L'Intrigante Divinité ~ Regalis

Les journées interminables défilent sous mes yeux. L’ennui pèse quand nul ne sait se distinguer et m’offrir une porte de sortie. Les commentaires me supplient d’allumer la caméra mais le cœur n’est pas à l’ouvrage aujourd’hui. Je me lamente dans ma morosité, le regard tourné dans le vide. Je me fais prête à sauter dans un portail pour Terra ou peut-être retourner visiter les enfers. Les possibilités sont nombreuses mais l’envie manque. Cette absence de volonté me foudroie sur place. Jusqu’à ce qu’un message se distingue : une curieuse et culottée invitation au cinéma d’un abonné.

C’est décidé ! J’accepte. Je récompense son audace et lui donne rendez-vous dans une demi-heure devant le cinéma, ajoutant qu’il est dans son intérêt de choisir un bon film. Les messages s’enchaînent pour me demander confirmation, comme si un rêve éveillé se déroulait sous ses yeux. Les notifications me vrillent les oreilles pendant de longues minutes. Il se montre déjà pénible mais il sera toujours facile à jarter en cours de chemin. Je ne perds pas ma bonne volonté et enfile une simple robe, sexy à outrance pour un simple film.

Avec dix minutes de retard, je fais mon apparition de diva sous ses yeux ébahis. Il bégaye puis tente d’aligner quelques mots face à ma tenue. « Essuie-toi ta bave au coin de ta bouche. » C’est la seule réponse qu’il obtient quand nous entrons dans le complexe. Il prend la parole, débite sans s’arrêter. Parlant tout aussi bien du film que nous allons voir, des critiques et d’innombrables détails inintéressants au point de m’en faire bailler.

Ma patience frôle avec ses limites. Mais plus encore, une sensation étrange m’intrigue depuis notre arrivée. Je ressens la présence d’une aura peu commune. Peut-être est-ce ce qui détourne mon attention de son monologue assommant. Je n'arrive pas à la localiser précisément, j’ai seulement la vague impression de m’en approcher par moment. J’en perds pas espoir. Nous continuons notre avancée quand en passant devant une porte, mon instinct s’affine.

Je quitte mon rencard du jour et me faufile entre les portes d’un film déjà en cours. Il essaye de me suivre mais un employé le rattrape avant. Me voilà sauvée d’une compagnie ennuyeuse et sur le point de déceler d’où vient la puissante émanation. Elle n’a rien d'humain, ni même de communes à des créatures mortels. Elle m’attire comme un insecte désire s’approcher de la lumière.

Je longe les rangées, me fiant uniquement à mon instinct pour me guider dans l’obscurité. Je le perçois de plus en plus clairement. Après quelques minutes, je parviens à m’asseoir à côté de la divinité dans cette salle presque vide et face à un film dont je ne connais rien. « Vous ne vous ennuyez pas tout seul ? » Consciente de sa nature, j’aborde une démarche simple et sans me soucier de déranger les autres spectateurs. Puis ma main baladeuse se perd sur l’une de ses cuisses.

Je n’ai jamais eu l’occasion de fricoter avec un dieu mais je suis prête à le faire succomber à mon charme avant la fin de la projection.

Certains mondes avaient évolué de manières différentes. Revenir parmi les mortels après autant d’absence était perturbant. Ceux qui avaient accès à la magie n'avaient pas beaucoup grandi. Ils restaient sur leur acquis, améliorant simplement les sorts déjà connus et le confort d’un toit au-dessus de la tête. Ils étaient loin d’être intéressants au premier regard. Même si certains pouvaient se démarquer des autres, il leur était impossible de changer la surface du monde sur lequel ils vivent.
 
Pour ceux dont la magie n’existe pas, ils ont su exploiter ce qui leur servait de cerveau. Exploitant matériaux, ingéniosité afin de rendre la vie plus facile. Travailler dans les champs était moins pénible. Se déplacer était simple pour tout le monde. La technologie qu’ils avaient développée permettait de mettre une grande majorité de leur population au même niveau. Cependant, il y avait aussi ces mondes un peu plus sombres. Il ne comprenait d’ailleurs pas le fondement de ceux-ci. Les êtres humains qui s'installent des implants … c’était bien le genre de monde qui avait pu grandir en son absence. Jamais ils n’auraient dû atteindre une telle bêtise.
 
C’est pourquoi aujourd’hui il était dans ce qu’on appelait un cinéma dans un monde normal sans magie. Visiblement, c’étaient des images projetées sur une toile et qui racontait une histoire. Original. L’indication était claire, c’était inspiré de fait réel. Le thème de ce film ? Un classique chez les Japonais visiblement. Les bombes nucléaires. Ils osaient mettre le mot de cataclysme sur une destruction aussi mineure. C’était presque une insulte pour le dieu qu’il était. Loin d’avoir encore découvert les sombres aspects d’une telle société, cette animation bien qu’historique, était divertissante sur bien des aspects. Elle prouvait également comment ces humains pouvaient se redresser après une catastrophe. S’il devait sévir sur ce monde, il fallait donc prendre des notes. Le but d’un cataclysme c’est qu’il est difficile de s’en relever.
 
Encore dans ses pensées, il était loin de se douter qu'une âme étrange viendrait à sa rencontre alors qu’il était plongé dans ses pensées tout en observant ce film. Le mot ennuyer fit sursauter ses oreilles … L’ennui d’une prison était derrière lui désormais. Il lui était impossible de ressentir un tel sentiment si on ne l’enfermait pas de nouveau. Son regard se posait sur la jeune femme et par reflexe, celui-ci était imprégné d’une animosité sans précédent. Ce simple mot avait fait resurgir beaucoup d'émotions. Il ne se rendit même pas compte de la froideur qu’il pouvait dégager en ce moment même, passant à côté de l’aspect démoniaque de cette jeune pousse. Cependant … À quel niveau les habitants de ce monde plaçaient l’ennui ?
 
-Qu’est donc l’ennui à vos yeux ?
 
