Symptômatique ... ( Miya's RP )

La scène était étrange, et irréelle. Miya avait l'impression de ne pas être tout à fait elle même. Comme dans un conte de fées... La façon dont parlait Erwan, de cette voix envoutante et hypnotisante... Non, décidément, ça ne ressemblait pas à la demi déesse de tomber sous le charme de qui que ce soit aussi facilement. De se laisser aller, sans vraiment réfléchir aux conséquences de ses actes. Non, normalement, elle était méfiante, et ne se laissait pas approcher, surtout de la gente masculine.

Ou c'est peut-être parce que Erwan, contrairement aux autres hommes, ne lui avait pas fait la moindre proposition réellement indécente dès qu'il avait ouvert la bouche. Ou peut-être était-ce parce qu'elle avait fait le premier pas vers lui.

En tout cas, un drôle de fourmillement lui chatouilla la nuque quand il prononça les mots. "Ma Muse"... Miya trouva un soudain intérêt dans la contemplation du fond de sa tasse. Elle ne voulait pas avoir cette prétention. Elle ne voyait pas en quoi elle pourrait l'inspirer pour de l'écriture... Elle bafouilla un instant, des mots inintelligibles, sans suite, avant de se taire. La demi déesse cherchait une "excuse", quelque chose à dire pour qu'il ne la mette pas sur un piédestal. Elle le faisait bien toute seule, et la chute était toujours douloureuse. Elle suivit l'exemple d'Erwan et but sa tasse rapidement avant de lever les yeux vers lui quand il se leva et qu'il lui tendit la main.

- Je t'invite à me ... suivre.

Et Miya devina qu'il n'était pas le genre d'homme à inviter, généralement. Pas ainsi, du moins. Et la demi déesse inspira profondément, avant de sourire et de poser la main dans celle de son compagnon, puis de murmurer :

- Bien. Je vous suis, alors.

Pourtant, une fois debout, elle retira sa main de celle d'Erwan. Parce qu'elle ne voulait pas devenir accroc à un contact avec une personne - elle ne le voulait plus. Mais elle resta à ses côtés, pas en retrait ou en avant, lorsqu'ils marchèrent. Pas très loin, à vrai dire, elle n'habitait que quelques rues plus loin. Si proches, et ils ne s'étaient jamais rencontrés avant ce soir. Deux âmes en peine qui ont pourtant finies par se trouver. Erwan ouvre la porte de son appartement, et Miya attend d'être invitée à entrer pour découvrir l'habitation d'un écrivain en manque d'inspiration.

( Désolé pour ce retard, dossier Bac à boucler ... )


Un habitat ... Qu'il avait délaissé. En entrant en ces lieux accompagné de Miya, il se rendit compte de ce qu'il faisait subir à son appartement. Un mur couvert de mille et unes tentures, chacune rapportée d'un pays différent, qui étaient accrochées de manières à former une sorte de tente insolite, de photos découpées ou de cartes postales bariolées. Un autre, où des phrases, des mots, des citations, étaient gravés à même le plâtre couvrant le mur. Que ce soit " On s'ennuie de tout, mon ange, c'est une loi de la nature. " de Laclos, où " Je ne peux pas gagner ma vie, je l'ai " de Boris Vian. Bien que ces murs soient couverts d'une abondance de choses, les deux murs restant - diable, son appartement était délimité dans un immense rectangle - étaient d'une finesse et d'un minimalisme pur. Sur l'un résidait - reproduction parfaite - l' "Ophélie " de Millay, délicieuse et cruelle, et l'autre était couvert de peinture ardoise, sur laquelle il gravait tout, et rien. On pouvait distinguer, à moitié cachées par les tentures, deux portes. L'une menant à la salle de bain, l'autre à la "chambre". Négligée, elle aussi. Les murs étaient tachés de photographies de tableaux de Pollock, et une immense fenêtre empiétait sur un des mur. Il avait un lit quatre fois trop grand, mais couvert de multiples couvertures fines et coussins.
L'abondance ...

