Une alliance profiteuse ... [PV: Belgrif]

Eh bien, depuis la disparition soudaine et inattendue de Dorian, tous ses clients viennent désormais me voir, demandant à voir mes esclaves. Certains paient même le gros prix pour être bien sûr que je ne les vende pas à quelqu'un d'autre… Y'avait pas à dire, je commençais à faire des affaires en or depuis la disparition de ma concurrence, et bientôt, je pourrai prendre le titre qui me revient de droit; prince des marchands d'esclaves. J'y ai travaillé dur pour pouvoir un jour atteindre ce rang, mais je ne pouvais pas le faire seul.

Qui dit hausse de la demande ne dit pas seulement hausse du prix, mais aussi hausse de la recherche d'esclaves, et donc hausse du personnel. Avec tout l'argent qu'on m'avait offert pour finalement vider mes stocks d'esclaves, je pusse me procurer une véritable petite armée, en plus de l'armada de morts vivants que je pouvais appeler comme bon me semblais, mais qui ne restaient jamais avec moi plus d'une journée entière, environ vingt quatre heures. De toute façon, en général, je ne les utilisaient qu'une heure ou deux, puis je les renvoyais à leur triste sort dans les  limbes froides et sombres qu'était leur nouvelle demeure.

Y'avait pas à dire, tout allait bien pour moi, mais il me fallait un homme à mes côtés, un bras droit qui me servirait de conseiller, de préférence un aussi tordu que moi, pour qu'il puisse me comprendre et élaborer des stratégies qui seraient tout à fait dans mes cordes. Alors que j'en recherchais, un nom revenait souvent; Belgrif. Après avoir fait des recherches sur cet homme, je découvris que c'était un terranide aux attributs de félins. Au début, l'idée de m'allier à un terranide me déplu, j'avais passé ma vie à les réduire à l'esclavage, et je finirais par en engager un à mon haut conseil? Je ne pouvais pas faire ça… Enfin, pas avant d'avoir des preuves solides de sa compétence.

Deux mois plus tard, trois espions étaient venus me voir, me faisant leur compte-rendu de la personne qu'était ce Belgrif. Apparemment, personne qui m'avait donné des informations sur ce terranide n'avait romancé, il était vraiment à la hauteur de sa réputation.

Je crois même qu'il m'a remarqué à un moment, alors que j'étais sur les toits, à le suivre d'en haut, lau nuit!

Un petit sourire en coin, puis j'envoyai un messager à sa rencontre.

J'étais donc à me prélasser dans mon nouveau palace, à côté d'un étang que j'avais fait installer par certains hommes des bas fonds, en les payant beaucoup plus qu'il n'avait été convenu, aussi bien se faire des amis, même parmi les pauvres, non? Ma sœur avait décidé d'emménager avec moi, malgré le fait qu'elle avait décidé que s'était beaucoup trop pour elle, et qu'elle préférait me laisser les rênes de la compagnie familiale. Allongé au soleil, ne gardant qu'un short ample en soie rouge m'arrêtant aux genoux, je sursautai en entendant un de mes hommes m'interpeller. Il était beaucoup plus près que ce que j'avais imaginé!

Monsieur Atayoshi, Belgrif, le terranide que vous vouliez voir, est arrivé, et attend devant la porte extérieure.

Annoncez vous, bon sang! Parfait, amenez le à mon bureau, nous allons avoir une petite discussion. Offrez lui un verre. Une fois qu'il est bien installé, venez me chercher.

Bien, monsieur… Oh, et désolé, pour le sursaut…

L'homme entra dans la maison afin de sortir à l'extérieur, par devant. Ma sœur et moi pûmes entendre le bruit de la porte, faite de barreaux de fer, s'ouvrir, pour se refermer quelques secondes plus tard. Ma sœur, laissant ses yeux fermés, tout en restant allongé sur le sol, presque nue, me lança.

Je ne vois vraiment pas pourquoi tu aurais besoin d'un conseiller, père n'en avait jamais eut, lui.

Puis, dans un petit raclement de gorge, le garde réapparut à côté de moi.

Monsieur, le terranide est dans votre bureau…

Sans aucune réponse verbale, je me levai, puis me dirigeai vers l'intérieur.

L'entreprise n'était pas aussi florissante lorsque c'était père qui l'avait, et je dois avouer que j'ai de la difficulté à coordonner toutes les captures d'esclaves, en plus de devoir vendre moi-même les produits… Sans parler du recouvrement des clients qui n'ont toujours pas payé… Au fait, tu as terminé de les transcrire?

T'inquiète.

Lançant un petit sourire à ma sœur, je me détournai d'elle pour entrer, mais je m'arrêtai net. Attrapant le haut d'Inu, qui était resté au sol je lui lançai.

Rhabille toi, j'ai un invité.

Laissant ma sœur cadette à son bronzage, je me dirigeai vers mon bureau, où j'ouvris la porte. Affichant un sourire à mon invité, j'attrapai un verre et me servit un whisky, comme à mon habitude. Je n'avais pas jugé bon de dire un mot avant que je sois face à face avec cet homme. Une fois assis, je me décidai à prendre la parole.

Bonjour, vous devez être Belgrif? Je suis Hiro Atayoshi, marchand d'esclaves. Évidemment, vous devez vous demander pourquoi vous êtes ici, dans cette pièce. Eh bien, mon cher, j'ai une proposition à vous faire; devenir mon conseiller. J'ai entendu dire que vous étiez d'une intelligence sans commun et que vous aviez une moralité… disons… déficiente et c'est exactement ce dont j'ai besoin. Vous comprendrez que, depuis la disparition prématurée du prince des marchands d'esclaves, Dorian Garan, mes affaires augmentent à chaque jour, et je commence à avoir de la difficulté à pouvoir tout coordonner. Si vous acceptez le poste que je vous offre, votre job sera de m'assister et me conseiller pour toutes situations nécessaires. Sachez que, assez souvent, je fais des Raids sur des petits villages dans les alentours de nexus, et je réduis à l'esclavages la majorité des gens encore envie après le Raid, inutile de dire que je participe à ses attaques surprises. J'aurais donc besoin d'un homme qui n'a pas peur de se salir les mains.

Je marquai une pause, prenant une gorgée de mon verre, un peu pour lui laisser le temps de comprendre ce que je veux de lui.

Si le job vous intéresse, on pourra parler de paiement ensuite.

