Le vide. Le néant, voilà ce qui occupait l’esprit de Nümba. Elle ne savait pas ce qui s’était passé, ni ce qu’elle était devenue. Elle se remémorait juste sa dernière image, celle de sa régression, puis de son évanouissement. Quelque chose s’était passé, quelque chose de … grave. À vrai dire, elle s’en moquait d’où avait-elle était emmenée. Intérieurement, il se passait des choses bien plus importantes. Pendant tout le temps de son coma, elle ne fut pas dans l’inexistence. Elle était consciente mais … ailleurs. Quand son corps frappa le sol, inerte, démuni de toute force, ses yeux se clôturèrent, et son souffle s’était amenuisé. Toute sa force, sa robustesse, sa puissance s’était envolée en un rien de temps. Pourquoi ? La raison était à la fois simple, et … Un peu moins simple.
Ses yeux se rouvrirent subitement. Sa poitrine oscillait fortement, elle ne savait pas où elle était. Sa tête regarda à droite, puis à gauche, ne voyant alors que brumes et ténèbres. Pour autant, si ces lieux ne lui dirent rien à première vue, il en fut différent quand elle se redressa. Elle se sentait toute endolorie, faible. Mais, ce lieu … En fin de compte, il ne lui était pas si inconnu. La dernière fois qu’elle l’avait vu c’était … Quand les flammes s’étaient éprises de son âme. Quand Abro et Nümba ont fusionnées, pour devenir l’Idole. C’était donc cette sorte d’entre-monde, réservée à elle. Pourquoi était-elle là, à nouveau ? Un silence de plomb régnait, jusqu’à ce qu’elle aperçoive, un peu plus loin, une lueur.
Nümba s’en approcha, mais sentit ses forces la trahirent à plus d’une reprise. Elle était si fatiguée, si faible, elle en trébuchait au moins tous les cinq pas. Pourquoi était-elle dans un tel état ? Quand finalement elle parvint à la lueur, elle constata alors que celle-ci émanait d’un miroir. Etait-elle devenu … Folle ? Ou bien était-elle morte, et son esprit s’était perdu dans un endroit peu probable ? Elle ne savait rien, elle ne savait plus … Jusqu’à ce qu’elle entende un rire. Un rire qui provenait d’une voix puissante et grondante, mais qui l’interpella fortement car elle reconnaissait, malgré tout, sa propre voix. Son regard tourna, et elle aperçut alors cette gigantesque montagne de muscle, assise sur un trône majestueux. L’Idole lui souriait malicieusement, et son regard semblait percer sa propre âme.
Nümba s’approcha de l’Idole, et son corps la trahit à nouveau, la faisant tomber juste devant Abro. Faible, démunie, elle rampa devant la femme, puis posa sa main sur son genou pour s’aider, ne parvenant plus du tout à se relever. « Pauvre que suis-je … » S’exclama l’Idole, regardant la druidesse. « Pourquoi … Pourquoi dois-je subir cela, Idole ? » Demanda Nümba, de sa voix fatiguée. La réponse ne vint pas de suite, et la guérisseuse sentait le regard perçant de la femme se poser sur elle, sans cesse. « Subir ? Que subit-tu donc, Idole ? » Rétorqua-t-elle, causant alors la druidesse à lever son regard, ne comprenant pas pourquoi fut-elle appelée ainsi. « Tu es désormais maitresse de tes propres actes. Comme tu l’as toujours été … Une Idole est avant tout libre de ses choix, malgré sa nature primaire. Il n’en tient qu’à toi de juger … Tu es l’Idole de la Force et la Nature, Nümba. Tu possèdes sa force, ses pouvoirs … Tes capacités sont infinies. Quel usage en fera-tu, alors ? » Dit-elle.
La druidesse gémit de douleur, puis tentant alors de se relever, elle constata que l’Idole l’aida, de sa grande force, à se remettre debout. « Je … Je ne veux pas. Je ne suis pas une meurtrière ! Je … Je ne veux pas rependre la peur, le chaos et le sang ! Je v… » Fut-elle coupée. « Si, tu le souhaite plus que tout au monde, Nümba. Tu es une âme pure, noble … Tu adores ce que tu es devenue. Tu désires user de ta nouvelle condition pour accomplir ta mission, et tu la feras … Le reste n’est que conséquence. Cependant … Malgré le feu présent en toi, il n’en tient qu’à ta pureté et à ta raison de ne pas faire ce qui te semble mauvais, ou bon. Tout n’en tient qu’à toi, Nümba. Tu … Es l’Idole désormais. Rien ne sera plus comme avant, et rien ne pourra te faire changer comme avant. Acceptes ceci, et fais-en l’usage qui te semble le plus juste … Mais sache, que tu seras malgré tout celle qui représente la vengeance, la justice, et que quoique tu décides … Tes actes n’iront qu’en ce sens. Mais, la forme n’en tient qu’à toi … Nümba. » Expliqua l’Idole, tandis que la druidesse ferma les yeux. Sa respiration commença à reprendre en vigueur, alors qu’elle sentait aussi ses forces lui revenir. Une curieuse sensation se déclara partout sur son corps, alors qu’elle finit par rouvrir les yeux … Pour se voir elle-même, assise sur ce trône.
Il n’y avait plus qu’elle, l’Idole avait disparue … Le croyait-elle, jusqu’à ce qu’elle constate que son corps avait changé, à nouveau. Elle était assise sur le trône, de toute sa majesté. Souriante, elle se leva, puis regarda ses bras bien musclés. Le miroir était devant elle, et elle observa alors que ses traits étaient redevenus ceux de l’Idole. « Qu’il en soit ainsi … » Dit-elle, souriant doucement face à ce reflet qui, désormais, était le sien.
Un flash, puis une immense inspiration. Les yeux de la druidesse se rouvrirent doucement, alors qu’elle reprenait subitement son souffle. Aveuglée par une lumière bien trop forte, elle tenta de gesticuler, mais n’y parvint guère. Elle entendit une voix sourde, mais n’arriva pas à en distinguer les mots. Son esprit émergeait d’un coma, et cette lumière aveuglante n’était pas là pour l’aider. Elle se rendit compte plus tard qu’elle était nue, et complètement attachée. Elle s’arrêta de gesticuler, voyant que cela n’avait aucune utilité. Elle ne comprenait pas ce qui se passait, et elle aurait bien aimé savoir où elle était. Cependant, elle parvint juste à capter les derniers mots de cette voix masculine, lui disant alors qu’il n’hésiterait pas à la calmer si l’autre revenait.
La druidesse tenta de le regarder, mais la lumière était trop forte. L’incompréhension totale. Avec tout ceci, aucuns mots ne sortirent de ses lèvres … Elle ne savait pas quoi faire, ni quoi dire. Le fait qu’elle ne savait même pas ce qui s’était produit ne l’aidait guère … Mais en revanche, elle se souvenait parfaitement de ses songes, et en était à présent … Changée, éternellement.