Il la fit donc entrer. Il l'invita à s'asseoir, au milieu des multiples fauteuils qui stagnaient sur le sol. Il espéra qu'elle ne soit pas gênée par la moquette, par terre, couvertes d'audacieuses taches de peintures. Ni par l'odeur d'encens persistante. Quand à lui, il se dirigea vers un coffre, caché contre un immense canapé, et en sortit du whisky. Écossais.
Un sourire. Il se tourna vers elle, ôtant deux verres de ce qui lui servait d'armoire - des carrés creusés dans le mur - la bouteille à bout de bras.

- Ne regrettez vous pas de m'avoir suivie ?

Il toussa, pour s'éclaircir la gorge.

- Ma demeure est ... pour le moins insolite. Dérangeante.

Il osa un sourire, et lui tendit son verre. Peu rempli ... Il ne voulait pas qu'elle pense qu'il cherchait à la faire boire. Il osa la regarder, même. Elle, au milieu d'un univers si ... étrange. Elle semblait encore plus irréelle, capable de disparaitre dans la fumée.

(Pas de soucis :3 Le principal, c'est que tu ne m'as pas oubliée :3 )


Une véritable caverne aux merveilles. Miya avait l'impression de revenir chez elle. Son vrai "chez elle", dans une roulotte qu'elle avait partagé avec son frère jumeau, il y a si longtemps. Des tentures aux couleurs diverses couvraient un mur - comme ils avaient fait dans la roulotte pour éviter les courant d'air... Ailleurs, il y avait une peinture - Jhun se la jouait peintre, parfois... - encore ailleurs, des citations, des mots - ils se laissaient souvent des mots comme ça, aussi... Mais il fallait chercher sous les morceaux de tissus, ce qui était amusant, finalement.

Miya se sentait mal à l'aise, de revenir aussi brusquement en arrière. Erwann ne sembla pas percevoir son trouble - ou l'avait-elle parfaitement masqué ? - et il l'invita à s'asseoir. Elle se força un peu à sourire, essayant de dissiper ce malaise qui lui serrait le ventre. Elle s'assit par terre, à la japonaise, avant de décider de se mettre en tailleur, où elle était bien plus à l'aise. Son regard errait sur les murs, faisant le parallèle avec sa vie perdue s'il y a si longtemps. Elle sursaute lorsque son hôte prend la parole, dissipant les brumes de ce passé révolu. Elle prend le verre qu'il lui tend.

- Je préfère penser que votre demeure est originale et plutôt... Agréable. Je ne vois pas pourquoi je regretterai de vous avoir suivi, Erwan.

La demi déesse porta le verre à ses lèvres, huma le whisky ambré avant d'en prendre un légère gorgée, de la faire tourner dans sa bouche, sur sa langue, avant de l'avaler. Miya se rendit compte qu'elle avait fermé les yeux quand elle les rouvrit, et elle sourit à son hôte.

- Délicieux. Je confirme ne pas regretter d'être venue.

La jeune femme savoura une seconde gorgée avant de poser son verre sur la table basse contre laquelle elle s'appuyait légèrement. Elle finit pourtant par se lever et se diriger vers le mur des citations gravées. Ses doigts coururent dessus. Elle ne comprenait pas le moindre traître mot, mais elle aimait retrouver ce souvenir de son passé - Jhun et elle se gravant des mots qu'eux seuls, les jumeaux, pouvaient comprendre. Elle tourna son regard azur vers Erwan et demanda :

- Puis-je ?

Avant de sortir... Une dague. Hum, pas rassurant, mais elle ne comptait pas s'en servir pour attaquer... Juste pour apporter sa petite touche au mur en y gravant :

"Il faut toujours un coup de folie pour bâtir un destin"


La demi déesse ne se souvenait pas qui lui avait dit ça - mais c'était dans une autre vie. Mais une autre femme, française qui plus est, l'avait aussi dit, même si Miya en ignorait totalement l'existence. Assez fière d'elle, elle sourit à Erwan.

- Je crois que ça nous correspond bien. Je ne suis pas femme à suivre un étranger ainsi, et vous n'avez pas l'air d'être un homme à inviter les femmes en cet endroit... Arrêtez-moi si je me trompe... Mais je pense que nous avons tous les deux eu un sacré coup de folie de faire ce que nous faisons...

Elle haussa une épaule.

- Maintenant que nous sommes autour de ce whisky incroyable... Qu'est-ce qu'une apprentie muse comme moi peut faire pour vous ?