Un coup de poignard par ici, une belle parole par là, une main furtive qui passe, qui prend… Belgrif, en quittant son village natal, n’était guère qu’un voyageur perdu, un être vulnérable ignorant du monde qui se découvrait peu à peu à ses yeux. Mais à force de persévérance et de fourberie, il était devenu un autre : un escroc, un manipulateur, un criminel. Il s’était vite adapté, il avait compris les règles du jeu en Terra. Il ne devait sa survie qu’à son immoralité. Tuer de sang froid, tuer par traitrise, lui avait permis à plusieurs reprises de ne pas finir la chaine au cou, esclave, marchandise de chair. Dépouiller les riches ou les miséreux lui permettait de gagner sa vie. Evidement, nombreux étaient ceux qui lui en voulaient mais peu lui importait. Ces gants qui le détestaient faisaient sa notoriété. Il n’était peut-être pas devenu le plus célèbre les bandits mais à Nexus, sa ville de prédilection, son nom circulait. Sa sinistre réputation décrivait un être au visage d’ange et aux manières de démons, quelqu’un capable de vendre père et mère pour un peu de plaisir, un monstre d’égoïsme.  Oui, c’en était bel et bien fini de ce pauvre minou errant dans les rues sans savoir où il allait. A présent, il hantait les bas-fonds tel un fantôme, il s’aventurait même dans les cartiers aisés pour y prendre ce qui lui plaisait. Tout, absolument tout ce qu’il avait sur le dos, il ne l’avait pas payé, histoire de principe.

Ces dernières semaines, le Terranide félin avait remarqué quelque chose de curieux. On l’observait, il en était presque certain ayant aperçu un curieux individus le suivant de nuit sur les toit de la cité. On cherchait à se renseigner sur lui. Alors, de son côté, il avait mené sa propre enquête. Si on cherchait à lui faire un mauvais coup, à lui qui jamais encore n’avais connu l’échec, il devait être prêt. Lentement mais surement, il remontait la piste. Il n’eut toute fois pas le temps de découvrir qui était le commanditaire lorsque ce dernier lui adressa directement un message, une invitation. Hiro Atayoshi, un influant marchant d’esclaves.

Voilà Belgrif surpris. Devait-il répondre à l’appel ? Il ne fallait pas oublier qu’il avait le profil parfait pour devenir un esclave. Seulement, il se dit que les intentions du marchant devait être autre. Sinon, au lieu d’un message, il aurait envoyé ses sbires, il aurait tendu un piège. Et puis le félin était curieux d’avoir le fin mot de cette histoire. Aussi, il se décida à venir. C’était risqué, certes, mais peut-être y avait-il là une opportunité à ne pas laisser passer.

Voilà donc Belgrif dans le bureau de Atayoshi. Il avait prit ses aises. Installé confortablement sur sa chaise, un verre à la main, l’air très décontracté, il donnait l’impression d’un individu confiant en lui-même et en l’avenir. Comme à son habitude, il était vêtu d’embles habits derrière lesquels il se dissimulait. Un large chapeau orné d’une plume et un manteau tombant plus bas que ses genoux étaient se qu’on voyait en premier lieu. Sous l’obscurité du chapeau, on devinait son visage de chat au regard d’émeraude.

Le félin garda le silence tout en sirotant l’alcool dans son verre et en écoutant avec attention. Il avait simplement salué d’un geste respectueux le maitre des lieux histoire d’être convenable mais sans trop en faire. Quand ce fut à lui de répondre, il déposa son verre sur el bureau et s’exprima avec calme. Son ton était posé.

-Monsieur Atayoshi, quel étrange marchant d’esclaves vous faites. Vous me demandez, à moi, Terranide, de vous seconder dans une activité qui brime les Terranides. Ou vous êtes fou… Il ménagea une brève pause, laissant sa phrase en suspend. …ou ma notoriété est passé à un tout autre niveau. On va dire qu’il s’agit de ce dernier cas, il convient mieux à mon égo.

Il fit l’un de ses sourires malicieux dont il avait le secret. Puis il reprit, presque rêveur.

-Moi, associé à un marchant d’esclaves, moi le Terranide qui vend des Terranides. Soyez certain que l’idée me plait mais elle va me placer dans une situation délicate. Je serais, pour mes semblables et beaucoup d’autres, un monstre, un symbole à abatte. Est-il possible de pousser plus loin la trahison ? Sur le principe, je suis d’accord, je dirais même que cela m’enthousiasme. Alors parlant paiement.

Un éclair d’avidité passa dans le regard du filou félin.

-Si vous voulez des esclaves, je pourrais vous en procurer. Je peux même vous aider à gérer vos affaires. Mais si vous voulez bénéficier de mes services, que m’offrez-vous en échange ?

Une situation délicate?

Mon verre toujours en main, je souris en coin avant de me lever, puis je me retournai, comme pour regarder dans la même direction que le terranide. Au lieu de comporter quatre murs, mon bureau n'en avait que trois, le côté dépourvu de mur était soutenu par deux colones de style grecs, et me présentait une vue sur le quartier des marchands, et je pouvais voir les bas fonds, en plus d'une partie de la place publique. Gardant mes yeux sur ce panorama, j'éclaircis l'esprit qu'était celui de Belgrif.

Vous savez, à Nexus, je suis le prochain prince des marchands d'esclaves, l'homme qui a une grosse part de marché. S'attaquer à un de mes hommes, chacun d'entre eux étant un maillon dans la chaîne qu'est mon entreprise, s'expose à de graves sanctions. Alors, pour votre job au sein de mon organisation, je peux vous dire que vous ne risquez absolument rien. Vous n'aurez qu'à claquer des doigts lorsque quelqu'un vous menace pour le réduire à l'esclavage.

Retournant m'asseoir, satisfait du fait que l'homme-chat soit bien à l'aise avec l'idée de trahir sa propre race, quoique je ne trouves pas qu'un homme-chat soit parenté avec une femme-oiseau, et ainsi pouvant conclure une entente ensemble.

Le paiement consistera ainsi: Vous aurez une terre pour vous, environ 50 hectares, des pierres précieuses et des vêtements de soie, comme "bonus" au commencement, et ensuite ce sera un paiement hebdomadaire, de 800 pièces d'or, sans parler des commissions lorsque vous réussirez à vendre un esclave. Comme j'ai besoin de faire un profit, votre commission sera de 5 %. Alors, satisfait?

