon sang, dis-le moi vite ou je te jure que je t'explose à la figure !
 -  Dénève je... Je ne sais pas je n'arrive juste pas à...
 -  A quoi ? Regarde-toi, merde. Tu es splendide quand tu prends soin de toi, et j'ai l'impression de faire face à une souillon. Tu alignes les mots savants comme un poète aligne les vers normalement, et en deux phrases, tout ce que je vois est un chiot blessé qui bégaie... Merde, viens là, je ne veux pas te parler au travers d'un mur ! »

   L'ordre est ultime, et la voilà qui quitte la cuisine mollement, traînant la patte, ayant presque l'impression d'être une condamnée à mort qui fait ses quelques pas en direction de l'échafaud, laissant cafetière et bonnes intentions derrière elle pour passer la porter reliant les deux pièces la tête baissée, droit vers la moquette chauffante parcourue de tâches. Devant elle, la grande sœur était tellement remontée qu'elle n'était pas loin de faire voler le moindre des meubles qui se trouvaient dans la pièce, si elle n'avait pas encore la conscience de se dire qu'elle ne pouvait le faire au risque de briser l'intégralité de la vaisselle sale qui s'y trouvait exposée, cela ferait déjà sûrement un moment que l'intégralité des lieux aurait connu sa colère. Mais non, elle ne reste que statique et dépitée devant l'état de sa petite sœur, tellement abattue qu'elle ne sait même plus si la colère est de mise. Mais comment peut-elle savoir comment agir envers sa cadette si celle-ci reste ainsi mutique, passive, ne répondant qu'à ses ordres sans jamais se laisser le droit de s'exprimer comme le ferait une pauvre petite bête domestique peureuse. Voilà, c'est exactement ça qui la met en colère, qui est en train de l'insupporter : Luxienne est une jeune femme fantastique, qui a toute valeur à s'exprimer et à offrir aux autres le tout de son intelligence, et de la voir ainsi incapable de se défendre, se contentant de se taire et de baisser la tête, ça la met hors d'elle. Elle ne voulait pas sortir de sa carapace ? Très bien, Dénève allait la faire craquer, la pousser à bout jusqu'à ce qu'elle lâche enfin ce qu'elle avait au plus profond d'elle :

« Putain mais tu vas causer oui ? Allez, lève la tête, arrête de faire la petite gosse apeurée, regarde-moi, et réponds moi ! Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu sais pas réfléchir ? Es-tu une sotte qui ne sait quoi dire ? Bouge-toi, je veux avoir une réponse !
 -  Dénève je... Je...
 -  Arrête de bégayer pour l'amour de Dieu ! Parle clairement !
 -  Pardon je... Eh bien je...
 -  SOIS CLAIRE OU JE T'EN COLLE DEUX EN PLEINE TRONCHE !
 -  Ils me haïssent ! Personne ne veut travailler avec moi, personne ne veut même me parler ! Je me sens seule, inutile, je n'arrive plus à faire quoi que ce soit ! Dénève j'en peux plus, je peux pas aller travailler sans me faire écraser et insulter, et finalement je ne parviens même pas à progresser sur mes recherches... je... Je... Je suis fatigué de tenter de leur parler sans résultat, de me faire envoyer chier à chaque tentative pour avoir deux mots avec le moindre d'entre eux... C'est... C'est trop dur...

   La jeune femme tomba en larmes, craqua en effet face à son aînée et commença à se vider de tout ce qu'elle avait sur le cœur de manière aussi pitoyable qu'honnête, laissant l'aînée contempler le triste résultat de ses provocations les plus directes, avec un léger air satisfait sur ses lèvres, contente dans le fond que sa cadette ait enfin réussi à se libérer de ce poids qu'elle avait sur le cœur. Sans attendre, alors que la petite forme encore adolescente de sa sœur était en train de tressauter mollement, portée par les soubresauts de sa tristesse, et les hoquets pathétiques dus à ses larmoiements, ce fut avec une tendresse légère, et un mouvement relativement délicat que Dénève vint à quérir sa petit protégée entre ses bras, et la serrer fortement contre sa poitrine. Alors voilà ce qui l'avait tant et tant laissée à l'abandon, voilà ce qui avait provoqué cette fuite dans ses appartements ? C'est vrai que Luxienne était loin d'être douée pour ce qui était du relationnel, mais pour le coup, l'aînée n'avait jamais imaginé qu'elle puisse avoir autant de soucis pour de simple échanges avec ses collèges de travail, ce qui, désormais, paraissait bien plus plausible maintenant qu'elle s'était enfin exprimée, et qui allait enfin lui permettre d'agir auprès de sa chère petite sœur pour lui offrir un peu de réconfort, et sûrement les conseils qui lui permettront de reprendre du bon pied son travail. Mais avant cela, elles restèrent immobiles, l'une contre l'autre, la cadette laissant ses larmes s'échapper en un flot ininterrompu, l'intégralité de son malheur s'échappant en des pleurs qui semblaient intarissables.

   Il lui fallut plus d'une demi-heure, trente minutes de geignements et de tremblements incontrôlés pour que finalement elle se remette un peu de son état, et qu'elle puisse se sentir enfin la capacité de quitter les bras de sa chère, si chère sœur, et de la regarder avec l'un des airs les plus terriblement perdus que Dénève avait eu l'occasion de contempler. Elle allait avoir besoin d'aide, de s'échapper un moment, de partir un peu de Tekhos pour se remettre de ses émotions, et pour l'occasion, la grande sœur avait déjà en tête quelques idées, si bien qu'elle attendit que sa cadette se sépare d'elle, et se dirige mollement vers le canapé pour s'y asseoir, afin de libérer ses jambes molles de la faiblesse due à l'émotion. Ceci fait, elle se dirigea tranquillement vers le premier moniteur de la pièce, et l'alluma, afin de laisser l’électronique se mettre en marche, tandis qu'elle se tourna doucement vers sa chère Luxienne, et lui adressa un doux sourire, désormais sortie de sa colère, pour enfin chercher des solutions qui permettront à la jeune fille d'enfin se permettre de progresser sans avoir à sentir le défi insurmontable de vivre avec autrui, de mettre en place un projet commun où elle ne parvenait à trouver sa place :

« Luxienne, dis-moi. Est-ce que tu penses que tu serais capable de te débrouiller seule pour travailler ? De trouver de toi-même les solutions ?
 -  Hum... S-Sûrement ? Je ne sais plus trop désormais, mais je m'en crois capable... »

   La grande sœur opina légèrement du chef, puis se tourna vers l'écran et ouvrit quelques pages net, avant de finalement trouver ce qu'elle cherchait, instant où elle tourna le moniteur vers sa chère petite sœur, lui présentant ce qu'elle venait tout juste de chercher, avant de reprendre la parole. Sur l'image holographique terne se trouvait une annonce pour une maisonnée, à des lieux de Tekhos Metropolis, une sorte de domaine de recueil qui se trouvait loin, très loin dans les montagnes voisines, dans les cimes de ce territoire quasiment vide, et avec tout cela était annoncé un paiement, ainsi que plusieurs petits détails pour qui serait assez proche pour les lire. Ce fut d'ailleurs un peu intriguée que la jeune fille observa cela, puis qu'elle leva les yeux avec une grande lenteur sur le visage fier de l'aînée, qui elle ne doutait pas un instant de ce qu'elle se préparait à lui annoncer. D'ailleurs, elle ne tarda nullement, parce que voyant que sa sœur allait se mettre à lui poser des questions sur le pourquoi de cette mise en scène, elle se racla la gorge de manière bien rapide, une main devant la bouche, puis commença à lui offrir le détail de son plan d'une voix quasiment universitaire, comme si elle donnait là à Luxienne un cours tout bête. Et bien sûr, l'adolescente vint à se taire respectueusement, ne faisant rien d'autre que d'ouvrir grand ses esgourdes pour ne pas manquer le moindre détail de ce dont son aînée allait l'informer, non sans bien sur se demander ce que l'adulte avait en tête pour sa pauvre petite personne en pleine dépression :

« Écoute petite sœur. On va présenter ta démission à l'institut dans lequel tu bosses, tu y perds ton temps. Pendant ce temps-là, je vais discuter avec la communauté pour te valider un permis de chercheuse autonome, afin que tu sois payée, et je vais te financer un petit voyage pour que tu ailles te reposer là-bas. Je veux que tu y restes le temps que tu as besoin, mais à une condition : quand tu reviendras, ce sera avec une idée révolutionnaire, et réalisable, et je veux que tu montres à l'intégralité du monde scientifique que tu n'es pas qu'une petite adolescente perdue, mais bien la plus grande génie de ce monde ! Compris ? »

   Un instant d'hésitation, une fraction de doute... Puis, lentement Luxienne acquiesça lentement.

« D'accord, faisons ça.
 -  Fantastique. »

. . . . .

   Deux mois plus tard, elle était là, dans cette zone enneigée, et bon sang ce qu'elle pouvait grelotter dans ce froid hivernal. Elle n'avait pas prévu qu'il y fasse si froid pour être honnête, elle savait bien que ce genre de domaine était particulièrement rude, oui, mais elle n'avait jamais présupposé qu'elle aurait autant de mal à s'habituer au changement si soudain de température, comme quoi elle pouvait toujours être surprise par le fonctionnement du monde, même après en avoir compris une grande partie des mécanismes. Elle venait de sortir de la voiture qui leur avait permis d'atteindre les lieux si lointains de la capitale Tekhane, et avec elle se trouvait les deux tenancières du domaine,  un joli couple de femmes âgées qui ne manquaient pas de lui offrir à chaque croisement de regards un chaleureux sourire au demeurant des plus réconfortant, pour être parfaitement honnête. Elle les trouvait sympathiques, elle les aimait bien, et si elle ne se sentait pas si mal à l'aise en compagnie d'autrui, elle aurait sûrement choisi depuis un moment de leur faire la conversation, mais avait peur de tout gâcher par quelques termes maladroits, comme elle en avait tant l'habitude. Pour autant, elles l'avaient menée jusqu'à l'impressionnant chalet, qui dominait les lieux, et c'est avec un léger soulagement qu'elle observa la haute bicoque en bois, y trouvant un charme bien différent des hautes tours de fer de Tekhos Metropolis. Encore une fois, un sourire de la tenancière, alors qu'elle vint lentement lui offrir la clé de la bâtisse, puis elle vint à l'accompagner tranquillement jusqu'à l'entrée, ayant choisi de lui faire une rapide visite des lieux, afin qu'elle n'ait pas à chercher les différents outils qui lui seront nécessaires pour vivre durant les prochaines semaines.

   La porte ouverte, le tour des lieux débuta notamment avec le grand salon d'entrée, un feu puissant permettant à la belle maisonnée d'être délicieusement chauffée, grâce au rayonnement de l'âtre où il était en train de brûler, puis le duo continua tranquillement la visite pour permettre à la jeune Luxienne de contempler les chambres, la salle à manger, les cuisines, ou encore les endroits plus scientifiques, comme la cave, dont l'aspect technologique contrastait drastiquement avec la beauté ancienne des lieux. Ce n'était pas gênant, après tout elle était une Tekhane, et elle savait qu'en tant que chercheuse autodidacte, elle allait avoir besoin d'un domaine de recherche, d'approfondissement, afin de pouvoir continuer encore un moment ses recherches une fois qu'elle aurait su reposer un tant soit peu son esprit et son âme, y trouvant les ressources nécessaires pour se remettre à un travail des plus précis et efficace. Mais pour l'instant, elle continua avec beaucoup de respect et de calme le tour du chalet, observant autant le vieux bois que l'ancienne décoration, se demandant bien en quelle occasion quiconque avait pu avoir l'idée de venir construire un lieu pareil dans un tel recoin montagneux, avant de se laisser tout simplement charmer par ce petit bout d'antiquité architecturale, et de simplement emboîter le pas de la tenancière qui semblait trouver fort plaisir en la compagnie de l'adolescente. Peut-être était-ce la différence d'âge, peut-être était-ce autrement le simple fait d'une nouvelle compagnie ? En tout cas, elle ne manqua pas de continuer sa présentation fidèlement, avant qu'elles ne reviennent tranquillement devant l'entrée, et que le passage des clés se fasse dans le plus grand calme, et sûrement un autre surplus d'amabilité.

« Pour les courses, ne vous en faites pas, il y a un service permanent qui se fait par demande automatisée, vous n'aurez donc pas à faire vos propres achats, à moins que vous ne souhaitiez acquérir un aliment particulier, en ce cas vous n'aurez qu'à envoyer une demande, on le fera livrer.
 -  Merci beaucoup, et pour le paiement eh bien...
 -  Pas de crainte pour cela, votre sœur a payé pour plus d'une année déjà, donc profitez simplement des lieux. S'il y a la moindre malfonction n'hésitez pas à nous contacter.
 -  Je n'y manquerais pas, merci encore !
 -  Mais de rien, à bientôt, faites attention à vous jeune fille. »

   Elle ne manqua pas d'acquiescer tandis que la femme quitta tranquillement les lieux, la laissant donc seule dans cette gigantesque maisonnée, un peu perdue, un peu craintive, mais déterminée à se retrouver, et surtout, à ne pas décevoir sa chère grande sœur, qu'elle ne puisse la voir retourner chez elles, à la capitale, avec le regret dans les yeux, et la honte dans l'âme. Tranquillement, elle alla donc se positionner tout prêt du feu, et s'accroupit pour goûter à la divine chaleur qui s'y trouvait, sentant enfin un peu de réconfort dans ses muscles qui commençaient sérieusement à geindre du contact prolongé avec la neige et la glace extérieure, laissant ses pensées se perdre dans quelques constats des plus agréables, notamment l'un qui ne sut que lui offrir un doux sourire sur les lèvres alors qu'il venait tout juste d'apparaître dans sa petite tête : elle avait pu discuter simplement avec cette femme, elle ne s'était pas moquée d'elle, ni ne l'avait rejetée de par ses compétences. Sûrement n'en avait-elle même aucune connaissance, peut-être était-ce cela qui lui avait permis de rester aussi simple, aussi directe envers elle, sans jamais cacher de son amabilité et de sa douceur ? Elle le découvrirait sûrement en temps voulu, mais l'idée germait dans son esprit : peut-être qu'il fallait qu'elle cache ses capacités pour aller mieux avec autrui, pour pouvoir leur parler sans détour ? Elle allait essayer, et peut-être que l'avenir viendrait lui dire s'il ne s'agit que de vaines suppositions, ou si elle venait de toucher là le secret de l'art de la communication entre les êtres humains : ne pas chercher à faire automatiquement preuve de sa supériorité, mais d'être tout simplement égale aux autres...

   Et pendant ce temps-là, au dehors, une voiture redémarrait tranquillement, emportant le couple de Tekhanes avec un léger vrombissement plaisant dans l'épaisse neige, alors que celle qui venait de faire la visite vint à se permettre un petit commentaire amusé, taquin, mais surtout curieux, face à un événement qu'elle n'avait tout simplement pas compris en entrant dans le haut chalet qu'elles louaient :

« Dis-moi, quand est-ce que tu as eu le temps aujourd'hui d'aller faire un feu dans la cheminée ? Surtout qu'il était fort, tu n'as pas dû y aller de main morte avec le bois, ma chérie !
 -  Un feu ? Hum, je ne me souviens plus, tu sais, avec l'âge ma mémoire faiblit, sûrement ce matin, un peu avant qu'elle arrive.
 -  Hum peut-être. Tu es tellement prévenante mon amour.
 -  Oh arrête cela voyons, flatteuse ! »

. . . . .

   L'installation de la demoiselle prit plusieurs jours, elle dut même attendre quelques semaines au final pour obtenir le tout de son équipement, autant dans les machines de calcul que pour les échantillons les plus sensibles dont elle avait fait la commande, ce qui avait passablement ralenti son envie de recherche, mais lui avait octroyé en revanche le plein temps dont elle avait besoin pour se sentir un peu mieux, pour se plaire dans son nouvel environnement, et surtout pour mettre un peu d'ordre dans sa pensée tant et tant anarchique depuis les tristes événements de sa vie de citoyenne Tekhane. Découvrant au passage le plaisir de converser avec d'autres personnes, notamment par le biais de ses locatrices qu'elle pouvait passer voir de temps à autre, elle eut aussi le grand plaisir de se laisser aller à de longues discussions, et à un attachement somme toute des plus surprenant pour elle, qui n'avait jamais été aussi proche de qui que ce soit, hormis des deux autres femmes de sa famille. La découverte de ce petit couple lui offrit d'ailleurs le droit à de nombreux questionnements, autant sur la nature d'une relation amoureuse, qu'elle n'avait guère la capacité de comprendre encore, mais qui l'intriguait sérieusement, mais surtout sur le fait que deux femmes puissent ainsi vivre une pleine harmonie, année après année, loin de tout, commençant à l'obliger à se poser quelques questions vis-à-vis de ses propres attentes dans la vie future. Pourrait-elle s'éloigner de Tekhos pour vivre dans le calme ? Aurait-elle besoin d'un peu plus de contact, de reconnaissance ? Elle n'avait pas encore les réponses, mais la découverte de ces questionnements fut un premier pas pour la jeune chercheuse, un salvateur premier pas !

   En tout cas, Luxienne put au moins profiter des lieux et du temps qui lui était alloué, et ne manqua guère d'en faire le plus grand des usages, car si elle n'était pas encore forcément dans l'esprit de se mettre au travail, chose compréhensible au vu de ses difficultés à trouver un moyen de se concentrer sur les différentes études qu'elle pouvait mener, elle préféra en profiter pour trier un peu l'ordre de ces dernières, essayant tant bien que mal de trouver l'unique sujet qui ferait autant son plaisir que sa gloire. Mais bon, il n'y avait rien dans les projets d'androïdisation qui pouvait se trouver intéressant à son regard, rien non plus dans les nouvelles recherches chimiques, qui se trouvaient actuellement passablement stagnantes à cause du problème formien, sans parler des différentes propositions d'amélioration technologique, où la progression constante ne saurait être influencée par la présence de la génie. Non, aucun de ces sujets ne trouvait grâce aux yeux de la demoiselle, et plus elle s'octroyait du temps pour y réfléchir, moins elle avait envie de s'attaquer à ce genre de travaux, ayant à chaque fois une petite voix au fond de son cœur lui exprimant à quel point elle se trouverait inutile en entamant une observation précise des données qui lui avaient été confiées, pour finalement trouver la réponse en quelques jours, et recommencer à se faire huer par les quelques personnes dont elle viendrait annihiler des mois, peut-être même des années de recherches complètes et frustrantes. Alors Luxienne tentait tant bien que mal de découvrir son propre sujet, crayonnant des feuilles et des feuilles d'idées plus ou moins folles en espérant avoir le droit à un éclair de génie, et ces dernières finissaient toujours au creux des flammes de la cheminées, laissant la poussière et le charbon accueillir ses dernières pensées.

   Chaque soir, en se couchant, la jeune femme pensait à cette sœur qui avait fait tant d'efforts pour lui offrir le lieu idéal afin qu'elle puisse de nouveau se concentrer sur ses recherches. Chaque soir, elle repensait à leur dernière discussion, et commençait à se demander si son aînée n'avait pas eu le malheur de placer en elle un espoir trop grand, trop important, qu'elle ne pouvait pas encore réussir à justifier au vu de son état mental. Chaque soir, quand elle fermait les yeux sur son oreiller, et qu'elle se laissait aller à un repos souverain, elle se demandait bien comment elle allait faire pour pouvoir s'en sortir avec cette promesse qu'elle avait faite, celle de revenir avec l'idée du millénaire, celle qui permettrait de tout changer pour le peuple Tekhan, mais finalement se laissait emportée par les souvenirs et les rêves, disparaissant dès lors dans quelque monde merveilleux dont personne ne pouvait la tirer...

   Sauf cette nuit là.

« Aaaaaaah ! »

   Elle ouvrit les yeux. Sur le cadran, plus de deux heures de la matinée, elle avait encore envie de dormir, et surtout ses cheveux étaient tellement en pétard qu'elle avait eu bien du mal à regarder l'horloge électronique au travers des rideaux en désordre de sa chevelure rebelle, l'obligeant finalement à se redresser, et de couper définitivement court à son repos, si le bruit qu'elle avait entendu en bas n'avait pas été suffisant pour justifier son réveil. Elle avait entendu quelqu'un hurler, en bas, et si elle avait eu le don de reconnaître l'une des voix de ses deux propriétaires, elle aurait sûrement sauté du lit pour aller lui offrir une aide des plus appropriées, mais ce qui ce soir la plongeait dans l’effroi, c'est que la voix qui se trouvait aux étages inférieurs n'avait rien à voir avec celles des deux Tekhanes ! Trop grave, trop nasillarde. Ramenant les couettes sur elle, un peu craintive, Luxienne était dans son sommeil quand elle avait entendu ce son, si bien que la jeune Tekhane avait été bien loin de pouvoir en comprendre toute la portée : était-ce un cri de douleur, ou l'expression d'une hargne ? Elle ne savait guère, et son esprit tournait à toute vitesse, l'obligeant non seulement à toujours rester éveillée, mais surtout à chercher le courage de quitter ses draps, et s'éloigner du confort chaleureux de ses couettes pour se mettre en marche, en direction de la sortie, afin de découvrir ce qu'il se tramait dans le chalet. Elle espérait sincèrement ne pas avoir affaire à quelques brigands, quelques voleuses malintentionnées, les renégats étant rares dans le pays, mais d'autant plus dangereux du coup, car bien moins prompts à l'écoute et à la camaraderie...