Il baissait alors le regard sur cette main qui se baladait sur une de ses cuisses. Habillé d’un pantalon blanc ressemblant à du lin et qui permettait d’être à l’aise n’étant pas un slim et d’un débardeur à capuche sans manche et se boutonnant comme une chemise, il avait fait l’effort de plus ou moins ressembler aux humains de ce monde niveau vestimentaire. Ce n’était pas encore vraiment ça … mais y avait de l’effort ! Cependant … Ce qu’il n’avait pas vu dès le début lui saute maintenant aux yeux. Il lui attrapait donc ce poignait si proche de sa cuisse et la tirait un peu plus contre lui …
 
-Tu n’es pas humaine … On t’envoie ?

Est-ce un mot ou une action qui a rendu le Dieu si froid à mon égard ? L’animosité qu’il dégage égaye mes sens. Je me sens frémir à l’intérêt de séduire une personne si hostile. Les hommes tombent toujours à mes pieds, après un mot doux ou une caresse. Ils cherchent mes faveurs et s’enferment dans un rôle secondaire. Mais lui ne s’est laissé avoir par mon charme démoniaque. Je n’en attends pas moins d’un dieu. Au-delà de sa résistance, il s’oppose. Mon intérêt grandit. Je désire déjà plus que de raison de le faire de mien.

Sa question m’étonne. Mes yeux s’écarquillent, ronds comme deux pastèques. Une jolie femme est assise à côté de lui mais des propos hasardeux sont tous ce qui retiennent son attention ? Je m’étonne puis m’insurge silencieusement. J’en perds pas la face, répondant avec sérieux. « La lassitude d’être inoccupé, seul ou entouré d’êtres insignifiants. Quand il vous est impossible de vous divertir tant la médiocrité de votre environnement vous saute aux yeux. » Ma définition est simple, restreinte et personnelle.

Ma surprise grandit. Il tire avec fermeté sur cette main baladeuse que je laissais sensuellement traîner. La malice se dévoile sur mes lèvres. Nos visages ne sont qu’à quelques centimètres l’un de l’autre au point qu’il peut sentir mon souffle chaud contre sa peau, ma respiration accélérée par l’excitation d’une situation exaltante. Je trouve mon équilibre en déposant ma main sur l’accoudoir entre nous et je me penche un peu plus au-dessus de lui.

Je suis devenue une potentielle menace à ses yeux. Pourtant, il n’en est rien. Si j’ai envie de jouer le jeu pour attiser sa colère, mon instinct me dicte de ne pas jouer avec le feu. Combattre n’est ni mon fort, ni dans mon intérêt. Alors, faisons descendre la pression tout de suite. « Personne. » D’une voix affirmée mais basse, je tente de dissiper ses doutes et joue la carte de l’honnêteté. « Je ne suis qu’une succube affamée. J’ai senti votre énergie divine. »

Je me penche un peu plus sur l’accoudoir, jusqu’à poser un genou sur mon siège. Je lui offre par ma position une magnifique vue sur mon décolleté. Si j’ai peut-être dissipé tout malentendu, je ne pense pas encore l’avoir séduit. C’est un autre jeu auquel je risque de me brûler les ailes. Mais à celui-ci, je prends le risque.

Je dégage mon poignet de son emprise et rattrape sa main. Mes doigts enlacent les siens. « Permettez-moi de mieux m’installer. Ce film n’est peut-être pas si nul en votre compagnie. » Cette fois-ci, je me lève et m’assoie sur lui. Mes fesses sont délicatement posées sur ses cuisses quand mes jambes sont en travers, passées par-dessus l’accoudoir d’à côté. Je ne lui gêne pas le visionnage, de cette manière. Mes doigts se font à nouveau baladeurs.

Mais mon intérêt ne se porte jamais sur l'écran. Avec un dieu à mes côtés, il est impossible qu'une banale création humaine sache m'intéresser. Mon impatience me tarde d'en découvrir plus sur l'inconnu.

La définition de son ennui n’était pas d’un niveau plus élevé de ce qu’il attendait. Elle était au plus au niveau de l’imagination humaine. Seuls les dieux avaient inventé la torture avec l’ennui ? Tss … Mais peut-être était-il possible de changer sa vision des choses à ce sujet ? Bien que cette discussion ne commence que d’un mot, il était lourd de sens. Elle semblait en souffrir un peu et … Sa définition en disait peut-être long sur son ressenti ? Lui poser cette question lui brulait la langue …

-S’en est une très bonne torture n’est-ce pas ?

Enfin … quand il posait cette question, il n’imaginait bien entendu personne autour de soi, un lieu dévaster par des rafales de vent soulevant poussière et silence avec comme seule compagnie, l’écho de ses propres bruits. Ce genre de monde existe malheureusement. Mais celui ou ils se trouvaient tous les deux étaient peuplés d’idiots … et pour contrer l’ennui, on en choisit quelques-uns, faisant d’eux des élus, et ils deviennent nos idiots favoris. Enfin … ce raisonnement marche d’humain à humain. Pour les personnes comme elle … c’est certainement différent.

Bien que ce geste l’ait rapproché, elle ne dépassait pas les frontières pour le moment. Elle prenait appuie et se mettait en valeur, laissant ses formes plus que généreuses et appétissantes être mise en avant. Il avait lâché sa main. Personne ne l’envoyait. Il la croyait du premier coup ? Non … De toute façon, si elle mentait, il finirait par le découvrir. Mais elle lui dévoilait être une succube. Super … Il était bien tombé ! Que pouvait-il faire d’un être aussi volatile qu’elle ?

-Admettons que je te croie … Pourquoi une succube se pointerait en face d’un dieu ? De mémoire, les relations qui sont entretenu entre nous est plutôt … l’éradication pure et simple de l’autre. La faim ? … Vraiment ?

Elle se permettait ensuite de s’installer sur lui sans gêne … Il écoutait malgré tout le film d’une oreille. Celui-ci était assez avancé pour entendre des informations qui se répète, faisant des liens entre divers évènements afin de construire les difficiles filets de l’histoire et afin de comprendre la diversité des choix humains qui ont été fait après cette période. D’un autre, il gardait un œil sur cette succube aux délicieuses fesses … Elle venait de s’assoir comme une gangster. Elle s’amusait encore de ses doigts en les baladant. Il soupirait sous cette sensation. Elle semblait avoir trouver un repas qu’elle ne voulait pas laisser filer. Allait-elle devenir un problème ?