Je souris en coin en regardant l'homme qui se tenait devant moi. Il était le premier terranide que je ne considérais pas comme inférieur à moi, c'était comme si je parlais avec un autre humain, tout bonnement. Je ne pus m'empêcher de croire qu'il se disait que c'était un sacré jackpot pour lui, un terranide, alors qu'il avait dû vivre dans la misère depuis son premier jour, alors lui offrir autant devait le rendre heureux. Moi, je l'étais, car je m'étais trouvé un officier qui n'aurait aucun scrupule à suivre mes ordres, mais à me conseiller sur la meilleure manière à faire.

Si vous avez des questions sur le travail à effectuer, si vous aimeriez apporter quelque chose au paiement, ne vous gênez surtout pas, nous débattrons de ton paiement.

C'est alors qu'on frappa à la porte. Un "Entrez" autoritaire s'échappa de ma bouche, le soldat de tout à l'heure entra dans la pièce.

Monsieur, nos vigiles nous ont annoncé qu'un contingent de terranides marchands passe à l'extérieur des murs de la ville en ce moment, côté nord, quels sont les ordres?

Je souris en coin en me retournant vers mon nouvel employé.

Vous vous sentez d'attaque pour commencer aujourd'hui? J'aurais besoin de quelqu'un pour diriger le groupe qui va tendre le piège, avant que nous n'attaquions.

-Satisfait, répondit simplement Belgrif.

Il avait étouffé un ronronnement de satisfaction. Jamais il n’aurait imaginé qu’on pouvait offrir tant, si vite. Bien sûr, il se doutait que tout ceci était soumis à de bon résultat de sa part. Hiro, comme beaucoup de puissant, ne devait pas vraiment tolérer l’échec. Le jeu que constituait cette collaboration si atypique n’en devait que plus excitant. Négocier maintenant n’était peut-être pas une bonne idée, d’autant plus qu’un soldat venait d’entrer pour transmettre une information à son maitre et que ce dernier demandait à son nouveau subordonné d’entrer dans le vif du sujet. Le félin, excité à l’idée de devenir dès à présent ennemi des Terranides, n’allait pas se faire prier.

-Ma foi, je n’y vois aucune objection. Un peu de sport me fera le plus grand bien.

Il se leva, histoire de joindre le geste à la parole. Il reprit ensuite.

-Ceci dit, comprenez que ce n’est certainement pas aujourd’hui, en cette chasse, que je monterais le meilleur de moi-même. Il me faudra un petit temps d’adaptation afin de pleinement appréhender mes nouvelles fonctions. Mais je veillerais à ce que ce ne soit pas trop long.

Il disait cela afin de se couvrir d’une certaine façon. Cette affaire qu’on venait de lui faire valait son pesant d’or. Il était plus que certain qu’il ne trouverait pas mieux ailleurs et il ne voulait pas, de ce fait, la laisser passer à cause d’une bête erreur de débutant. Il n’avait que peu l’habitude de commander. Heureusement, tendre des pièges, ça, il savait faire. Comme un gosse, il trépignait intérieurement d’impatience.

J'eus un petit sourire en constatant que le terranide n'avait jamais vu une telle proposition, d'où l'absence d'hésitation alors que je lui demandais s'il était satisfait. Sourire qui s'élargit lorsque je remarquai qu'il avait très bien compris ce que j'attendais de lui; à savoir le succès. Il était évident qu'avec un salaire comme ce que je lui proposais, je ne tolérerais que très peu l'échec. Il me rassura cependant bien vite que la période de stabilisation prendrait le moins de temps possible.

Je l'espère bien… Content de savoir que vous souhaitez commencer maintenant. Suivez moi dans ce cas.

Nous traversâmes la maison avant de faire un arrêt à l'armurerie où j'enfilai une armure en cuir, très souple pour la protection qu'elle pouvait m'offrir. Attrapant un filet et un marteau, je lançai une dague d'environ vingt centimètres au terranide.

Cette mission sera ton test. Réussi la tâche que je vais te confier, et tu pourras prendre la place qui te revient de droit.

Je l'entraînai alors à l'extérieur, où nous attendaient un cheval brun ainsi que mon étalon noir à deux paires d'yeux rouges. Montant sur ma créature, je fis signe à Belgrif d'en faire autant, puis nous sommes parti, nous dirigeant vers la porte Nord.

À l'extérieur des murs, un petit contingent de soldats, une dizaine pour être précis nous attendaient. Six étaient sur des chevaux semblables à celui de Belgrif, et quatre autres étaient à pieds. Pointant ces derniers, je dis à Belgrif que ce serait ces hommes qu'il devrait commander. Au loin, on pouvait voir les caravanes se rapprocher de nous, avançant à un rythme régulier, mais lent.
 
Amenant un des hommes à cheval, ainsi que Belgrif, en retrait des autres, je sortis une carte de la poche de mon armure de cuir. Déroulant la carte, on pouvait très bien y voir la ville de Nexus et ses alentours, signe que ce n'était pas la première fois que nous y planifions une attaque.

Ika, nous allons faire une diversion. Nous sept allons créer un barrage devant les caravanes, ce qui les poussera à reculer. S'ils ont le moindre d'intelligence, ils comprendront qu'ils ne pourront pas nous semer par le chemin qu'ils ont empruntés, et passeront par là

Avec mon doigt, je passai sur un chemin qui rejoignait celui des marchands, mais qui s'engouffrait dans une forêt, pas bien dense, vue la végétation qu'il y avait…

Belgrif, toi et tes hommes serez posté ici, dans la forêt, caché dans les arbres. Attention, il faut impérativement que vous soyez dans les arbres. À ton signal, vous sauterez sur les montures qui font avancer les caravanes, et vous les tuerez. Ainsi, les marchands seront à notre merci. De toute façon, même si on en perd certains, nous pourrons aller vendre ce qu'ils ont dans leurs caravanes. Des questions?

Ouais, moi j'en aurais une; Pourquoi diable avez-vous engagé un terranide pour faire un travail d'humain?

Jetant un regard froid à mon colonel, je répondis à sa question.

Dans mon équipe, il n'y a ni Terranide, ni humain, ni ESPer, ni sirène ou nymphe, il y a des frères et des soeurs qui travaillent tous ensemble. Ai-je répondu adéquatement à ta question condescendante, colonel?

Un peu gêné, le dénommé Ika hocha timidement la tête puis leva le genou qu'il avait posé au sol avant de remonter sur son cheval, pendant que nous faisions le même, le nouveau membre et moi.