( ... T'oublier ? Jamais. )


Il la regarda faire, essayant de deviner la phrase qu'elle écrivait, ainsi. Il n'arrivait même pas à deviner ce qu'elle était en train de faire. Aurait-il pû anticiper le fait qu'elle sorte une dague ? Erwan se retint de pousser un soupir. Il avait sentit son cœur frémir, un moment. Allait-elle le tuer ? Allait-il crever avec, comme seule dernière vue, celle de son appartement mal rangé qui sentait - un peu trop - l'encens ? Sans avoir pu terminer sa bouteille de cognac volée quelques jours plus tôt et jamais ouverte ? ... Non. Elle ne comptait pas l'assassiner. Juste laisser sa marque sur son mur. Il avala une gorgée d'alcool, restant debout, l'admirant tandis qu'elle écrivait. Puis il se reprit. Dévisager ainsi quelqu'un lui ressemblait beaucoup, il devait l'avouer. Si bien que quand elle dit qu'il n'avait pas l'air d'être un homme qui faisait entrer beaucoup de femmes ici, il grimaça légèrement.
Sur ce point là, elle se trompait. Mais il ne voulut pas la démentir. Ni se vanter du nombre de femmes et d'hommes qu'il emmenait ici. Par contre, elle était peut-être la première personne depuis Phédre qu'il ne comptait pas plaquer sur le lit et abandonner le lendemain. Il baissa les yeux, un moment, et regarda autour de lui, sans répondre pour autant. Il se contenta, en souriant, de lui assener un :

- C'est bien la pire folie que de vouloir être sage dans un monde de fous.

Il regarda à nouveau les mots tracés sur le mur. Que pouvait-elle faire ... ?

- Penses-tu pouvoir me sauver d'un mal qui me ronge ?

Il ouvrit de grands yeux. Des mots qui dépassent la pensée, ça, ça lui arrivait un peu trop souvent, ces temps-ci. Il déposa son verre de whisky sur un meuble environnant. Simple précaution. Il toussa légèrement.

- Pardonnez-moi. Tous mes mots ne sont pas à comprendre.

Il repris sa respiration, reprenant son verre, remarquant à peine qu'en faisant ce geste, une photo de Phèdre venait de s'envoler, pour se poser hors de ses yeux, aux pieds de la jeune femme. Une photo des deux hommes, à 17 ans. A Paris. Face au club tenu par son père. Un souvenir. Il se retourna vers elle, un moment.

(Sache que l'inverse est tout aussi vrai :3 )


Miya continuait de regarder d'un oeil critique ce qu'elle avait gravé. Vraiment, elle n'aurait pas du faire ça. La dague avait regagné son fourreau invisible sous la courte robe qu'elle portait, sans doute à la ceinture du jean.

Elle se tourne vers lui, légèrement surprise. Il est passé au tutoiement. Et il ignore qu'il vient de poser le doigt sur l'un des plus grande terreurs de la demi déesse. Le Sauver... Troublée, elle baisse la tête, les lèvres entrouvertes. Elle ne veut pas, ou plutôt, elle voudrait le sauver, elle qui a été incapable de sauver ses parents, son jumeau, et son amant... Mais la bonté n'est pas forcément le trait de caractère dominant chez la chanteuse. Les excuses qu'il lui présente ne changent rien.

Erwann le lui a demandé. Et elle ne veut pas refuser. L'air de rien, elle a toujours chercher à se racheter, pour sa folie, sa lâcheté, son impuissance. Elle se souvint d'un jour où elle avait été faible, et qu'elle avait craqué. Jhun, qui la consolait, lui avait alors murmuré :

- Tu sais quelle est la différence entre une personne forte et une personne invincible ? L'invincible n'a pas à être fort, et le Fort n'est pas invincible. Toi... Tu n'as pas à être forte.

Sauf qu'en plus, elle était lâche. L'échec était quelque chose qu'elle supportait mal, surtout quand Miya savait que la vie de quelqu'un dépendait d'elle. La demi déesse vit la photo à ses pieds, la regarda un long moment avant de la ramasser, sans la quitter des yeux.

- Je pourrai guérir tous les maux, tant qu'ils sont physiques et pas fatals... Dites... Dis moi lequel te ronge, et si je peux faire quelque chose, je ferai ce que je peux.