-Tu n’as même pas la politesse d’attendre que j’acquiesce ou que je refuse ton installation … Tu attends vraiment à ce que je nourrisse une succube ? … Un être aussi volatile que toi ?

Elle serait un parfait élément pour briser le respect des règles divines cela dit … Mais pour autant qu’il le sache, elle n’est s’en doute pas une partenaire de confiance.

« Je n’adhère pas… La frustration est plus intéressante. Elle mêle les plaisirs et leur inaccessibilité. N’est-ce pas plus drôle de voir une femme se tordre sous vous pour chercher le contact jusqu’à vous supplier d’assouvir ses désirs ? »  L’ennui est mon pire ennemi. Il est douloureux et insidieux, toujours à m’attendre et me saisir impuissante.

Il est une torture difficile à en rendre fou ses victimes. Ce n’est pas ce que j’y cherche. Un supplice doit être lent et vicieux, jusqu’à plier à notre volonté le bénéficiaire. Il ne doit ni le rendre incapable, ni impuissant. Les effets dévastateurs de l’ennui n’ont que peu de manières de trouver réparation. Je n’ai jamais été pour briser mes souffre-douleurs. Il est toujours mieux de pouvoir les garder sous le coude si une opportunité se présente. Toutefois, le dieu semble en connaître un rayon sur ce sujet, différemment de mes propres connaissances. Cette information cruciale ne m’en apprend pas plus sur son identité. Je ne cherche pas à la connaître.

La vieille querelle entre démons et dieux se remet sur la table. La légitimité de la question ne la rend pas moins barbante. Je lève les yeux au plafond. « Il est vrai que les démons n’apprécient guère le panthéon mais… Ce ne sont pas mes affaires. Pourquoi chercher à faire la guerre quand nous pourrions tous nous entendre joyeusement ? Je n’aime pas le conflit. Je préfère donner de l’amour. »

Il doute de mon explication. Le dieu a raison, la faim seule n’a suffit à me guider jusqu’à ses genoux et ce risque pris. L’avouer immédiatement gâcherait le charme de la situation. Je ne remarque pas son attention à suivre le film et les événements. Les voix et les bruits sont occultés par mon esprit trop concentré sur cet homme.

Il s’offusque de mes manières, ce à quoi je réponds d’une pointe d’insolence. « Ce n’est pas avec de la politesse que je vais séduire un dieu. » Il soulève un point juste, propre à ma race insatiable et instable. Pourtant, par ma présence même en ces lieux et sur ses genoux, je suffis à me distinguer des congénères. « Oui. Je sais que vous le ferez. » Mon assurance cache ma peur de l’échec.

« Est-ce là le souci qui vous retient à la chasteté ? L’humeur changeante des succubes ? Il vous suffit de me prouver que je serais à l’avenir incapable de me passer de vous. Rien d’impossible pour un dieu. » Il est temps pour moi de passer à l’étape suivante. Je me relève légèrement et dépose mes lèvres dans son cou. Je prends garde à ne jamais le gêner dans son visionnage mais je m’espère lui faire oublier l’existence du film.

Mes doigts brûlants trouvent leur chemin sous son haut. Ma poitrine se plaque contre son torse. « Ne sentez-vous pas mon souffle chaud et mon coeur affolé par votre présence ? Mon corps vous désire pour ce que vous êtes. » Son hostilité, doublée de sa méfiance enflamme mon appétit.

-Oh ? … Tu vas me supplier ?

Il se mit alors à rire un peu. Était-ce un message cacher de sa part afin de démontrer sa réelle envie de lui ? Elle lui donnait des idées à force … Cela pourrait se retourner contre elle pour s’en amuser et la frustrer. Les querelles entre les dieux et les démons n’étaient que des enfantillages à vrai dire. Lorsque l’on savait vraiment de quoi ça partait … Nous ne valions pas mieux que les humains, capable de se frapper pour un bout de pain. Mais elle s’en fichait visiblement. Tant mieux … Il aurait eu un petit pincement au cœur de devoir détruire ce lieu en même temps que la succube. Après tout, cette salle pouvait offrir quelques divertissements.

-On dirait presque … Ce que les humains appel une petite annonce que j’ai pu voir dans un de leur journaux … Succube cherche dieu pour échange d’amour …

Bien qu’il puisse parfois montrer de la froideur ou refléter son immense gouffre de colère dans ses regards, il restait sur un humour un peu provocateur. Mais cela ne semblait pas déranger la demoiselle. Mais il remarquait aussi qu’elle n’avait pas poser un seul regard sur l’écran. L’histoire ou ses apparences ne semblaient pas l’intéresser ? Pourtant il y avait bien de leçon à apprendre, au-delà des simples bêtises humaines.

-D’accord … Tu ne séduis pas un dieu avec la politesse mais en même temps, ayant si faim, tu ne demandes pas directement que je profite de ton corps pour te nourrir … Alors que la retenue est une forme de politesse non ?

Il laissait un de ses doigts venir s’enrouler autour d’une mèche de cheveux de la succube pour s’amuser avec en la faisant tourner autour. Il devait bien avouer qu’elle l’amusait en ce moment même et qu’il avait déjà une grande partie des informations sur une partie de l’histoire de ce monde avec ce film qui continuait. Que faire ? Surtout qu’elle se montrait plus … physique. Venant savourer le cou du dieu en déposant ses lèvres sur son cou, sentant son souffle chaud sur sa peau … et cette poitrine contre son torse …

-Ce qui fait défaut c’est la confiance … C’est une chose qui à trop été brisé. Prouver quelque chose ne sert à rien. Il y a aucune certitude derrière. D’autant plus que c’est la succube qui est affamée et qui croit avoir capturé une proie … N’a-t-elle pas des solutions plus radicales ? … Comme … hmmm … des pactes ? Ou alors doute-t-elle de la qualité et hésite-t-elle à se lancer corps et âme ?