   Mais elle n'avait pas vraiment le choix en tout cas, elle se devait d'aller à la rencontre de cette intrusion. Se mordillant la lèvre dans un simple signe de stress, elle quitta les couettes dans une absolue lenteur, essayant de poser son pied légèrement sur le bois du parquet pour ne pas produire le moindre grincement, et se dirigea tout de même vers le placard avant tout pour quérir au moins un peignoir qui saurait cacher sa nudité. Difficile de l'avouer encore, mais elle avait pris beaucoup de formes ces derniers mois, elle avait atteint la fin de sa croissance, et les quelques tenues qu'elle avait emporté commençaient à être un brin... Petites pour le reste de sa personne, lui écrasant bien souvent la poitrine, ou affichant son ventre sur quelques centimètres. Alors le peignoir était sa seule option pour cacher réellement son corps, sans parler de la rapidité avec laquelle elle pouvait l'enfiler, puis cherchant dans la poche d'une de ses vestes, elle vint à quérir le Lance-dard qu'elle avait emporté, au cas où, petit engin des plus efficace et capable de transpercer de nombreuses couches de vêtements afin de s'assurer d'administrer la dose de calmant suffisant pour se faire s'écrouler la moindre menace. Elle le dissimula dans sa paume, sans l'activer pour ne pas risquer de se planter l'aiguille dans un mouvement sot, et sortit lentement de sa chambre, enfin, la porte ouverte lui offrant la possibilité d'entendre quelques gémissements plaintifs plus bas, ceux de quelqu'un qui retient difficilement ses larmes, et essaye tant bien que mal de ne pas faire plus de bruit. Si c'était une cambrioleuse, ou une renégate, elle n'était décidément pas très douée !

   Ses pas étaient les plus légers possibles, les plus calmes, elle ne voulait pas se faire entendre à cause d'une petite erreur de mouvement, et espérait pouvoir s'approcher rapidement de ce potentiel danger pour pouvoir agir si elle y était poussée. Malheureusement, son moyen de défense, bien caché à l'intérieur de sa main, n'avait pas une grande portée si elle voulait qu'il reste efficace, et il était nécessaire qu'elle soit au maximum à une dizaine de mètres de celle qui geignait pour considérer avoir la moindre chance de mettre cette intruse hors d'état de nuire, alors elle avait tout à gagner en se faisant la plus discrète possible, au lieu de gueuler à l'intérieur de la maisonnée. Un pied après l'autre, descendant les marches une par une, en essayant toujours de ne pas faire crisser le vieux bois du chalet, elle commençait à voir la légère lumière qui s'échappait de la cuisine, se permettant ainsi de découvrir la position de sa potentielle ennemie, l'amenant à raffermir sa poigne sur le Lance-dard avec une certaine volonté de se rassurer, avant de finalement atteindre le sol du rez-de-chaussée. Qu'est-ce qu'elle allait faire ? Bondir dans la pièce pour prendre son attaquante par surprise ? Essayer une approche plus calme et attendre que celle-ci cherche à quitter la pièce pour finalement la prendre à son propre jeu ? Le fait est qu'elle était toujours capable d'entendre le souffle lourd de cette personne, ses tentatives de calmer sûrement la douleur par quelques vains exercices de respiration, alors peut-être était-il plus indiqué qu'elle en profite pour faire quelques approches supplémentaires ? Oui, elle ne devait pas laisser la peur lui indiquer la solution de facilité, elle devait profiter de l'état de l'intruse pour s'y attaquer !

   Elle n'attendit plus, laissa la discrétion de côté, et courut en direction de la pièce légèrement lumineuse pour s'y jeter avec vigueur, connaissant désormais bien les lieux, et se plaçant ainsi de manière à ce que la table soit entre elle et celle qui n'avait rien à faire dans le chalet, mais la soudaine surprise laissa la scientifique en herbe cesser son mouvement dès qu'elle parvint à se faufiler dans la pièce, les yeux grand ouverts...

   Devant elle, à coté du réfrigérateur, se tenant une main en sang à cause de nombreux débris d'assiette tranchants à souhait, se trouvait non pas un membre du sexe féminin, mais un homme, un vieillard même, aux cheveux ébouriffés, à l'air malade, qui non content de se tenir la main de manière bien inutile, laissait de grosses larmes couler sur son visage ridé. Elle en était tellement stupéfaite qu'elle n'en remarqua même pas que celui-ci, à l'heure actuelle, portait une épaisse blouse comme celles qu'elle pouvait elle-même arborer quand elle se trouvait dans les labos de Tekhos Metropolis, mais surtout elle put bien remarquer que ce misérable, s'il se trouvait en effet chez elle, et au beau milieu d'un pays où son simple sexe pouvait lui valoir bien des soucis, n'avait pas la moindre condition physique d'un renégat, avec ses membres malingres, et ses joues creusées. Et tout comme la scientifique avait eu le don de le remarquer, ce fut réciproquement le même résultat pour le vieillard, qui n'ayant pas loupé les sons du déplacement de Luxienne, se détourna lentement de la lumière du réfrigérateur pour la regarder, les yeux rouges, et les lèvres mordues dans un fin espoir de ne pas faire plus de bruit qu'il n'en avait déjà fait. Le silence s'était installé, l'un comme l'autre des partis semblait attendre l'explication de cette rencontre presque incohérente, au vu des événements, mais surtout, le temps s'étant arrêté, l'une se demandait comment elle devait réagir face à ce bonhomme pitoyable, et l'autre ce qu'il allait faire maintenant qu'il avait été repéré, après tant de temps à se dissimuler. Et finalement, ce fut à la jeune femme en peignoir de lever la voix, son arme toujours en main, au cas où son intrus se metrait soudainement à agir de manière belliqueuse !

« Qu-Qui êtes vous !? Que faites-vous ici !?
 -  P-pardon je... je... Je m'appelle Hatashi Kirosu. Je vous en prie, je me suis juste caché ici... je pensais la maison abandonnée... Je ne savais pas qu'elle vous appartenait...
 -  Vous pensiez que... Depuis combien de temps vous trouvez vous ici ?
 -  Quelques mois... Je suis apparu dans ces montagnes, sans savoir pourquoi... J'ai cherché le premier endroit où me protéger du froid... Et quand vous êtes arrivée, je n'osais faire preuve de ma présence... Voyez j'ai... J'ai vu vos émissions et...
 -  C'est bon, c'est bon, j'ai compris. »

   L'homme se tut. En effet, s'il avait vu les quelques émissions Tekhanes, il avait dû vite comprendre qu'il n'était pas foncièrement le bienvenu dans ce pays, où les femmes n'ont que peu tardé à traiter le cas masculin pour ce qu'il était, à savoir une nuisance, incapable de maîtriser ses pulsions, et qui ainsi ne devait pas se voir accordé les privilèges de la citoyenneté, ou le confort que l'on offre naturellement à celles qui savent réfléchir sans s'en laisser conter par leur instinct. De là, ayant compris son statut de criminel, il avait préféré rester dissimulé dans le chalet, surtout qu'avec le système d'approvisionnement naturel du réfrigérateur, et les stocks de bois, il devait parfaitement avoir de quoi se chauffer, et manger, sans jamais craindre de se faire attraper pour quelques raisons... Et puis bien sûr, voilà qu'elle était arrivée en louant le chalet, et ainsi avait eu le don de perturber le train-train de l'homme, l'obligeant à se cacher de jour quand elle était active, tandis que lui restait debout la nuit, profitant de son repos, pour manger quelques morceaux. Elle se disait bien que, parfois, certains des aliments qu'elle commandait n'arrivait pas à bon port, mais elle ne s'était pour autant jamais doutée qu'un autre qu'elle en faisait son repas, et en profitait plus ou moins pour survivre malgré sa présence. Comment avait-elle fait pour ne pas remarquer qu'une autre présence que la sienne se trouvait dans les environs, franchement ? Luxienne n'en avait guère idée, mais rien que pour cela, elle s'en voulait un peu, se jugeant presque reine de la sottise par ce biais ! Mais bon, il y avait une question désormais plus importante que son aveuglement, ou son manque de lucidité : qu'allait-elle faire de lui ?

   Parce que oui, elle  avait beau le regarder sous tous les angles, elle ne voyait en lui rien qui ne puisse fondamentalement lui porter préjudice de quelque manière, ni même être le moindre des dangers, surtout qu'il semblait bien plus apeuré par sa présence qu'elle-même l'était de la sienne ! L'homme tremblait un peu, et si on ôtait l'idée que les quelques soubresauts de son corps pouvaient provenir des blessures qu'il s'était maladroitement infligé, il ne manquait guère le fait que l'idée d'être emportée par quelques-unes de ces Tekhanes un peu particulières, un peu fortes d'esprit, et prêtes à ne pas laisser la moindre seconde chance à un membre de sexe masculin, était foncièrement une des possibilités de la terreur de cet homme, et du fait qu'il s'était caché auparavant sans jamais tenter de s'en prendre à elle, malgré son sommeil. Peut-être devait-elle simplement choisir de lui faire confiance ? Ce n'était pas simple, après tout il y avait là toute une éducation de sa part pour lui faire comprendre que l'entité masculine était dangereuse, viciée, vorace, mais pour autant est-ce que l'intégralité de l'humanité qu'elle avait connue n'avait jamais eu la moindre once de délicatesse envers elle, hormis sa famille ? En quoi pourrait-il être différent de ces camarade de travail qui l'avaient proprement abandonnée, puis lynchée, rependant sur elle les pires rumeurs et les plus innommables marques de vice morale ? Non, pour être tout à fait honnête, elle comprenait ce que ce vieil homme ressentait dans l'instant, et rien que pour cela, elle ne voulait tout simplement pas lui faire du mal. Aussi étrange cela puisse être pour une Tekhane... Elle voulait en savoir plus sur lui, et surtout, lui permettre d'enfin ne pas se sentir mal à l'idée de rencontrer une des femmes de ce peuple matriarcale et sexiste :

« Relevez-vous donc. Prenez une chaise aussi, et maintenez votre plaie, je vais prendre des pansements. Je m'appelle Luxienne au fait, autant que nous nous connaissions un brin si je vous héberge. »

. . . . .

   La rencontre de cet homme fut une bouffée d'air frais pour la jeune femme, en bien des sens. Choisissant de l'accueillir, et ne l'invitant à se dissimuler que lors des quelques éventuels passages du couple qui lui avait loué la bâtisse, elle commença lentement à entrer dans une dynamique de longues discussions à ses côtés, d'échanges, de banalités sincères et agréables où l'un comme l'autre purent se permettre de comprendre un peu mieux l'univers dont chacun provenait, et la manière dont ils comprenaient dès lors les mœurs de leur interlocuteur. Kirosu, ou plus simplement Kilosse dans sa langue, étant donné que la prononciation et l'écriture différaient selon les standards Tekhans, était tout comme elle un homme de science, qui à l'occasion de travaux semblait avoir connu une incohérence, un loupé, qui l'avait finalement envoyé au beau milieu des terres enneigées des environs, l'obligeant à trouver rapidement l'abri qui le laisserait en vie et capable de se renseigner sur les erreurs qui l'avaient mené jusqu'ici. Son lieu de vie originel s'appelait Terre, et s'il exprimait assez simplement que son monde se trouvait bien différent du sien, notamment sur le plan de la position des sexes, les hommes ayant encore chez lui des avantages par rapport aux femmes malgré de nombreuses tentatives de tous de réduire ces inégalités, il avait eu le temps d'observer les astres, et avait remarqué que si ceux-ci se trouvaient en des emplacements tronqués, ce n'était pas pour autant qu'il ne retrouvait pas de nombreuses formes astronomiques remarquables qui lui offraient une théorie intéressante : Terra devait se trouver dans la même composition astrale que la Terre, sûrement bien éloignée, mais présente.

   Et en retour, Luxienne lui exprima ce qu'elle savait de Terra, de ses voisins, de ses conflits, lui montrant notamment la différence entre son pays natale, Tekhos, et les autres pays l'environnant, précisant non seulement leur retard technologique, mais aussi à quel point ceux-ci semblaient être proches de ce que le scientifique exprimait comme étant le Moyen-Âge dans son monde d'origine. Finalement ce furent de nombreuses journées d'échange, un confort renouvelé pour l'homme perdu, et surtout la première véritable occasion de Luxienne de se défaire de son manque d'aisance en compagnie d'autrui, découvrant autant son talent pour l'échange, pour l'expression de ses connaissances, mais surtout, le fait qu'il était nécessaire qu'elle explique, qu'elle détaille, qu'elle offre à ceux avec qui elle se trouvait l'intégralité de son savoir afin de leur en offrir le sens. Plus de réponses toutes faites, mais des heures et des heures de présentation afin de s'assurer que l'autre parti puisse comprendre l'intégralité de son propos. Et cela fonctionna, cela lui permit non seulement de voir que le vieil homme ne rejetait pas sa compagnie, mais surtout qu'étant à l'écoute, il pouvait lui-même se permettre de développer certains points de ses théories, de ses observations, de ses travaux, au point même où ils purent finalement se tourner vers des sujets plus complexes, plus profonds, plus sinueux : les travaux de la jeune femme, qui trouvèrent enfin une ligne directive, et un moyen pour que l'homme, malgré le manque clair de ses outils de recherche, puisse rentrer chez lui sans craindre de faire face aux Tekhanes, et à leur prévisible manque de tolérance.

   Les deux penseurs avaient trouvé quoi faire, et les prochains mois furent longs, intenses, mais pour l'un comme pour l'autre, une source infinie de satisfaction, la chercheuse trouvant de l'affection et de la reconnaissance en cette compagnie, et le terrien de l'espoir.

   Et le point commun fut que tous deux, pour poursuivre leur travaux, se mirent à regarder les étoiles.


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Chapitre 2 : Au-delà d'un projet catastrophe.


   La réunion avait été précipitée, pour ne pas dire carrément poussée en tête de liste des actions que se devait d'accomplir la compagnie pour sa survie, et ce sans que personne ne comprenne pourquoi, n'ayant pas du tout été préparés à un tel revirement de situation, et un tel chamboulement de leurs horaires, voyant soudainement leur emploi du temps s'alourdir de plus de deux heures d'échange en fin de soirée, sous l'ordre du patron. Enfin, pour quelques-uns seulement, la grande majorité du groupe se trouvait bien éloignée de tels actions de la part de la grande chef de direction, mais en revanche les principaux dirigeants des différentes études manquèrent de peu d'exprimer un certain mécontentement, même si aucun ne se le permit en imaginant à quel point la colère de leur supérieure saurait se faire implacable si l'on venait à contester ses ordres. Alors les heures filèrent rapidement, chacun se demandant bien pourquoi une telle rencontre avait été mise en place, quel genre d'idées farfelues étaient venues en tête d'Alista Marovik, grande directrice de la filiale de production améliorée des technologies de guerre Tekhane, mais chaque supposition finissant bien rapidement par faire frémir les différentes hauts-placées de la compagnie, finissant de les dégoûter de la future rencontre qu'elles allaient devoir mettre en place dans la soirée. Mais, étant donné que rien ne semblait leur être offert pour trouver un moyen de se défiler au dernier moment pour trouver le confort d'un chez-soi agréable, chacune dut traîner les pieds dès la sonnerie de fin de journée, et prendre l'ascenseur central, se dirigeant vers le quatorzième étage, tout en échangeant de manière plus ou moins aisée sur les différents, mais probables, sujets de discussion qui allaient être engagés !

« Vous croyez qu'elle va encore gueuler sur les chiffres de la compagnie ?
 -  J'en doute. L'avantage avec l'attaque formienne, c'est que l'armée a toujours besoin d'approvisionnement en armes, ou en chair à canon. Résultat, les chiffres sont bons.
 -  Pour autant, ça ne l'empêche pas de se mettre en colère de temps à autre. Je ne sais jamais ce qui lui passe par la tête.
 -  Personnellement, je crois qu'elle aura un nouveau projet à nous sortir. J'ai entendu parler d'une découverte étrange par un groupe de soldates il y a peu, c'est peut-être lié ?
 -  La rumeur sur cette excavation qui avait été abandonnée ? Voyons, vous ne pouvez pas croire pareilles foutaises, tout le monde se doute qu'il s'agit simplement d'une manière de légitimer un peu les forces armées, alors que nous n'arrivons pas à progresser face aux formiens. Un espoir pour la masse...
 -  C'est possible. Je ne saurais exposer un avis sur le sujet. Pour moi, tout est bon à prendre, s'il y a possibilité de mettre en place quelques recherches à ce propos. »

   Le tintement de l'ascenseur vint à faire cesser la moindre parole, le silence s'installant alors que les quatre femmes quittèrent enfin l'habitacle de fer pour se diriger rapidement vers la grande salle de réunion, dossiers à la main, et inquiétude sur le visage, cherchant encore quel genre de sujet avait bien pu les réunir toutes en cette soirée. Au moins, à se déplacer dans les riches couloirs du quatorzième, elles avaient un peu moins d'appréhension, la moquette rouge et or qui se trouvait sous leurs pieds illuminant les lieux d'une teinte luxueuse tandis que les lustres offraient à chacune ce scintillement chatoyant, cette bénédiction silencieuse du domaine de l'armement et de la guerre, leur montrant une fois encore que si, pour la grande majorité du monde, les affrontements et le sang étaient des calamités, il se trouvait toujours des personnes qui en tiraient profit. Et dans ce genre de cas, mieux valait être ce genre de personnes, histoire de pouvoir éponger larmes et souffrances par le biais de quelques aisances monétaires des plus agréables. Et puis, en toute honnêteté, il n'y avait pas non plus de meilleur outil pour soutenir la recherche que le besoin d'éliminer un ennemi national, rendant les aides bien plus aisées à quérir, alors pourquoi s'empêcheraient-elles de profiter d'une telle mine d'or pour de simples raisons morales ? Non, tandis que chacune passait les portes qui menaient au lieu de leur rendez-vous, elles savaient peut-être que beaucoup les jugeraient immorales, mais elles n'en avaient tout simplement que faire. Seule comptait la réussite, et le luxe qui y était affilié. Et leur dirigeante, assise déjà en bout de table, était parfaitement d'accord avec un tel dogme.

« Bonjour à toutes. Je vous en prie, asseyez-vous, nous allons avoir besoin de discuter sur un sujet d'une importance cruciale, et je vais ainsi avoir besoin de votre pleine concentration. »

   Quelques regards se croisèrent, mais personne ne vint faire cas de la moindre petite réticence face à ce comportement bien civil de la part de la directrice de la compagnie. L'une après l'autre, elles firent lentement le chemin menant vers la chaise la plus proche, et commencèrent peu à peu à s'installer avec calme, tout en observant devant elles la femme qui se tenait bien droite, mains croisées devant son visage dans une position qui lui permettait de poser son menton sur celles-ci, tandis qu'elle observait ses subordonnées derrière des lunettes en demi-lune. Les assises s'écartèrent de la table, puis se rapprochèrent, et finalement, quand les scientifiques et autres dirigeantes de secteurs humains eurent toutes pris place autour du large rectangle de bois, il ne resta qu'à la directrice de se relever, austère, froide, avant de prendre une télécommande, et d'appuyer sur deux de ses boutons pour abaisser l'écran d'affichage, puis l'allumer de manière à ce que toutes puissent voir ce dont elle s'apprêtait à parler.

   Sur l'image, de manière un peu mystérieuse pour les femmes en présence dans la pièce, se trouvait afficher un nom de code, sous lequel avait été placé deux photographies d'une enfant qui ne semblait guère avoir plus de huit années, aux cheveux couleur de sang, à l'air farouche, et au regard presque déstabilisant.

« Connaissez-vous ce visage, mesdames ? »

   Une rapide vague de négation vint lui répondre, sans que cela ne la surprenne. Elle-même avait eu grand mal à quérir les informations et les documents sur cette apparition étrange, et il n'avait guère été aisé de comprendre les cryptages qui avaient été utilisés pour protéger les informations concernant cette bien particulière jeune femme se trouvant actuellement affichée sur le large écran bleuté.