Je comptes sur vous pour expliquer le plan à vos hommes. Belgrif, j'attends que, la seconde que tu as terminé d'expliquer la tâche à tes hommes, vous aillez immédiatement dans la forêt. Laisse ton cheval ici, tu n'en auras pas besoin.

Nous retournions alors vers le contingent, laissant le soin aux autres d'expliquer la capture d'aujourd'hui.

Belgrif avait toujours eu une grande confiance en lui, allant même souvent jusqu’à se surestimer. Mais en cet instant, alors qu’il accompagnait Hiro à cheval, le doute s’insinuait en lui. Et s’il échouait, s’il ratait complètement ce coup ? A n’en pas douter, ce serait lui qu’on allait vendre. Dans cette histoire, il avait tout à gagner… ou tout à perdre. Commander, il ne l’avait jamais fait. Et là, il allait commander des esclavagistes, des gens qui pour l’instant le regardaient plus comme une marchandise qu’autre chose. Il était petit, il faisait mal du cheval, il ne payait vraiment pas de mine. S’il voulait jouer le rôle auquel on le destinait, il allait devoir être bon, très bon.

-Bien monsieur. Je ferais selon votre désir.

Voilà le Terranide félin à pied, ce qu’il appréciait, et en compagnie de ses quatre hommes. Leur expliquer le plan fut rapide et pour cause, le chat se limita à une phrase.

-Vous quatre, avec moi : on a un piège à tendre dans la forêt.

Bien qu’intimidé, Belgrif n’en montrait rien. Il s’était exprimé avec une fermeté stupéfiante. Il savait jouer la comédie, c’était un don chez lui. Sur ce, il prit la tête de la petite troupe et imposa une marche rapide. Il voulait gagner un maximum de temps. Dix minutes plus tard, il fut sur place, dans la forêt. Là, il s’apprêta sagement à respecter les ordres d’Hiro mais une autre idée lui vient à l’esprit. Tout en observant les arbres à proximité du chemin, il hésitait.  On le testait, n’est-ce pas ? On l’avait prit pour sa réputation, sa ruse. S’il se contentait d’obéir, il ne serait au final qu’un être banal. Tout le monde povuait obéir. Non, il voulait être mieux que ça, il voulait se démarrer et ce dès le début. Peut-être faisait-il là une erreur ou au contraire, peut-être allait-il enchanter son nouvel employeur. Ce dernier, au final, voulait un résultat aussi bon que possible. Pour lui, rien d’autre ne devait compter.

Le Terranide se tourna vers ses hommes. Pendant le trajet personne n’avait parlé. Il n’y avait eu que des murmures entre les humains. L’homme chat désigna un arbre particulièrement gros à côté du chemin.

-Toi, avec ta hache, coupe cet arbre au trois quart. Il faut qu’à mon signal tu puisses le faire s’effondrer sur le chemin en un rien de temps. Vous deux, vous allez vous cacher dans ces buissons, juste à droite de la route. Toi, Belgrif s’adressait au quatrième et dernier de ses hommes, tu va rester avec moi, on va se poster sur la gauche. A mon signal, l’arbre tombe, les caravanes vont devoir s’immobiliser ou contourner l’obstacle. Nous attaquons sans attendre, l’effet de surprise nous aidera. Notre objectif : les montures, il faut les abattre. Toi, dès que tu as fait tomber l’arbre, tu viens nous aider, bien sûr. N’oubliez pas que la seconde équipe va poursuivre les marchands. Si certains de ces derniers retournent en arrière, on les laisse faire, ils seront prit au piège. Ce qu’il ne faut pas, c’est qu’ils parviennent à forcer notre barrage. Allez, on se prépare !

Bien vite, le piège fut tendu. Belgrif estimait que ce dernier allait être plus efficace que le plan d’origine. Sauter depuis les arbres représentait un risque qu’il voulait épargner à ses hommes, et à lui-même. Seulement, l’avenir allait sous peu dire si son choix avait été judicieux. Le « bucheron » était prêt à faire s’effondrer l’arbre. Il était dissimulé derrière le tronc. Le reste des esclavagiste ainsi que leur chef félin se terraient dans les buissons. Il ne leur faudrait pas plus de quelques secondes pour sortir de leur cachette et se jeter sur les chevaux. Belgrif scrutait le chemin. En son fort intérieur, il revit l’étrange monture noir d’Hiro. Ce dernier devait avait sans doute quelques secrets tournant autour de lui. Raison de plus pour lui plaire…

La caravane approchait. Oui, voilà mes prochaines marchandises. Je pouvais pratiquement respirer l'odeur des pièces d'or qu'ils allaient me rapporter, mais aussi quelque chose d'autre, une odeur forte et âcre, c'était des marchands d'opium!

Messieurs, vous sentez ce que je sens?

Des petits rires furent la réponse que mes hommes me donnèrent. J'avais déjà mon idée; en plus de vendre les marchands, on vend la moitié des stocks et on garde l'autre pour les soldats, ce sera leur commission pour la mission facile que nous mettions en branle. Les septs chevaux, dont le mien, qui était un peu plus imposant que les autres, qui était en plein milieu, bloquaient la route, ne laissant pas passer les marchands. La caravane dirigeante s'arrêta, puis un "Qu'est-ce que vous nous voulez?" Retentit.

Donnez nous votre stock, et nous vous laissons passer! Rétorquais-je.

Aucune réponse, seule un mouvement de la caravane, signifiant qu'ils refusaient. Le contingent fit volte face pour repartir dans la direction qu'ils avaient pris. Nos chevaux partirent au galop, sous les cris de mes soldats. Le piège se refermait sur les marchands, alors qu'ils changeaient une nouvelle fois de cap pour s'engouffrer dans la petite forêt. Alors que nous les prenions en chasse, un craquement se fit entendre, puis un autre, jusqu'à ce que je vis un arbre tomber devant la caravane, puis mes hommes sortirent des buissons, menés par Belgrif, pour attaquer les bêtes. Un soupir alors que je voyais mes hommes s'arrêter, stupéfaits par la violence de cette attaque.

Une fois tous les esprits recouvrés, mes hommes encerclèrent les caravanes et tirent les occupants en otage, jusqu'à ce qu'ils décident de sortir. Je comptais mentalement les personnes qu'il y avait; quinze terranides, dont cinq femmes, ça valait son pesant d'or, mais pas autant que l'argent que je me ferai en revendant la moitié du stock d'opium, au marché noir.