Il décroche alors son regard du film, observant la succube avant de laisser sa main se poser sur une cuisse de la demoiselle … remontant doucement celle-ci d’une caresse en laissant son pouce à l’intérieur … toujours de plus en plus proche de son intimité. Il penche un peu la tête vers son oreille, décidant de la taquiner un peu d’un murmure bien osé et mielleux …

-N’a-t-elle pas envie d’entendre de la bouche d’un dieu l’envie de la nourrir, au cœur de son être ?

« Ce n’est pas dans mes plans. Je ne me soumets pas au premier venu. » Ce sont des paroles bidons. Le dieu n’a pas posé une seule main sur mon corps sulfureux qui brûle déjà d’un désir destructeur. Je me sens tombée entre les griffes de ma proie, prête à me mettre à genoux pour obtenir la caresse tant désirée. Il suffirait si peu…

« Vous vous moquez car vous n’estimez pas encore votre chance d’être tombée sur moi. » Je ne suis pas vexée par ses paroles, je réponds sur le ton provocateur.  « Vous confondez la retenue avec la maîtrise. Je prends mon temps pour laisser l’envie s’installer et accroître. Je vous laisse le temps de découvrir à quel point mon corps est brûlant et mon esprit embrasé par notre simple rencontre. Mais… Si j’avais d’entrée de jeu, osez-vous demander de me prendre bestialement, auriez-vous accepté ? »

La curiosité demeure un vilain défaut. Maintenant que le dieu a émis cette hypothèse, j’ai besoin d’une réponse et de savoir. Mon esprit retors imagine déjà cette situation torride où nos corps enlacés communiquent à la place de nos bouches, où nous n’avons pas eu besoin d’épiloguer pour se donner l’un à l’autre. Ses images obscènes envahissent mon esprit. Elles y chassent toute forme de raison pour n’espérer qu’une seule chose. Mon corps se tend sous cette impérieuse envie de succomber avec le dieu à des plaisirs décadents. Mais il reste à convaincre à céder à ses pulsions primaires.

Je commence à manquer d’idées pour l’y faire céder. C’est lui qui finit par me le donner : l’évidence qui était sous mon nez depuis le début. L’habituel procédé des démons, que j’ai éhonteusement abandonné pour des procédés plus expéditifs. Je me relève et m’assied à califourchon sur ses cuisses. Je suis désormais dos au film, masquant sa propre vue. Seuls les sons et dialogues lui permettent de continuer à suivre. « S’il y a bien une chose sur laquelle je ne doute aucunement, c’est la qualité d’un dieu. Je n’avais juste pas songé à cette possibilité… » En parlant, je sentis l’aventure débutée par sa main. Mon corps entier se crispe, sous cette simple caresse, prête à me faire perdre bon sens.

« Dites-le moi. » Le dieu entre dans le jeu. Je ne le pensais pas si douée pour me troubler. Je suis toute affolée par ses simples paroles qui mettent mes convictions sans dessus dessous. « Faisons un pacte. Nous ne pourrons nous trahir et nous devrons contenter les désirs de l'autre à chaque fois qu’il le réclame. Avez-vous une autre clause à ajouter ? » Au-delà de sa divinité, il m’a prouvé de bien des manières qu’il est un partenaire à préserver. Ma proposition ne peut s’arrêter quune seule fois rapide dans ce cinéma…

-Oh ? On fait donc la fine bouche quand on est affamée ?

Amusé par les paroles de la succube, il ne peut s’empêcher de continuer de la taquiner. Même si elle disait ne pas se soumettre à n’importe qui, il suffisait d’observer un peu les diverses actions de la demoiselle pour se compte que ces mots n’avaient aucune valeur. Elle avait faim … Elle avait senti une bonne nourriture et s’était présentée en face de lui. Ce n’était pas le comportement d’un chasseur, mais d’une proie éprise de toute ignorance. Il fallait bien avouer que son comportement lui donner un aspect plutôt mignon.

-Et on sent qu’il y a certaines années d’expériences dans ta façon de faire … Mais si tu avais été trop direct … hmm … Disons que je t’aurai offert une mort aussi violente que le plaisir que tu aurais pu ressentir en partageant ma couche ?

Au moins, elle avait fait le bon choix ! En agissant aussi spontanément, elle aurait ressemblé à un animal plus qu’autre chose. Bien qu’elle ait été impolie durant cette rencontre, cette impolitesse était mélangée avec une certaine politesse … Un mélange subtile intéressant. Elle savait ce qu’elle valait tout en ayant du respect pour ce qu’elle avait en face de lui. Mais si elle pensait n’avoir aucun effet sur lui, il fallait que cela continue ainsi … Il ne comptait pas laisser une succube mener le jeu fièrement devant un être divin. Il serait la risée des dieux. Ce n’était pas le genre de réputation qu’il souhaitait après une sortie de prison.

Elle changeait de position, le coinçant en se osant se permettre de s’installer à califourchon sur lui. Elle ne doutait pas de la qualité de l’énergie d’un dieu. C’était une bonne chose et peut-être se rendait-elle compte qu’elle risquait de perdre ce savoureux plat si elle ne faisait pas plus d’effort. Il pouvait sentir son corps réagir sous sa caresse, arrêtant celle-ci à une limite sensuelle de son entre jambe avant de retirer sa main comme s’il abandonnait une marchandise … Histoire de faire naitre cette fameuse frustration dont elle parlait tout à l’heure.

-Dire que tu en avais oublié les pactes … Tu désirais vraiment me séduire d’une manière différente à ton habitude ? Hmmm … c'est louche ... On dirait une jeune fille humaine ayant succombé à des sentiments ...

C’était peu commun … Mais cela pouvait signifier beaucoup. Mais c'était aussi pour la taquiner une nouvelle fois.

-Très bien … Je répondrai à ta faim autant que tu le désir, réciproquement … du moment que tu ne reprends pas tes habitudes volages. Mais il manque un point. Durant combien de temps désires tu te nourrir d’un dieu ?

