« TUE ! LE ! TUE ! LE ! TUE ! LE ! »
Tous les gradins scandaient en rythme, à l'unisson. Certains tapaient des mains, d'autre des pieds sur le sol, d'autre encore brandissaient le poing, ou hurlaient simplement. Mais tous étaient survoltés, presque enragés. Tel était, en quelques mots, l'ambiance qui régnait au sein de l'arène. Pendant ce temps, au centre, un gladiateur tournait lentement autour autour de son adversaire, au sol. Une épée à la main, il levait les bras en direction de la foule, qui était déjà en délire, pour encourager leurs acclamations. Le combat avait été d'une rare violence, mais néanmoins très court. Le gladiateur terrassé n'avait pu tenir tête à son adversaire bien longtemps, échouant à divertir le public. Et celui-ci en réclamait maintenant davantage, une mise à mort, une exécution. Du sang.
Le gladiateur victorieux se tourna alors vers le gradin central, où siégeait l'organisateur des jeux, et maitre des lieux, Deimos, accompagné de ses invités de marques. Son épée s'abaissa sur la nuque du perdant, qui était à genoux sur le sable de l'arène, blessé et vaincu, mais prêt à accepté son destin. La foule continuait à hurler de vive voix au gladiateur, « TUE ! LE ! », mais ce n'était pas à lui de prendre cette décision. Les deux combattants attendaient donc le jugement de Deimos, solennellement. Ce dernier prit son temps, jouant avec l'impatience du public, avant de finalement se lever, et d'un geste du pouce vers le sol, condamner le perdant à mort. Le gladiateur hocha la tête, puis il prit sa poignée à deux mains, et d'un puissant coup d'épée, trancha net le cou de son adversaire, qui roula sur le sol, son sang teintant le sable d'un rouge écarlate. Les cris de la foule redoublèrent d'intensité.
« OUAAAAIIIS ! »
Pendant ce temps, Brutus attendait son tour, devant la grille. Il n'était pas ému par cette décapitation, ni effrayé à l'idée de subir le même sort. C'était son quotidien, et cela ne suscitait plus aucune émotion chez lui. La seule chose à laquelle il pensait, en ce moment, froidement, c'était de survivre. La mort ne lui faisait pas peur, certes, mais ce n'était pas pour autant qu'il était impatient de la rencontrer.
Des esclaves vinrent ramasser le corps et la tête du vaincu, pendant que le gagnant quittait l'arène, sous de bruyants applaudissements. Puis, deux grilles s'ouvrirent de part et d'autre, desquels Brutus et son adversaires surgirent, se rejoignant au centre et s'inclinant devant leurs maitre, Deimos. Un signe de sa main notifia alors le début du combat, et l'instant d'après, les épées des deux gladiateurs s'entrechoquèrent.
* CLING ! CLANG ! CLING ! CLING ! CLUNG ! *
Le duel était sans merci, chacun maniait le glaive avec une puissance et une précision redoutable. Ils semblaient danser l'un autour de l'autre, parant et attaquant successivement. Leurs pas, leurs esquives, leurs appuis, soulevaient le sable de l'arène en une fine poussière. Ils ne se quittaient pas des yeux, concentrés, à la recherche de la moindre faille, de la moindre opportunité, tout en continuant à assener leurs coup d'épée. Personne ne semblait pouvoir prendre l'avantage sur l'autre, et le combat dura un long moment encore. Ils commençaient à s'essouffler, des gouttes de sueurs perlaient sur leur musculature virile, luisante sous le soleil, mais leur volonté ne faiblissaient pas.
C'est alors que, atteint par la fatigue, son adversaire commit une erreur. Il s'avança trop en donnant un coup d'épée verticale, ce qui permit à Brutus d'esquiver sur le coté, et de le contourner, sans qu'il ne puisse revenir sur ses appuis. Trop proche pour pouvoir contre-attaquer avec sa lame, il lui donna cependant un violent coup de pommeau sur la tempe, l'assommant presque. Il tomba alors à quatre pattes sur le sol, sonnée, tandis que Brutus poussa un cri bestial.
« Raaaaahhh ! »
Convaincu de l'avoir terrassé, il galvanisa les gradins, suivant les bords de l'arène en une parade victorieuse, les bras levés. C'est alors que, au milieu de la foule, il crut reconnaitre un visage qui lui était familier. Celui d'une jeune femme, qu'il avait connu dans une autre vie, il y a plus de quinze ans. *Non, ce n'est pas possible, je dois rêver...*, songea-t-il, tandis qu'il continuait de la fixer. Pendant ce temps, son adversaire avait eu l'occasion de reprendre ses esprits, et être laissé pour perdant l'avait rendu furieux.
« Je n'ai pas dit mon dernier moooooot ! »
Il attrapa son glaive à deux mains, se rua vers Brutus, et avec toute la force que son physique colossale permettait, l'abattit sur lui. Ce dernier, distrait et lui ayant tourné le dos, eu tout juste le temps de lever sa propre épée et de parer tant bien que mal le coup. Il était si puissant qu'il l'ébranla de la tête au pieds, lui faisant perdre l'équilibre. Brutus parvint miraculeusement à ne pas tomber, mais ayant rompu sa parade, l'épée de son adversaire poursuivit sa trajectoire, et vint lui lacérer le mollet. Il en hurla de douleur, mais gardant la tête froide, reprit une position de combat face à lui. La femme qu'il avait cru voir avait complètement quitté ses pensées, il était maintenant pleinement concentré sur le combat. Sa blessure était profonde, sanguinolente, et bien qu'il se tenait debout, il n'arrivait pas à prendre appui sur sa jambe, forcé de boiter. La tournure des évènements étaient assez dramatique pour lui, mais cela ne l'empêcha de lancer une pique à son adversaire.
« Au moins maintenant, le combat sera plus équitable, héhé. »
Ce à quoi ce dernier répondit en chargeant Brutus, glaive en avant. Le combat se poursuivit, tout aussi intense qu'avant. Les coups fusèrent, les armes s'entrechoquèrent, mais l'on sentait bien que Brutus avait du mal à tenir la cadence, et était plutôt sur la défensive, se tenant sur un pied et demi. Il était désavantagé, sa blessure au mollet le faisait souffrir, mais il tenait bon. Abandonner n'était pas dans sa nature, et tant qu'il n'était pas encore vaincu, il se battrait jusqu'à son dernier souffle.