Elle avait continué à profiter de son corps, s'exaltant elle-même sur les sensations qu'elle en tirait, alors que lui, en restait de marbre. Elle faisait preuve de toujours plus de violence, alors que ses mouvements se faisaient d'avantage vigoureux. Elle enfonça alors soudainement ses ongles dans le torse de Jad qui resta encore une fois de glace : la douleur ne l'excitait en rien, c'était même le contraire. Mais de toute évidence, elle avait pris son pied, elle avait fini par avoir un orgasme. Jad soupira, il allait enfin pouvoir reprendre ses habitudes. Qu'on se serve de lui comme d'objet sexuel ne le dérangeait pas, ce qui venait de se produire étant une nouvelle expérience, intéressante, mais sans plus.
Elle l'observa avec un sourire, mais il s'effaça aussi soudainement qu'il fut apparus. Avait-elle remarqué qu'il n'avait pas pris de plaisir. Elle sembla fâché d'ailleurs, Jad se disait qu'il allait sans doute souffrir d'avantage... Bon, puisqu'il fallait passer par là, il attendit. Finalement, au lieu de cela, elle se redressa et s'écarta de lui, l'air vraiment fâchée. Jad l'observa, attendant qu'elle rende son verdict. Elle déclara alors, aussi soudainement que cela :
« Qu’aime-tu donc humain, si le plaisir primitif du sexe ne te plait pas ? Quelle joie déplorable adores-tu dans le fait d’enfoncer ton sexe entre les cuisses d’une humaine ? Dis-moi ! »
Jad haussa les sourcils. Cette question l'intrigua : pourquoi s'en inquétait-elle ? La curiosité, peut-être. Jad savait à quel point ignorer quelque chose pouvait être dur, mais il pensait être le seul dans ce cas. Après un instant d'incertitude, où il hésita s'il fallait tenter de lui faire comprendre ou de laisser faire les choses, il plissa les lèvres et déclara :
« Durant mes voyages, je suis arrivé dans une tribu africaine assez libérer sur le plan sexuel : un homme et une femme pouvait avoir de multiples partenaires, selon ses désirs. Seulement, les gens de cette tribu ne m'adressaient pas de la parole, ni ne me regardaient. Le soir même, trois de leurs femmes s'immicèrent dans ma tente. Nous avons fais l'amour plusieurs fois, tous les quatre, d'abord l'une après l'autre, puis toutes en même temps. Le lendemain, le clan entier m'acceuillait comme un frère, comme si j'avais été toujours des leurs. Lorsque j'ai demandé à mon guide pourquoi ce changement soudain, il m'a parlé de la "première nuit du colon" »
Il s'installa plus confortablement, puis continua :
« Lorsqu'un colon blanc, ou un nouveau venu dans la tribu, était acceuillis, personne à part le chef du village n'avait le droit de lui parler ou de le regarder directement. Et le soir, on lui envois trois des plus jeunes et des plus belles filles de la tribu. Le colon est invité à faire l'amour aussi longtemps qu'il le veut, mais s'il fait l'amour au moins une fois avec chacune d'entre elle, il est alors frère de la tribu, et devient comme un membre de la famille. La raison de ce rituel est simple : par le sexe, les partenaires d'un soir son à même de dire si le nouveau venu est bon ou mauvais pour la tribu, s'il apporte une bénédiction, ou au contraire une malédiction. »
Il regardait ensuite la femme dans les yeux, sans dégoût, ni appréhension, et continua :
« Lorsque je fais l'amour à quelqu'un, je me souviens de cette réalité : on partage un corps, on découvre une personne, on l'apprends, on trouve ses forces et ses faiblesses. On fusionne littéralement avec une personne, en découvrant les parties les plus intimes de son corps et de son coeur. Le sexe est un moyen de découvrir, d'apprendre l'autre, de comprendre ce qu'il est, ce qu'il vaut, l'écho qu'il émet dans le monde. Je sais que je suis l'un des rares à ne pas juste "baiser pour le plaisir", parce que cela ne m'intéresse pas. C'est toujours pareil dans cet ordre. Mais dans mon point de vue, le sexe devient toujours une nouvelle expérience, irremplaçable. »
Il allait sans doute subir un lourd châtiment avec ce qu'il allait dire, mais il valait mieux lui dire la vérité que de lui mentir, et risquer qu'elle le découvre. De toute manière, il n'était pas fort pour flatter quelqu'un sans raison.
« Quand vous m'avez montré cette... aura de danger autour de vous, j'étais excité : l'idée de vous découvrir, de vous apprendre, j'étais sublimé. J'avais envie de vous, c'est clair. Mais quand nous avons commencé, j'ai ressentis qu'au fond, vous êtes vide. Oui, vide, prenez le comme un avis plus qu'une critique. Vous prenez le sexe pour acquis, juste pour un besoin bestial primaire, sans réel consistance, juste du plaisir à l'état brute, rien d'autre. Dès lors, j'ai compris que vous n'étiez pas aussi passionnante que vous sembliez l'être. Vous n'êtes qu'une boule de désir qui veut s'assouvir, mais qui ne trouvera jamais le repos, parce qu'elle s'arrête à cette vision du sexe si restreinte, si basique. »
Il soupira doucement, elle allait mal le prendre, c'était certain, mais bon, c'était le risque d'avoir couché avec une créature aussi dangereuse. Il s'en rendait bien compte.
« Maintenant, vous pouvez me punir pour mon insolence, me faire souffrir, voir me tuer, si ça doit se faire, au moins, je partirai en me disant que j'aurai été honnête avec vous. Mais pensez au moins à ce que je viens de vous dire et regardez ce qui s'est passé à l'instant. Pensez-vous que vous vous contenterez seulement de ça ? »
Il ferma les yeux, attendant son châtiment. Dur de se dire qu'il allait peut-être mourir, là, de suite, mais allons, il fallait faire face, sans la crainte de la mort. Il allait faire peut-être le dernier grand voyage... Aller savoir.