« Il s'agit de la dernière découverte de l'armée, le projet 37-C-Delta. Pour les quelques femmes ici présentes il y a de cela plus d'un an, ce qui vous exempt, madame Jeruss, sachez que cette entité à été retrouvée dans l'excavation catégorisée Y-45, qui avait été fermée il y a de cela de nombreux mois, pour cause de danger trop important. Ne vous attardez pas sur son apparence de jeune fille, elle n'est non seulement pas humaine, mais surtout cette chose a eu le don d'éliminer des dangers que nous, Tekhane, n'avions même pas la plus petite chance de soumettre, sans que nous n'ayons jamais su pourquoi. »

   Elle appuya sur un nouveau bouton, et l'affichage passa sur l'un des cadavres qui avait été retrouvé autour de l'objet appelé « Oeuf », ne manquant pas d'ailleurs de rendre mal à l'aise ses subordonnées, dont l'une eut bien du mal à ne pas laisser échapper un haut-le-cœur, tout autant à cause de la monstruosité de ces bêtes, mais aussi de l'état terrible dans lequel se trouvait sa chair, des éclats se trouvant partout sur le sol des environs, non sans parler des trous béants se trouvant sur la carcasse. Alista Morovik, bien peu prompte à se laisser aller à de telles tendresses de cœur, ne fit rien d'autre que reprendre tranquillement la suite de son exposé, l'image en fond derrière elle, et ne prit même pas la peine de passer à la prochaine présentation pour alléger un peu la conscience de ses collègues, jugeant qu'elles devraient sûrement accepter de voir bien pire avec les plans qu'elle avait en tête :

« L'une de ces choses, à elle seule, suffisait à éliminer plusieurs bataillons de nos unités, et le projet 37-C-Delta a été capable de toutes les éliminer avant même que notre armée n'ait eu le temps de se déplacer en direction de l'excavation, si bien que nous n'avons même pas d'image de ce qu'il s'est exactement passé. Tout ce que nous savons, c'est qu'une fois sur place, les forces Tekhanes ont pris soin de rapatrier l'enfant, si je peux oser l'appeler ainsi, et l'ont amenée à l'intérieur de la capitale, dans un labo sécurisé. À partir de là, elle est intraçable...
 -  Pardonnez-moi cette remarque, mais pourquoi nous parler de cela. Car si cet exposé est ma foi fort intéressant sur l'évolution de la situation des armées Tekhanes, je ne vois guère en quoi l'apparition d'une forme de vie humanoïde sur nos terres va changer grand chose à nos propres recherches en armement.
 -  J'y viens. »

   Un nouveau clic, et voilà que l'affichage se fait sur un tableau, accompagné de quelques photos prises durant le rapatriement du projet, mais surtout, de nombreuses données d'évaluations sur l'évolution de celui-ci, notamment dans les premiers mois de son observation, ce qui était relativement facile à lire pour quiconque ayant un minimum de connaissances en terme d'observation scientifique. Une rapide perte en force, en pouvoir, en puissance y était visible, une certaine forme de dégénérescence qui n'était tout simplement pas explicable du point de vue des données vitales de 37-C-Delta, mais qui toutefois semblaient avoir toute leur importance du point de vue de la directrice de la compagnie, qui laissa même le temps à ses subordonnées de lire l'intégralité des notes, comme s'il fallait absolument qu'elles se les mettent en tête pour les futures explications. Peu étaient de celles capables de comprendre les pensées d'Alista, mais là, elle était tout simplement en train de les perdre, et aucune d'entre elles ne voulaient l'exprimer à haute voix, même si la femme était largement capable de le voir au travers de leurs prunelles emplies d'incompréhension. Il était donc temps qu'elle leur explique son but, SON projet, ce qu'elle avait vu dans l'arrivée de cette humanoïde à l'intérieur des labos Tekhans, et tout particulièrement comment elle comptait en faire usage, de la plus savante des manières. Elle se racla donc la gorge, et avec un sourire dont l'assurance n'avait d'égal que l'inquiétant sadisme qui s'y découvrait, elle reprit son propos, appuyant particulièrement sur le moindre détail qui lui semblait capital.

« Cette découverte aurait pu être un véritable cadeau pour l'armée Tekhane, mais malheureusement, comme vous le voyez, il semble que depuis sa sortie de « l'Oeuf », elle n'ait plus la capacité de conserver ses forces. Ce que je souhaite, désormais, c'est que nous nous penchions sur une reproduction, que nous pourrions produire en masse, une autre forme de vie, identique à la sienne, mais qui ne subisse pas cette régression, et pour cela, sachez que j'ai investi en contacts, et en connaissances, pour obtenir des échantillons de son corps. De la peau, du muscle, prélevés en toute honnêteté pour des recherches, mais dont nous allons user pour mettre en place une certaine forme de culture, de clonage, et dont je souhaite le résultat particulièrement probant. Vous toutes allez me constituer une équipe, solide, compétente, et je veux que désormais le tiers de vos différents budgets soit alloué à la création d'une entité guerrière sans limite, du niveau premier du projet 37-C-Delta, qui sera de toutes manières inutilisable bientôt, j'en ai bien peur. Et surtout, je veux que ça avance, rapidement, quitte à ce que des échecs soient inévitables. Torchez-vous avec l'éthique, le simple but est de créer l'entité ultime de la défense Tekhane, et qu'elle soit opérationnelle ! Vous avez compris ?
 -  Madame, ce n'est en rien pour vous contredire, mais rien que pour créer un être viable par clonage, le procédé est complexe, surtout pour une entité humanoïde dont nous ne connaissons ni la croissance, ni l'évolution...
 -  Et j'ai dit que je m'en battais de l'éthique. Que les sous-sols deviennent un charnier si nécessaire, si elles ne parviennent pas à maturation, ces projets ne seront même pas humains à mes yeux. Je ne veux que du résultat, et rapide, aussi vous avez tout intérêt de choisir des personnes de confiance, qui n'auront pas besoin d'être tenues au silence !
 -  Ces échantillons que vous avez obtenu, où se trouvent-ils ?
 -  Au sixième étage, dans les compartiments à risque. Il vous sera délivré un laisser-passer vous permettant d'y accéder une fois que vos équipes auront été mises sur pied.
 -  Eh bien... de combien de temps disposons-nous pour choisir nos coéquipières ?
 -  Je vous laisse trois jours. »

   Les mots qu'elle avait prononcé avaient laissé dans la salle une impression glauque, où chaque personne autour de la table sentait déjà retomber sur elle les conditions particulières de l'éthique Tekhane sur leurs épaules, mais malheureusement il était proscrit de résister à la directrice, malgré le trouble, malgré les peurs, malgré les doutes. Elle avait fait le choix de constituer une nouvelle entité, une force armée sans égale qui deviendrait bientôt la principale source de défense en Tekhos Metropolis, et pour elle le sujet était déjà une réalité, lui assurant soutien lucratif d'abord, mais surtout l'une des plus grandes réussites du monde scientifique, et de celui de l'armement. A bas les règles et les codes, rien ne saurait lui faire croire que son projet n'est pas viable, elle comptait bien prendre tous les risques pour se permettre de devenir la première ressource de force du pays, et ainsi, elle ne laissait nullement le choix à ses subordonnées, soit elles la suivaient sans broncher, soit elles finiront évincées, pour qu'elle mette à la tête de ses industries des gens possédant un brin moins de scrupules, ou de capacités à lui résister. Maintenant qu'elle y avait pensé, le projet se devait de se mettre en marche, le plus rapidement possible, et elle n'allait pas faire la moindre concession. Et ça, elles le savaient toutes, se regardaient parfois rapidement, en coin, pour jauger le degré de réticence de chacune, mais aucune n'allait avoir la force de lui faire face, de s'opposer à ses projets de grandeur, de suprématie sur le marché... Alors, rapidement, et dans un silence complet, chacune acquiesça, et toutes commencèrent rapidement à traiter des potentielles membres de leurs équipes, ainsi que des moyens par lesquels elles allaient procéder.

   Et chacune sortit de la salle de réunion avec le poids de nombreux remords, celui de n'avoir pas résisté, celui d'avoir abandonné l'idée de continuer les recherches de manière éthique, mais surtout, celui d'avoir laissé Alista s'enfoncer rapidement dans sa folie, celle de constituer cette arme humaine sans jamais se remettre en question quant aux risques encourus. Aucune des quatre femmes ne se sentait le courage de regarder les autres, et de manière presque étrange, elles ne partirent guère ensemble, acceptant la longue attente de l'ascenseur pour finalement partir une par une, dans un silence de mort, avec en tête le projet qu'elles allaient bientôt mettre en place, au delà de toute morale. Pour l'une d'elles, dernière encore en présence dans les couloirs, le départ fut d'autant plus complexe qu'elle ressentait au plus profond d'elle que malgré ses hésitations, sa couardise, elle était en accord avec la vision des choses de la dirigeante. La scientifique voyait ce qu'elle comptait faire, l'opportunité qu'elle avait remarqué dans la présence de l'entité 37-C-Delta, et comprenait aussi que même si elle allait s'avancer bien au delà de ce que les valeurs Tekhanes acceptaient comme « correct », cela ne serait que pour un bien supérieur de la patrie. Seule, et silencieuse dans les couloirs vides, elle vint se gratter compulsivement la joue, réfléchissant encore et encore aux différents procédés de synthèse d'une entité à partir de simples échantillons de peau, ou de muscles, et si la directrice n'était pas sortie de son bureau pour elle aussi quitter les lieux, il était bien possible qu'elle reste encore longtemps dans cette transe réflective...

« Alexandra Purelle, que faites-vous encore ici ?
 - Hum... Oh pardonnez-moi directrice, je réfléchissais à votre projet.
 -  Nous en avons déjà bien discuté, non ?
 -  Bien entendu, mais certains points me restent en tête. J'aimerais évaluer dès maintenant l'un des échantillons, madame, et je souhaiterais que vous me meniez jusqu'aux compartiments à risques.
 -  Il est bien tard, et je suis loin de désirer vous payer des heures supplémentaires Alexandra, vous savez ?
 -  Il ne s'agit guère d'argent, madame. Considérez cela comme... de la curiosité. »

   Un éclat dans le regard de la fameuse Alexandra fut tout ce qu'il était nécessaire pour convaincre la directrice... Cette femme, malgré sa présence relativement récente dans la compagnie, avait compris ce qu'elle désirait, ce qu'elle cherchait, et ne comptait pas remettre en cause ses méthodes, ou sa vision des choses. Non, apparemment, en présentant un projet aussi dangereux, aussi étrange, elle venait de se faire une alliée de poids, une personne qui serait capable de maintenir le cap lors de ces recherches inexorablement épuisantes moralement, et ce fut donc avec un grand sourire qu'elle accueillit autant de bonne volonté de sa part, finissant par... glisser sa main en direction de son sac, et de tirer un dossier de recherches, qu'elle ouvrit pour en sortir une carte magnétique au contenu particulier. Et cette dernière, Alista la tendit à cette femme de bonne foi avec toute la confiance du monde, prête à lui offrir même bien plus !

« Tenez... Ici se trouvent toutes les informations que j'ai pu obtenir sur 37-C-Delta, ainsi que le laisser-passer nécessaire pour pouvoir obtenir quelques uns des échantillons de peau que j'ai pu recueillir... madame Purelle, je vais placer ma confiance en vous. Faites tout ce qui est nécessaire pour que ce projet soit un franc succès !
 -  Entendu, madame. »

   Et elle vint prendre la carte, juste avant qu'Alista ne se tourne vers l'ascenseur, et le prenne, quittant définitivement les lieux, et laissant à nouveau la scientifique en chef auprès de ses pensées, contemplant d'un air avide l'outil de savoir se trouvant entre ses doigts, n'osant imaginer le tout des informations qu'elle venait ainsi d'obtenir. Quand elle se décida enfin à bouger, à appuyer sur le bouton d'appel pour que son moyen de déplacement vienne la quérir au quatorzième, elle attendit calmement, puis s'engouffra dans la cage de fer aux portes rutilantes avec un sourire profondément malsain, ne lui laissant dès lors que l'occasion d'appuyer sur le joli chiffre en surbrillance pour l'aider à se diriger vers le cœur de sa recherche. Elle posa les pieds sur le seuil du sixième étage avec une impression tenace, celle de fouler un interdit, puis se glissa dans la pénombre des bureaux, et des pièces de test, pour finalement parvenir au cœur des lieux, devant la zone des échantillons, et continua dès lors sa progression dans cette poix sombre jusqu'à parvenir au point crucial, la zone des éléments à risques. Un bip sonore, des lettres et des chiffres lumineux dans une teinte verdâtre se reflétant dans l'un des optiques perchés sur son front, et le lent déroulement d'un casier réfrigéré devant son regard piqué par un intérêt des plus inexpugnable. Lentement, elle vint à quérir les quelques menues restes d'une peau blanche se trouvant entre deux fines lamelles de verre, et l'observa avec un air aussi froid qu'analytique...

   Elle avait entre les mains l'élément qui allait changer la face du monde.

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Luxienne et Myriade

Humain(e)

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 2 jeudi 04 mai 2017, 21:08:42

   Compte rendu n°001, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Cela m'a pris de longues heures, et plusieurs ré-évaluations de mon travail pour comprendre comment cette peau pouvait être vivante auparavant. Ni trace de terminaison nerveuse mineure,ni trace de capillarité sanguine, ni trace d'activité cellulaire. Pendant un long moment, j'ai crû faire face à de la pierre, et si ce n'était pour la confiance que j'ai dans les professionnalisme de notre directrice, j'aurais pu me poser la question d'une quelconque farce de la part de cette dernière. Je me devais de chercher un autre moyen d'observer cet élément.
      Détection laser, observation au microscope nucléaire, étude de la composition chimique, ces éléments me permirent de commencer à approcher un peu plus de la vérité : il n'y avait tout simplement rien à observer sur cette peau, et pourtant celle-ci se trouvait en parfait état. Deux possibilités s'offraient à moi, soit ce que j'observais n'existait pas, soit c'était composé de matériaux et d'une énergie que nous, Tekhanes, n'avions encore jamais observé dans l'univers. Le projet commençait à devenir de plus en plus complexe à mesure que j'obtenais des résultats.
      Le jour arrivant, je ne pouvais continuer mes recherches aux yeux de toutes, j'ai donc pris le temps de ranger l'échantillon, d'éteindre la moindre machinerie, et d'aller boire quelque chose pour me réveiller un peu. Tout ce mystère ne me donne que plus envie de m'attarder sur ce projet, et je pense qu'il va devenir de plus en plus nécessaire que nous lui trouvions un nom complet, quitte à ce que cela soit un peu imagé, ou alors bateau, mais simplement pour pouvoir classer ces enregistrements, que je compte faire de manière régulière, pour garder une trace de nos avancées.
      Aujourd'hui, je dois trouver les personnes capables de m'accompagner dans ce travail. Je ne sais encore combien en sont dignes, ou même ont la connaissance suffisante pour s'attaquer à ce morceau. Quel dommage que nous n'ayons pu engager la cadette Mueller, je ne doute guère que cette femme nous aurait été d'une grande aide.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°003, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Il est clair que nous ne pouvons tout simplement pas obtenir de résultats avec nos moyens traditionnels, mais je crois pouvoir être certaine que les échantillons commencent à évoluer, à changer, ce qui commence légèrement à m'inquiéter quant aux résultats éventuels d'une reconstruction physique, ou d'un clonage. Notre directrice souhaitait un résultat optimal, et si les éléments primaux commencent à différer, à évoluer, il n'est que concevable que nous allons nous écarter de l'entité de référence, 37-C-Delta.
      En revanche, les équipes ont été mises sur pied. Nous sommes donc une vingtaine, chefs de projet comprises, à travailler sur la mise en place de ce clonage, et si chacune y va de sa théorie, nous n'en sommes encore qu'aux balbutiements de ce travail de longue haleine, et au deçà du moindre petit avancement. J'enverrai un premier compte-rendu écrit à madame Morovik une fois que l'intégralité de nos membres aura pu comprendre l'ampleur du projet, et j'espère que nous aurons déjà quelques avancées à soumettre.
      Un détail toutefois me paraît important à soulever avant que je ne coupe cet enregistrement. Alors que j'étais encore à l'observation des différents fichiers contenus dans la carte magnétique qui m'a été confiée, j'ai crû remarquer que le projet 37-C-Delta était accompagnée d'armes, armes ayant la capacité de converser avec le projet. Peut-être est-ce trop demander, mais je crois sincèrement qu'un échantillon de celles-ci saurait être d'une grande aide pour l'approfondissement de nos travaux, voire pour sa progression. Une demande officielle sera faite sous peu vis-à-vis de ce besoin, et j'espère qu'il trouvera un écho positif. Après tout, nous cherchons des armes, il est normal que nous nous intéressions à l'équipement de 37-C-Delta ! Je pense même que cela serait parfait pour dissimuler nos véritables travaux.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°006, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Nous avons obtenu, tôt ce matin, les échantillons de K'leir, et de Ter'er, les deux armes utilisées par le projet 37-C-Delta, et il faut l'avouer, ces objets sont tout aussi fascinants que peuvent l'être les échantillons de leur utilisatrice. Tantôt leur masse est nulle, tantôt il devient impossible de déplacer leurs échantillons, à tel point que nous avons été obligées à un moment d'en laisser un au beau milieu de la pièce, le temps que celui-ci puisse de nouveau être soulevé pour qu'on l'amène en analyse. En revanche, une fois cela réussi, les résultat furent tout aussi clairs que ceux obtenus avec mes premières observations, résumés dans le compte-rendu n°001.
      Pas de conceptions remarquables, matériaux parfaitement inconnus, et aucune trace de micro-composant une fois mis à l'observation cellulaire ou atomique. Ces choses ne sont pas existantes, ou elles ne possèdent pas d'éléments contenus sur Terra. L'idée de la magie, utilisées dans d'autres pays, nous a été apportée par une personne ayant voyagé jusqu'à l'Empire Ashnard, avec lequel nous entretenons un pacte d'alliance plus ou moins agréé, mais le fait est que nous n'avons pour l'instant personne pour évaluer une telle possibilité, nous forçant à laisser de côté d'éventuelles observations sur ce point.
      Je commence à croire que nous ne parviendrons guère à faire de réelles avancées sans un miracle, ou sans l'évolution du groupe D dans leurs recherches, ceux-ci s'étant attardés sur la conception de nouveaux outils de mesure, plus généraux, qui auraient potentiellement une chance de réussir. Je dois pour cela échanger avec madame Jeruss, qui dirige cette partie de notre travail. J'espère qu'elle saura nous assurer de l'avancée de leurs propres travaux, ou je crains de ma prochaine rencontre avec madame Morovik.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°007, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Il nous fallait un coup de génie, une surprise magistrale, quelqu'un qui ait eu l'incroyable idée de produire l'inconcevable alors même que nul autre n'en avait eu l'idée. Finalement, cela nous parvint du groupe B, et je dois avouer que je ne m'attendais guère à voir l'un des membres débarquer dans mon bureau en début de soirée pour me demander immédiatement de l'accompagner, mais sentant le parfum de l'évolution, je n'ai eu guère le choix que d'emboîter son pas, afin de rejoindre le reste de l'équipe dans la salle d'observation. Toutes étaient en transe, commençaient à aller de droite à gauche en enchaînant les recherches et les observations, et je ne sus m'expliquer telle effervescence... C'est là qu'on me présenta l'événement miraculeux :
      L'une de nos chercheuses, relisant un rapport sur 37-C-Delta, eut cru bon de cesser d'observer les deux éléments séparément, mais en symbiose, prenant en présentation le fait que d'apparence, l'entité inconnue ne vivait qu'en compagnie de son armement, et ne les abandonnait jamais. Le résultat fut splendide, car l'un comme l'autre révélèrent dès lors à l'observation l'une des choses les plus importantes pour notre projet : un génome. Celui-ci n'était clairement pas humanoïde, et ne permettait guère de s'imaginer le degré évolutif de l'humanoïde considéré 37-C-Delta, présentant un ensemble de 207 chromosomes différents.
      Le chiffre est tout simplement faramineux, une telle quantité d'informations sera non seulement difficile à décrypter, mais surtout fastidieux. Toutefois, je pense que nous allons au moins pouvoir nous pencher dès maintenant sur un éventuel clonage, une première tentative d'observation, de création, et éventuellement en tirer des conclusions pour nos futures évolutions. L'équipe B, forte de sa découverte, sera assignée à la lecture du génome. L'équipe C, encore non-assignée à une tâche claire, se trouvera désormais à la partie technique et mécanique, permettant la liaison entre l'équipe B et D. Enfin, l'équipe A, ainsi que moi-même, engagerons les travaux de clonage dans la semaine, une fois l'information pleinement analysée.
      Enfin, nous avançons.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°032, projet renommé *37-prime, Sang-Clair* :