Les hommes dans le bâtiment D, les femmes dans le H

Attrapant un petit emballage contenant environ un demi kilo d'opium, je m'éloignai du contingent puis criai "Belgrif!" afin qu'il vienne me voir. Une fois que je l'eus emmené à l'écart des autres, je me fis à faire les cent pas.

Tu as désobéi à un ordre direct… Tu as suivi tes seuls instincts… Ta témérité a failli nous coûter la réussite de la mission, l'effet de surprise était censé être seulement aux marchands, pas pour mes hommes aussi!! Tu… Tu… Tu me fais penser à moi!

Je mis alors à rire alors que je lui tendais sa part du butin, un demi kilo d'opium, qu'il pourrait consommer ou encore vendre, à son gré. Il était vrai qu'il me ressemblait alors que j'étais plus jeune, m'amusant toujours à désobéir aux ordres à mon père pendant les missions, rendant les choses un peu plus intéressantes.

Ceci dit, je n'ai pas que des compliments à te faire. Belgrif, lorsque tu as une idée, ou encore une amélioration, comme aujourd'hui, à un plan que j'ai élaboré, j'apprécierais vraiment que tu m'en fasses part. Comme ça, je saurais à quoi m'attendre.


Je lui souris puis ordonnai à mes hommes, après avoir mit tout le stock d'opium dans une seule caravane, de brûler les deux autres, où nous retournâmes à Nexus, où j'appris à Belgrif les rudiments de la vente d'esclaves, mais aussi la vente au marché noir, où on devait toujours négocier, et user de ruse pour pouvoir avoir les prix qu'on veut avoir.

-Mes excuses patron. Cette idée m’est venue sur le lieu du piège. Mais cela ne se reproduira pas, soyez-en assuré.

Tout content de cette victoire, car il s’agissait bien d’une victoire, Belgrif suivit son nouvel employeur en ville. Une nouvelle vie s’offrait à lui, une vie fastueuse et monstrueuse. Hiro avait visé juste, employé la bonne personne. Peut-être fut-il lui-même surpris de la rapidité d’adaptation du Terranide félin. En à peine quelques semaines, il n’eut plus grand-chose à lui apprendre et déjà Belgrif rendait d’appréciables services. En à peine quelques mois, le chat avait prit une indéniable importance.  En ville, on le respectait autant qu’on craignait. Accumulant les succès ainsi que la richesse, il participa à rendre son maitre plus puissant, plus influant qu’il ne l’était déjà. Il était connu comme son fidèle et effroyable bas droit. Mais la soif de pouvoir du matou était sans fin. Sans cesse il montrait une volonté d’aller de l’avant, de développer ses affaires. Peu à peu, il prit une certaine indépendance vis-à-vis Hiro. Il devint responsable de l’approvisionnement en esclaves et pour cela, nul besoin d’aide. Il ne reculait devant rien pour offrir à son patron une marchandise abondante et de qualité. Il alla jusqu’à faire des raids sur les villages de sa terre natale. Pour Belgrif, c’était une vengeance en quelque sorte, une vengeance contre son passé.

Un an et deux moins s’écoulèrent ainsi…
Le Terranide félin était devenu un autre, mais cela ne lui suffisait toujours pas…
En cette radieuse journée d’été, il s’apprêtait à mettre à exécution le plus sombre de ses plats…

Pas de velours sur sol de marbre blanc, le maitre des lieux s’avançait dans la vaste salle à colonnade. Il était ici chez lui, dans son imposant manoir qui trônait fièrement dans les hauteurs de Nexus. Cette demeure montrait à elle seule la puissance qu’avait acquis Belgrif. Ce dernier avait abandonné depuis bien longtemps sa veste et son chapeau, trop vulgaire désormais pour sa personne. Il était vêtu de soie et d’argent, une tenue étincelante digne d’un noble. A une main, il portait une grosse et magnifique chevalière, elle-aussi d’argent, frappé du symbole qui était devenu le sien : une griffe recoubée. A son côté, il portait une rapière. Cet arme, avouons-le, était là uniquement pour l’esthétisme car le félin n’était pas un homme d’action. Tout juste s’en servait-il pour occire un serviteur qui lui avait manqué de respect ou avait commis d’irréparables erreurs. Oui, cela lui arrivait de tuer ainsi.

-Monsieur.

A l’approche du maitre, les gardes s’étaient inclinés bien bas comme l’exigeait l’excentrique règlement.

-Allez attendre nos invités au grand portail.
-A vos ordres.

Les invités, c’était Hiro et sa sœur. Cela n’avait rien d’extraordinaire, ces invitations étaient devenues quotidienne. Tantôt Belgrif invitait chez lui, tantôt était-il invité chez Hiro. Les deux hommes discutaient, autour d’un bon repas, de leur affaire. Seulement, ce jour là, il y avait bien quelque chose d’un peu étrange. Dans le manoir, nul trace des domestiques habituels. Il ne restait que les gardes du corps de Belgrif, ces soldats d’élite lourdement armés et à l’air si sévère, si implacable. Leur fidélité envers le fourbe félin était indiscutable. Avec eux, au moins, pas de souci à avoir, il ne dirait rien de ce qui allait se passer…

Belgrif se dirigea dans la grande salle à magnée. La table était déjà dressée. Il s’empara de la carafe de vin et rempli trois verres de cristal. Il posa l’un des verres devant sa propre place. Ensuite, il sortit de la poche intérieure de son costume une petite fiole dont il versa le contenu dans les deux autres verres. Il ricana. Non, vraiment, il ne reculait devant rien. Il plaça les verres devant les assiettes des invités, rangea la fiole et prit place. Ensuite, il attendit.

Le plus douloureux quand on sait qu'un de nos hommes de confiance nous trahira, ce n'est pas la trahison, c'est bien l'attente de savoir quand il nous trahira.

C'était ce que je vivais, depuis deux mois. Je n'en laissais rien paraître à mes hommes, laissant une image imperturbable de moi et ce, peu importe où j'allais. J'avais cependant peur de croiser un des miliciens de Belgrif, qu'il ait reçu l'ordre de m’éliminer et me saute dessus. Bon, je suis immortel, mais l'idée de retourner au fleuve des morts me déplaisait beaucoup…

Belgrif était devenu très puissant, connaissant ce terranide comme ma poche, je savais qu'il en voulait plus, que je lui aie donné trop de pouvoir et qu'il essaye de me tuer, tôt ou tard. J'avais décidé de me contenter de vendre les produits que lui et ses hommes me rapportaient, et chaque fois, il m'amenait des meilleurs produits et prenait cet argent pour faire grossir ses terres, son armée, il avait même formé une milice, réduisant à l'esclavage tous ceux qui s'opposaient à lui. Plus les jours s'écoulaient, plus ils prenaient du pouvoir à la royauté, et à moi. Beaucoup de mes généraux me disaient que je me devais de réagir... Mais la curiosité l'avait emporté, allait il me tuer de manière douce, ou violente?

