« Alors, le Japon ? Les Japonais sont aussi tarés qu’on le dit ?
- Mmmh...
- Je vais prendre ça pour un « Oui ». Tu sais qu’ils ont des bars où on peut obtenir des câlins ?
- Mmmh-hmmm...
- Ainsi que des bars où... Euh... Tu fais quoi, au fait ? »
Téléphone portable faufilé dans sa poche, Rachel sourit devant la question pleine de sagacité de Lizzie. Liz’, comme elle l’appelait, était une vieille amie civile, remontant à l’époque de l’université, quand Rachel suivait une Licence en droit. Si Rachel avait rejoint l’armée, Liz’, elle, avait rejoint un cabinet d’avocat se trouvant à Washington, et, aux dernières nouvelles, participait activement à la vie politique du pays. Rachel et elle étaient restées bonnes amies, et elle était précisément en train de discuter avec elle, dans l’un des principaux centres commerciaux de Seikusu. Un grand bâtiment à plusieurs étages, avec de longues artères et de nombreux magasins, dont une boulangerie française. La pâtisserie française était très réputée au Japon, et Rachel était venue au centre commercial pour faire les courses hebdomadaires. Elle en avait profité pour faire une halte à la boulangerie, et était en train de manger un flan quand Liz’ l’avait appelé.
Rachel avala son morceau, et lui répondit. Elle portait un jean et un débardeur, ainsi que des lunettes de soleil, relevées au-dessus de ses yeux. Dehors, il faisait beau. Beau, et chaud. Bienvenue au Japon.
« Et les États-Unis ? Tu en as fini avec ce procès ?
- Oh... Ouais, depuis longtemps ! Je suis conseillère juridique de Simmons, maintenant.
- Le député ?
- Hin-hin », acquiesça son amie.
Autour d’elle, Rachel voyait des familles marcher, des hommes, des femmes, certains observant sa belle poitrine. Les vieilles grands-mères qui passaient l’observaient silencieusement. Depuis des mois, Rachel était au Japon, et commençait à apercevoir l’étendue des différences culturelles entre son pays et le leur. A leurs yeux, elle était une gaijin, une étrangère. Aujourd’hui, c’était son jour de congé, mais ce n’était pas pour autant qu’elle était sortie sans le disque monolithique. A dire vrai, elle n’avait pas le droit de s’en séparer, car, si Rachel Hawkes pouvait se permettre de faire la grasse matinée, et manger des croissants en faisant des courses, Iron Girl, elle, devait rester opérationnelle. Elle continuait donc à papoter avec Lizzie. Liz’ savait que Rachel était partie au Japon dans le cadre d’un programme militaire confidentiel, et évitait donc de lui poser des questions concernant son métier. Les minutes s’écoulaient ainsi délicieusement quand Rachel sentit son téléphone portable vibrer à nouveau dans sa poche. Un second appel. Elle soupira, s’essuya les doigts, puis attrapa le téléphone. Elle blêmit en voyant, sur l’écran digital, le nom de l’expéditeur du message téléphonique : « BASE ». Le genre d’appels sur lequel on ne pouvait pas attendre.
« Désolée, Liz’, j’ai une urgence.
- Hein ? Mais je croyais que...
- Je te rappellerai. Bisoux. »
Rachel mit fin à cet appel, puis prit celui de son supérieur.
« Urgence prioritaire » annonça immédiatement la voix de son supérieur.
Fin des courses. Rachel s’essuya les lèvres. Elle était prête. Il lui fallait juste trouver un endroit où s’abriter. Elle se releva rapidement, et retira ses oreillettes, plaquant le téléphone contre son oreille, tout en se dirigeant vers les toilettes.
« Je vous écoute.
- Nos capteurs viennent de détecter un pic radioactif... A proximité de votre position. »
Le disque monolithique avait un capteur GPS, pour empêcher qu’il ne soit volé. Surprise, Rachel acquiesça silencieusement, tout en entrant dans les toilettes. Elle fila dans une cabine. Pour revêtir son armure, elle préférait se débarrasser des vêtements, afin de les retrouver en bon état.
« Nous avons eu accès aux caméras de sécurité, et il semblerait que la radioactivité émane d’une femme... Un vigile a tenté de l’appréhender, et... Et bien, je dirais qu’il est mort.
- Hum... Une... Pile radioactive sur... Sur pattes ?
- Vous allez bien, Officier Hawkes ?
- Si vous voulez tout savoir, je suis en petite culotte. Mais vous pouvez continuer.
- Oh... Et bien, la radioactivité augmente de manière dangereuse. Votre armure vous protègera des pics de radioactivité. Neutralisez la mutante, nous avons envoyé une équipe de décontamination. Vous savez que les Japonais sont tatillons sur la question de la radioactivité, je tiens à éviter qu’ils ne s’emparent de cette femme avant nous. »
Rachel ne répondit pas. Nue, elle appuya sur le disque, et l’armure se mit en marche. Les plaques rouges et dorées jaillirent, l’enveloppant, et elle déposa le portable parmi ses affaires, avant de sortir. Elle constata alors qu’il y avait effectivement un problème. Il avait suffi de quelques minutes pour qu’une fin de matinée tranquille dégénère. Des gens couraient, en se tenant la tête, visiblement mal en point. Certains tombaient sur le sol, semblant comateux. Ils saignaient du nez, et tous filaient en hurlant depuis un couloir. Rachel avait visé plusieurs agents de sécurité.
« Iron Girl ?! s’exclama l’un d’eux.
- Effectuez un périmètre. Regroupez les blessés. Que personne ne pénètre dans ce couloir.
- Mais... Mais qu’est-ce qui se passe ? demanda l’un des agents.
- Pic de radioactivté » lâcha sommairement Rachel en s’écartant.
Contrairement aux autres super-héros classiques, Rachel travaillait pour le compte de l’armée américaine, et avait donc, concrètement, des pouvoirs de police sur le sol japonais. Elle était donc dans son droit en donnant des ordres. Les vigiles obtempérèrent. Rachel se rapprocha du couloir, tandis que son compteur Geiger s’affolait. Elle s’enfonça dans le couloir. Certains hommes et femmes étaient prostrés sur le sol, morts, ou sur le point de le devenir. Il fallait stopper ça rapidement. D’autres étaient couchés dans les allées de boutiques de vêtements, et Rachel s’avançait. Elle préférait éviter de voler, concentrant ainsi dans son bouclier l’énergie de son armure.
*A ce niveau-là, la radioactivité est mortelle...*
Les compteurs s’affolaient, et elle finit par voir la femme à l’origine de tout ce cirque. Elle était d’une grande beauté, de cette beauté fatale dont les démons se paraient.
« Officier Rachel Hawkes ! s’exclama Rachel en se rapprochant d’elle. Arrêtez ça tout de suite, vous êtes en état d’arrestation ! »
Même malgré les boucliers, Rachel commençait à voir sa vision se détériorer, et à sentir une certaine migraine. Tout était auréolé de vert, et elle tendit sa main vers la femme, commençant à charger un tir plasma. Les compteurs Geiger n’étaient désormais plus les seuls à s’affoler, ses signes vitaux s’emballaient dangereusement.