      Il est difficile d'appeler cela un échec. Tant de travaux, d'évolutions, de résultats, nous n'avons fait que progresser, mais il est de mise d'accepter cette triste vérité : notre première forme de vie clonée est un vaste échec. Nous avons pu créer une cellule souche, mais sa division archaïque, sa lente transformation, son point vital étant inconnu, notre tentative de faire accélérer sa croissance nous a mené à quelque chose d'immonde, dont nous ne sommes même pas sûres de l'humanité, de la conscience. Cette chose n'est qu'un amas de chair noire, au sang vitreux, et à la dangerosité bien trop élevée pour que nous nous en approchions sans risque.
      Une membre de l'équipe A s'est trouvée absorbée par 37-prime il y a deux heures, et nous n'avons rien pu faire pour empêcher sa destruction, ne faisant finalement que grossir l'entité de trois centimètres général de diamètre. Ayant contacté l'équipe D, nous avons pu nous assurer de la création d'un outil de destruction pour ce modèle défaillant, même si cela nous fait mal d'imaginer que tant de travail finisse ainsi. Toutefois nous ne pouvons concevoir que cet être puisse continuer d'exister, sa libération étant un risque potentiel pour le labo, et la ville alentour. Nous espérons que l'arme soit bientôt opérationnelle, et pour éviter tout soucis, nous avons clos complètement l'étage inférieur, gardant l'espoir que cela soit suffisant pour qu'en cas de brèche, 37-prime ne puisse se libérer.
      Tant de mois pour un tel résultat, je ne peux m'empêcher de ressentir un pincement au cœur, mais il va bien falloir que nous l'éliminions. Dès que sa destruction sera accomplie, nous retenterons le projet, les observations de l'équipe B sur le génome de 37-C-Delta en renfort. Avec un peu de chance, ceci suffira à nous donner les clés de sa maturation, et le contrôle de son évolution, pour ne pas nous retrouver à nouveau face à de tels problèmes.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°094, projet renommé *37-prime, Sang-Clair* :

      Nous parvenons enfin à obtenir autre chose que des fleurs de chair, mais le travail que nous parvenons à mettre en place reste pour l'instant peu fructueux en terme d'esthétique Tekhan. Je parle d'esthétique d'ailleurs parce qu'autrement, nous commençons enfin à atteindre un degré fonctionnel dans ce que j'appellerais la puissance brute de notre création. La force y est, l'endurance aussi, et il est vrai que si nous n'avions créé dès le départ le sérum de cristallisation, il nous serait sûrement bien complexe d'éliminer les créatures que nous parvenons à constituer. Mais encore une fois...
      ...Il reste que leur apparence actuelle ne plaît pas beaucoup à madame Morovik. Et je peux la comprendre, les unités font plus de deux mètres, tiennent plus du monstrueux que de l'humain, et présentent surtout une forme s'apparentant grandement à ce que nous définissons comme étant insectoïde. Je dois avouer que cela rend le tout un peu délicat, car si nous présentons finalement des soldats qui ressemblent à nos ennemis, je nous vois mal réussir à obtenir facilement l'approbation du plus grand nombre. Et si nous ne voulons pas nous faire questionner sur l'origine de nos « armes », il va être nécessaire que rien de ces dernières ne puisse créer le doute, ou l'inquiétude ! Et pour l'instant c'est loin d'être le cas.
      Mais je n'ai pas bien peur, le groupe B avance de plus en plus rapidement, notamment grâce aux différents extraits que nous parvenons à récupérer sur les quelques fleurs de chair que nous gardons en culture, et ainsi nous parvenons de plus en plus à nous rapprocher d'un hybride de type humanoïde. Une fois cela fait, nous pourrons progresser encore un peu pour parvenir à stimuler l'évolution de notre sujet, et, je n'ai aucune inquiétude à ce propos, finir par concevoir une soldate pleinement fonctionnelle, et digne de la grande supériorité Tekhane. Finalement, nous avons tant et tant progressé, je ne vois guère ce qui pourrait nous arrêter désormais en si bonne marche... D'un projet fou, nous atteindrons bientôt un miraculeux succès, et avec, les honneurs qui nous sont dus !
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°117, projet renommé *37-prime, Sang-Clair* :

      Suite à l'élimination de 37-prime-16, un élément curieux nous est apparu, et cet élément, aussi aléatoire peut-il être, va sûrement devoir nous forcer à accélérer un peu plus les choses, ou du moins à cesser de faire des tests à tout va et nous concentrer sur la création d'une entité viable d'ici peu de temps, au risque de rendre notre travail bien plus complexe. Le sérum de cristallisation commence à perdre de son effet. Ou plutôt devrais-je dire que, naturellement, les projets 37-prime ont commencé à synthétiser quelque chose pour s'en défendre.
      De peur de faire une erreur, nous avons préféré observer les différents résultats obtenus lors de la cristallisation des sujets, afin de ne pas faire la moindre erreur, et nous avons malheureusement eu la bêtise de ne pas remarquer plus tôt ce fait grave, du moins jusqu'à aujourd'hui, où la différence fut telle que nous ne pouvions passer outre son observation. Le premier projet avait mis trois secondes à se cristalliser entièrement afin d'être ensuite évacué, le second aussi... mais nous n'avions guère pris le temps de regarder l'évolution de cette courbe. Trois secondes, puis quatre, puis cinq... les sujets prenant de la masse, il n'était que logique que le temps s'allonge un peu...
      Mais là, il lui a fallu plus d'un quart d'heure. C'est trop, bien trop, et il devient donc absolument nécessaire que nous trouvions une forme viable, intelligente dans les prochains tests, sinon je ne doute guère de la difficulté que nous allons devoir considérer pour les éliminer. Je compte diminuer dès maintenant la fréquence de nos test de création, tant pis si nous nous éloignons un peu du sujet par moment, mais il faut absolument que nous endiguions cette capacité protectrice. Par souci évolutif, nous ne récupérerons aucun élément de 37-prime-16, c'est malheureux en un sens mais je préfère être prudente.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°145, projet renommé *37-prime, Sang-Clair*, Seconde étape :

      Aphrodite et Bételgeuse. Elles sont les premières à enfin avoir une forme humaine, et le sérum de cristallisation a prouvé une efficacité de quelques secondes sur un morceau de leur chair, les rendant viable au niveau du contrôle de masse, si on décide d'en faire la production. Je dois avouer que la curiosité m'étreint un peu quand je pense au travail fourni jusqu'ici, et il m'arrive parfois de repenser à ce projet 37-C-Delta, à me demander à quoi elle ressemble désormais, pour savoir à quel point mes propres « filles » lui ressemblent.
      A. et B. sont jumelles, nous n'en avions que peu conscience lors de la phase de création, mais le passage embryonnaire n'a laissé aucun doute quant à leur maturation simultanée. N'ayant guère envie de perdre à nouveau quelques semaines de production, nous avons continué de les faire grandir sans nous impliquer dans le projet, essayant même de voir s'il n'y avait pas un moyen de leur offrir un lien symbiotique particulier de par leur liaison naturelle, avant de finalement abandonner l'idée pour nous rattacher à une simple observation. Parfois, elles semblent se parler depuis l'intérieur de la cuve, et je me demande toujours ce qu'elles peuvent échanger...
      Mais au delà de toutes ces considérations je me permets tout de même de souligner encore un peu plus à quel point nous avons progressé ! Nous atteignons bientôt les deux années de travaux, et il est à noter toute l'évolution de notre compréhension de ce génome, de cette entité qui est apparue en Tekhos Metropolis, et de ses capacités. Nous somme passées d'un stade d'évolution purement embryonnaire à la création d'une entité humaine complexe, de deux entités même... Et surtout, nous voyons enfin le résultat de nos efforts. Je ne sais guère si Aphrodite et Bételgeuse seront notre projet final, mais en tout cas, je ne peux plus douter un instant que nous ne puissions parvenir à sublimer leur être au bout de quelques autres tentatives, afin d'obtenir enfin notre ultime soldate.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°176, projet renommé *37-prime, Sang-Clair*, Seconde étape :

      Aphrodite et Bételgeuse : une entité faible, une entité puissante. Présence d'une harmonie lors de la présence de l'une auprès de l'autre, mais la moindre séparation les rendaient instables, non sans parler de leur langage, qui n'a jamais pu être élucidé. Éliminées.
      Céleste : Entité puissante, capable de se défendre, mais à la forme instable, dégradée. La première mutation ne fut pas dangereuse, et même vue comme une potentielle forme adaptative de notre projet. Celles qui suivirent rendirent Céleste impropre à la création en masse. Éliminée.
      Diane : Entité puissante, incontrôlable. Elle eut l'intelligence d'attendre la fin de sa maturation pour briser le verre de sa cuve, et chercher à s'attaquer aux différentes membres de notre groupe scientifique. Désormais toutes nos cuves se verront renforcées lors de la mise en culture d'un embryon. Éliminée.
      Eris et Firmament : Puissance colossale, présence d'une harmonie, action en symbiose. Elles auraient pu être le sujet d'une étude plus poussée, mais tandis qu'elles ont atteint le stade adolescent, leur langage s'est adapté au notre, et ce que nous avons pu comprendre nous força à arrêter le projet les concernant. Éliminées.
      Gorgonea : N'a pas survécu à l'apport constant des enzymes pour accélérer sa croissance. Confirmation que son sang ne possédait pas l'aspect vitreux découvert chez tous les autres sujets. Nous ne savons encore s'il s'agit d'une erreur de création. Morte.
      Heracles et Ikarus : Respectant le sexe de ces jumeaux, nous leur avons offert des noms masculins. Pour autant, ils prouvèrent être tout aussi belliqueux que les autres jumeaux que nous avions élevés, nous laissant comprendre que nous ne pouvions tout simplement les laisser évoluer ainsi. Éliminés.
      Jerrah et Kornephorros : Nous avions déjà choisi de ne plus faire de test sur les jumeaux, mais apparemment une cuve était déjà en production alors que nous étions en train d'essuyer le dernier échec, avec Heracles et Ikarus. J. et K. prouvèrent que nos doutes étaient fondés, et ont tenté de mettre à sac l'intégralité du laboratoire. Éliminées.
      La Superba : Entité à la puissance phénoménale. Elle semblait viable, divinement agréable à l’œil, et surtout possédait enfin la capacité d'échange et de compréhension que nous souhaitions. En d'autres circonstances, elle aurait pu être notre projet final, mais l'action d'une de nos consœurs à valu l'élimination de L. et l'éviction d'une des membres du groupe A, que les événements n'avaient que trop affectée. Éliminée.
      Nous espérons de tout cœur que le prochain projet soit aussi satisfaisant que La Superba, et ferons tout pour que ces dernières années n'aient pas été que des recherches sans fondements.
       Fin de l'enregistrement, Jolyne Desrepand, Membre du groupe A.


   Compte-rendu n°179, projet renommé *37-prime, Sang-Clair*, Seconde étape :

      Nous savions déjà que toutes les potentielles créations du projet 37-prime allaient avoir des caractéristiques similaires. Toutes ont eu les cheveux d'un rosé étrange, chose provenant d'une décoloration dans les premiers jours de vie d'une abondante chevelure rouge, que semblait posséder le projet 37-C-Delta. De la même manière, toutes les entités ont connu une certaine forme d'attachement envers un des membres du labo, celui-ci devenant soit une personne privilégiée, soit la cible d'une haine tenace, nous obligeant à tenir le personnel éloigné de la cuve le temps de la maturation. Ajoutons à cela une force physique démentielle, et surtout une sensibilité accrue aux échantillons de K'leir, et de Ter'er, produisant des effets allant de la violence à l'apparition d'un certain nihilisme dans la manière de penser (voir la suite de rapport 153 à 156).
      Myriade... possède tout cela, et plus encore. Elle parvient à déjouer certains de nos tests avec une aisance qui frôle l’insolence, elle commence dès son plus jeune âge à accepter des aspects du combat et des techniques de défense tekhanes qui sont pourtant d'une grande complexité. Elle est parfaitement stable, et même si elle n'est pas encore poussée à maturation, n'ayant encore que 8 à 9 ans physiquement, elle semble être capable de comprendre et d'interpréter de bien nombreux sujets sans faire part d'une vicissitude extrême dans l'esprit, contrairement à certains de ses prédécesseurs. Plus, elle semble déjà si jolie pour une petite demoiselle de son âge, il n'est à n'en pas douter tout à fait envisageable qu'elle devienne une bien charmante jeune femme, exactement le genre de personne que nous pourrions souhaiter dans les rangs de l'armée.
      Nous sommes encore en phase d'observation, mais si le sujet semble être en parfaite condition d'apprentissage et de préparation, nous ne tarderons guère à cesser l'évolution accélérée pour nous laisser plus de temps pour lui offrir les informations nécessaires pour faire d'elle une parfaite tueuse, l'exemple de la soldate Tekhane. Je ne saurais décrire la hâte que je ressens à l'idée de voir ce projet se concrétiser... Je n'ai finalement plus qu'un désir, pouvoir la présenter à notre directrice, en tant que grande réussite de notre projet de soldate améliorée.
      Nous n'avons plus qu'à confirmer nos espoirs.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.

. . . . .

   La cuve. Elle n'avait jamais connue que celle-ci. Cette cuve froide, épaisse, dans laquelle elle nageait plus ou moins, sans jamais en toucher les bords, sans jamais en atteindre le plafond, sans jamais parvenir à mettre pied à terre, et à se déplacer par ses propres muscles, par ses propres forces, toujours obligée de se laisser flotter avec, sur elle, cette batterie d'équipement qui n'avait pourtant aucun attrait à ses yeux. Elle avait bien tenté de les ôter, quelques fois, quand ces femmes n'étaient pas là pour l'observer, et que la caméra qui filmait les lieux se tournait juste assez pour ne plus faire attention à elle, mais l’électricité qui s'en était échappé lui avait grillé le corps, l'obligeant finalement à se défaire de cette idée, et de continuer à jouer le jeu de la bonne petite fille silencieuse, docile. Elle avait cru comprendre qu'elle n'était pas la première à s'être trouvée ici, elle avait remarqué les autres cuves, celles qui portaient des lettres, celles qui n'en portaient pas, mais jamais elle n'avait vu d'autres personnes qu'elle en ces hautes jarres de verre sans ouverture. Parfois, elle écoutait les femmes parler entre elle, comme si elle n'était pas là, découvrait que certaines avaient peur d'elle, et que d'autres étaient plutôt curieuses, intéressées, cherchaient avant tout à la comprendre, malgré son masque qui lui permettait tout autant de respirer, que de rester parfaitement muette, bien malgré elle. Parce que oui, entre le fait que cela coupait le son de ses termes, et que le liquide autour d'elle déformait ses dires, il devenait complexe pour ces scientifiques de voir autre chose que ses lèvres bouger.

   Et elle ne leur en voulait pas de ne pas chercher à la comprendre, encore une fois elle s'en accommodait, elle l'acceptait, elle se disait même qu'un jour, peut-être, elle sortirait de la cuve, comme avait l'air de l'avoir fait les autres avant elle, et d'ainsi pouvoir s'exprimer avec ses propres termes auprès de ces femmes qu'elle n'aimait pas, mais qui auraient peut-être la capacité au moins d'essayer de la comprendre. Elle se sentait seule aussi, terriblement seule, elle aurait bien aimé s'attacher à quelqu'un, pouvoir vraiment s'approprier une personne pour que ce soit une femme « à elle », une amie, une mère, mais malheureusement personne ici n'avait la moindre valeur à ses yeux, ou ne lui permettait de se sentir mieux. Alors elle s'en accommodait, encore une fois, elle faisait surtout cela aussi d'ailleurs, elle considérait qu'en « s'en accommodant », elle serait capable de prouver qu'elle pouvait faire ses propres choix, qu'elle était, en soi, une entité vivante, même si elle ne ressentait pas, même si elle ne touchait pas, même si elle ne sentait pas, même si elle ne vivait pas. Oui, elle avait du mal à se croire vivante, à rester là, aussi nue, aussi statique, incapable de baisser la tête à cause des longs tubes placés autour de son crâne et de son cou, mais elle faisait tout pour l'être, et sûrement serait prête à tout pour l'être, quitte à ce que cela fasse sa tristesse, ou sa colère. Parce que c'est ainsi qu'on vit non ? En exprimant des sentiments, et prenant parti ? Du moins, c'est ce qu'elle comprenait du flot d'informations qu'on lui envoyait directement dans son esprit, et elle comptait s'y accrocher, pour vivre !

   Et puis... Elle commença à les entendre parler d'une libération, d'une mise à l'étude. L'idée était salvatrice pour elle, une véritable promesse de vie, de liberté, quelque chose qu'elle n'avait jamais connu, elle fut tant et tant intriguée qu'elle essaya, par tous les moyens, de lire sur leurs lèvres si elles avaient le malheur de prononcer une date, ou une durée, ou moins de quoi lui confirmer que cette idée n'était pas simplement quelque chose d'évoqué par l'une de ces femmes dans un cadre hypothétique, mais bien une possibilité future ! Et elle crut même comprendre que cela n'allait pas tarder, ce qui fit toute sa joie, l'amenant à vouloir se montrer d'une exemplarité totale dans le seul et unique but de quitter cette cuve froide, vide de sensation, et d'enfin toucher la terre ferme. Bon apparemment elles avaient encore quelques essais à faire, quelques tests, qu'elle n'eut aucun mal à accepter et à traverser, malgré la douleur. La pression ? Elle sentit bien un de ses os se disloquer lorsqu'elles parvinrent à solidifier le liquide dans lequel elle avait vécu jusqu'ici sous une force de plusieurs dizaines de tonnes, mais qu'est-ce que cela était en comparaison de son besoin de quitter cette prison de verre ? La force ? Elle n'eut guère à leur prouver sa valeur quand elles commencèrent à l'envelopper grâce à ces espèces de tentacules mécaniques, et les brisa même une fois qu'elle fut complètement étreinte par ceux-ci, afin de montrer à quel point ces choses étaient insignifiantes pour elle. L'obéissance ? Rien ne vint la faire osciller, même pas les pires preuves de sadisme de la part de ces scientifiques abominables. Les connaissances ? Toutes leurs questions furent répondues rapidement grâce à l'écran de la cuve, sans qu'elle n'ait à hésiter.

   Tout ce qu'elle voulait, c'était sortir.

   Alors elle eut bien du mal à comprendre lorsque qu'elle ne vit soudain plus personne. Pas la moindre femme ne passait désormais les portes de cette salle, les grésillements des différentes machines se turent lentement, et seule resta la lumière légère de sa cuve dans le noir. Du jour au lendemain, elle se retrouva seule, terriblement seule, et alors qu'elle espérait toujours entendre le fin chuintement des portes coulissantes venir faire réagir son ouïe, elle n'eut que le droit à l'écho pesant d'un silence parfait, qui ne révélait finalement quelques brins de son qu'à l'instant où elle cherchait à se déplacer un peu dans sa cuve, par inconfort. Elle ne comprenait pas, elle avait tout bien fait, elle avait respecté les ordres qui lui avaient été donnés, elle avait fait absolument tout ce qui était en son pouvoir pour s'assurer que chacune de ses réponses, de ses propos, de ses actes soit porteur de sa volonté de découvrir le monde extérieur... Que faisait-elle donc alors à être encore dans cette cuve, à attendre inlassablement qu'une douce âme ne vienne l'en libérer ? Elle ne savait pas quand c'était le jour, quand c'était la nuit, aussi elle ne tarda pas à cesser de dormir, se posant simplement dans sa prison, les genoux ramenés contre son corps encore bien juvénile, et continua tranquillement de revoir les différentes informations auxquelles elle avait encore accès via la base de données, y trouvant sa seule voie de sortie. Elle y trouvait les plaines, les villes, les gens, et au dessus de tout cela, les étoiles dans le ciel, scintillantes formes qui n'exprimaient que des découvertes, lointaines, si lointaines... Et pourtant qu'elle souhaitait tant découvrir, elle qui se trouvait encore sous terre.

   Depuis combien de temps se trouvait-elle seule, ici, dans le noir et dans le silence ? Elle ne savait guère, pour elle cela ne lui semblait pas très long, mais elle ne doutait pas qu'au vu du nombre de « leçons » qu'elle était allée quérir dans le serveur central, il n'y avait pas de grands doutes à avoir, elle avait dépassé depuis bien longtemps les deux semaines d'attente, et commençait à se demander si quelqu'un passerait désormais les portes de sa captivité un jour. Mais peut-être qu'il y avait d'autres solutions que de simplement attendre en se languissant de la présence d'autrui, peut-être qu'il était nécessaire qu'elle fasse désormais ses premiers pas par elle-même ? Dans le fond elle avait peur. Peur que tout cela ne soit qu'un autre test, et que sa tentative de sortir de la cuve soit perçue comme un acte belliqueux, une rébellion qui ne finirait que par lui faire outrage dans sa bonne volonté et son désir de suivre les ordres pour enfin découvrir un peu de liberté, un peu du monde dans lequel elle a vécu jusqu'ici sans avoir le droit de le côtoyer. Elle avait peur que, sitôt sa sortie, les femmes rentrent d'un coup, et lui tombent dessus pour la ramener en captivité, ou pire encore, la neutraliser. Elle avait entendu une scientifique en parler, elle savait que quelque part dans la structure se trouvait un objet capable de la tuer d'un coup net, et ne voulait absolument pas avoir à souffrir de ses effets. Elle voulait vivre ! Et avec cette envie de vivre, elle avait bien compris à quel point elle avait peur de mourir, de n'être rien d'autre qu'une forme absente, abandonnée, loin de tout, dans le noir et le si...