Puis, comme à chaque semaine, nous avions un repas d'affaires. Entrant dans la maison, ou plutôt le manoir, de Belgrif, je me penchai vers ma sœur.

Reste de marbre, Belgrif va tenter de me tuer aujourd’hui, regarde l’absence de serviteurs, que des soldats…

Ouais, j’ai remarqué aussi…

Nous nous rendîmes alors vers la salle à manger, où nous attendait Belgrif, nous servant des verres de vin. D’un remerciement de la tête, je pris place à la table, suivit des deux autres, avant de commencer à discuter affaires avec le terranide. Depuis qu’il s’occupait de rapporter des esclaves, j’avais fait construire deux bâtiments de plus, qui étaient aussi pleins…

J’aime bien ce que tu fais, Belgrif, et on dirait que l’élève risque bientôt de surpasser le maître… Content que tu sois dans mon camp!... Cependant, arrêtes tes raids, ne serait-ce que pour une ou deux semaines, je ne vais pas commencer à construire deux nouveaux bâtiments par mois, je ne ferai plus de profits! Contente toi, pour les semaines à venir, de seulement coordonner les clients à défauts de paiement, et voir à la sécurité des esclaves ainsi qu’à la défense des bâtiments. Pour l’instant, je ne t’en demande pas plus. Tu as été utile, cette dernière année, même vital, mais être trop gourmand cause notre perte…

Mon père me répétait ça sans cesse cette phrase, enfin, ce n’était pas la phrase au complet, mais peu importe, c’était pas mal l’essentiel.

Après quelques minutes, un servant vint porter de la nourriture et nous commencèrent à manger. Comme à l’habitude du félin, la nourriture était irréprochable. Cependant, lorsque je pris une gorgée de vin, un drôle de goût me fit froncer les sourcils.

Je ne sais pas qui t’as vendu se vin, mon ami, mais fait le écarteler par tes miliciens au plus vite! C’est un vin beaucoup trop acide.

Ma sœur en prit alors une gorgée et, comme pour confirmer mes faits, grimaça un peu. Alors que Belgrif détourna le regard, nous échangeâmes les nôtres, alors que j’hochai la tête, un peu pour confirmer les peurs d’Inu. Retenant un petit sanglot, je vis alors une expression de tristesse et de peur énorme, retenant avec difficulté ses larmes.

Moi, qui n’avait nullement peur de la mort, car je savais très bien que Charon me laisserait repartir, ayant cependant de la compassion pour ma sœur, je feintais le fait que j’ignorais qu’il nous avait empoisonné, riant de ma plaisanterie, puis continuant à manger, même si je n’en avais plus l’appétit.

Soudain, brûlement d’estomac, nausée, fièvre se succédèrent. Tombant de ma chaise, je ne réussis pas à me lever, mes pieds étaient de plus en plus douloureux, mes mains aussi. Lentement mais sûrement, la douleur monta jusque dans mes jambes et mes bras, les paralysant complètement. Bientôt, je n’arrivais plus à respirer, mes poumons, contractés par le poison, refusaient de m’obéir. Seul mon cœur faisait encore ce pourquoi il était fait, mais faisant un peu trop un bon travail, il battait à une vitesse inouïe, laissant peu de place à l’espoir de survivre. J’avais remarqué que c’était la même chose pour ma sœur, car je pouvais encore entendre ses petits gémissements de douleur, devenant des soupirs, puis plus rien, ni pour elle, ni pour moi. La grande porte et le fleuve.

Charon! C’est lui qui a fait ça, hein?

La mort acquiesça.

Laisse moi partir avec ma sœur.

Cette fois, cependant, ce ne fût pas un oui que j’eus…

Occupes toi de lui…

Inu… Je t’aime

Puis la terre s’effrita sous les pieds de ma sœur… Elle me regarda, puis alla rejoindre mon père et mes frères dans le fleuve des âmes perdues.

Charon, laisse la avec mon père, et mes frères, j’aime mieux qu’elle passe l’éternité avec eux.

Ne t’inquiète pas. Cependant sache que remonter les marches des esprits n’est pas sans danger, ce sera de plus en plus dur à chaque fois que tu mourras

J’hochai la tête, puis posa le pied sur la première marche de l’escalier, alors qu’il apparaissait pour moi… Chaque pas était une douleur à mon âme, mais elle était supportable.

Belgrif, nonchalant, déposa sa coupe de cristal après y avoir prit une dernière gorgée de vin. Hiro et sa sœur s’étaient effondrés, ils agonisaient. Le glacial félin était resté de marbre face à l’effroyable spectacle. Ce n’était, au fond, qu’une ignominie de plus à son actif. Il n’était plus à deux morts près. Un fourbe sourire aux lèvres, il se leva et, l’air très décontracté, il alla jusqu’au corps convulsionné de son patron. Il savait que ce dernier pouvait encore l’entendre. Il était grand temps de lui délivrer un ultime message. Le chat se pencha sur lui et prit la parole, toujours aussi aimable.

-Vous vous en doutiez, n’est-ce pas ? Tout ceci est tellement logique après tout. Qui pouvons-nous ? Ce sont les règles du jeu. Vous m’êtes devenu dispensable alors je vous écarte à jamais et je prends seul la tête de notre empire. N’ayez crainte, je le ferais prospérer. Et un jour, j’en suis certain, je finirais comme vous, évincé par quelqu’un de plus fort, de plus rusé que moi. Adieu Hiro.

Belgrif se redressa. Il jeta un regard neutre à Inu puis se détourna. Il frappa deux fois dans ses mains, appelant un soldat. Ce dernier s’avança silencieusement dans la salle à magnée quelque peu chahutée. Le spectacle qui s’y trouvait le laissait sans réaction. Il s’y attendait.

-Monsieur ?
-Emmenez ailleurs ces cadavres, ils salissent mon parquet. Taillez-les en pièces, qu’on ne puisse plus les identifier et donnez-les à manger à mes chiens de chasse.
-Bien monsieur.