Il posait alors ses mains sur ses hanches afin de la perturber un peu plus, laissant celle-ci glisser sur ses belles courbes que représente ses fesses. Ses grandes mains de dieux pourraient parfaitement les empoigner. Mais il la laissait languir pour le moment, approche son visage du sien pour donner l’impression qu’il allait dévorer ses lèvres, mais bifurquait avant de les rencontrer pour venir une nouvelle fois lui chuchoter à l’oreille … laissant sa langue lui léchouiller le lobe …

-Je pourrai ensuite te murmurer des choses quand ce pacte sera signé …

Elle ignorait qu’il avait trop d’année d’abstinence également … Il avait donc une frustration à soulager également de ce côté la.

 « Affamée ou non, je ne me contente toujours que de la qualité. » Je n’ai nullement besoin de me nourrir pour assouvir un besoin primaire comme les humains. Je prends mon temps, j’examine, je cherche et je refuse si la proie ne suscite mon intérêt. Un repas doit être plaisant et divertissant. Un dieu représente ce grain de folie qui manque à mon quotidien routinier. Rien n’est gagné et le risque rend le jeu exaltant. Je m’impatiente de connaître le résultat de mon pari car le temps ne s'arrête pas pour nous. Il continue son inexorable destinée et le film connaîtra une fin. Arriverais-je à séduire le dieu avant sa conclusion ?

Puis il répond à ma question. J’en ris de cette brutalité ouvertement affichée. Cette démarche spontanée ne me ressemble. Comme j’ai pu lui dire, j’aime faire durer le plaisir, jouer le jeu de la séduction. Il n’existe rien de plus divertissant que de sentir l’intérêt de son partenaire monter et l'atmosphère se tendre sous un désir ardent. « Vous êtes cruel. Mais ça fait parti de votre charme. » Il est bien ennuyant de tomber sur des hommes trop « propres » gentils et bienveillants à mon égard. Ils n’offrent aucune résistance ni intérêt.

Mais Regalis est différent. Je m’en aperçois vite quand sa main quitte ma cuisse. Le sensuel contact m’offrait une perspective d’un avenir plus chaleureux mais sa disparition soudaine me surprend. Cette seule attention, retirée brutalement, laisse un vide. Il n’est pas dans ma nature d’aller prendre. Je préférais lui laisser le temps de tomber sous mon charme.

« Je crois qu’il y a une confusion… » A nouveau, mon rire franc se laisse entendre. Je me dresse contre lui, mon visage si proche du sien. Mes mains sont posées sur son torse, sous ses vêtements. « Je ne fais presque jamais de pacte… Peut-être un tous les millénaires quand un dieu capricieux comme vous me le réclame ou des contrats pour obtenir l’âme de quelques humains audacieux. Rien de plus. Je n’aime pas l’engagement que cela représente. » Mon regard sulfureux se plonge dans le ciel. « Est-ce l’impression que je donne ? Je ne m’en suis jamais préoccupée. »

Je n’agis pas comme les autres. J’en ai toujours conscience. Le temps a une emprise sur mon esprit, il agit comme un venin là où les autres succubes y voient une bénédiction. Je peine à concevoir les bienfaits de l’immortalité, me lamentant sur le profond ennui qu’elle procure. Alors les pactes sont à mes yeux une solution de facilité qui n’a jamais trouvé grâce ou utilité, sauf en des cas extrêmes.

« Combien de temps ? Je n’y ai pas songé. Soyons simples et disons jusqu’à ce que j’aille voir un autre homme. Cela peut être une semaine, un mois, peut-être des années. » C’est pour ce genre de raison que je n’aime pas ces formalités. Mais l’effort en vaut la peine. Il me le prouve bien, empoignant mes jolies fesses rondes. « Vous êtes tout à coup plus tactile... » Mais ce n’est pas pour me déplaire. Il érode ma patience en glissant de manière obscène sa langue contre ma peau.

Je sors mes mains du carcan de tissu. Le contrat apparaît dans une. Les clauses y sont inscrites avec clarté, sans formulation hasardeuse ou trompeuse. Je signe la première d’un l’autre où est apparu une plume. « Dépêchez-vous… Je meurs d’envie de connaître vos pensées les plus obscènes. »

-Et la qualité à un prix … Et celle-ci n’est pas donnée à tout le monde. Il faut la mériter … Et ce mérite se mesure de façon bien différente selon l’individu … surtout avec des dieux si capricieux.

Ils avaient tous leur particularité et leur caractère. En général, les deux étaient liés. Nous ne verrons jamais un dieu des cataclysmes qui vouerait une admiration à toute épreuve pour la vie. Celui-ci serait simplement incapable de faire ce pour quoi il est destiné. Et ce genre d’anomalie ne survit pas très longtemps dans la jungle divine. De tous les dieux, ceux des cataclysmes sont peut-être les pires. Contrairement à un dieu de la mort, il est difficile de le cerner. Mais il peut faire parti du cycle de la vie d’un grand nombre d’individu. Pourtant, ce n’est pas son rôle premier.

-Cruel ? … Je dirais juste réaliste. Une réponse des plus correcte pour l’outrage, sachant que son interlocuteur avait deviné sa nature.

Bien que Regalis soit le premier à ouvrir le claper de la poubelle concernant certaines règles … Il ne pouvait pas passer au travers de certaines qu’il jugeait normal. Un humain qui demandait une chose pareille à une humaine se verrait naturellement prendre une gifle. La punition était juste à la hauteur de l’inégalité qui les séparait. Si une déesse s’était pointée en usant des paroles qu’aurait pu utiliser la succube pour lui faire du rentre dedans … la gifle aurait été adéquate.

-Mais voila une succube bien sage … J’imaginais plutôt le bureau des succubes couvert de contrat en tout genre. Mais même si tu n’aimes pas l’engagement que cela représente … Je vais te l’imposer. Tu te doutes bien que ça peut cacher d’autres choses …

Le ton de Regalis avait un peu changé sur la fin de sa phrase. Il n’avait aucune confiance en elle. Elle restait une démone et le mensonge était monnaie facile à ses lèvres. D’autant plus qu’elle pouvait s’amuser de coups bas. Et il fallait ajouter à ça qu’il n’avait aucune envie de perdre son temps avec des enfantillage. Alors en lui avouant que cela pouvait cacher des choses, il la mettait au défi. Mais celui-ci n’était pas clairement expliqué. Ce serait trop facile. Mais puisque c’était quelque chose qu’elle n’aimait pas, voilà un prix à payer.

