Bâillement. Combien de temps s'était écoulé? Au moins quelques dizaines de minutes. Après s'être étiré de tout son long, Daclusia regarda autour de lui. Il n'avait pas fait dans la dentelle. Le sommeil engourdissant ses sens, il ne se souvint plus trop de ce qui l'avait mit dans un tel état. Mais ça devait sûrement être quelque chose de gros, car des carnages comme ça n'étaient pas dans son habitude.
Passant la main sur un morceau de terre carbonisée, il fit s'envoler les cendres, afin de révéler, sous elles, des pousses nouvelles qui s'apprêtaient à s'étendre sous le soleil, ne demandant qu'un petit coup de pouce pour percer la couche noire.
La flamme de l'équilibre. La flamme de la vie. Il faut voir ce feu très spécial comme le cycle de vie d'un phœnix. Il ne consume pas, ne brûle pas, sauf si c'est pour protéger quelqu'un. Comme à chacune de ses colères, il nettoyait le paysage, et laissait le vent apporter une nouvelle vie sur celui-ci. Une prière aux quatre vents plus tard, il sortit une petite clef de sa poche, et l'enfonça dans l'air. La tournant, tranquillement, il ouvrit peu à peu une entrée vers sa demeure. Mais un sentiment étrange le taraudait, comme s'il avait oublié quelque chose. Alors qu'il passait le pas de la porte, il fouilla sa mémoire pour se rappeler de ce que c'était, car il lui semblait que c'était très important. Alors que la porte acheva de se fermer, il eut un éclair de génie.
Traversant les méandres des failles que sont ses portes, il chercha une sortie en direction de Nexus. C'était la ville la plus proche, et sans doute était-elle la destination la plus logique pour une frêle jeune femme perdue dans les landes.
Alors qu'il voyageait dans les replis de l'espace temps, il se servit une tasse de chocolat chaud pour dissiper les quelques moutons de sommeil qui restaient logés sous ses yeux.
Se remémorant parfaitement les évènements de plus tôt, il dessina dans l'air la silhouette de la gobeline. Étrange jeune femme que celle-ci, on aurait juré qu'elle était presque humaine.
Quoi qu'il en soit, il était évident au premier coup d’œil que le premier prédateur venu allait la croquer en une bouchée.
Il fallait se hâter.
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Autour de Rikke, la vie commençait à réapparaître. Ce qui avait fait peur au bête était maintenant parti, et cela se voyait partout autour de soi. Les insectes, de tailles anormalement grosse, réapparaissaient pour se chasser les uns les autres. On pouvait à nouveau entendre les bruits angoissants des bêtes qui s'entretuaient au loin, et sentir leur souffle sur sa nuque alors qu'ils n'étaient pas là.
Mais la gobeline le savait sans doute très bien. Ce qui est le plus dangereux n'est pas ce que l'on entend, mais ce que l'on entend pas. Les prédateurs qui vous chassent sont ceux que l'on remarque le moins.
Ils vous traquent, invisibles,, instillent la peur en vous, un peu plus à chaque pas, comme un cancer qui ronge votre esprit et émousse votre attention. Parfois, ils laissent un indice quand à leur présence, pour augmenter la tension, avant de redevenir invisible, et de recommencer à vous traquer. Et ce manège peut durer des heures selon le sadisme de la créature...
Celle qui pourchassait Rikke n'était cependant pas de ce type là. Peut être avait elle faim. Peut être n'avait elle pas le goût de la chasse. Peu importe. Alors que la jeune gobeline allait se retourner pour voir arriver sa mort imminente, elle ne put que voir...
Un katana se planter entre les crocs du prédateur. Apparemment, l'heure de la gobeline n'était pas encore venue.
Bien que la jeune femme n'eut sûrement pas, en cette situation, la volonté d'étudier l'arme en détail, celle-ci était de fort bonne facture. Un acier solide et résistant, à en juger par la résistance qu'elle infligeait aux dents du fauve. La lame aux reflets azurés était de type " vaguelettes ", et un papillon était gravé à même le métal à la base de celle-ci.
Un manche noir et simple était serré par deux mains enfoncées dans de lourds gants en cuir, elles même reliées à un corps humain aux longues oreilles, confortablement installé dans une armure complète en cuir, qui avait l'air résistante et pourtant assez souple pour laisser une grande liberté de mouvement à celui qui la revêtait.
Et l'homme avait deux grands yeux bleus enflammés...
D'un mouvement de poignet, il fit pivoter sa lame pour forcer la bête à reculer, effectua une tranche horizontale suivit d'un coup de pied ascendant, qu'il acheva en plaquant la bête au sol, le katana paré à lui trancher la gorge. Un échange regard de plusieurs minutes suivit, à l'issue duquel l'animal avait trouvé son maître.
Lâchant sa prise, l'homme en armure de cuir soutint un nouveau défi du regard en provenance de la créature, avant que celle-ci ne décide finalement de s'éclipser sans demander son reste.
La lame se dissipa dans une fumerolle bleutée, et son propriétaire abaissa le masque de cuir qui cachait la partie inférieure de son visage. Il adressa un sourire ample à la gobeline mais ne s'approcha pas trop d'elle pour ne pas l'effrayer.
" Bonjour à nouveau, jeune demoiselle. Veuillez m'excuser pour cette rencontre pour le moins désagréable de tantôt, je n'avais aucunement l'envie de vous mettre dans un tel effroi. "
Se laissant tomber au sol, assit en tailleurs, Daclusia sortit d'une sacoche une tablette de chocolat, et après en avoir prit une rangée, en proposa à Rikka.
" "Pourquoi est-il là?", j'imagine que vous vous demandez. En réalité, je n'étais pas à l'aise à l'idée de vous avoir laisser, seule et apeurée, au milieu d'un endroit si dangereux. Et puis je résiste difficilement à l'envie d'aider mon prochain.
Oh, mais j'en oublie mes manières! Permettez moi de me présenter, Daclusia Khaleos, à votre service."