Elle lui rendit la photo, tendant la main vers lui. Ses yeux bleus se révélaient un brin mélancolique. Miya ne souriait pas. Même si elle essaya.

- N'est-ce pas mon devoir de Muse, Erwann ? T'écouter, t'inspirer, te guérir... ?

Il récupéra la photo, et la rangea dans la poche du pantalon qu'il portait. Sans un mot, ni une explication. Les souvenirs devaient rester où ils étaient, et on devait pouvoir les contempler du coin de l'oeil, parfois. Mais pas les remettre au goût du jour, sans cesse. Pas les faire revivre sous le coup d'un mélancolie exacerbante. Il poussa un fin soupir, et leva les yeux vers la jeune femme. Son regard, son ton, était sans doute tout aussi nostalgique que le sien. Il aurait donné beaucoup, sans savoir pourquoi, pour pouvoir estomper les douleurs qu'elle conservait au fond de sa mémoire. Qui était-elle vraiment ? Pourquoi s'en souciait-il, d'ailleurs ? Il en venait à se remettre en question, sans oser parler, ni troubler ce silence un peu trop pénible à son goût.
Il n'avait jamais aimé le silence.

- Je suppose que nous sommes tous hantés par notre passé, et que rien ne pourra changer cela. Nous avons tous quelque chose à cacher ...

Il lui adressa un fin sourire.

- En conséquent, il faut s'accommoder des souvenirs pour que le présent soit plus attractif. Tu ne penses pas ?

Il regarda autour de lui, un moment. Puis il effleura sa main, doucement, avant de la serrer finalement dans la sienne.

- Je pense que ma ... Muse pourra me comprendre. Puisqu'elle semble aussi mélancolique que moi.

Il inspira un grande bouffée d'air, et la regarda, les yeux brillants.

- Nos passés pourraient faire naître un présent prometteur, tu ne penses pas ? 

Hanté. C'était le bon mot, une fois de plus. Miya avait toujours su qu'avec sa condition d'immortelle, elle ne devait pas s'attacher aux gens. Pourtant, elle a se manque affectif à combler, depuis toujours, et elle a besoin de l'attention des gens. Les fantômes du passé, elle les regrette, voudrait qu'ils reviennent.

Elle a un hoquet. Non, elle a décidé de changer de vie. De tirer un trait définitif sur toute la vie qu'elle a eu jusqu'à présent. Elle n'oubliera jamais, la demi déesse le sait. Mais elle ne doit plus laisser ce passé régir sa vie en permanence. Et elle ne doit plus rien attendre de qui que ce soit... Cette fois ci, elle doit s'en tenir à cette "bonne" résolution, au moins pour sa santé mentale.

Aussi hocha-t-elle simplement la tête aux paroles d'Erwan. Décidément, elle allait finir par se demander s'il ne lisait pas dans sa tête... Et elle ne proteste pas lorsqu'il prend sa main, elle qui déteste qu'on la touche. Ses doigts se mêlent à ceux d'Erwan, même, avant qu'elle ne ferme les yeux.

- Mélancolique, sans doute... Je cherche un présent sans attaches. Sans passé. Je souhaite commencer une vie entièrement nouvelle. Devenir ta Muse est un bon début, je pense.

Elle ne se rend pas compte qu'elle se penche légèrement en avant, alors qu'elle baisse la tête.

- Je veux être là pour toi. Ne me demande pas pourquoi moi, si égoïste, si insouciante des autres, je veux t'aider. Prendre ce mal qui te ronge. J'essaierai de te comprendre, Erwan.

Prononcer son simple nom lui donna un frisson, comme sur la plage, tout à l'heure.

... C'est de la folie. Il lui adressa un sourire, comme pour la remercier. C'était d'ailleurs, en quelque sorte, un remerciement. Ne serait-ce que pour ses paroles. Même si elle venait à ne pas les tenir. Ces mots, là, le touchaient droit au cœur. Ce genre de réaction était puérile, pour lui. S'attacher à une créature pour la simple et bonne raison qu'elle disait des choses gentilles ... mais il devait bien croire qu'il n'avait besoin que de cela, en cet instant. Ou en ce moment. Je me trouve bien faible.
Doucement, il lâcha la main de la jeune femme, et releva ses yeux vers elle. Il n'avait même pas envie de lui mentir plus longtemps. Il avait envie de lui dire, juste, tout ce qu'il ressentait, afin de pouvoir écrire avec certitude quelques poèmes qui lui offrirait du baume au cœur. Qui, au moins, lui permettrait d'aller mieux le lendemain. Comme si j'avais besoin de ça ... Il sortit promptement une cigarette de sa poche, et l'alluma avec délicatesse. Il inspira la fumée, un moment, et s'installa de manière presque lâche sur une sorte de fauteuil-poire géant qui traînait dans la pièce.