Le soldat s’inclina et fit demi-tour. Il allait chercher trois de ses collègues pour exécuter la tâche demandée. Pendant son absence Belgrif refit face à Hiro. Ce ne fut qu’à cet instant où son rire méchant retentit. En son esprit, il faisait le compte de tout ce qu’il allait gagner juste grâce à une petite fiole de poison.

-Décidément, c’est presque trop facile ! Suis-je donc si doué que ça ? Le futur prince des marchands, c’est MOI. Et après, qui sait, peut-être m’amuserais-je à m’emparer de Nexus. Une couronne sur la tête… oui, ça me plairait bien…

Disant cela, il reprit place à table et recommença à manger comme si de rien n’était. Dans peu de temps, les soldats seraient de retour.

Les soldats de Belgrif étaient revenus. En fait, ils avaient déjà emmené le corps d’Inu, qu’ils faisaient déjà brûlé, il était cependant évident que mon corps allait être exhibé partout en ville, histoire de faire passer le message que le prince des marchands avait été tué, et qu’il y avait un nouveau chef de l’esclavagisme à Nexus. Tiens? Les revoilà.

Tiens, levons le, il sera plus facile à transporter sur mon dos.

Je venais tout juste d’atteindre la porte des vivants, alors qu’un des deux tenait mon corps debout alors que l’autre essayait de me dénuder les pieds, faut bien gagner sa vie, non?

Mon corps recracha du sang au visage d’un des soldats. Pris d’une forte toux, j’avais repris mon corps. Bon sang, Charon avait raison, c’était non seulement plus dur pour l’esprit de recouvrer son corps, mais aussi pour le corps de réaccueillir son esprit après la mort. Les bons points, là dedans, c’était que mon corps était purgé du poison, et que j’avais un effet de surprise monstre.

Messieurs, je crois que vous allez rejoindre ma sœur.

L’homme derrière moi, s’étant relevé, tira son épée. D’un petit pas sur le côté, j’évitai facilement le coup d’estoc, chose que le soldat me faisant face, encore incommodé par le sang, ne réussi à faire, recevant la lame dans le ventre. J’attrapai la dague de mon adversaire avant de lui trancher la gorge. De l’autre côté de la table, encore un peu surpris par ce qui venait tout juste de se passer, les deux autres hommes tirèrent des haches à manche court, et me les lancèrent. Je ne su si c’était l’alcool ou encore l’incompétence, mais la première hache alla se planter à un bon mètre de moi. Cependant, la seconde hache fût beaucoup plus précise, et me taillada le bras droit.

Prenant la dague par le bout de la lame, je la lançai directement dans la pomme d’Adam d’un des soldats, puis sautai par-dessus la table, foutant en l’air tout le repas de Belgrif, pour atterrir sur le dernier homme. Tombant à la renverse, je savais que j’avais une chance. Attrapant un petit couteau de lancer accroché à sa ceinture, je le lui plantai dans la gorge.

Haletant, après avoir prit la dague des mains du corps inerte, je m’avançai vers l’homme qui avait causé tout ça. Mes yeux ne reflétaient que l’indifférence, mais toutes les personnes qui me connaissaient savait que, même lorsque je bouillais à l’intérieur, rien ne paraissait, c’était peut-être une des facettes qui faisaient de moi un homme dangereux. J’arrivai devant lui, qui n’avait même pas essayé de fuir.

Ta gourmandise a fait ta perte, si seulement tu t’étais contenté de tenir ta place, au lieu de rêver de la mienne… Tu étais tellement obnubilé par le titre de prince des esclavagistes, que tu n’avais même pas remarqué que j’étais dans les bonnes grâces du Dieu de la mort… Les mensonges, la tricherie… Tellement décevant.

Je l’avais attrapé par la gorge, le souleva de mon bras droit et posa la pointe de ma dague à son cœur…

Cependant, contrairement à moi, tu m’es indispensable, je vais donc te laisser la vie sauve…

Retirant ma dague menaçant de lui transpercer le corps, je me tournai vers les morts.

Vous quatre! On se réveille! J’ai besoin de vous!

Les quatre hommes se relevèrent, mais ils étaient différents inexpressifs, comme s’ils étaient de simples coquilles. Un véritable pouvoir qui me plaisait bien, tant par la noirceur de ces invocations que par la maniabilité avec laquelle je contrôlais les morts.

L’un d’eux me regarda, pointant Belgrif.

MANGER?...

Non, vous trois, tenez le, histoire qu’il ne s’échappe pas. Toi, va voir Ika, lui dire de ramener son cul ici. Et tue les soldats de Belgrif que tu rencontreras.

Quelques minutes plus tard, le colonel revint, soufflant comme un bœuf.

Où il est l’autre?

En train de se repaître de cadavres…

Je souris en coin, ces créatures là ne pensaient qu’à manger, c’en était presque pathétique.

Ika, tu vas amener notre traître dans la salle des exécutions, du vieux bâtiment. Une fois amené là bas, deux bourreaux, les meilleurs de Nexus, vont venir te voir, ce sont eux qui vont procéder à la torture de ce terranide. Vous trois allez l’accompagner, puis vous retournerez à votre repos éternel. J’aurai cependant besoin de vous demain.

Je me retournai alors vers Belgrif.

Tu croyais vraiment venir à bout de moi aussi facilement? Au vu de ce que tu as fait pour moi, toutes les richesses que tu as acquis jusqu’ici, tu les conserveras. Pour la torture, ne t’inquiète pas, je me ferai une joie d’assister à la représentation. Tu m’as bien compris, je serai là lorsque tu brûleras

J’étirai mes lèvres, formant un sourire démoniaque avant que mes zombies n’escortent Belgrif au bâtiment B, la salle des tortures.

-Non, c’est… c’est impossible…

Belgrif avait été tout aussi surpris que ses soldats. Il assista, passif, à l’effondrement de son plan qu’il pensait pourtant si parfait. En plus d’un an, il avait si peu connu l’échec qu’il peinait à croire ce qu’il voyait. Pourquoi fallait-il qu’il échoue maintenant alors que l’instant était aussi crucial ? Ce n’était pas juste ! Non, ce ne l’était pas ! Et en plus, des soldats, faisaient preuve d’une incroyable incompétence ! Maudit personnel ! Il n’y en avait pas un pour rattraper l’autre ! Comment faire du bon travail quand on était si mal entouré ?

