Quid ouvrit les yeux et regarda autour de lui : le sol typique et brûlant des landes dévastées. Sa main glissa un moment sur la fine couche de sable déposée sur le sol aride qui se fissurait presque partout, il en prit une poignée.
Il observa sa main, entaillée jusqu'à l'os, et sa position par rapport au sol : il était couché, et sa tête avait dû heurter une pierre en tombant, heureusement sans rien casser.
Autour de lui, son propre sang, mais aussi celui de trois ouargues, l'une ayant encore son glaive dans le poitrail, qui formaient un mélange vermillon tout autour de lui, du sang clair où le ciel aurait pû se refléter s'il n'avait pas été si sombre.
Et une terre qui ne l'aurait pas esquinté s'il n'avait pas été si con.
Il releva légèrement sa tête, attiré par un grognement : il sentait bien des fourmillements à la jambe mais ne parvenait pas à en trouver l'origine : c'était un quatrième ouargue, blessé mais vivant, qui lui mâchouillait la jambe, essayant probablement de l'arracher.
Le gladiateur chercha alors son pistolet dans sa poche, ne parvenant qu'à réveiller l'entaille immense qu'il avait au torse et qui ne pouvait cesser de cracher du sang à chaque fois qu'il inspirait, provoquant un léger sifflement : pas besoin de docteur pour confirmer que malgré toutes ces blessures, il allait vivre peut-être une heure ou deux de plus, et sa volonté, à ce stade là, ne pouvait vaincre les lois de la physique : ses jambes ne pouvaient plus le tenir, ses bras se baladaient n'importe comment dans la petite mare, jusqu'à ce qu'un tintement métallique ne vienne troubler le silence -hormis les faibles grognements du ouargue, mais un acouphène terrible l'empêchait de déterminer son âge-
Le guerrier ramassa son pistolet, espérant que le sang n'empêche pas son tir, levant son bras en lambeaux pour viser lentement et calmement : un claquement partit, un hurlement bref résonna, tandis que le ouargue s'écrasa sur ses pattes, l'empêchant de ramper, le hurlement allait peut-être attiré d'autres ouargues, mais il n'y avait plus rien dans le chargeur.
Alors Quid se mit à prier, faiblement d'abord, puis implorant n'importe quel dieu existant de lui laisser encore un peu de temps : s'il allait au Vallhalla, dieu sait combien de temps il devrait attendre ? Sans compter les railleries de ses camarades...
Sa prière finit, le gladiateur se reposa, n'essayant même pas de dégager le poids mort de ses jambes, sifflotant un petit air pas très joyeux...