- Ne prends pas mon mal, je veux que ma Muse reste en bonne santé, répondit-il en souriant.

Il tira une bouffée de tabac, et brusquement, ne trouva pas cette cigarette délicieuse.

- J'essayerais de t'offrir un présent digne de ce nom, Miya.

Il la regarda, un moment. Ce genre de promesses ... Sans oser même la quitter des yeux. Elle est une déesse, je trouve, pensa t'il sans le dire. Il ne dit que :

- Je t'offre quelque chose à manger ?

Et réalisa à quel point briser une discussion remplie de nostalgie était simple.

(Un jour, tu me diras comment tu fais pour toujours trouver des avatars aussi beaux... Même si j'avoue que pour moi, Erwan sera dans ma tête comme il était sur son avatar précédent ^^; )



Elle ne dit rien. Miya ne lui confia pas que sa santé ne pouvait pas être affectée par le moindre mal. Il ne manquerait plus qu'elle finisse par effrayer Erwan... Elle reste debout, et se contente de lui adresser un nouveau sourire. Elle l'observe allumer une nouvelle cigarette, suit la fumée des yeux... La seule raison pour laquelle elle fumme elle-même, d'ailleurs : se laisser envoûter, hypnotiser par cette petite chose. Lui, il garde les yeux rivés sur elle, et cela finit par la gêner, au point qu'elle détourne la tête vers la peinture qui orne un des murs. Puis finalement, il brise le silence.

- Je te l'ai dit : je te suivrai.

Et voilà. Elle recommençait. Non pas à s'attacher à lui, mais d'avoir quelqu'un pour décider pour elle, pour la guider. Il avait besoin d'une muse, et qu'importait qu'il finisse par l'enfermer dans une cage dorée, si elle pouvait avoir un présent qui ne lui laissait pas le temps de penser au passé.

- Je te laisse choisir où tu m'emmènes. Mais s'il te plaît...

Miya se pencha, posa ses mains sur les accoudoirs du fauteuil, et colla son front contre celui d'Erwan.

- ... Ne m'abandonne pas.

( Je fouille pendant des heures ( mainboard, deviantart ), je suis assez perspicace ... )


Il aurait pû, je pense, ne pas réagir. Juste rester serein. Juste la regarder. Mais, au son de sa voix, et en comprenant ses paroles, il eut l'impression que sa cage thoracique, son cœur, allait exploser. Quelque chose monta, le long de ses membres, de son épiderme. Et ce, en quart de seconde, à peine. Suffisamment de temps , en tout cas, pour qu'il envoie valser dieu-sait-où sa cigarette. Sans même cligner des yeux, mu par une force qu'il ne pouvait - et ne voulait - pas contrôler, il plaça ses mains sur celles de la jeune femme. Son cœur battait, peut-être un peu trop vite. Il resta comme ça, un moment, cherchant à capter le regard de la jeune femme. Une de ses mains se leva, presque tremblante, et vint se caler sous le menton de Miya. Relevant son visage vers le sien. Il ne put que dire, du bout des lèvres, avec une voix douce et rassurante :

- Je te le promets.

Cette promesse là, il la tiendrait. Il ne savait pas comme il pourrait en être autrement. Et, d'un mouvement fluide, peut-être un peu trop vif, il se rapprocha d'elle pour l'embrasser. Sans faire aucune autre manière. Juste poser ses lèvres brûlés par la cigarette sur celles de la jeune femme. Une impulsion, qu'il n'avait pas pû, encore, contrôler. C'est de la folie, se répéta t'il, sans que cela ne vienne pour autant rompre ses actes. Sa main, sous le menton de la jeune femme, glissa sur son cou, son épaule, le long de son bras, effleurant la peau avec délicatesse. Savourant son simple contact.

