La lune était belle, ronde et pâle, haut dans le ciel. Je m'étais souvent demandé si on pouvait s'y rendre. Je veux dire, pour y vivre. Pas pour planter un drapeau et se la péter en redescendant quelques heures après. Ce coin de la ville me plaisaient de plus en plus. J'avais déjà vécu pas mal d'expériences assez plaisantes dans les environs, et cette pauvre femme toute chamboulée non loin de moi était l'une de ces expériences. Je lui adressai un sourire moqueur. Elle était nue, transpirait et suffoquait. Normal, elle venait de goûter à une technique spéciale de mon invention. J'avais pas encore trouvé de nom, mais elle avait dû apprécier, la cochonne. Le truc, ça consistait à stimuler l'intérieur de la demoiselle avec de petites langues de sang - que j'avais pris soin de ne laisser sortir qu'une fois l'engin bien en place. Aucune trace de détectable, vu que je contrôlais totalement mon liquide sanguin.
La coquine m'avait littéralement éclaboussé. Sans me vanter, j'étais doué pour la chose. Je fis mine de lui envoyer un bisou, un air moqueur attaché au visage. Elle détourna le regard en rougissant. Elle voulait en redemander, je le sentais, mais son honneur et sa fierté l'empêchaient d'avouer qu'elle avait grave pris son pied.
- Je vais jouer franc-jeu avec toi, ma petite. Moi, j'ai trouvé ça très distrayant ! J'espère que je t'ai pas trop salie ? me préoccupai-je en souriant. T'as de la chance, quand même. Tu viens de te rapprocher de la lune, depuis que t'as connu le septième ciel avec moi. Alors que moi, j'suis encore coincé ici...
- Espèce de porc ! Vous ne vous en sortirez pas comme ça ! souffla la belle en me lançant des éclairs avec ses yeux.
- Eh beh ! Une vraie tigresse ! me moquai-je en faisant semblant de reculer. Je vais devoir rentrer, de toute façon, il commence à se faire tard.
- Ouais, fous la paix à ma femme. Les mioches dans ton genre, à minuit et demi, ça dort déjà depuis belle lurette, siffla un homme derrière moi.
*De quoi il parle, lui ? Je viens de me taper sa femme, elle est encore pantelante de ce que je lui ai mis, entièrement à poil et il me traite de mioche, sans se préoccuper ce qui s'est passé ? Il est taillé comme un cure-dent, en plus. Et sa tronche. Mon Diable, pourquoi une femme aussi bien roulée que cette nana-là se taperait un mec comme ça ? Il est riche ? Nan, vu ses fringues, il doit travailler comme vendeur de churros dans le métro, ou un truc comme ça...*
Je haussai les épaules en jetant un dernier regard à la femme, toujours assise sur le sol.
- Tu pourras dire à ton tendre mari qu'il vaut rien, comparé à moi, fis-je, en adressant un doigt d'honneur à l'homme.
- Hein ? Non, attendez... fit la femme, comme paniquée.
- Allez chérie, on rentre, trancha net l'homme en agrippant fermement le bras de sa femme.
Un doute m'assaillit. La demoiselle semblait vouloir me dire quelque chose, mais la présence de l'inconnu semblait la dissuader. Sa femme ? J'avais de gros doutes, maintenant. Mais bon... J'allais profiter du reste de la nuit, tout simplement. Je m'installai sur un banc et me posai tranquillement, les yeux rivés sur l'astre blanc dans le ciel.
Environ trente minutes de silence plus tard, un cri perçant retentit. Cette voix, c'était ma petite copine de tantôt, j'en étais sûr. Et c'était pas un cri de plaisir, comme elle avait pu laisser échapper avec moi. Non, c'était de la peur, et de la douleur. Un mélange des deux. Tout en fronçant les sourcils, je me levai et me dirigeai dans la direction d'où provenait le hurlement. *Ce fils de pute m'a menti... Dommage pour lui, s'il s'était contenté de se barrer loin quand j'étais pas d'humeur à me friter, il aurait pu survivre... Mais là, j'me suis calmé, et il va tout regretter. Le mensonge, le viol... et le fait que je puisse pas aller sur la lune.*
En m'approchant, je distinguai une odeur particulière, que je connaissais bien. Un paquet de remords et comme une pointe d'effroi au cœur, je me mis à courir. Ça puait le sang.
La scène était horrible. Des plaies béantes, des mares rougeâtres disséminées partout, et la femme qui respirait à peine. Je me précipitai.
- Il est où ? demandai-je en m'accroupissant près de la nénette.
- Vous... voulez m'aider ? articula-t-elle, étonnée.
- Dis pas de conneries, je veux juste le retrouver parce qu'il m'a menti, cet enfant de... Je m'interrompis, et essayai de recoudre les plaies avec des aiguilles de sang et des bouts de ma chemise.
- Qu... Qu'est-ce que... c'...est ? interrogea la femme en détaillant mes ustensiles carmins.
Je ne répondis rien. J'étais pas un bon médecin. Je récupérai les gros bouts de tissu avant d'abréger les souffrances de la pauvre fille. Un coup de dague ensanglantée en plein cœur. Et je m'élançai à la suite du criminel.
Après un peu plus de deux heures de recherches infructueuses, je dus me rendre à l'évidence. Je retournai sur mes pas, pris soin de briser la nuque de la femme pour éviter qu'on m'accuse - est-ce que ça marchait vraiment, ce genre de procédé ? - et m'emparai du téléphone de la victime. Le portable affichait 3h26.
- Allô, police ?
[HRP]Voilà, dis-moi si tu trouves que ça va pas =)[/HRP]