Elle n’aimait pas blesser les personnes qu’elle appréciait. Savoir qu’elle avait fait quelque chose qui avait fait mal à Jonathan, même si ce n’était pas intentionnel, elle ne se le pardonnait pas. Très dure envers elle-même, elle savait pourtant qu’elle n’était pas au point concernant les relations avec les autres, qu’elle n’était ainsi coupable que d’ignorance. Par ailleurs, les coutumes barbares n’étaient pas tout à fait les mêmes, alors elle avait du mal à changer son comportement. Pour autant, elle ne s’attendait pas à ce que l’homme sorte finalement de sa fourgonnette. Encore moins à ce qu’il la suive pour lui donner une tape sur la tête. C’est pourquoi à l’instant où il fit se geste, elle banda tous ses muscles comme pour parer une attaque. On ne l’avait pas par surprise. Néanmoins, elle reconnut la fragrance qu’il dégageait, aussi réprima-t-elle un mouvement défensif-offensif, se contentant de se raidir un instant avant de détendre tous ses muscles.
Un léger sourire s’imprima sur ses lèvres gourmandes, et la rousse tourna la tête vers son compagnon, ses prunelles d’argent exprimant encore la riposte qu’elle s’apprêtait à donner. C’était une guerrière dans l’âme, elle ne pouvait pas lutter contre sa nature, seulement la dompter, la réprimer. Ses yeux ne tardèrent d’ailleurs pas à exprimer son soulagement de le voir finalement près d’elle. Un pétillement malicieux parcourut ses iris nacrés alors qu’elle écoutait sagement les paroles qu’il laissait échapper de ses lèvres. Tout son corps se détendit finalement, alors qu’une expression proche de la sérénité remplaçait la tension de ses traits. Elle tourna même la joue pour mieux sentir ses lèvres s’y appuyer quand il l’embrassa, et son sourire s’élargit.
Elle ne put s’empêcher de pouffer à la suite. C’est vrai qu’elle avait été plutôt idiote, sur ce coup. Mais elle n’avait pas réussi à interpréter autrement sa froideur suite à ses questions. Elle avait réellement cru qu’il se renfermait sur lui-même, peut-être parce qu’il croyait qu’elle se faisait de fausses idées. Pour sa défense, elle n’avait pas fréquenté beaucoup d’hommes, et il était courant à son époque, chez les barbares, de s’embrasser comme il l’avait fait sous le coup d’une émotion forte, sans pour autant ressentir du désir pour la personne. C’était un acte irréfléchi, purement instinctif. Savourer sa joie, et la faire partager à ses proches. Elle ressentit également un contentement sans pareil quand il lui avoua qu’il l’avait embrassée, plus tôt dans la soirée, parce qu’il éprouvait bien quelque chose pour elle. Ou en tout cas, qu’il ne l’aurait pas fait si jamais il n’avait pas ressenti un truc à son encontre. Elle accrocha d’ailleurs sa main, pour la presser affectueusement, alors qu’il terminait sa tirade en rappelant qu’elle avait parlé d’un dernier verre. Ses lèvres s’étirèrent, en un sourire ravi, et dévoilèrent ses dents blanches avant qu’elle ne finisse par hocher la tête.
« Absolument, tu as une bonne mémoire ! »
Elle finit de déverrouiller la porte, et l’invita à entrer dans le hall. Elle poursuivit en le guidant jusqu’à l’ascenseur, dissimulé derrière un groupe de boîtes aux lettres, et appuya sur le numéro 3, l’étage auquel elle s’arrêtait. Quand les portes de l’environnement clos s’ouvrirent, elle esquissa un sourire à son compagnon, et lui prit la main pour le mener au bout du couloir, face à une petite porte qui ne payait pas de mine. Sortant les clés de son sac, la déesse déverrouilla la porte et l’invita à entrer. L’espace dans lequel elle vivait était sobre. Un hall d’entrée, avec une porte sur la droite pour un cagibi/porte-manteaux, qui donnait ensuite une un séjour meublé sommairement. Une table, deux chaises, un placard pour la vaisselle et une bibliothèque avec quelques livres. Simple, mais pratique. A gauche du séjour, il y avait le salon. Une autre bibliothèque, un canapé, une table de salon, une télé qui ne payait pas de mine, quelques poufs, et quelques étagères avec des draps ou du linge de maison. Une porte, à gauche de l’entrée du salon, donnait sur une salle de bain et une chambre.
A droite du séjour, il y avait la cuisine, équipée de façon moderne, et des toilettes. Il y en avait déjà dans la salle de bain, mais il y en avait d’autres ici. Une petite porte donnait aussi sur une autre pièce que Charis avait aménagée en bureau. Elle y rangeait tout ce qui avait trait à son emploi sur Terre, et y gardait aussi une bibliothèque remplie d’ouvrages venant de Terra et de quelques artefacts issus du même monde.
Elle précéda Jonathan dans le séjour, et lui indiqua le salon d’un petit geste de la main alors qu’elle prenait deux verres à apéritifs dans le vaisselier.
« Que veux-tu boire ? J’ai des bières, du bourbon, du vin… Un peu de tout en fait. »
Pour sa part, Charis sortait déjà la bouteille de bourbon. Elle adressa un sourire franc à son compagnon, attendant sa réponse.