-Ah oui ? …

Le ton était encore différent. Elle ne faisait aucun sacrifice avec ce qu’elle venait de dire. Bien qu’il soit plus tactile, il l’observait sortir son contrat et signer. Son regard se tournait vers ce bout de papier avant de changer d’expression. Elle pourrait facilement y lire qu’elle ne répondait pas aux critères cachés et d’une certaine façon, il lui laissait une seconde chance. Ses mains se retirèrent doucement de ses fesses. Pas pour donner l’impression qu’il allait prendre ce bout de papier et cette plume en main. Mais pour laisser ses avant-bras prendre place sur les accoudoirs de son siège.

-Ce que tu viens de me dire te trahit un peu … Cela revient à faire un contrat qui n’a aucun poids ou représailles. C’est donc la valeur que tu donnes à cette divinité ?

Les termes ne trouvent grâce aux yeux du Dieu. Son refus soudain de signer suivi de son corps s’éloignant du mien me crispent. Il s’attend à plus ? La frustration monte. La situation est critique et le défi, grand. Mais surtout, je peine à aligner mes pensées correctement. Sa résistance exalte mon intérêt. Les minutes s’écoulent et me font mentir sur ma capacité à le séduire en ce temps restreint que je me suis donnée. « Vous trouvez ? A mes yeux, un pacte est une concession bien lourde de ce sens. » L’engagement est ce poids et l’importance que je lui donne. Mais il ne le perçoit pas comme moi.

Dans cette salle, presque vide, j’ai l’impression de fondre. Il fait chaud. J’ai très chaud. Mon corps est un véritable brasier, enflammé par chacune de ses caresses. Sans le savoir, par cette complexification de la situation, il me met un peu plus à mal. Il se fait désirer et m’échauffe. Je laisse tomber négligemment la plume sur mes cuisses et saisis l’accoudoir entre mes mains. Il m’est difficile de savoir comment me sortir de cette situation sans céder à outrance à la divinité. Je suis presque prête à tout pour obtenir ce que je désire.

« Vous n’êtes pas facile. Mais je vous le concède : Votre valeur mérite un peu d’effort. Disons un mois où je n’aurais la capacité ni de vous trahir ni d’aller voir ailleurs. Il en sera de même pour vous… Pas que j’en serais dérangée. Cela permettra de m’assurer que vous soyez disponible à chaque fois que je vous le demande. » J’essaye de ne pas céder trop de terrain et d’apporter un échange équitable qui, si jamais, je n’y trouve pas mon compte, ne me pénalisera pas.. « Un mois est peu dans une éternité. Mais je vis au jour le jour. Un tel temps peut paraître une peine à perpétuité si l’ennui s’installe. »

A mes mots, les lignes s’ajoutent et se réécrivent sur le parchemin. Il s’en inscrit désormais dans des conditions plus claires mais il me reste un dernier atout à jouer. Il a mentionné les représailles ce qui m’a donné l’idée absurde de condamner tout manquement à ce contrat. « La confiance manque toujours alors je vous propose d’ajouter une dernière condition. Si je romps ce contrat, je m’expose à être votre obligée pendant les mille prochaines années ou seulement, si vous désirez plus de moi, à une condamnation à l’abstinence durant cette période. »

Mille ans pour un mois. Le prix de la violation d’un pacte si banal est lourd et affreux pour une succube tel que moi. Il engage mon être et me privera sans que je n’ai mon mot à dire dès l’instant où je l’enfreindrais. Il représente beaucoup, peut-être trop, sans m’accorder aucune possibilité de me défaire de mes responsabilités à la seconde où la confiance sera rompue. « Etes-vous satisfait ? » J’ai mis en œuvre plus que de nécessaire pour obtenir son affection.

D’autres succubes me qualifieront d’idiote et de stupide. Le brasier qui dévore mon corps m’implore de mettre fin à cette attente insoutenable. Mes lèvres se déposent dans son cou. Elles montent vers son oreille dont je mordille le lobe. « Acceptez ou refusez mais faites-le vite. Vous enflammez ma passion et malmenez ma patience. Je bous d’un désir fougueux que je ne peux contenir longtemps. » Mon souffle chaotique et embrasé s’écrase contre son oreille. Je ne désire que le dieu, en cet instant précis mais à jouer ainsi de moi, il me sera peut-être nécessaire de me rabattre sur une proie insignifiante pour libérer les pulsions impérieuses qui m’habitent.

Ce bout de papier ne représentait pas grand-chose pour lui avec de telles conditions. Mais visiblement, elle était d’accord pour revoir les termes de son accord. Elle ne réfléchit pas bien longtemps avant de lui proposer d’autres choses. Il devait reconnaitre qu’elle fournissait un certain effort. Mais cela ne lui convenait toujours pas. Elle tenait visiblement à retrouver une certaine liberté au bout d’un moment. C’était tout à son honneur. Mais dans ce cas, pourquoi se plonger dans de pareille complication ? Il ne comprenait vraiment pas. D’autant plus, en l’écoutant, la valeur d’une divinité ne valait qu’un petit mois ? Finalement … un démon restait un démon. C’était tout de même avec une déception certaine qu’il soupirait lourdement devant lui, laissant échapper cette sensation de son être.

-Je m’attendais à avoir une succube un peu plus réfléchie en face de moi … Mais l’intérêt n’est vraiment pas aussi grand que je le pensais. J’ai vraiment l’impression d’être un de ses plats préparé que l’on doit réchauffer … Comme tu l’as dit, un mois ce n’est rien sur une éternité.