A trop en vouloir, le chat allait-il tout perdre ? Sa fierté, sa cupidité, sa soif de pouvoir était telle qu’en cet instant critique, il s’inquiéta d’avantage de se voir priver de ses richesses et de sa place plutôt que de trépasser. Heureusement, il avait sut se rendre indispensable. Hiro, malgré sa fureur qu’on ne pouvait que supposer car elle n’était en rien visible, ne le tua pas. Il lui annonça même qu’il ne perdrait rien de ce qu’il avait acquis. Mais évidement, il allait y avoir sanction et celle-ci allait prendre la forme de la torture. Que dire à cela ? Ce serait « juste » un mauvais, très mauvais moment à passer. Mais évidement, le félin ne pouvait pas aller jusqu’à s’en réjouir. Peu de temps plus tôt, il espérait devenir le prince des marchands. Maintenant, il était promis à la souffrance. Il garda le silence, l’air contrarié, énervé. S’il devait éprouver de la peur, ce serait peut-être lorsque viendrait la sanction.

Avant qu’on ne l’emporte, toute fois, il s’adressa à Hiro. Il avait une question à lui poser, quelque chose à éclaircir. Il avait aussi une requête à formuler. Si elle lui était accordée, il pourrait être un peu plus tranquille.

-Je présume que mes excuses ne changeront rien et puis vous me connaissez assez pour savoir que je ne regrette rien. Je suis certains, également, que vous saviez que j’agirais ainsi tôt ou tard. Pourquoi attendre ? Pourquoi ne pas m’en avoir dissuadé avant ? Nous aurions évité ce gâchis. Si vous m’aviez avoué votre immortalité, je n’aurais rien tenté.

Mensonge ! Il aurait agit autrement. Hiro aurait peut-être terminé enfermé à jamais dans les oubliettes profondes du manoir où nul ne l’aurait jamais entendu.

-Enfin, je dis gâchis… je m’en suis pris à vous, pas à votre image. Aux yeux de la plèbe, votre grandeur est intacte. Alors, de grâce, faites de même pour moi.  Que tout ceci reste privé, ne soit pas exhibé en place public. Ce serait vous affaiblir que de me décrédibiliser.

Belgrif me posa une question, avant que mes zombies ne l'amène pour sa torture. Il est vrai que, pour quelqu'un qui venait de voir son plan lamentablement échouer, il semblait essentiel de savoir pourquoi il n'avait pas su avant. Un petit sourire en coin, la réponse était tout à fait évidente.

Je n'en parle qu'aux personnes de mon entourage qui me sont loyaux, tout simplement. De toute façon, immortel ne veut pas dire invincible, et donc tu aurais facilement pu me détrôner en m'enfermant…

Puis, il passa un commentaire qui me fit grincer des dents… Il n'avait attaqué que ma personne? Vraiment? Je posai une main sur le torse encore sanglant d'un des zombies. Regardant d'un air dégoûté le terranide, je décidai de répondre à sa requête maintenant, au lieu de plus tard.

Tu as laissé ma réputation intacte? Pendant un an, tu t'es amusé à me voler ma réputation à ton profit, même celle de la royauté! Belgrif, les gens commençaient à avoir plus peur de toi que de moi, ou encore le Roy! Compte-toi chanceux que tu te retrouves entre mes mains, aujourd'hui, parce que l'état Major t'aurait fait pendre, en spectacle, sur la place publique pendant l'heure d'affluence. Je ne peux te promettre qu'une seule chose, c'est que je reprendrai ce que tu m'as pris…

Pendant que les autres étaient partis au bâtiment B, j'avais été faire un peu de grabuge à la cour du château pour avoir une audience avec le roy, qui ne recevait jamais de visiteurs si tard la nuit. Mes cris autoritaires et mes promesses d'esclavagisme portèrent fruit alors que je vis le roi lui-même se diriger vers moi, s'essuyant encore la bouche de son repas interrompu.

Lui expliquant la situation, je lui demandai de me permettre d'utiliser les services de ses deux bourreaux, chose qui me fut accordée. Pendant que les deux hommes partirent à la salle des tortures récupérer quelques effets pour une longue nuit, je me mis à marcher dans Nexus, regardant à droite et à gauche les gens qui étaient attablés dans leur petite chaumière. Mon plan allait être exécuté. Soudain, le ciel se couvrit,  amenant avec lui une vingtaine d'hommes, tous plus putréfiés les uns que les autres qui couraient dans les rues à ma rencontre.

Comme une véritable armée, les coquilles s'arrêtèrent devant moi, attendant les ordres.

Vous avez trois choses à accomplir pour retourner à votre repos: Un, vous entrez dans les maisons de cinq miliciens de Belgrif et cinq personnel de son armée et les forcez à mettre leur uniforme. Deux, vous tuez leur famille, femmes, enfants, pas de pitié.

MANGERRR?...

Oui, vous pouvez, sauf les dix hommes en uniforme. En dernier lieu, vous revenez ici avec vos prisonniers et je vais vous conduire au bâtiment B.

Alors que j'eus fini ma phrase, les zombies s'élancèrent dans les rues de Nexus. Bientôt, je pus entendre des portes se défoncer, des cris de douleur, des pleurs, et même des hurlements de rage… C'était ignoble comme plan, mais je ne pouvais laisser Belgrif avoir plus d'influence sur le peuple que moi.

Une vingtaine de minutes plus tard, ils étaient tous rassemblés, rageant, mais sous bonne garde des mes "hommes". Les miliciens étaient habillés d'un uniforme jaune et argent, tandis que les soldats avaient un uniforme noir, pour pouvoir attaquer de nuit furtivement. Ce qui rapprochait les deux uniformes, et qui indiquaient qu'ils étaient sous la gouverne du même homme, c'était la griffe de chat, qu'il y avait sur les épaules et le torse… Il avait même son propre écusson! Je ne pouvais vraiment pas laissé ça arriver.

Lorsque nous étions revenus, les bourreaux venaient tout juste de terminer leur job, et Belgrif était dans un état lamentable, je ne savais exactement ce qu'ils lui avaient fait, mais ça n'avait pas l'air d'avoir été une partie de plaisir. Rejetant les hommes dans une cellule près de la salle des tortures, je m'approchai du terranide.

Toujours envie de me trahir et devenir le prince des marchands? Emmenez le avec les autres, le pire reste encore à venir…

Oh ça oui. Non seulement il allait passer une nuit dans une cellule avec dix hommes qui viennent de perdre leur famille, mais demain, la torture continuait.