   Se pensées la menèrent à cette conclusion. Si elle ne résistait pas maintenant, elle n'était pas différente d'une personne déjà morte, attendant passivement qu'on la « mette au monde » sans qu'elle ne fasse le moindre effort, alors qu'il était peut-être justement temps qu'elle fasse preuve d'un peu de personnalité, d'un peu de force, de montrer qu'elle était un être en lui-même, une entité vivante, pas une simple petite chose qui obéit sagement. Elle regarda tranquillement le verre qui se trouvait face à elle. Quelle épaisseur faisait-il ? Elle ne pouvait clairement pas le voir, mais elle ne pouvait pas savoir s'il résisterait à un de ses coups tant qu'elle n'essaierait pas de le mettre au « défi ». Elle leva sa main lentement, puis serra son poing, fort, extrêmement fort, avant de commencer à bander les muscles de ses bras, et de projeter le tout avec force contre la paroi devant elle, ne cherchant clairement pas à faire preuve de la moindre retenue vis-à-vis de sa puissance : ce coup était le signe de son désir de liberté, son désir d'exister. La vitre ne sembla pourtant guère frémir au premier abord, elle resta droite, insensible, jusqu'à ce qu'un premier craquement se fasse entendre au niveau du poing encore engourdi de la jeune femme, et que celui-ci se propage en de nombreuses fissures dont le nombre augmentait en permanence, jusqu'à ce que deux de celles-ci se rencontrent, et entraînant l'explosion de sa prison de verre, le tout volant en éclats, tandis que le liquide étrange se vidait à toute vitesse. Sentir de l'air contre sa peau nue, quelle sensation étrange, quelle incroyable et divine caresse, quelle douceur... Le froid qui fit frémir sa chair un instant, elle le vécut comme la plus réconfortante des sensations : elle ressentait.

   Et ressentir autre chose que de la douleur l'amena à s'éveiller, enfin, à se trouver pleine de forces, de capacités, de compréhension, qu'elle n'avait guère eu la chance de ressentir jusqu'ici, elle se sentait entière, elle se sentait vivante, et elle ne comprenait pas comment, pendant tant de temps, elle n'avait pas eu la présence d'esprit de comprendre que tout ce qui l'entourait, ce carcan, n'était rien d'autre que quelques vaines limitations qu'elle aurait dû ôter depuis bien longtemps. Suspendue par les tuyaux qui se trouvaient autour de sa tête et de son cou, elle commença à les arracher, à les détruire, comme s'il s'agissait de constructions de papier, se libérant définitivement de cet amas lugubre de fer et de plastique, pour finalement les rejeter dans la pièce, la gravité finissant son travail quand, finalement, son poids devient trop important pour le reste de la machinerie, et qu'elle s'arrache alors d'elle-même pour concéder sa victoire à la jeune femme désormais au sol. À moitié dans l'eau, à moitié à l'air libre, les fesses écrasées sous son propre corps, elle découvre, et pendant un instant elle se perd en d'étranges expérimentations, plaçant le reste du liquide sur son visage pour sentir à quel point la fraîcheur l'affecte dans ce genre de situations, ou attrapant un bout de verre pour l'écraser dans sa paume, ressentant dès lors le mélange de douleur et de plaisir destructeur... Elle n'a que grand mal à se rendre compte de son état, de cette liberté, mais elle sait désormais qu'elle n'a plus à s'en faire, qu'elle va pouvoir agir comme elle le désire. Et plus rien ne lui fait peur, absolument plus rien !

   Elle se releva au bout d'un moment, ivre de bonheur. Sautant de la cuve au sol, évitant dans son bond particulier les bouts de verre qui tapissent le dallage métallique, elle se rattrape sans le moindre problème, et se pose donc avec légèreté dans les lieux avant d'observer les alentours sous un autre angle, curieuse de découvrir à quel point le monde peut être autre chose que la même vision en permanence, les mêmes tubes, les mêmes machines... Et justement, la jeune femme se trouve intriguée par un petit morceau de fer en bas de sa cuve, un petit écriteau, sur lequel semble se trouver inscrites quelques lettres dont elle se demande l'utilité, même si rien ne lui permet de le lire à cette faible distance. Elle a encore de l'eau plein les yeux après tout, normal que ce soit compliqué pour elle de voir loin. S'agenouillant, après avoir viré une partie des bouts de verre d'un revers de sa main blessée due à ses expérimentations, la demoiselle aux cheveux roses se penche en avant pour continuer de réduire la distance avec les inscriptions, jusqu'à avoir enfin la possibilité de les traduire malgré sa vision affaiblie. Encore une fois, elle devait plutôt se reposer sur ce qui lui avait été transmis par les machines plutôt que sur ses propres expériences, si bien que ce ne fut pas sans mal pour la jeune femme qu'elle parvint peu à peu à identifier les différentes lettres, puis à les accoler les unes aux autres pour commencer à identifier les mots. Et pourtant, s'aidant à haute voix, elle parvint tout de même à recoller les morceaux, finissant par se reculer avec un sourire satisfait, se mettant à s'exprimer par la même, découvrant enfin sa douce voix sans que celle-ci ne soit déformée par la cuve et son contenu :

« Myyyy...Myyyrrrraaaa....Myriaaaa...de ? Myriade, prrrooo...projet... trois et sept... trente-sept pri-me. Myriade, projet 37-prime. Sanegue Clahir? Non ça ne peut  pas être ça. Sang ? Sang-Clair ?...Hummm »

   Elle se releva lentement, et se tourna vers la porte.

« Myriade Sang-Clair, c'est pas mal quand j'enlève le reste. Je suis Myriade Sang-Clair, je suis libre, et je vais désormais sortir ! »

   Un autre petit bond, et la voilà en direction des lourdes portes automatisées qui servaient d'entrée au lieu. Pas d’électricité toutefois, ou bien trop peu, elle imaginait bien qu'elle ne parviendrait pas à passer normalement par celles-ci, mais à mesure qu'elle s'approchait, elle faisait jouer sa mémoire, cherchant avant tout à se rappeler de l'épaisseur du double-battant pour imaginer si elle avait la capacité de les passer par la force brute. Finalement point de réponse une fois qu'elle se trouva en face, hormis le fait d'essayer, afin de voir si elle était en effet aussi puissante que les scientifiques pensaient l'avoir créée, et soufflant encore longuement, elle prit un grand élan en arrière, avant de se projeter en avant avec violence, fichant son poing dans la porte, puis continua d'un trait, sans cesser de forcer, déformant le métal sous l'impact, puis rompant les quelques contenus offrant à ces portes leur résistance si particulière... Jusqu'à ce qu'elles volent en éclats, s'écrasant dans la pièce avec un fracas terrible qui se répercuta dans le silence du bâtiment. Il faisait toujours aussi sombre, mais l'absence de fenêtre en était sûrement la cause, ainsi que la coupure en énergie qui ne permettait donc guère de nourrir les différentes lampes de manière suffisante pour offrir un peu de clarté. Elle fit avec, passa par dessus les lourds pans métalliques avec un certain dédain, et continua de se faufiler dans des couloirs vides, et des salles tout autant vivantes, tout en se questionnant de manière ininterrompue : Comment cela était-il possible que personne ne se trouve dans les environs ?

   Elle n'avait guère de réponse, mais au point où elle en était, elle n'avait pas de grande raison de rebrousser chemin face à ce mystère, si bien qu'elle progressa sans le moindre doute, cherchant à se repérer dans ce flot de nouveautés qu'elle ne comprenait guère. Passant à coté d'un sandwich emballé dans un film plastique, elle s'en approcha lentement, curieuse, mais ne tarda pas plus dessus en décelant l'apparence grisâtre de ce dernier, comprenant par là que celui-ci n'était clairement plus propre à la consommation. Elle avait faim pourtant. Alors elle chercha un « distributeur », en ayant eu quelques informations par le biais de ses leçons, et surtout sachant pertinemment qu'il devait y en avoir dans la bâtisse, ayant déjà remarqué que certaines des femmes qui s'approchaient de sa cuve avait parfois une de ces choses appelées canette, ou sachet, et que ces éléments contenaient normalement quelques denrées qui ne sauraient sûrement que satisfaire son appétit. Finalement, la jeune demoiselle trouva les deux objets de sa recherche en même temps, une échappatoire, sous la forme d'un escalier qui semblait se diriger vers les strates supérieures du bâtiment, et un distributeur, juste à coté, qui semblait encore avoir en son sein quelques éléments comestibles, malgré la difficulté à les différencier à cause des ténèbres environnantes. Seule une vitre la séparait de l'objet de son désir, et comme jusqu'ici la violence avait toujours fait ses preuves, elle se concentra et vint mettre un petit coup rapide dans celle-ci pour la réduire en morceaux, s'offrant dès lors l'accès à une foule d'éléments qui ne saurait que combler ses besoins !

   Un sachet, puis deux, puis de quoi boire, puis à nouveau de quoi manger. La gourmandise eut tôt fait de lui faire consommer bien plus qu'elle n'avait normalement besoin, mais elle avait tellement soif de cette découverte que la moindre chose qui pouvait satisfaire sa curiosité venait immédiatement finir dans son gosier, du moins jusqu'à ce que sa satiété s'exprime par de léger grondement de la part de son ventre appréciant peu le soudain bourrage. Elle se redressa alors et repartit rapidement, grimpant les escaliers avec un certain empressement, se dirigeant immédiatement vers l'étage, et ne fut pas surprise de découvrir que les lieux étaient dans le même état de déperdition que les sous-sols, comme si soudainement la présence humaine avait disparu des environs, emportée par une tornade qui avait fait le choix de laisser intacts les meubles, mais de prendre une à une chacune des scientifiques du labo pour ensuite s'éloigner en la laissant en bas, seule et obéissante. Pour elle, c'était une bonne nouvelle dans le fond. Personne envers qui obéir, personne à satisfaire, Myriade allait pouvoir vivre pour elle-même, et donc s'offrir la joie de connaître ses expériences sans avoir à subir les lourds regards de toute une équipe prête à lui faire comprendre que le moindre de ses gestes pouvait être lourd de conséquences ! Filant hors des bureaux, rapide, agile, bondissant parfois par dessus une chaise renversée, ou les restes d'une table aux pieds brisés, elle parvint enfin auprès de la large porte à double-battant, et parvint par le plus grand des bonheurs dans le haut hall vitré qui servait d'entrée à l'ancienne compagnie d'armement. L'air frais arriva des vitres brisées, et elle en inspira une grande bouffée revigorante...

   Elle y était, la vie au dehors. Il faisait toujours aussi sombre quand elle regardait au dehors, mais elle n'avait pas la moindre crainte quant à ces ténèbres-ci ; ces formes étranges qui s'y déplaçaient lentement, ces êtres vivants qui y riaient avec la plus grande des honnêtetés, ces lumières au dehors qui avaient légèrement tendance à l'éblouir étant autant de signes d'une vie belle, d'une vie qui allait la changer, lui offrir enfin un renouveau, loin de sa cuve, loin des tests. Sautillante, la jeune demoiselle s'approcha de l'entrée, et vint à y remarquer une étrange couche de résine sur les premiers mètres, lui permettant enfin de comprendre pourquoi les lieux étaient vides et froids, privés de toute vie. Le bâtiment entier avait sûrement été vidé à la hâte, et ensuite il avait été bloqué, « muré », mis en quarantaine par quelques forces de la loi Tekhane, lui offrant dès lors toute possibilité pour se libérer, elle qui se trouvait dans les tréfonds de cette institution militaire. Pour le coup, elle aurait bien pu les remercier, mais se doutait que si les lieux avaient été ainsi mis à l'écart, ce n'était pas foncièrement pour qu'une expérience puisse de nouveau sortir, lui laissant à l'occasion quelques instants de réflexion pour se poser une importante question : si elle osait passer cette gangue de résine, allait-elle être poursuivie ? Il y avait des chances, la demoiselle expérimentale avait crû comprendre de ses apprentissages que Tekhos Metropolis était une ville fortement surveillée... Mais finalement peu lui importait, tout ce qu'elle souhaitait était de partir, de découvrir, de vivre. Et cette résine se trouvait entre elle et son idéal.

   Un coup, pour que la double-porte bien sommairement résistante vole en éclats, puis un second qui vint fragiliser l'épaisse couche désormais solidifiée de résine claire. Le troisième vint définitivement créer une brèche, par laquelle elle s'engouffra sans attendre, se faufilant sans la moindre hésitation, avant de débarquer de manière un peu maladroite dans la rue à cause de son empressement, enchaînant deux petits bonds pour tenter de garder son équilibre avant de rouler en avant, sur la route.

   Lentement, elle rouvrit les yeux, qu'elle avait bien étrangement fermés instinctivement quand elle était venue perdre l'équilibre, et ce qui vint capter son attention fut dans les plus grandes et inconcevables hauteurs de ce monde. Que connaissait-elle du monde ? La guerre, l'armement, le militaire, le scientifique... Bien des choses dont on lui avait bourré le crâne pour que Myriade devienne la meilleur arme de Tekhos Metropolis, et même la petite expérience acceptait le fait qu'elle serait tout à fait capable d'éliminer le moindre danger sans grand souci. Mais là, ce qu'elle avait devant les yeux, c'était autre chose que tout cela. Ce n'était ni la ville froide, ni les terres désolées qui entourent les environs, ni même la plus petite chose qu'elle avait vu dans ses rapports. Elle ne parvint à comprendre qu'en se rappelant à partir de quelles données ses prédécesseurs et elle-même avaient été nommées. Ce qui se trouvait actuellement haut dans le ciel, bien trop loin de sa portée, bien trop loin de toute tentative d'entravement, d'appropriation, ce qui brillait si haut au dessus de sa tête, c'étaient des étoiles. Et elle les aimait. Ces formes fantastiques, brillantes comme des joyaux, petites comme des têtes d'aiguille à cause de la distance, mais qui étaient si libres, intouchables, c'étaient des étoiles... Et elle, toute nouvelle vie en cette terre, les contemplait avec le besoin inhérent de graver en sa mémoire l'instant même où sa première erreur lui offrit son premier soupçon de beauté naturelle. La petite expérience, confuse, charmée, ne sachant plus quoi faire, restait là, au milieu de la route, contemplant ces petits points brillants dans le ciel...

   Et quand elle reprit contact avec la réalité, ce fut avec un crissement de freins, et l'éblouissante lumière d'une paire de phares.

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Chapitre 3 : Les deux têtes du projet OESA


   Luxienne n'avait pas cherché à calculer le temps qu'elle passait au chalet. Elle avait un soutien financier personnel, elle avait de quoi tenir longuement grâce à l'approvisionnement constant en nourriture, et surtout elle pouvait passer du temps avec une personne de confiance quand elle n'avait plus la tête à travailler, même si de nombreux sujets restaient souvent orientés autour des nouvelles technologies, et de ses projets en terme de recherches. Kirosu n'était pas foncièrement plus intelligent qu'elle, plus doué, ou plus malin, mais il possédait nombre de connaissance qui lui avaient échappé de prime abord, et qui s'étaient révélées particulièrement utiles lors de ses propres tentatives d'amélioration de ses travaux. Finalement, il lui avait dit un jour qu'elle « possédait l'esprit pour voir au-delà de bon nombre de problèmes, mais les bases, si importantes, te manquent pour concevoir ». Et ce n'était pas faux, à tel point qu'elle fut grandement étonnée que les dites bases ne lui aient jamais été inculquées lors de son apprentissage, lors de ses écoles, laissant finalement la femme sur la touche lors de ses premiers mois de triturations intellectuelles, le temps qu'elle puisse quérir de son ami de tous les jours le savoir suffisant pour prendre ses travaux sous un autre angle, progressif, et compréhensible. Et la plus grande des différences avait été énergétique, la menant à faire de nombreux calculs pour transposer cela sur un schéma Tekhan, la façon de procéder selon les Terriens étant tellement différente qu'elle s'était parfois casser la tête sur des semaines pour avancer une simple ligne d'équations...

   Mais, des années plus tard, son projet était viable. Elle ne l'avoua guère au vieil homme, mais elle avait en main tout ce qu'il lui était nécessaire pour pouvoir quitter le chalet normalement, et usa de quelques moments supplémentaires auprès de lui pour l'accompagner sur sa propre tentative de création technologique supérieure, lui offrant le tout de son savoir pour faire avancer ses hypothèses, ses recherches, au delà de son propre possible. Finalement, en quelques mois, elle lui offrit ce qui lui permis de retourner chez lui, et la soirée qui vint à préparer son départ fut des plus amusantes pour la jeune femme, un peu trop d'alcool peut-être, une crise de foie en plus, mais en tout cas, ils fêtèrent en grandes pompes leurs résultats, chacun profitant des clairs derniers instants qu'il leur restait avant de se séparer définitivement, eux qui s'étaient tant plus dans la compagnie de l'autre, par un esprit identique, et une volonté de savoir qui dépassait les espérances de chacun. Si Luxienne était plus mesurée sur l'éventualité d'ailleurs qu'ils ne puissent se revoir, au vu de son avancée, elle joua tout de même le jeu, se permit d'accorder à l'homme un sourire sincère, une discussion soulignée d'émotions, mais surtout de nombreux remerciements pour tout ce qu'il avait pu lui offrir, socialement et scientifiquement. Elle s'était attachée à cet homme dans le fond, et se dire qu'elle n'aurait plus d'occasion de le revoir était en soi source de grandes difficultés, mais elle faisait preuve d'une certaine résilience. Si elle ne pourra désormais lui reparler, elle gardera toutefois en tête sa personne, douce, et à l'écoute, qui avait tant permis à la femme de progresser...

   Et vinrent alors les adieux. Kirosu disparut grâce au portail de son invention en un instant, comme si il n'avait jamais existé, et Luxienne prit soin de venir quérir l'une des parties de la machine pour s'assurer que le portail ne puisse se rouvrir, ou que personne ne vienne en faire usage depuis les contrées de Tekhos, afin d'éviter toute forme de choc culturel entre deux mondes particulièrement différents. C'était la dernière demande que lui avait fait son ami, et elle comptait bien s'y tenir, n'imaginant pouvoir décevoir celui qui lui avait tant offert sur leurs années de colocation. Puis la scientifique commença à empaqueter ses affaires, à vider les lieux, à procéder à un nettoyage méthodique pour offrir au chalet sa pleine beauté, rendant les lieux dans l'état dans lequel le vieux couple de Tekhane le lui avait loué, pour finalement se diriger lentement hors de cet abri de bois et de chaleur avec un certain pincement au cœur, se rappelant encore de l'époque où elle s'y était installée, si innocente, si différente. Aussi étrange que cela puisse paraître, cette maisonnée lui évoquait désormais l'une des plus grandes évolutions de sa vie, un apprentissage de tous les jours qui l'avait changée, lui avait permis de trouver sa place, socialement. Désormais, elle retournait à Tekhos avec un projet, mûrement réfléchi, maîtrisé, elle ne comptait plus agir comme un simple rat de laboratoire... Non désormais, alors que ses pas se marquaient encore légèrement dans la neige perpétuelle des lieux, et que son sac volait au travers des airs pour atterrir lourdement à l'intérieur du véhicule adjacent, Luxienne faisait une croix sur le reste de son passé scientifique, et rentrait dans son outil de locomotion avec un léger sourire aux lèvres : elle avait le projet de devenir l'une des prochaines forces technologique de Tekhos, et seuls les kilomètres la séparaient désormais de son but.

   Elle déposa ses clés chez le vieux couple, et aussi étrange cela fut, l'étreinte que toutes deux lui offrirent fut pour le coup particulièrement difficile à supporter moralement. Elles aussi, il y avait des chances que la femme n'ait plus l'occasion de les revoir, et il était difficile d'accepter que des personnes aussi tendres, aussi agréables, soient ainsi laissées en arrière de sa part pour nourrir son besoin de vivre non pas comme une simple aide laborantine, mais bien comme la directrice d'un Empire technologique. Pourtant elle fit l'effort de leur offrir une accolade sincère, essayant de leur exprimer par celle-ci combien elle tenait à elles, qui avaient été si bienveillantes à son encontre, puis quitta les lieux pour se diriger le plus rapidement possible en direction de la capitale de son pays, voulant non seulement y retrouver sa sœur, et lui exprimer le tout de son idée, mais surtout s'installer une bonne fois pour toutes, et clouer le bec à tous les serpents qui n'ont sûrement pas chômé durant son absence pour la rabaisser cruellement, en partie grâce à son absence imprévue. Dans le fond elle jubilait un peu. Imaginer ces langues de vipère, ces idiotes, ces imbéciles, ouvrir leurs mirettes assez grand pour avoir l'air de poissons décérébrés devant l'excellence de son projet, de son travail, c'était une idée tellement plaisante, tellement satisfaisante pour la femme, elle n'espérait qu'être là pour l'observer de ses propres yeux. Mais pour l'instant, son regard était adressé à la longue route qui défilait devant elle, et aux sombres échos qui apparaissaient au loin, premiers signes d'une nuit rapide, pleine d'étoiles... Et elle avait encore beaucoup de chemin à faire.

