« Le vieux m’a parlé d’une cascade pas loin, je reviens.
-Nepta ! Att- »
Mais Beryl n’a pas le temps de finir sa phrase que la jolie louve a déjà disparu dans la forêt, en quête de la fameuse cascade. Depuis deux jours, les trois amis ont quitté pour la première fois le royaume terranide, après un détour à la capitale. Ils ont, pour la première fois, l’impression que leur voyage démarre. L’excitation et la soif d’aventure sont à leur paroxysme. Mais, ils ont été bien obligés de s’arrêter dans un village, frôlant la frontière pour passer la nuit. Leur aventure est récente ; ils ne sont pas encore assez confiants pour passer la nuit dehors.
Nepta ne tient plus en place. Au milieu de l’après-midi, après que le chef du village leur ai vanté la beauté des alentours, elle s’est mise en quête d’exploration. L’intrépide femelle a bien vite semé ses compagnons pour s’enfoncer dans la sombre forêt. D’un pas confiant, elle avançait. Les oreilles dressées, la queue remuante d’un enthousiasme à peine dissimulé. Mais l’épais manteau verdoyant des arbres lui masquait le ciel et les nuages menaçants trouvant peu à peu leur place dans l’immensité dégagée.
De multiples effluves envahissent son odorat. Ses oreilles frissonnent sous la brise humide. L’air s'alourdit mais la cascade est introuvable. La louve aurait dû faire demi-tour à cet instant. Mais non, l’obstination est plus forte. Les premières gouttes lui tombent sur le bout du nez jusqu’à ce qu’un torrent s’abatte sur la terranide impuissante.
Ses bras remontent sur le haut de son crâne pour protéger ses oreilles plaquées contre sa chevelure. Elle court, se perd et tente de trouver un abri en vain. La pluie lui est désagréable et le chemin se fait boueux et glissant. Elle ne tombe pas mais manque à plusieurs reprises d’enfoncer son joli minois dans la terre humide. A sa peine, vient s’ajouter sa faim. Son ventre gargouille indiscrètement à ce repas absent.
Les minutes s’écoulent sans qu’elle soit capable de se sortir de son mauvais pas. Une odeur délicieuse vient lui chatouiller le nez. Des arômes de poulet la conduisent en dehors des bois, dans une prairie clairsemée où une tente s’est élevée. C’est bien la première fois qu’elle voit une habitation en tissu, ainsi dressée. Méfiante puis résignée, Nepta s’approche.
Devant elle, un humain. Elle ne le sait pas encore, la louve n’en a jamais vu. Son père lui avait donné une définition bien monstrueuse de ces derniers : de grandes dents, des yeux globuleux et cruels et de dangereuses armes capables d’abattre les plus puissants guerriers d’un seul coup. Mais l’absence d’attributs animaux la surprit. Même dans le village, où ses compagnons passeraient la nuit, il n’y avait que des terranides.
De plus, sa nudité attire son regard indiscret, malgré une certaine surprise de voir un homme avec si peu de pudeur. La différence flagrante l’amène à des pensées plutôt extravagantes. Est-il constitué comme les hommes de son village ? Y a-t-il d’autres divergences notables ? Ses pupilles mauves le détaillent longuement, surtout au niveau de l’entrejambe. Pour arriver à la conclusion, qu’il ne lui manque que ses attributs bestiaux. Peut-être les a-t-il coupé ? Ce songe l’horrifie et elle balaye vite de son esprit pour se concentrer sur ses mots.
« Excusez-moi… »
Après coup, la louve se questionne : Peut-il la comprendre ? Parle-t-il la même langue ? Son langage est similaire à la langue commune malgré quelques différences initiées par l’autarcie de son village. L’idée serait facilement compréhensible pour quelqu’un ayant les bases de cette dernière.
« Je peux m’abriter avec vous sous votre… étrange abri ? »
Sa robe légère commence à peser sur ses épaules. Si elle n’a pas vraiment froid, Nepta aimerait au moins éviter de tomber malade.