Il finit par marquer une résistance bien plus forte. Il l’empêcha d’ailleurs de s’approche de lui pour lui offrir son attention, posant ses mains sur ses épaules afin qu’elle garde une certaine distance après qu’elle a discuté d’autres détail et qu’elle soit venu lui mordiller le lobe. Puis, il fermait son espace en croisant ses bras sur son torse, portant son regard sur un coin de la salle en semblant réfléchir. Puisqu’elle semble faire dans le compliqué … Autant lui proposer sa vision ? C’était lui laisser une autre chance … encore. Mais il fallait bien avouer qu’elle valait le détour … Et c’était aussi pour ça qu’il était aussi pénible.

-Au moins, les conditions sur une rupture du contrat est au niveau de mes attentes … Mais je ne souhaiterais en aucun cas garder quelque chose qui m’a trahi à mes côtés. Si une si bête condition a été brisée, alors je n’ose même pas imaginer en étant mon obligée. Donc la condamnation à l’abstinence est suffisante sur le papier.

Il se permet même de jeter un coup d’œil par-dessus l’épaule de la succube pour voir ou en est le film … Les informations se ressemblaient toujours. Au moins, il n’avait pas perdu grand-chose de celui-ci. Il reportait alors son regard sur elle, laissant une main venir se porter sur la joue de la jeune femme pour la lui caresser doucement …

-Que dis-tu de ces conditions, dont certaines que je vais reprendre de ta bouche : Tu n’auras pas la capacité de me trahit, ni d’aller voir ailleurs. Il en sera de même pour moi. J’estime qu’il est de mon devoir de respecter ce que je peux t’imposer. Je te serai disponible à la moindre petite envie, toi de même. Cependant … Si tu souhaites vraiment mettre la divinité que je suis au placard, tu viendras me le dire en face. J’accéderai alors à ta demande si c’est vraiment ce que tu souhaites. Le contrat sera alors clôturé. Cependant … Le lien entre nous sera brisé. Me retrouver si cela venait à te manquer reviendra surement à trouver une aiguille dans une botte de foin.  Et je doute qu’un autre dieu te laisse regoutter à une telle saveur.

Changeant quelques peu les conditions, il lui ajoutait même le risque d’une telle rupture pour son palet. Combien d’année avait-elle vécu avant de tomber sur un dieu ? Cette rencontre n’était qu’un hasard. Elle devait en être consciente. Elle s’engageait peut-être sur un dédale semblable à une drogue. Il n’en savait rien, il n’était pas une succube. Mais ce qu’il sait, c’est qu’une fois qu’on a mangé à une certaine qualité de repas, il est difficile de revenir à la table d’un monde étant au moyen-âge.

-Qu’en penses-tu donc ? … Acceptes tu ce termes et de m’ouvrir toutes les options que propose ce corps ?

« Nous sommes éternels mais nous ne percevons pas le temps de la même manière. Pour vous un mois semble ridicule tandis que pour moi, il peut être une peine impérissable. » Il impose une douloureuse distance entre nos corps. Je la respecte et procède à mon tour à un éloignement. Je me pose au plus loin de ses cuisses, toujours assise sur lui. Il ne lui suffirait que d’un mot pour que je parte. « Vous êtes dur. Je n’oserais jamais vous considérer comme tel. Nos perceptions sont seulement éloignées et peinent à s’accorder. Vous êtes un dieu, je suis une succube. Nous sommes diamétralement opposés.Ainsi, ce qui vous semble un effort insignifiant est un bouleversement de mon monde. »

Mes mains s’élèvent et terminent leur chemin, tombées sur mes cuisses. Dans une tentative séductrice, j’en ai presque oublié l’interdit posé lors de nos négociations. Mes doigts se baladent, longeant ma peau délicieusement chaude. J’attends sa réponse, ce qu’il cherchera à me proposer. Mais au contraire, il ne félicite que la condamnation inscrite sur notre pacte. Les termes changent sur le papier. Il s’inscrit désormais : “Si la succube trahit les termes, il sera immédiatement rompu et elle se verra condamnée à un millénaire d’abstinence forcée.” S’il en semble satisfait, le reste demeure à faire et à conclure.

Pourtant, le dieu finit par me proposer une alternative. Aucune durée n’est posée clairement. Mais ses exigences sont rudes. Elles changent à nouveau. Mais, je n’ai pas encore accepté et ma signature disparaît dans un nuage de fumée. « Vous êtes sévère. Plus que de raison. Sachez seulement que si vous désirez rompre notre pacte, je vous laisserais aisément me retrouver. » Je prends le contrepieds de sa position. Nos visions s’opposent. Je ne peux être aussi ferme que lui, à rejeter les possibilités d’un avenir inconnu. Le dieu semble si sûr de lui sans en connaître les détails.

« J’accepte. Je possède la liberté que je désire. Vous avez l’assurance que je vous trahirai pas. » Je signe une seconde fois. Je marque sur mon approbation à ses nouvelles conditions sur le parchemin. « Comptez-vous enfin éteindre le brasier qui ravage mon corps ? Ou dois-je obtenir votre pleine attention par mes propres moyens ? » J’ai remarqué ce regard fugace qu’il a jeté au film. Je m’en suis vexée sur l’instant mais il est de mon devoir de garder son regard sur moi. Je dépose mes deux mains sur chacune de ses joues. « A l’instant où vous aurez signé, ne regardez que moi, ne faites attention qu’à moi. » Ma demande est parfaitement égoïste. Mais il n’existe rien de narcissique qu’une succube.

« Vous aurez d’autres occasions de voir ce film. Je veux être votre priorité pour les prochaines heures et jours jusqu’à être pleinement satisfaite. » Mes lèvres se déposent sur les siennes. Je l’embrasse et lui enlève toute possibilité de me répondre. Ma main attrape la sienne déposée sur ma joue et je la descends lentement jusqu’à l’un de mes seins. Sa paume est grande mais peine à le contenir entièrement.

-Certes … nous percevons le temps d’une manière différente. Mais ne comptais tu pas justement m’utiliser pour que ce temps ne soit plus périssable ?

