Prudemment, Alice posa sur ses genoux son bol, le mettant sur une belle assiette, et y trempa son petit pain, avant de le porter à ses lèvres, se dépêchant de lécher le chocolat, mordant dedans. Si c’était bon ! Il était sans doute inconvenant qu’elle se permette de manger devant un invité, mais Alice restait une petite gourmande. Elle regarda Romary, attendant que ce dernier s’exprime, qu’il dise où il voulait en venir. Le jeune homme était assez mignon. Des hommes, Alice ne connaissait généralement que des individus virils, comme les Commandeurs, son père, ou même Gauvain…
« Je vous remercie...Sinon vos mages ne sachant pas cela je suis venue pour vous demander comment contacter les dragons afin de leurs demander si eux-même savent quelques choses...Je pense qu'ils pourront m'aider d'une façon ou d'une autres. »
A cette demande, savoir « comment contacter les dragons », un petit rire secoua deux des soldats en armure, et Alice fronça les sourcils en les regardant. Ceci ne les empêcha pas de murmurer entre eux.
« Voir les dragons… Il veut sans doute leur servir de casse-croûte… » rigola l’un d’eux.
La Princesse se pinça les lèvres. Les soldats n’avaient toutefois pas spécialement tort. Les dragons étaient assez agressifs, et, s’il était interdit aux étrangers d’aller les voir, c’était surtout pour leur propre sécurité, afin que les dragons ne viennent pas les dévorer. Il fallait donc perpétuellement veiller à ce que personne ne s’y rende sans être accompagnée par au moins un Commandeur, dans la mesure où les dragons n’attaquaient jamais les Commandeurs, ou ceux les accompagnant. Réfléchissant sur la réponse à lui porter, Alice hésita. Il avait beau sembler petit et inoffensif, il devait probablement avoir accompli un long voyage.
« Je vois… » répliqua-t-elle posément, réfléchissant silencieusement.
Elle se tapota les lèvres. En soi, elle devrait opposer à Romary un refus franc et catégorique. Le territoire des Dragons était un sanctuaire pour Sylvandell, et on ne pouvait y aller que pour des raisons spéciales. Alice y avait déjà invité des individus, comme sa petite protégée, Sakura, mais elle l’avait fait parce que le dragon doré l’y avait invité. Elle avait aussi admis Tinuviel Lastrim, une elfe rouge, à y pénétrer, mais l’avait fait parce que l’elfe était une femme exceptionnelle.
« Vous devez savoir, cher Romary, que le Territoire des Dragons est un lieu sacré à Sylvandell, et passablement dangereux pour les étrangers. Les dragons n’aiment pas qu’on les dérange, et, si vous y allez sans y être invité, et si les dragons vous trouvent, ils vous attaqueront. »
Elle se tut un peu, lui laissant le temps de bien analyser ce qu’elle venait de dire. Alice reposa le bol sur la table basse, et retourna croiser ses jambes, relevant un peu sa robe, permettant à un regard curieux de voir le bout de ses collants. Elle caressa distraitement, avec le bout de ses doigts gantés sa peau, et le regarda.
« En conséquence, pour rejoindre le dragon d’Or, vous aurez besoin d’une autorisation spéciale. Et sachez que, même si vous obtenez cette autorisation, le dragon d’Or est susceptible de ne pas vous aider. Nous n’influons pas sur la volonté des dragons dorés. »
La Princesse se tut, afin que Romary comprenne bien qu’elle ne promettait pas le succès. Quelques idées commencèrent à émerger dans sa tête, et elle se redressa, s’extirpant de son fauteuil.
« Veuillez me suivre, jeune Romary. Je considère cet entretien comme clos. »
Une manière polie d’inviter ses gardes et le page à les laisser. Elle tendit sa main, pour que Romary s’y agrippe, et elle sortit de la salle, marchant tranquillement le long d’un couloir, jusqu’à atteindre une espèce d’alcôve avec des rideaux volant doucement parle vent. Elle les écarta, le menant sur un balcon. La vue donnait sur les montagnes escarpées du Territoire des Dragons, et on pouvait voir plusieurs dragons tourner dans le ciel en poussant quelques rugissements.
« Contemplez, Romary… C’est le Territoire des Dragons. »
Elle le regarda en souriant, ses cheveux volant délicatement au vent, et caressa avec le bout de ses doigts la nuque de Romary, sans vraiment pouvoir s’expliquer son geste.
« C’est un endroit dangereux… Réfléchissez-y bien, avant de vous prononcer pour y aller. Qu’est-ce qui pourrait m’inciter à vous donner l’autorisation de vous rendre dans mon sanctuaire ? »