   Dans le fond, quelle tristesse d'avancer de manière horizontale quand elle savait que le vertical était si proche d'elle, quasiment à sa portée...

   Quand elle entra dans Tekhos, la nuit était déjà tombée depuis un moment, et seuls ses phares éclairaient la route, ne lui offrant que bien peu de vision, l'astre nocturne étant quasiment absent en cette soirée, et les étoiles à peine suffisantes pour offrir un brin de lumière. Mais cela ne lui déplaisait pas, elle avait presque l'impression de se cacher de ses consœurs pour revenir, de fomenter un mauvais coup, c'était amusant. Elle laissait ses pensées se balader un peu en sus, n'ayant guère de crainte maintenant qu'elle ne se trouvait plus dans les grandes steppes arides qui environnent le territoire Tekhan et sa capitale, et si cela influait un brin sur sa concentration, elle n'en ressentait pas le moindre danger, les rues de la ville étant toujours sûres, et les accidents inexistants. Non, à la lumière des lampadaires, encore rares aussi bas dans la grande cité, mais tout de même suffisamment présents pour lui permettre de distinguer au loin les embranchements lui permettant de rejoindre le cœur de la ville, elle profitait encore autant que possible de sa solitude, et ne voyait pas ce qui pourrait l'empêcher, de quelque manière, de rejoindre dans les minutes qui suivent son objectif premier. Et pourtant, alors qu'elle tourne à gauche de manière tout à fait mécanique, innocente, suivant le traceur GPS munit avec l'automobile de location pour lui permettre de rentrer, la voilà qui débarque dans un lieu dénué de tout éclairage urbain, une longue route sombre en plein milieu de la cité. Surprenant, mais elle ne va pas rebrousser chemin sans raison, n'est-ce pas ? Elle progresse un peu plus lentement, seulement, par simple prudence, et ne saura que louer pareille prévention durant le reste de sa vie...

   Une forme, au beau milieu de la route, au beau milieu des ténèbres ! Elle pile, paniquée, écrase violemment le frein sous son pied, braque le volant pour tenter de se décaler de cette présence diaphane allongée au sol. Elle prie de ne pas la toucher durant les quelques instants où elle voit son véhicule s'approcher dangereusement, sans vouloir faire mine de cesser son mouvement meurtrier.

   Et elle s'arrête, sans un choc... Elle ne voit plus rien, le capot l'empêchant d'avoir une ligne de vue suffisamment correcte pour vérifier qu'elle n'ait pas touché ce qui se trouvait au sol. Sur son siège, le souffle chaotique, elle tente pendant un instant de reprendre son calme tandis qu'elle se pose encore la question de ce qui se trouvait en face d'elle, et qui ne semblait pas avoir fait preuve de la moindre réaction alors que le véhicule s'était apprêté à lui fondre dessus avec une vitesse qui n'aurait eu comme résultat que de réduire n'importe qui en bouillie. Il n'y a plus un bruit, il n'y a de lumière que les phares, et Luxienne ne remarque même pas le reflet miroitant de la résine à gauche de son véhicule, tant elle manque de clarté d'esprit face à la situation... Puis, incapable de rester une seconde de plus sans rien faire, elle ouvre vivement la portière, et saute de l'habitacle avec un empressement tout compréhensible, se rattrapant un peu maladroitement sur la route pour avancer rapidement en direction de l'avant du buggy pour s'assurer qu'elle ne vient pas de tuer quelqu'un dès son retour en ville. Bon dieu, elle revient avec une idée géniallissime, capable de changer définitivement le visage de Tekhos Metropolis, et elle se retrouverait immédiatement en tribunal pour avoir manqué de prudence, et ainsi d'avoir écrasé une innocente qui avait fait un malaise ? Elle ne pourrait jamais assez s'en vouloir si c'était effectivement la vérité. Alors elle se presse, elle craint ce qui pourrait se révéler à ses yeux, mais elle ne se laisse pas plus de temps pour réfléchir, ayant horreur de ne pouvoir sauver la victime de son manque de précautions si elle perdait trop de temps...

   Et elle se fige. Devant elle se trouve une adolescente, dénuée du moindre vêtement, mais surtout pleinement consciente, et attentive, relevant lentement les yeux pour que ses prunelles turquoises se posent droit dans le regard affolé de la conductrice tremblante d'émotions, s'imaginant déjà constater une charpie sanguinolente devant le pare-choc de son moyen de locomotion. Luxienne est... paralysée. Aussi étrange soit-elle, cette rencontre presque inconcevable la déstabilise, elle qui pourtant à fait tant d'efforts pour pouvoir agir normalement en société, mais elle ne s'était clairement pas préparée à une telle rencontre, et ne peut que rester là, interdite, muette, complètement désarçonnée, alors que la jeune femme allongée sur la route roule lentement, se plaçant sur le ventre pour ensuite commencer à se lever. Et finalement, la scientifique parvint à se faire un peu violence en voyant la demoiselle aux cheveux décolorés se déplacer, se remettant un peu en tête le fait que malgré l'aspect si étrange de la situation, elle avait tout de même manqué écraser cette « enfant », et qu'il était de son devoir de s’enquérir de son état, même si la honte étreignait son cœur à l'idée de lui avoir potentiellement fait du mal. C'est donc d'une voix mal assurée, difficilement maîtrisée, bégayante, et manquant clairement d'une intonation adulte que Luxienne tenta vainement d'échanger avec la figure pâle, en pleine quiétude, de l'accidentée, qui quant à elle se trouvait désormais bien campée sur ses deux jambes, droite, et le regard placé de manière toujours aussi directe dans celui bien moins à l'aise de la conductrice.

« B-b-bonsoir... Je m'appelle Luxienne, pardon de... d'avoir manqué de vous écraser, je... Vous allez bien, je ne vous ai pas blessée ?
 -  Luxienne ? Je m'appelle Myriade... Myriade Sang-Clair »

Luxienne et Myriade

Humain(e)

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 3 jeudi 04 mai 2017, 21:23:22

   Aussi étrange cela fut-il pour la dame affolée, mais le ton de son interlocutrice ne portait ni trace de rejet, ni de colère, et encore moins de ressentiment... Elle semblait juste fière d'avoir prononcé son nom et son prénom, et semblait à coté passablement perdue, comme si elle n'avait pas du tout conscience de ce qu'il venait de se dérouler, et qu'elle était juste sortie d'un rêve, un peu trop brusquement pour retrouver ses repères dans la réalité. D'ailleurs, au vu de la beauté de cette « enfant », il était en effet envisageable pour Luxienne que la demoiselle ne soit qu'une entité céleste, rêvée par quelque citadine en manque de réconfort charnel, et que cette dernière était tombée du songe à la réalité sans grande raison, pour débarquer soudainement au devant de ses roues. En tout cas, peut-être que les mots de la fameuse Myriade, détendus et peu vindicatifs eurent au moins un avantage certain, celui de rappeler un peu la scientifique à la réalité, de lui permettre de se rendre compte qu'elle parlait à une adolescente dénuée de tenue, et que sa nudité dans le froid des environs était peut-être agréable à sa vue, mais ne devait pas manquer de faire l'inconfort de son interlocutrice, perdue dans le froid nocturne... Enfin, la femme reprenait un peu du poil de la bête, ne craignait plus d'avoir produit une grave faute sur le territoire de Tekhos Metropolis, et se précipita donc en propos un peu désordonné, mais qu'elle espérait au moins assez clairs pour celle qu'elle venait de rencontrer, afin de lui indiquer quelques directives rapides, sûrement un peu plus propres à la situation que de bien agréables, mais futiles présentations.

« Tu... Tu dois être gelée, non ? Installe-toi donc dans la voiture, j'ai des vêtements dans une valise !Tu n'es pas blessée hein ? Tu me l'assures ? Oui bon euh, monte sur le siège conducteur, je vais chercher ce qu'il faut. »

   Elle lui tourna le dos, et vint à se diriger vers la partie arrière du véhicule, ouvrant la portière avec hâte pour aller quérir son sac du bout du bras, l'attirant jusqu'à elle pour l'ouvrir rapidement et chercher dedans quelques unes de ses tenues qui sauraient couvrir la nudité de la jeune femme, quitte à ce que ce soit un brin grand, mais au moins pour s'assurer que le froid ne pénètre pas sa chair, et ne vienne lui offrir un rhume ou quelques maladies désagréables. Pour être parfaitement honnête, elle ne comprenait pas bien pourquoi elle faisait cela, hormis le sens du devoir, le fait de ne pas laisser une si jeune femme dans le froid et complètement dénudée, car il n'était pas vraiment de bon aloi de traîner seule dans les ombres sans la moindre tenue, mais malgré tout elle se sentait la prime obligation de prendre soin d'elle, comme si soudainement elle était investie de cette mission alors même qu'elle ne savait que peu de cette demoiselle aux yeux turquoises. Alors Luxienne fouillait vivement ses affaires, faisant fi pour l'instant des sous-vêtements et autres vêtements de peu d'importance pour essayer de déceler parmi le bordel de ses affaires quelque chose comme un gros pull et un pantalon solide, des tenues dont le confort ne saurait que se prouver salutaire, et elle était tant concentrée sur sa tâche qu'elle ne fit même pas attention aux bruits de pas lents qui se rapprochaient d'elle, qui se trouvaient dans son dos, la laissant pleinement vulnérable au moindre problème envisageable. Dans d'autres lieux, d'autres circonstances, tout aurait pu arriver à la scientifique. Là, bienheureusement, seule la surprise vint la cueillir.

. . . . .

   Myriade avait bien du mal à comprendre ce qu'il s'était déroulé, ayant quitté son état de « méditation » de manière bien soudaine pour se retrouver finalement face à cette femme, belle, surprenante, douce, quelque chose qu'elle n'avait jamais vu au travers de ses tortionnaires, au travers des autres scientifiques. Elle était là, et la questionnait, la regardait comme un être humain, et en même temps comme quelque chose qu'elle semblait ne pas oser concevoir ou comprendre, comme si elle n'avait jamais eu l'occasion de connaître l'existence d'être de sa création. Elle était avec elle comme elle pourrait être envers une autre citoyenne, elle n'en doutait guère, mais tout cela était... agréable, touchant ? De manière quasi instinctive, complètement arbitraire, le projet inconnu se sentit lentement attirée par celle qui venait de lui parler, de s'inquiéter pour elle, puis de courir vers ses affaires pour lui en offrir, elle qui se trouvait nue comme un ver, sachant pourtant pertinemment que toute personne civilisée portait normalement des vêtements. Myriade venait-elle de trouver son attache ? Elle ne le savait guère mais ses pas la menèrent lentement sur les propres traces de celle dont elle venait de faire la rencontre, et sans un mot elle se glissa dans son sillage, oubliant volontairement les conseils de cette dernière pour dépasser le siège conducteur, puis se trouver dans son dos, la regardant fouiller frénétiquement son sac, en rejetant une partie des affaires s'y trouvant sur le siège arrière du véhicule. Elle l'appréciait, beaucoup, elle avait envie de rester auprès d'elle. Myriade avait froid aussi, alors elle n'attendit point, et réduisant encore un peu la distance entre elles, la jeune expérience tout juste libre se lova dans son dos, vint se coller tout contre la femme aux longs cheveux bruns, goûtant à la chaleur d'un contact humain... Et elle sut qu'elle ne voulait plus quitter cette dame au demeurant si généreux.

« Madame Luxienne ? Je veux vous suivre. Je n'ai pas d'endroit où me réfugier... Je n'ai pas d'endroit où vivre... Laissez-moi rester avec vous ! »

   Elle avait été directe, mais elle suivait son instinct. Elle savait que la femme prendrait soin d'elle, elle le sentait, et elle savait aussi de manière certaine que cette personne, qui en pleine nuit s'arrêtait pour faire attention à elle sans même faire preuve de la moindre méfiance, du moindre doute, était digne de sa confiance, de son attachement, de son appréciation. Elle avait bien ressenti que cette personne s'était tendue, les fibres de ses muscles ayant répondu instantanément à la surprise qu'elle venait de lui offrir, mais pour autant elle ne fit même pas le plus petit geste pour la repousser, interdite, et sûrement estomaquée par l'information soudaine qu'elle venait d'obtenir. Myriade ne doutait pas qu'elle pouvait refuser, après tout elle ne la connaissait que depuis quelques instants, et elle pourrait trouver cette invitation tellement étrange, tellement saugrenue, que comme beaucoup de monde elle n'aurait qu'à faire un rapide pas en avant pour se soustraire du contact soudain, et fermer la portière pour la laisser ici, sans d'autre réponse que le déni... Mais elle n'était pas comme les autres, et au bout de bien longues secondes, elle la sentit tourner lentement la tête, et la regarder avec un air confus, un peu perdu, un doute profond dans le regard. Sûrement se demandait-elle si elle pouvait faire cela, si même l'inconnue de la route ne venait pas de fuir une situation désastreuse pour sa jeune personne. Dans les pupilles brunes se trouvait l'apparence du choix, d'une décision importante, et pour l'occasion, Myriade n'avait pas tort un seul instant sur ce qui se déroulait dans l'esprit de Luxienne... qui ne parvint finalement qu'à s'exprimer de manière douce, incertaine, mais accueillante dans le ton, comme si elle venait d'accepter que le destin prenait parfois des décisions à sa place, et qu'elle n'avait d'autre possibilité que d'accepter celle-ci.

« Je n'ai moi-même pas de logement fixe à l'heure actuelle... Tu es sûre de vouloir me suivre ? Non pas que je refuserais, mais ma situation est...
 -  Certaine, je ne veux être qu'avec vous. »

   Quelque chose dans la voix de l'adolescente ne laissait même pas place au doute, ou au refus de la part de la concernée. Elle aurait pu tout dire, lui exprimer qu'elle n'avait rien pour elle, qu'elle ne pouvait s'occuper d'une jeune femme, ayant déjà bien du mal avec sa propre condition, ou qu'elle était en chemin pour une affaire importante qui ne pouvait être reportée, Luxienne pressentait tout de même qu'elle n'aurait aucune possibilité de refuser ce rapprochement, alors que le corps léger et délicat de la jeune fille continuait de se lover dans son dos. Elle se décala un instant tout de même, quittant le contact de la demoiselle aux yeux turquoises, et quand elle vint à se trouver nez à nez avec elle, observant son visage attentivement, y remarquant cette étrange lueur dans les yeux, elle n'eut même pas la force de s'imaginer résister à son injonction. Quelque part, peut-être que la scientifique ressentait qu'il était déjà trop tard pour faire marche arrière d'une quelconque manière, et elle vint la prendre dans ses bras, lentement, pour l'approcher de sa poitrine, et la conserver tout contre elle, lui offrant dès lors autant sa chaleur que son affection, son appréciation. C'était illogique, inconcevable pour la partie la plus stricte de son esprit, mais dans un autre sens elle acceptait que parfois, un événement aussi étrange ne puisse trouver de justification. Elle allait prendre soin de cette jeune femme, et de manière assez rapide, après l'avoir étreinte, elle la relâcha pour prendre d'une manière bien plus calme, bien plus sereine, deux épais vêtements qu'elle vint à lui tendre sans la moindre hésitation, avant de lui parler avec un tout empli d'une bienveillance désormais souveraine dans sa manière de concevoir l'incongrue situation :

« D'accord. Habille-toi Myriade, nous allons trouver un endroit où dormir au chaud, et tu m'expliqueras ce que tu faisais ici, d'accord ?
 -  C'est promis, répondit vivement la jeune femme en enfilant à la hâte la tenue réconfortante, puis prenant place dans la voiture, tandis que Luxienne partit pour redémarrer celle-ci, et se remit en route, à la recherche d'un quelconque hôtel. Merci.
 -  Je... Tu n'as pas besoin de me remercier. Nullement besoin. »

   Si elle comprendra un jour pourquoi le destin l'avait mise sur sa route, pour l'instant, elle n'y comprenait rien, mais avait juste fait un choix crucial, et tout simplement irresponsable selon elle : elle prendrait soin de cette adolescente, et avec un peu de chance, pourra même lui offrir quelque chose de bien plus important qu'elle n'aurait jamais pu l'imaginer, une vie simple, et normale.

. . . . .

   Si Luxienne eut fort à faire pour trouver un moyen de prendre soin de la jeune femme qu'elle avait recueillie dans les jours qui suivirent, ce ne fut pas pour rien, l'adolescente semblant étonnement peu au courant des us et coutumes des citadines, non sans parler de sa curiosité sans faille sur les différents éléments qu'elle semblait découvrir , de manière bien surprenante, comme le simple fait qu'un lit avait été source de multiples discussions, ou qu'une cafetière avait presque été insultée d'outil du diable au vu de sa capacité à faire couler de l'encre de manière continue et profuse. Finalement, la scientifique avait l'impression de devoir prendre soin d'une jeune femme dans le corps, mais d'une jeune enfant dans l'esprit, et le rapprochement forcé qu'appliquait Myriade envers sa tutrice avait peut-être comme avantage de leur offrir bien des instants pour que la cadette Mueller puisse lui enseigner ce qu'elle savait, mais cela avait aussi le défaut de montrer à la femme aux cheveux bruns le manque clair de retenue et de sang-froid que possédait parfois sa protégée, celle-ci étant capable de passer par des phases de panique, ou de trouble, si violentes qu'elles avaient tendance à la désarçonner. Mais elle faisait l'effort, et si pour l'instant elles ne vivaient toutes les deux que dans une pauvre chambre d'hôtel que la scientifique avait pris soin de louer discrètement, de peur qu'on ne la prenne pour une proxénète vu qu'elle avait dans la main une jeune fille à la nudité parfois troublante, ce n'était pas pour autant que les deux ne parvenaient pas à s'y plaire, Luxienne développant bien malgré elle un attachement croissant face au comportement aimant et attendrissant de l'adolescente.