Comment peut-il en être autrement ... ? Il recula son visage, un moment, reprenant son souffle. Se taisant, encore. La regardant, encore. C'était presque incroyable ... Elle semblait si fragile. Si secrète.

- Je te le promets, chuchota t'il encore, pour l'assurer de ses paroles.

Miya ne sursauta pas, une fois de plus, alors qu'elle sentit les mains d'Erwan sur les siennes. Elle se contenta de rouvrir les yeux, et de décoller son front de celui du jeune homme, afin que leurs regards s'entremêlent. Et puis il promet, de ne pas l'abandonner.

Et il scelle cette promesse d'un baiser. La demi déesse referme les yeux pour savourer ces lèvres sur les siennes. Elle se dit : "C'est de la folie. Je deviens dingue." Pourtant, elle ne rompt pas le contact. Car oui, parlons de contact plutôt de baiser : leurs lèvres restent collées, mais il n'y a pas de passion, même s'ils restent longtemps soudés l'un à l'autre. Il est celui qui rompt le charme. Miya se noie à nouveau dans son regard, et il prête à nouveau serment.

Elle ne saurait dire pourquoi ça la chamboule autant. Elle n'attendait pas cela d'un inconnu rencontré au bord de la mer. Peut-être n'espérait-il pas trouver une Muse débutante en cette inconnue, lui non plus. Alors à son tour, elle dépose un rapide baiser sur ses lèvres, avant de se redresser :

- Merci Erwan. Sois sur que l'inverse est tout aussi vrai.

Finalement, il n'aura peut-être pas besoin de l'enfermer dans cette cage qu'il avait évoquée... Elle lui prend une main pour le faire se relever, et passe son bras autour de celui d'Erwan.

- Allons-nous manger, à présent ?

- Soit.

Il se sentait encore tout embué, comme s'il sortait d'un brouillard dense. Comme après une terrible, terrible dose de cannabis, vous voyez. Tout tourne autour de vous, votre équilibre est rompu, et quand tout est fini, vous êtes certain qu'après un seul de vos mouvements, tout recommencera. Voilà tout ce qu'il ressentait. Le coeur un peu trop battant, et les tempes douloureuses, aussi. Ce genre d'afflux de sentiments et d'envies était ... douloureux. Il devait l'avouer. Il fit taire un soupir, et se leva. Peut-être était-ce la faim qui le mettait dans cet état. Ou tout autre chose ... Ne commence pas à penser. Il obéit à sa conscience. Et, s'appuyant légèrement sur la main de la jeune femme, il se redressa de tout son être. Il avait l'impression de faire partie d'un autre monde. T'es con.

Il s'avança vers sa cuisine, et regarda autour de lui, ouvrant quelques portes de placards. La regarda une dernière fois. Elle ne va pas s'envoler, rassurez-moi ...

- J'espère que tu aimes ... Les fruits.

Il se sentit, brusquement, très con.

- Je mange souvent en extérieur, alors ... Ici, je n'ai que ... des fruits.

Il se tourna vers elle, affichant un sourire gêné. En fruits, il devait bien avoir de tout, même des fruits hors-saison. Quand il se sentait l'envie de grignoter, il voulait alors avoir sous la main que des choses qui n'entacheraient pas sa ligne. Un raisonnement assez simple, en somme.

Miya observait Erwan dans la cuisine. Il semblait ailleurs, pas tout à fait dans son assiette, ou même dans son monde. Il avait l'air d'un étranger en cet endroit, à vrai dire, comme s'il cherchait ses marques, ou... Quelque chose à manger. Il lui en expliqua la raison assez vite, et elle se contenta de hocher la tête :

- Des fruits, c'est très bien.

La demi déesse l'observe un instant continuer à se mouvoir dans la cuisine ; il semble perdu... Elle se décide à l'y rejoindre pour lui prendre la main et le forcer à la regarder dans les yeux, de son autre main qu'elle a placé sous son menton. Un sourire, un coin de ses lèvres fines...

- On peut sortir, aussi, si tu préfères. Tu as l'air d'un lion en cage, là.

