Cathleen se sentait étrangement bien. Reposée, détendue, et en sécurité. Elle était consciente de tout cela alors qu'elle dormait, car c'était bien cela, le "problème" : elle dormait à poings fermés. Dans son rêve, elle se surprit à penser qu'elle avait peut-être imaginé tout cela ; qu'elle était au Couvent de l'Ordre, qu'elle n'avait jamais été chez ce vampire, qu'elle n'avait jamais été mordue, et plus que tout, que son frère veillait sur elle.
L'irlandaise roula sur le côté, et se réveilla en sursaut, consciente d'être dans un lit à l'odeur inconnue, nez à nez avec un plateau garni d'un verre d'eau et d'un sandwich. La politesse, et son éducation, l'empêchaient de se jeter dessus. Pourtant, c'est son estomac qui se manifesta dans un grognement peu discret, et la jeune femme en rougit. Elle prit le temps de s'asseoir sur ce lit inconnu, retenant le drap sur sa poitrine bandée. Finalement, tout ceci n'était pas un rêve, juste une triste réalité. Ses yeux émeraudes coulèrent vers Ryuga, qui n'avait même pas du se rendre compte qu'elle était réveillée. Et lui aussi semblait si triste... Elle ne savait pas ce qu'elle pouvait faire pour cet illustre inconnu qui lui avait sauvé la vie. En tout cas, elle se promis de lui rendre la pareille, un serment qu'elle avait aussi prêté pour d'autres personnes, mais que l'irlandaise se jurait de tenir. Son estomac se manifesta une nouvelle fois, mais Cathleen se leva. Loin d'être pudique, elle laissa le drap sur le lit et vint poser une main sur l'épaule de l'inspecteur, et lui sourit, compatissante. A la façon dont il jouait avec sa bague, quelqu'un lui manquait autant qu'Alastor manquait à Cathleen. L'irlandaise le regarda un instant, plongeant ses prunelles d'un vert presque surnaturel dans les yeux sombres de Ryuga, et lui sourit, un privilège qu'elle avait toujours réservé à son frère.
- Je vous aiderai, autant que je le peux, et de toutes mes forces.
La main de la jeune femme quitta son épaule et elle repartit vers le lit, où elle s'assit pour dévorer - littéralement ! - le sandwich qui contenait, tous les dieux en soient remerciés, si peu de viande. L'eau elle-même était d'une fraîcheur sans égale, et Cathleen était bien loin des auberges miteuses où elle s'arrêtait en temps normal. Non pas qu'elle n'avait pas les moyens de prendre mieux, puisque son sac contenait une bourse pleine de pièces d'or, mais elle était en cavale, et nul doute que les frères de l'inquisition la chercheraient d'abord dans des endroits non bondés et propres. Ce n'est qu'au milieu de son repas, quand son ventre cessa de gargouiller, qu'elle fit une pause, joignit les mains, et pria avec un peu de retard, demandant à Dieu de bénir son repas, s'excusant aussi au passage d'avoir commencé sans prier. Cathleen finit rapidement sa collation, et se décida seulement à ce moment-là à se rhabiller, sans un mot. D'abord son pantalon noir, puis elle enfila sa chemise, sans la fermer. L'irlandaise tourna le dos le temps de réajuster ses bandages, puis la boutonna.
Reposée, rassasiée, Cathleen aurait pu repartir pour une semaine de cavale. Au lieu de cela, elle fit à nouveau face à Ryuga. Le sourire qu'elle lui avait offert avait disparu de ses lèvres, mais pourtant, elle ne donnait pas l'impression de faire la tête, le visage toujours empreint de cette expression sereine et bienveillante. Assise sur les talons, les mains élégamment posées sur ses genoux, Cathleen regardait l'ancien inspecteur avec douceur :
- Vous êtes un homme bon, et c'est rare en ce monde. Je tiens avant tout à vous remercier à nouveau de m'avoir sauvé la vie. Si je peux faire quoi que ce soit pour vous aider en retour, je le ferai avec un immense plaisir...
Son regard se posa un instant sur l'anneau qu'il portait, et ajouta, hésitante :
- Je ne ressuscite pas les morts, par contre... Je fais un peu de magie, mais pas à ce niveau là...