   Le seul bémol de cette histoire, c'est qu'elle n'avait pas encore eu le temps de contacter sa sœur, ou le personnel exécutif du domaine scientifique pour mettre en marche son projet, et commencer à établir son plan premier, qui était malgré tout la raison pour laquelle elle était revenue à Tekhos Metropolis à la base. Elle dut ruser par plusieurs fois pour tenter d'ailleurs d'approcher le téléphone, Myriade étant tant et tant incapable de ne pas chercher l'attention de celle qu'elle avait choisie comme soutien, comme compagne, comme mère et comme unique famille, qu'elle avait eu la malheureuse tendance à l'empêcher de se déconcentrer d'elle, toujours en allant pour l'obliger à se tourner vers elle, à l'observer, à lui parler encore et encore de ce monde, ou d'elle-même. Finalement, ce fut tard dans la nuit, quand elle put s'assurer que la jeune femme soit bien endormie, qu'elle ait trouvé le plus profond des sommeils, le plus doux des repos, que Luxienne parvienne enfin à s'éloigner un peu sans qu'elle n'ouvre immédiatement les yeux pour la rattraper, et la ramener contre elle, une expérience qu'elle avait d'ailleurs déjà vécue, et dont elle avait compris que ses futiles résistances ne sauraient la sauver, tant l'étreinte de l'adolescente était puissante et implacable. En tout cas, ce soir-là, elle put enfin quitter la pièce principale, et vint chercher le téléphone accroché a mur dans l'entrée, avant de commencer à taper tranquillement le numéro de Dénève, puis de lancer un appel, le plus calmement du monde, se préparant déjà à s'excuser pour l'heure tardive, avant quelle ne se trouve bien surprise d'entendre sa sœur décrocher immédiatement après le premier signal, bien trop alerte pour être en train de dormir :

« Allô, Dénève Mueller, j’écoute...
 -  Bonsoir grande sœur, je ne m'attendais pas à ce que tu répondes si vite !
 -  Luxienne ! Bon sang, tête de nœud, j'avais plus la moindre nouvelle depuis que tu m'avais annoncé ton retour, je me suis fait un sang d'encre !
 -  Pardon, je suis désolée pour cela, mais je dois avouer que j'ai eu... un petit problème, une surprise, qui d'ailleurs ne m'a pas vraiment laissée approcher du combiné... Enfin, que fais-tu levée à cette heure ?
 - … Une surprise qui ne me laisse guère me reposer...
 -  Est-ce que cela sous-entend une partenaire se...
 -  Tais-toi, tais-toi de suite ou je viens te voir pour t'étrangler ! »

   Elle ne put s'empêcher de rire à la réaction si vive de sa sœur. C'était étrange de se retrouver ainsi, de se savoir si proche, dans la même ville, mais qu'elle ne pouvait pas encore faire autrement qu'échanger par téléphone, Luxienne pour une raison qui sommeillait à quelques pas d'elle, et Dénève pour des raisons qu'elle ignorait, mais qui semblaient assez importantes du point de vue de sa sœur pour qu'elle n'accepte pas qu'on fasse preuve du moindre humour à ce sujet. En tout cas, même en dehors du fait qu'elle adorerait la voir, et que cela ne semble guère possible en l'état actuel des choses, elle vint à sourire avec grande joie en entendant les propos de son aînée, et prenant tout de même le temps de calmer son léger rire, non seulement parce qu'elle ne voulait pas vexer la plus proche membre de sa famille, ni réveiller la plus proche demoiselle des environs, elle fit l'effort de se concentrer pour finalement tourner son esprit vers les sujets les plus importants, voire même urgents. C'est donc de manière bien surprenante pour la femme se tenant de l'autre coté du fil que la voix de Luxienne vint soudainement se faire plus claire, plus directe, plus simple aussi dans son ton, mais surtout beaucoup plus assurée qu'elle ne l'avait jamais été, alors que le propos prit de suite le tout de son sérieux. Aller, première étape, prévenir Dénève de son projet, et lui demander de contacter si possible le personnel capable de financer tout cela. Deuxième étape, lui demander de plus amples informations sur ce qu'elle avait recherché depuis son arrivée dans la chambre d'hôtel, afin de découvrir qui est la jeune demoiselle désormais sous son aile :

« Désolée grande sœur. Bon je ne t'appelais pas pour te taquiner, mais j'avais besoin de te parler, rapport à ce fameux projet que j'ai théorisé, ainsi qu'un autre un peu plus particulier.
 -  Je t'écoute.
 -  Tu t'y connais mieux que moi, j'aurais besoin que tu me mettes en contact avec d'éventuels investisseurs. Des personnes capables de débourser de manière à ce que je puisse acquérir un siège d'action, et énormément de matériel.
 -  Cela va être compliqué, tu n'as que peu de notoriété scientifique, encore plus maintenant que tu es sortie du circuit depuis plusieurs années.
 -  Tu peux le faire ?
 - … Y'a des chances. Je te tiendrais au courant... Et sinon quel est l'autre sujet ?
 -  J'ai besoin que tu me fasses une recherche sur la compagnie Firmament, notamment sur leurs derniers projets d'armement. J'ai vu qu'ils avaient été placés sous « coque », mais... Mais je crois que quelqu'un est sorti de celle-ci... Dénève ? Dénève tu es là ?
 -  … Couleur des cheveux ? »

    Le ton que l'aînée venait d'employer ne laissait pas vraiment de place aux doutes, non seulement elle savait pertinemment ce qui s'était passé à la compagnie Firmament, mais surtout elle avait eu le soin de comprendre immédiatement que sa sœur ne s'intéressait pas à ce sujet sans raison. Et Luxienne comprit tout aussi bien que Dénève n'était pas foncièrement enchantée de savoir qu'elle avait recueilli la jeune adolescente :

« Rose...
 -  Elle est dangereuse, Luxienne.
 -  Elle est perdue.
 -  Tu me fatigues, bon sang ce que tu peux être épuisante. Il a fallu que tu rentres au pire des moments, et en plus tu as trouver le moyen de te compliquer la vie avant même d'arriver à bon port...
 -  Que veux-tu, je suis pas à l'aise dans le rôle de la Tekhane modèle.
 -  Je ne répondrais pas à cela ! Bon, je sens que tu ne vas en faire qu'à ta tête, alors je vais t'envoyer les informations que j'ai, mais je te prie de considérer que tu n'as pas affaire à un être humain !
 -  Oui oui, bien entendu.
 -  Le ton n'y est pas... Enfin bon, tu auras tes informations dans la semaine, autre chose à dire avant que je n'aille déchirer mes oreillers de frustration, à cause d'une imbécile de petite sœur suicidaire ?
 -  Un grand merci Dénève, je t'aime !
 -  Je t'aime aussi insupportable petite peste. A tout bientôt. »

   Et l'appel se termina, laissant alors la cadette, dans le noir, un doux sourire aux lèvres, poser le téléphone sur son support pour quitter le couloir et retourner auprès de celle qu'elle avait si étrangement rencontrée il y a de cela plusieurs nuits. Dangereuse ? Sûrement, elle avait remarqué lors de son dernier déplacement que la résine utilisée pour condamner un bâtiment avait été brisée, juste devant l'endroit où elle l'avait récupérée, mais... Elle était aussi dangereuse qu'incapable de désirer la douleur, ou l'affrontement. Elle s'en était rendu compte assez vite, la jeune demoiselle n'avait dans le fond que le souhait de la liberté, de la vie hors de sa cage, et sa curiosité, autant que son être tout entier, exprimait finalement qu'elle aimait ce qui l'entourait, et qu'elle voulait par dessus tout faire attention à ses gestes pour ne rien briser, ne rien abîmer. En quelques jours, Luxienne avait bien remarqué que cette adolescente luttait presque contre elle-même pour ne pas devenir une source d'ennuis, de problèmes, et elle trouvait cela non seulement incroyablement touchant, mais surtout honorable, de la part d'un être qui devait sûrement posséder en son cœur nombre de griefs envers l'unité scientifique de Tekhos Metropolis, et qui aurait ainsi pu largement quitter un comportement aussi pacifique pour se lancer dans une action bien plus vindicative et violente. Alors non, elle ne voulait pas l'abandonner, elle ne voulait pas suivre les sous-entendus de sa sœur, et l'abandonner à des autorités qui ne sauraient que lui offrir l'occasion de perdre le contrôle, et de devenir ce qu'elle ne souhaitait être, un monstre.

   Non, elle voulait plutôt accepter son attachement, et, se posant sur le bord de son lit, passant tendrement ses doigts dans la tignasse rose de la jeune demoiselle, elle se promettait de continuer de veiller sur elle, de la protéger, de la garder le plus affectueusement possible à ses côtés... Parce que ce petit bout de femme l'avait choisie, elle, sans chercher à lui demander ce qu'elle faisait là, sans lui demander si elle allait lui faire du mal... Elle lui avait offert le tout de sa confiance, et au plus profond de son cœur, Luxienne savait pertinemment qu'elle ne pourrait jamais briser pareil présent.

. . . . .

   Les informations que détenait Dénève lui furent envoyées quelque jours plus tard, et si ce ne fut pas la surprise qui l'affecta, ce ne fut pas pour autant que Luxienne ne manqua pas de ressentir un léger pincement de cœur en observant la jeune femme qui se trouvait actuellement à dormir auprès d'elle. Si calme, si douce, si tendre, elle ne s'était guère imaginé que cette demoiselle qu'elle avait eu l'audace de récupérer en pleine nuit était si dangereuse, en contrepartie de son bon comportement, qu'elle se trouvait littéralement en compagnie d'une forme de vie créée de toutes pièces et dont le seul et unique but premier était la destruction et la mort. Pourtant, quand elle vint à finir le message, elle eut l'étrange et intime conviction que sa sœur n'avait plus vraiment le don de lui offrir un propos aussi tranché, et qu'elle l'invitait presque à la garder à ses cotés pour lui apprendre une autre forme de vie, une autre façon de voir le monde, et comme ci cela n'était pas suffisant, elle put même lire entre les ligne une invitation des plus singulières, à savoir d'offrir à Myriade le statut de native de Tekhane, pour s'assurer qu'elle puisse avoir les même droits que ses consœurs. Honnêtement, cela prendrait du temps, mais il était vrai que s'il y avait bien un moyen de lui permettre de vivre convenablement, elle se trouverait dans l'obligation de cesser de la cacher aux yeux de tous, et de lui prouver par  la même qu'elle était tout à fait apte à vivre comme chaque femme se trouvant dans ce beau pays. Fermant le clapet de son ordinateur portable, elle ne manqua pas de commencer à réfléchir à ses actions futures, et si le planning lui paraissait serré, elle comptait bien contre-balancer pareille complexité par une efficacité à nulle autre pareille...

   Un mois, puis deux, et elle commençait déjà à sentir que les choses allaient se dérouler sans le moindre accroc. Elles commencèrent à sortir au dehors, tout d'abord pour pouvoir chercher, à droite ou à gauche, et en laissant à la chance toute possibilité de s'exprimer, un logement qui saurait convenir à la scientifique et à sa protégée, enchaînant avant tout les appartements de bonne qualité pour pouvoir cumuler le confort monétaire, et la joie de vivre dans un lieu assez digne pour que les deux femmes ne se marchent pas dessus. De même manière, et avec un plaisir relativement optionnel, Luxienne eut toute occasion de faire face à l'administration Tekhane pour faire enregistrer Myriade en tant que citoyenne, et put enfin découvrir que si son aisance au langage et sa vivacité d'esprit étaient de grands avantages dans de telles situations, sa beauté naturelle commençait aussi à faire ses preuves, et plus d'une personne soutenait une réponse plus rapide si elle avait le don de répondre à certaines attentes... Il ne lui fallut que choisir entre l'accord ou le chantage face à de tels propos pour faire avancer la procédure. Et puis, parallèlement à tout cela, elle faisait l'éducation de celle qui s'était infiltrée dans sa vie sans prévenir, avec ses yeux d'une si belle couleur, et cherchait à lui offrir la plus grande partie de son savoir, trouvant chez elle une élève attentive et sérieuse, ce qui ne manqua guère de faire sa fierté. Ceci, cumulé au simple plaisir de ne pas être à nouveau seule, et d'avoir quelqu'un avec qui échanger à chaque jour que Dieu faisait, était une source intense de satisfaction pour la femme, qui put finalement trouver le calme nécessaire pour s'attarder à de plus importants projets...L'OESA.

   Bon pour l'instant cet acronyme ne voulait guère dire grand chose, mais grâce aux contacts de sa chère aînée, et du temps qu'elle parvenait à s'allouer pour passer coups de fil et envoyer d'autres importants messages, elle se mit lentement à mettre en place le système de financement nécessaire à son grand projet, et se préparait même à une des entrevues les plus importantes de son histoire. De sa requête, trois réponses des plus intéressées avaient fait écho, et si la date n'était pas encore définitive, elle ne manqua guère pour autant de préparer une présentation des plus claires, des plus précises, chiffres à la clé, ainsi qu'explication du projet sur son évolution dans la durée au vu des différents soutiens monétaires qui pourraient lui être proposés. Finalement, dans ces moments-là, où elle se trouvait penchée sur ses feuilles pendant de longues heures, le plus dur était de faire accepter à Myriade qu'elle devait se concentrer, et que donc elle ne pouvait la soutenir dans son ennui croissant, jusqu'à ce qu'elle cède finalement devant les grands yeux implorants de la demoiselle, et qu'elle finisse par rattraper son retard dans la nuit. D'ailleurs, elle eut fini sa présentation bien avant que la date du rendez-vous ne soit atteinte, si bien qu'elle eut tout le bonheur et l'amusement de se préparer à cette rencontre en compagnie de sa chère camarade de vie, cette dernière ne manquant pas de lui poser parfois des questions particulièrement pointues, la déstabilisant assez souvent, mais lui offrant dès lors le soin de corriger ou de préciser son discours avec empressement.

   Et en six mois, elles avaient un logement, ainsi qu'une carte d'identité pour la jeune Myriade, qui n'arrivait même pas à s'en détacher, la gardant auprès d'elle comme la preuve de sa vie Tekhane, et de sa liberté désormais assurée. Ne restait finalement à Luxienne qu'à rendre son projet vivant, qu'à le concrétiser, et la date de son entrevue approchait à grand pas.

   En moins de temps qu'il n'en fallut, elle se retrouva là, dans cette pièce aux murs simples, à la table ronde exagérément grande pour le nombre de personnes conviées, et sortit lentement son premier rapport pour le tendre en direction des trois femmes qui se trouvaient là, à la regarder d'un air intéressé mais glacial, avant de commencer à présenter son projet, théorie à la clé.

« Mesdames, je vous remercie de vous être déplacées pour m'offrir un peu de votre temps. Je suppose que vous avez pris le temps de vous informer un peu sur ma personne, et je souhaite que vous ne voyez guère en mon absence de la capitale un manque de sérieux, mais le besoin de préciser mes idées, et mes savoirs, dans le but de vous offrir aujourd'hui un projet viable, clair, et dont la réussite n'est affaire que de ressources. »

   Elle prit une pause, avant de se redresser, et de se diriger vers le tableau nécessaire à ses explications, ramassant un marqueur sur le chemin pour commencer à inscrire les éléments les plus importants de sa thèse à mesure qu'elle en faisait la présentation.

« Ce projet, nommé OESA, pour Organisme d'Exploration Spatiale Avancé, est ici pour palier à l'un des plus grands problèmes de notre société pourtant si avancée : l'envoi de véhicule au delà de notre territoire en direction de l'espace, du vide stellaire. Si je dois vous faire un résumé rapide, avant d'entrer dans un propos plus détaillé, je me permettrais de dire que nous avons toujours eu le savoir, les matériaux, les forces et les ressources pour pouvoir le faire, mais nous bloquions sur notre énergie, dont les valeurs de puissances trop importantes menaient nos tentative à l'auto-destruction. Nous, peuple Tekhan, avions tant et tant progressé que nous manquions de base, tout particulièrement pour de premiers tests en vue de calibrages, et de précisions, sur nos données et informations en matière d'évolution spatiale. »

   Elle prit un fascicule, l'ouvrit à la page la plus importante pour souligner son propos, et l'envoya glisser le long de la table pour se trouver en face des trois femmes, qui la regardèrent avec un mélange d'intérêt et de doute. Elle avait accroché le poisson, il était temps que le reste de sa présentation vienne à annihiler leurs réticences quant à son projet. Tant mieux, elle avait du temps.

« Je compte faire un pas en arrière, prendre le temps de développer une technologie précise, peut-être ancienne du point de vue du monde Tekhan, et me baser sur les résultats de cette création pour transposer le tout sur une base technologique équivalente à nos meilleures productions. Ce que je vous propose, mesdames, c'est de me soutenir, financièrement, pour un projet dont le coût sera de toute manière bien inférieur, car passéiste, et de nous revoir au terme des premiers résultats afin de définir les besoins de l'entreprise pour transformer cette phase de test en le fleuron du travail spatial Tekhan. Ce projet ne vous lance dans aucun risque, mais sa réussite, son aboutissement, aura de quoi vous assurer une place bien supérieure à tout ce que vous avez pu imaginer en terme de domination technologique. Avant de poursuivre, toutefois, je souhaiterais entendre vos avis, vos questions, pour m'assurer de votre coopération.
 -  Votre projet... j'attends d'en connaître de plus amples détails, malgré votre prétendu génie. En revanche, quoi que vous fassiez, il va vous falloir une équipe, un lieu de travail, et je ne crois pas que vous ayez quoi que ce soit pour parvenir à monter cela suffisamment rapidement pour être efficace, même en considérant la viabilité de votre travail.
 -  Une équipe, je peux vous assurer de sa formation dans un délai de deux semaines, en considérant que je puisse hausser un peu le prix du salaire étant donné la largesse monétaire qui me serait attribuée, au vu du faible coût de notre première phase d'accomplissement du projet. Et un lieu, j'en ai un aussi, car je compte demander le rétablissement de la zone de recherche Firmament, selon les lois 458-a, et 463-c du code scientifique Tekhan. »

   Un court silence... Puis une des trois femmes s'exprime après un rapide coup d’œil auprès de ses camarades, un léger sourire aux lèvres :

« Continuez donc, nous sommes toute à votre écoute. »

. . . . .

   La réponse ne tarda guère à venir, une semaine après leur entrevue, le résultat était unanime : non seulement elle obtenait les fonds suffisants pour mettre ses recherches en marche, mais elle avait obtenu en sus de quoi employer une équipe complète, et ne lui restait plus que l'accord juridique viable pour prendre possession du bâtiment de l'ancienne compagnie Firmament, afin de s'y installer de manière claire, et de commencer à mettre en place le projet. Le seul détail gênant à cela venait de la loi 458-a, stipulant « qu'un bâtiment qui a été condamné ne pouvait être réutilisable et rendu à une entreprise scientifique qu'à la preuve ultime que celui-ci ne portait en lui aucun élément capable de mettre en danger le peuple Tekhan », et ainsi qu'il était du devoir de Luxienne de s'y rendre, en compagnie d'un groupe armé, afin de produire une observation minutieuse des lieux. Pour être parfaitement honnête, elle vint à profiter des fonds qui lui avait été offerts pour contacter une personne des plus utiles, Dame Enorie, chasseuse de prime et passable brigande, pour l'employer deux jours avant sa venue dans les locaux pour s'y faufiler, et ôter les quelques éléments dangereux s'y trouvant, sa grande sœur lui ayant passer une liste des éléments troublants qui avait valu la fermeture obligatoire de la compagnie, et l'élimination d'une partie des chercheuses qui s'y trouvaient. Point besoin de préciser qu'elle eut aussi le don de lui offrir une bombe de résine, obtenue sur le marché noir, afin qu'elle puisse reboucher le trou une fois sortie, ce qui fut fait avec un savant savoir-faire... Quelques magouilles ne sauraient lui faire de mal n'est-ce pas, surtout quand elle était capable de s'arranger pour que les données les plus dangereuses disparaissent d'elle-même.

   La visite ? Elle se fit sans encombre, rien ne put être découvert dans les environs, et seul un éboulement fut remarqué dans la zone la plus basse de la structure, réduisant le matériel technologique en pièce. De même, les données les plus dérangeantes, celles qui avaient valu la fermeture des lieux se trouvèrent être corrompues, détruites par quelque virus ou technologie visant à crypter des informations de manière irréversible sans le code nécessaire, et il fut accepté par tous que leur élimination n'était donc pas une grande perte, ce qui permit à la femme de s'assurer tranquillement d'effacer elle-même, et avec un soin tout particulier, les données qui pourraient permettre un jour de comprendre que sa protégée n'était pas humaine, comme elle l'avait signifié dans les papiers de citoyenneté. Tout se déroula donc comme elle l'avait prévu, et ce fut sans la moindre hésitation de la part des hautes instances qu'elle put rapidement former l'OESA au cœur du bâtiment, les lieux passant de vides à effervescents en moins d'une journée, le tout sous le regard ravi d'une femme qui sentait enfin trouver sa place au cœur de l'univers scientifique de Tekhos Metropolis. La prochaine étape serait, bien entendu, de s'assurer qu'elle puisse rapidement quérir les parts de société suffisantes pour ne plus avoir besoin du soutien de ses créditrices, mais elle avait deux bonnes années devant elle pour s'en occuper, aussi se permit-elle enfin une détente fortement appréciée, et se tourna donc bien plus vers un sujet d'importance : sa protégée.

   En effet, Myriade grandissait, et il fallait absolument que Luxienne s'assure de lui trouver une place agréable en ce monde, où elle ne saurait souffrir de ses activités, ou de ses connaissances, si bien qu'elle eut la belle idée de lui trouver elle-même un emploi dont elle pourrait être fière une fois qu'elle aurait atteint l'âge nécessaire à celui-ci. Toutefois les discussions autour de ce sujet furent rapidement avortées par la demoiselle aux cheveux rose : elle ne comptait ni quitter la scientifique, ni même se trouver loin d'elle plus d'une journée, et ce ne fut pas sans de longues tentatives de la part de la belle brune pour l'inviter à trouver un moyen de vivre sans elle. Non, Myriade était claire à ce propos, si elle devait vivre quelque part, c'était aux côtés de Luxienne, et rien au monde ne saurait lui faire choisir une autre façon de concevoir ce monde.