Elle respectait la distance qu’il lui imposait. Au moins, elle ne s’insurgeait pas qu’il puisse la mettre à l’écart en ce moment même comme les conditions ne lui allaient pas. Mais un dieu n’était pas forcément juste. Il était peut-être pire qu’un démon. Mais les moyens utilisé pour arriver à ses fins sont peut-être différents.

-Nos perceptions s’accorderont d’elles je pense. Elles ne peuvent évidement pas être les mêmes alors que nous ne nous connaissons guère … Que je sois un dieu ou une succube n’a pas vraiment d’importance pour ce que nous prévoyons de partager … non ? Si je dois bouleverser ton monde, c’est pour le rendre moins ennuyeux ?

Ce n’était que des faits qu’il avait observés jusqu’ici. Si elle voulait que cela change, il fallait y mettre les moyens sans aller se reposer sur un canapé et attendre. Regalis essayait simplement d’utiliser le peu qu’il connaissait sur elle. Il se fichait un peu si elle serait réceptive à ce genre de propos. Si elle voulait évoluer, il fallait que ça vienne d’elle.

Les termes sur le contrat changent encore après avoir énuméré les siennes. La signature de la succube disparaissait. Abandonnait-elle désormais ? Elle lui reprochait d’être sévère. C’est peut-être parce qu’elle ignorait quel genre de dieu elle avait en face de lui. Mais elle finit par accepter. Voila une bonne nouvelle. Si de telle conditions lui allaient, c’est qu’elle était vraiment prête à faire des efforts.

-Parfait ! Et j’aurai le devoir de te nourrir. Je compte bien faire en sorte que tu ne sois satisfait avec d’autres futurs repas si tu venais à rompre notre contrat …

Il attrapait le papier avant de prendre la plume qui lui était destiné. Il le lisait à nouveau pour être certain de ne pas se faire plumer. Il restait méfiant. Mais faire confiance à une démone n’était pas raisonnable. Elle sourit malgré tout quand elle parlait de son brasier qui la consumait. Il pouvait clairement lire sa signature et son nom désormais. Sareeth. Très bien. Il posait donc sa griffe sur le papier avant de le lui tendre …

-Et bien … quel comportement très extrême … ça ressemble aux humaines qui souhaite posséder toute l’attention de leur mari … C’est ce genre de situation que tu souhaites vivre ?

Mais place aux actes ! Ses lèvres rencontrent les siennes et il s’empresse donc de répondre à ses attentes, ayant lui aussi repousser l’envie folle de profiter d’elle. Cette main qui est guidée sur son sein venait immédiatement le capturer une fois dessus, le pressant, lui démontrant son engagement sur les termes qu’il avait signé de s’occuper d’elle. Il n’avait qu’une parole … Mais peut-être allait-elle se mordre les doigts une fois qu’elle aura gouter à une divinité. Tout pourrait lui paraitre bien fade comme nourriture. Son autre main quittait l’accoudoir pour revenir sur ses fesses en la lui claquant, avant de l’empoigner cette fois avec force, lui laissant découvrir ce qu’il lui avait pas offert tout à l’heure, faisant glisser son bassin sur ses cuisses pour qu’il vienne se coller bien plus proche du sien … Il lui mordille donc la lèvre inférieure en plongeant son regard dans le sien … ne regardant qu’elle comme demandé.

-Je vais envahir ton monde en y déposant ma présence divine au cœur de ton royaume ténébreux …

« Peut-être. Mais je ne sais affirmer ce dont je ne possède aucune certitude. Vos talents me sont parfaitement inconnus et ainsi, je ne peux juger de la capacité de notre pacte à balayer d’un revers de sa main mon ennui. » L’incertitude règne autour de notre contrat. Il n’a jamais été évident qu’un homme, un seul, soit capable de me faire oublier les affres de l’ennui. Je ne peux lui affirmer une fausse promesse ou me laisser charmer par un futur évident. J’existe dans l’instant présent sans me soucier de ce dont demain sera fait. « Vos promesses m’honorent. Mais dépêchez-vous de signer que je puisse en vérifier la véracité. »

L’attente est une interminable torture dont je ne peux me délecter. Mon corps réclame son attention mais son regard est fixé sur le contrat. Les termes y sont clairs, explicites et reprennent chacune de nos paroles. Je n’ai usé d’aucune fourberie, propre aux démons. Il est un dieu et non, un stupide humain tombant dans les pièges absurdes. Sa méfiance retarde l’échéance et je ne peux concevoir d’attendre plus longtemps. Ma patience s’est évaporée sous la chaleur incandescente de mon corps. Il lui suffirait d’y déposer une main pour comprendre que je m’embrase à espérer ses caresses.

Ses paroles m’arrachent un rire discret. Il y a plus important. Nos lèvres se joignent dans un langoureux échange, témoin de l’attente insoutenable qui m’a supplicié. Il m’approche de lui. Mon corps s’entrelace au sien, mettant un terme à la distance posée par ses longues négociations. « C’est extrême et à la hauteur de mon appétit que vous l’avez malmené. Je brûle et me consume sous les flammes de mon désir. La seule situation que je souhaite vivre est celle où vous comblerez l’avidité de mon être. » Dans mon regard flamboyant, soutenant le sien, danse les flammes de cette convoitise.

« Je me demande combien de femmes vous avez séduit avec vos belles paroles. » Dans une course effrénée, mes doigts courent sur son torse. Les boutons sont défaits un à un pour dévoiler ses muscles. Un humain ne peut égaler le charme d’un tel dieu. « Bouleversez donc mon monde. Marquez votre présence. Je me languis de savoir ce dont vous êtes capable. »

Je me rends vite compte que mes mouvements sont limités. Le cinéma offre un confort mais les places assises sont étroites pour deux personnes. Je m’empresse d’appuyer sur un bouton à ma gauche et le siège s’incline brusquement en arrière. De quelques centimètres tout au plus, il permet toujours d’avoir une vue idéale sur l’écran. Mais il règle partiellement mes soucis, m’offrant une plus grande marge de manœuvre. Je penche sur le dieu, ma poitrine pressée contre son torse. Mes doigts sont tombés plus, prêt à libérer l’épée de son fourreau de tissu.