La main, sous son menton, glisse jusqu'à la joue d'Erwan qu'elle caresse tendrement, et elle a l'air terriblement sérieuse quand elle lui dit :

- Ne te préoccupe pas de moi : je te suivrai, au gré de tes caprices. De tes envies. Tu veux manger les fruits qui sont ici ? Mangeons ces fruits. Tu veux aller au restaurant ? Allons-y.

C'était fou, ça : C'était une femme avide d'attention qui disait de ne pas se préoccuper d'elle... Pourtant, c'était bien ça, pour une fois : elle voulait suivre le mouvement, le suivre lui, tout simplement, et sans prise de tête...

Alors un instant, il la regarde. Il l'écoute et la laisse agir, savourant juste le contact de ses doigts sur sa peau ... Elle lui donne des frissons, des décharges, il se doit de l'admettre. Que ce soit son regard profond, sa voix, la manière qu'elle a de le déstabiliser d'un seul regard, d'un seul geste. Il n'est même plus lui-même. Il doute. Il ne sait même plus comment réagir. Autant dire que cela est loin, très loin d'être dans ses habitudes. Alors il continue à la regarder, même si elle a cessée de parler. Il ne pense même plus à Phédre, ou quoi que ce soit d'autre. Il ne connaît que cet instant, ce moment, où deux âmes trop égarées ont finit par se croiser. Il se contente d'hocher la tête, et de cligner longuement des yeux.

- Qu'aurais-je fait si je ne t'avais pas croisé ...

Il sourit, et soupire presque. Il ne sait même pas comment réagir. Alors il lève la main pour attraper la sienne, l'immobilisant entre ses doigts. Il pencha la tête pour, un moment, embrasser le creux de cette main. Il a la sensation d'approcher une réelle muse, à la fois présente et irréelle. Comme un songe. Il ne parvient même pas à discerner la réalité, dans tout ce brouillard qui peuple son esprit. Il a presque le ventre malaxé par quelque chose, sans réellement savoir ce que c'est. Comme un gamin, un adolescent qui ne sait pas comme faire.
Et il se penche vers elle, plaçant une main dans son dos, une autre sur sa taille, et glissa sa bouche contre son oreille. D'une voix fine, d'un ton sérieux, à voix basse, chuchotant :

- N'importe où, mais avec toi ...

Il ferme les yeux, comme pour ne pas regarder ce qu'il fait.

- Je n'ai envie que de toi.

Miya pourrait lui poser la même question : qu'aurait-elle fait si elle ne l'avait pas croisé ? Elle ferme les yeux lorsqu'il baise le creux de sa main. Et bien, sans doute serait-elle dans son nouvel appartement, à tourner en rond comme un lion en cage... A tenter de se saouler malgré son imortalité qui l'en empêchait. A avaler des médocs qui ne lui feraient aucun effet.

Au moins, cette rencontre au bord de mer venait d'accomplir un exploit : Miya allait changer de vie, elle en avait enfin la réelle impression. Ses doigts se mêlent tendrement à ceux du jeune homme, celui qui a promis de ne pas l'abandonner quelques instants plus tôt : c'est à cette promesse qu'elle se raccroche, maintenant...

Puis, elle le sent se pencher, et son souffle contre son oreille. Elle prend brusquement conscience qu'elle ne le connait que depuis quelques heures. Miya est prise d'une folle envie de faire ce qu'elle faisait de mieux, à une époque : fuir. Alors qu'elle se retrouve prisonnière de ses bras, Miya rouvre les yeux, le regard fixe droit devant elle. Un soupir, qui détend ses muscles qui s'étaient brusquement contractés, et elle posa son front sur l'épaule d'Erwan, et se contente juste d'apprécier le contact quelques instants.

- Quoi que je t'inspire, Erwan... Fonce. Qu'il s'agisse d'un coup de folie ou de quelque chose de réfléchi, fais le. Je veux t'inspirer, te rendre vivant... Mais s'il te plaît, ne m'aime jamais.

"Ou je devrai te tuer" se garda-t-elle d'ajouter. Son visage se cale un peu mieux au creux du cou de son compagnon. Elle devrait fuir, maintenant. Dire qu'elle doit rentrer chez elle. Qu'elle lui trouvera la muse qui lui conviendra tant. Et à celui qui l'avait mise en garde contre une cage dorée, Miya murmure :

- Enferme moi avant que je ne m'enfuis, que je disparaisse à tout jamais.