   Alors, lentement, une autre idée leur vint en tête. Myriade, dans toute son enfance, dans toute sa vision de la beauté de ce monde, où elle pouvait vivre libre, loin des expériences, loin des cages et des essais, n'avait toujours eu que le souhait de rejoindre les étoiles, et de pouvoir un jour s'y laisser porter avec toute la joie du monde, de manière insouciante... A la lumière de ce constat, Luxienne vint un soir avec une proposition envers sa protégée, une proposition qu'elle craignait, car elle ne savait comment la belle jeune femme pouvait y réagir, ni si cela avait des chances de transformer leur relation en quelque chose de moins naturel, de moins sain. Mais elle espérait sincèrement que cela puisse marcher, que cela lui offre non seulement un projet dans la vie autre que de toujours rester à ses cotés, et franchement, elle ne voyait pas d'autre possibilité de concilier  à la fois la nature des plus affectueuses de Myriade à son encontre, et ses passions, mais aussi de lui permettre d'atteindre des rêves qu'elle n'avait jamais considéré comme réalisables. Alors, la prenant entre quatre yeux un soir, tandis que les deux femmes finissaient un repas plutôt bon marché, acheté à la traiteur du coin, Luxienne prit son courage à deux mains, et se décida pour la première fois de raconter à sa protégée ce qu'elle avait fait, comptait faire désormais, et voulait donc lui proposer, afin qu'elles soient toutes deux toujours ensemble, tout en offrant à Myriade sa propre occasion pour briller. La première fois, elle manqua d'ailleurs de s'étouffer avec une boulette de viande épicée, mais après un bon coup d'eau, elle parvint enfin à s'exprimer :

« Myriade, cela fait combien de temps que je t'ai récupérée ?
 -  Hum... huit cent quatre-vingt quatorze jours, précisément, pourquoi ?
 -  Écoute, je... Je voulais te dire quelque chose. Tu te souviens de mon projet ? Celui de créer un véhicule spatial, et de pouvoir l'industrialiser, de manière à offrir à la société Tekhane un moyen de partir pour les étoiles ?
 -  Oui, je m'en souviens, mais ça ne répond pas à ma question.
 -  Désolée, j'y viens. En fait, j'avais besoin d'un bâtiment pour y créer le centre de recherche, et... j'ai fait usage du bâtiment devant lequel je t'ai trouvé. J'espère que ça ne te gêne pas.
 -  Pas le moins du monde, mais s'il n'y avait que ça, tu ne m'en parlerais pas. Donc qu'y a-t-il d'autre ?
 -  Eh bien... Comment te dire... Est-ce que cela te gênerait de t'y retrouver à nouveau ? »

   Le silence, un silence de plomb. Sans un mot, mais non sans que son expression parle pour elle, Myriade vint à poser lentement sa fourchette sur le bord de son assiette, et ne lâchant du regard sa tutrice, semblait laisser ses pensées se percuter dans son crâne avec un manque de contrôle prévisible. Retourner dans le lieu où elle a été conçue, et utilisée comme une source d'expérience et d'amusement par des femmes au manque clair d'humanité, capable de la transformer en arme sotte et servile sans le moindre libre-arbitre ? L'idée même de poser un pied dans l'entrée lui était désagréable, lui était difficile, lui était violent. Elle ne comprenait juste pas pourquoi sa tutrice, celle qu'elle aimait, celle qu'elle adorait, voulait la renvoyer là-bas, d'une quelconque manière, et si cela ne tenait qu'à elle, elle serait sûrement sortie de table immédiatement, mais elle se voyait mal couper court à la demande d'échange de Luxienne sans pour autant lui donner une réponse claire... ou au moins d'essayer de comprendre les motivations qui l'avaient menées à faire une telle erreur d'appréciation dans son discours. Alors elle vint à lâcher son couvert, se posa de manière à croiser les bras devant sa poitrine, qui gonflait de plus en plus désormais, la gênant bien souvent, et continua de planter son regard dans celui de la scientifique avec un clair manque de contrôle de ses émotions, paraissant presque agressive pour le coup. Et puis, malgré cette situation de malaise, la jeune femme parvint enfin à s'exprimer, non sans mal, et avec un brin de colère dans la voix, mais au moins sans que ses termes ne soient teintés de peur ou d'appréhension :

« Je ne veux pas, je n'aimerais pas, je t'ai... raconté ce qu'il s'y était passé. Luxienne je veux juste, juste être avec toi, et toi seule. Alors s'il te plaît, dis-moi pourquoi tu me parles d'une telle chose, surtout que tu savais que ça allait me faire du mal...
 -  Eh bien... Je ne veux pas que tu restes seule ici, à ne rien faire et … et j'ai eu une idée, à un moment. Tu pourrais travailler avec moi, en tant que secrétaire mais surtout... je voulais t'offrir ton rêve.
 -  Mon... rêve ?
 -  Tu aimes les étoiles, non ? Eh bien... Nous aurons besoin de pilotes quand les projets seront aboutis et du coup... Connaissant tes performances, tes forces, ton endurance, je ne pourrais rêver d'une meilleure pilote que toi Myriade.
 -  Tu... souhaites donc m'employer, dans le lieu où j'ai grandi, auprès d'autres scientifiques, et m'offre l'Espace en échange ?
 -  En gros, c'est cela. »

   Plus un mot... Lentement, la jeune femme poussa sa chaise, se redressa lentement, et se mit à approcher lentement de sa tutrice sans laisser le moindre petit signe pour permettre à la scientifique de comprendre quelles étaient ses intentions. Elle fit le tour de la table, tandis que Luxienne l'observait, et quand elle se posta à ses cotés, la brune ne manqua pas de se déplacer un peu avec sa chaise pour se tourner en direction de sa protégée, l'observant alors de plus près, avec son air décidé, son regard droit, et sa posture un peu raide, qui laissait toutefois entendre, désormais, qu'elle avait bien du mal avec ce qu'elle s'apprêtait à lui dire. Allait-elle encore rejeter son offre, lui dire qu'elle n'avait rien de mieux à faire que de rester terrée dans cet appartement, loin du moindre écho social, et qu'elle préférait n'avoir jamais personne d'autre à rencontrer que la scientifique un peu perdue qui se trouvait assise juste devant elle ? Très honnêtement, Luxienne priait que ce ne soit pas le cas, elle espérait qu'autant d'hésitation ne soit que la preuve qu'elle comptait agréer à ses demandes, qu'elle allait lui offrir non seulement son accord, mais aussi par là lui montrer qu'elle était prête à faire des efforts pour se comporter effectivement en citoyenne de Tekhos, et non comme une expérience en liberté qui ne peut oser montrer son visage à d'éventuels tortionnaires. Elle l'espérait toujours quand, rapidement, sa protégée se pencha pour se tenir aux accoudoirs de la chaise qu'occupait la cadette des Mueller, et qu'elle vint placer son visage à quelques centimètres du sien, pour enfin s'exprimer avec un ton déterminé, direct :

« Je peux le faire. Pour toi je peux le faire Luxienne, je peux y aller, si tu me l'ordonnes, je peux aussi être tout ce que tu souhaites... Mais en retour, je ne demande qu'une chose, qu'une seule et simple chose...
 -  Je t'écoute Myriade.
 -  Je veux que toi, tu sois à moi, rien qu'à moi, et que tu fasses ici la promesse de ne jamais, absolument jamais, t'éloigner de moi.
 -  Myriade c'est... c'est une sacrée de...
 -  Promets-le ! »

   Luxienne dut déglutir, mais ne pouvait pour autant échapper aux prunelles de la jeune femme, exprimant le tout de son attachement, le tout de son envie. Myriade, nouvelle citoyenne et membre de l'OESA, en échange de sa promesse d'être « à elle » ? La scientifique comprenait ce qu'elle entendait, et ne savait guère si elle est en droit de répondre au vu de la relation qu'elle entretenait avec elle... Mais pouvait-elle répondre autre chose que ce que la demoiselle aux cheveux rose attendait ? Plus maintenant, plus jamais :

« Oui. Oui je le promets, toutes les deux, nous serons toujours ensemble. »

   Myriade fit un dernier mouvement, et scella ces mots entre leurs lèvres.

. . . . .

   Et tandis que leur relation évoluait, que l'une comme l'autre découvrait désormais qu'elles ne sauraient se séparer, que leurs destins se trouvaient liés par un accord bien plus fort qu'elles ne l'avaient de prime abord imaginé, l'entreprise de Luxienne prit de l'ampleur, de la grandeur, et commença à se faire de plus en plus remarquer par l'univers scientifique Tekhan. Se faisant connaître, notamment par des tests plus que positifs, en terme d’envoi de sondes et de projets spatiaux, les différents partis de Tekhos Metropolis commencèrent à observer d'un œil intéressé les résultats de l'OESA, et se mirent même en tête de proposer des offres alléchantes pour tenter d'obtenir une part des privilèges liés à une potentielle expansion spatiale. Bien sûr, cela ne pouvait se faire de manière indirecte, chacune des trois femmes ayant offert un prime engagement auprès de Luxienne n'ayant guère dans l'esprit de laisser passer leurs parts de marché dans la compagnie, alors le tout fut de converser avec la principale intéressée, menant lentement la scientifique aux cheveux bruns sur le terrain des intrigues politiques et militaires, à son triste constat. Mais plutôt que de se laisser emporter par tant de considération, et de belles langues, la femme ne tarda pas à chercher à tirer son épingle du jeu, notamment sur le point de vue monétaire, commençant à former des alliances, des contrats, renflouant ainsi ses poches, et se permettant ainsi d'obtenir un capital conséquent pour mettre en place la deuxième partie de son plan, à savoir acquérir définitivement suffisamment de son entreprise sur le marché pour devenir seule directrice du domaine spatial, et ainsi se trouver en place forte de la technologie de son pays.

   Ainsi, le même jour, la femme offrit à toutes le loisir de découvrir le premier grand succès de l'expansion spatiale, la navette Erian, et à son bord Myriade, qui commençait déjà à se préparer à son premier grand voyage. Et même si la présentation se faisait de manière fort honnête, Luxienne avait déjà prévu de profiter d'une telle situation pour déclencher ses projets, car son ordinateur, chez elle, lançait au même moment un programme longuement mis en place par ses soins, un petit démon de l'informatique qui commença à quérir lentement de petites compagnies, de petits bouts des appuis monétaires de ses premières créditrices. Et tandis que le vaisseau prenait lentement de la hauteur, s'élevait dans les airs avec une démonstration surprenante de maîtrise et de légèreté, que dans son euphorie la demoiselle aux cheveux rose continua sans le moindre doute, et avec un sourire béat, sa course vers les étoiles, les ressources des trois femmes anciennement alliées à la scientifique chutèrent, soudainement. Un crash monétaire pour une envolée céleste, Luxienne en jubilait presque quand elle vint arrêter à distance son virus, observant enfin sa position atteindre des summums encore inestimés, tandis que son amour, sa belle protégée, sa camarade de toute une vie atteignait quant à elle les limites de son rêves. L'une avait la tête dans les étoiles, l'autre les contemplait, les deux vivaient enfin le pic de leur bonheur, loin des préoccupations passées, loin des doutes et de la peur, l'une comme l'autre libérée.

   Les mois qui suivirent furent des plus simples, des moins embêtants, la vie devint soudainement d'un tel plaisir que Luxienne comme Myriade commencèrent enfin à profiter d'une situation plus agréable, plus large, les deux découvrant le plaisir de ne plus avoir à craindre un retournement de situation inattendu. Tandis que l'une commença à produire de plus en plus de départs en direction de la zone stellaire grâce aux premiers vaisseaux Tekhan, l'autre se mit en tête de concevoir des modèles de plus en plus performants au travers de recherches de plus en plus pointues, approchant dès lors de manière conséquente du niveau de technologie général de Tekhos Metropolis. Tout filait parfaitement, si bien même au vu de l'évolution globale que Luxienne prit volontairement le temps de ralentir la progression de la compagnie, enchaînant les manques de présence et de directives de manière significative, cherchant à ne pas être plus rapide qu'elle ne l'avait escompté lors de ses premiers traités, se donnant toujours plus de temps pour faire avancer ses observations théoriques. Et cela pour une bonne raison : Myriade. Après tout, elle était sa pilote, son amour, et s'il y avait bien une seule chose qu'elle pouvait lui offrir en ce moment, c'était d'être la seule Tekhane privilégiée à pouvoir se déplacer selon ses désirs dans le grand domaine stellaire, loin des futurs trafics spatiaux, et autre forme d'expansion coloniale à la nature bien déplorable. Non, pour l'instant, elle laissait sa belle jeune femme contempler Terra au loin, seule, et heureuse... Son propre succès attendrait que Myriade ait pu en profiter.

. . . . .

   Luxienne rentra dans son bureau, tranquillement, un jour calme où tout semblait vouloir lui dire que le monde de Tekhos n'était encore qu'à l'aube de ses découvertes, et c'est avec une fierté incomparable qu'elle observa, par les grandes baies vitrées de la pièce, la belle capitale se profiler à l'infinie dans la chaude lumière du matin. Elle était partie de si loin, avait fait tant d'efforts pour devenir une femme que l'on respecterait, que l'on honorerait pour ses talents, et maintenant qu'elle avait atteint ce stade, elle se demandait encore de quelle manière son génie pourrait lui permettre de surpasser les plus grandes difficultés scientifiques du monde Tekhan. Mais quoi qu'elle fasse à ce propos, ce qu'elle ressentait par dessus tout, c'était du calme, de la sérénité, comme si au delà de tout ces affrontements, de tout ce travail, de sa croissance d'une jeune adolescente frêle et faible à une femme puissante et aux pouvoirs quasi illimités, ce qui en restait n'était rien d'autre que la satisfaction d'avoir traversé toutes ces épreuves sans jamais courber l'échine, sans jamais n'avoir perdu de vue ses objectifs...

   Quittant lentement la vue de la cité, elle se tourna sur son bureau. Sur celui-ci, non seulement une pile de dossiers faramineuse, mais surtout, et avant tout, une petite clé USB jaune, laissée là dans la nuit, dans le plus grand des secrets, par une personne dont elle connaissait parfaitement les intentions. Elle fit quelques pas, vint la quérir avec un mouvement rapide, précis, et plaça celle-ci dans le port de son ordinateur avec le plus grand des calmes, avant de se mettre à ouvrir les fichiers qu'il contenait, les observants d'un regard un peu absent, mais non moins concentré sur ce qui défilait devant elle. Toutes les informations sur Myriade Sang-Clair. Sa venue au monde, ses capacités, sa nature. Peu étaient ceux qui avaient encore le droit de contempler de tels fichiers, très peu étaient ceux qui étaient encore en capacité de les comprendre, et Dénève Mueller comme Luxienne Mueller étaient les deux seules femmes en Tekhos connaissant les secrets derrière ces rapports. Les deux femmes avaient accueilli, sensiblement au même moment, les deux enfants des astres, et toutes deux avaient largement compris que ces entités, elles les aimaient tout autant que celles-ci les appréciaient, mais qu'elles n'existaient pas sur le même plan de ce monde. Myriade plus encore que Belphy Mueller, l'enfant adoptive de l'aînée de la famille, car elle ne possédait guère les limitations naturelles que l'originale subissait depuis sa sortie de l'Oeuf. Luxienne et Dénève échangeaient donc couramment, et continuaient de garder leurs chères demoiselles à l’œil, pour s'assurer qu'elles puissent toujours vivre dans le bonheur.

   Et en parlant de cette dernière, Myriade, maladroitement, avec bien des difficultés, poussait comme elle pouvait la porte du bureau de son amour, deux cafés dans les mains, et manqua même d'en renverser la moitié, le temps que la brune se lève de son siège, et ferme tous les fichiers pour finalement se porter à sa rescousse. Une porte ouverte, une tasse récupérée, et c'est une charmante demoiselle aux cheveux roses qui vint lui sourire, se dissimulant derrière un manque d'aise flagrant pour lui parler avec empressement du planning de la journée.

« B-bonjour Luxienne. Pour tout à l'heure, tu as rendez-vous avec le chef de l'industrie minière pour t'assurer de l'apport des métaux fondamentaux à nos systèmes connectiques, et après tu dois retrouver Dame Aleyna pour un déjeuner d'affaire autour de la production d'un système de propulsion bien supérieur à celui de la navette Octan...
 -  Du calme mon ange stellaire, du calme. Assieds-toi donc, d'accord ?
 -  Oh euh... hum... bien sûr...
 -  C'est fou ce que tu changes quand nous sommes ici, je ne m'y fais toujours pas, tu sais ? La prochaine exploration est prévue dans deux jours, tu es prête ?
 -  Oui, évidemment !
 -  C'est le plus important à mes yeux. Ne t'en fais pas ma Myriade, tout se passe bien de mon côté, tout ce que tu as à faire, finalement, c'est de réussir à créer d'autres liens que ceux que tu as avec moi, d'accord ?
 -  Je peux même te promettre que je tente de le faire... Mais j'ai encore tant de mal.
 -  Fais-toi confiance, ne t'en fais pas, tu es une jeune femme merveilleuse. Et crois-moi, d'autres que moi le remarquent.
 -  Oh flatteuse ! Je dois y aller, j'ai des dossiers à photocopier, à plus tard, mon amour.
 -  A plus tard, mon amour... »

   Luxienne l'observa passer la porte. Une journée normale, stable. Une vie normale, stable. Des relations normales, stables. C'est tout ce dont avait besoin Myriade pour pouvoir rester au loin de sa nature, pour qu'elle puisse vivre à jamais en humaine, et non en monstre. Et si elle devait y veiller pour le restant de ses jours, elle le ferait, pour celle qu'elle aime, et pour elle-même.

   Elle reprit place à son bureau. Une journée normale, pour une vie normale. Qu'allait-elle donc imaginer pour changer encore une fois la face de ce monde ?

~ ~ ~ ~ ~

Fin.

~ ~ ~ ~ ~


Note optionnelle : Comme nombreux le remarqueront, où se douteront au vu des noms des personnages, cette fiche fait longuement référence à une autre fiche, « la longue histoire d'un projet catastrophe », qui parle, entre autres, du personnage de Belphy Mueller. Si vous souhaitez satisfaire votre curiosité, n'hésitez pas à cliquez sur ce lien : projet 37-C-Delta

Doublette or not doublette : Vraiment besoin de répondre ?

Cassidy Green

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Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 4 jeudi 04 mai 2017, 21:24:32

re bienvenue ;D
Voici mon topic pour découvrir mes autres comptes. Veuillez aussi me contacter sous ce compte pour mes autres personnages, vu que je suis plus souvent connecter avec Cassidy Green qu'avec les autre ;D

Ahri

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    Description
    Kitsune-bi Inari, Renarde à neuf queues ayant obtenue par magie l'apparence humaine, ayant besoin de fluides sexuels pour vivre, Ahri vit généralement seule à la recherche de plusieurs 'esclaves idéales'.

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 5 jeudi 04 mai 2017, 22:41:25

Rebienvenue, bienvenue.

tl;dr

:troll
♥~~ Dispo par MP (ou sur discord, j'y suis 24/7) si besoin. ~~♥

Ikami Naiko

Humain(e)

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 6 vendredi 05 mai 2017, 10:31:32

Re-bienvenue.  :D

omg la longueur de la fiche qui tiens sur deux postes ø.ø

Luxienne et Myriade

Humain(e)

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 7 vendredi 05 mai 2017, 11:50:46

Merci à vous trois, Cassidy, Ahri, et Ikami.

Bon par contre ... Deux posts mister Naiko ? Vous comptez bien mal, il y en a 4 en tout ^^ !

Ikami Naiko

Humain(e)

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 8 vendredi 05 mai 2017, 12:43:35

Autant pour moi. Désolé pour cette erreur.  :o

Shad Hoshisora

Terranide

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    A un putain de réseau social.

Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.

Réponse 9 samedi 06 mai 2017, 16:21:43

Grruumbl.
Je te hais.
Validée.

Luxienne et Myriade

Humain(e)

Tu me hais ma chère Louve ?
Il ne faut pas voyons ^^ Merci ma chère !

Et ne t'en fais pas Ikami, y'a rien de grave, pas besoin de présenter des excuses.

Seth Sternam

Administrateur

Bien bien bien ... Je connais 2 Tekhanes qui me doivent approximativement sur 2 jours :

-5 heures de ma vie *
-4 cafés **
-2 décaféinés ***
-1 paquet de biscuit ****

Mais j'ai tout lue ;D D'ailleurs vu que tu m'a demander sur la CB de te dire ce que j'en pense, déroule donc se superbe écran à Spoil :)

Spoiler (cliquer pour montrer/cacher)

Bref, re-bienvenu et bonne chance pour trouver des gens pour jouer avec ce compte ^^

* : Bon, j’avoue que les 4 premières j'étais au boulot et que je faisais autre chose.
** : Dont 3 pris au travail.
*** : Oui, sinon j'aurais probablement des problèmes cardiaques à force.
**** : Il faut bien apporter du sucre au cerveau.

Darthestar

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    Description
    Darthestar est un être d'un bon mètre 95, et il s'agit surement de l'exemple typique de l'homme torturé par sa nature.
    
    Devenu vampire par le biais d'une bien compliquée histoire, il essayes tant bien que mal de dominer son instincts, mais son combat avec lui même le rend parfois instable et maladroit.
    
    Homme contemplatif, il est avant tout un voyageur et n'use de sa puissance que dans les cas les plus extrêmes, y préférant une certaine forme de sagesse.
*commence à distribuer les heures manquées, et les tickets repas pour son café et ses biscuits*
Je dois avouer que je ne peux que te remercier d'avoir pris le temps de tout lire, c'est toujours agréable ^^ Maintenant, je m'offre un court instant pour répondre à tes avis, au moins par simple respect, mais surtout parce que j'imagine en effet que ces points ont dut perturber ta lecture !

Spoiler (cliquer pour montrer/cacher)


Seth Sternam

Administrateur

Pour une fois que je suis remboursé ^^. Après dire que ça m'a "perturbé" est un bien grand mot, j'ai vu bien pire dans le genre incohérent et je comprend bien qu'il faut parfois aider le scénario :)


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