La Theuggia… Un ordre de sorcellerie qui avait su survivre aux circonvolutions du passé, pour évoluer, et devenir une secte sinistre servant les desseins de la Monarchie de la Rose, et, en définitive, le Roi Cramoisi. Un nom qui revenait de plus en plus aux oreilles de la Déesse, et qui provoquait en elle une profonde inquiétude, inexplicable, mais palpable, et importante. Elle avait
peur de cet être, sans même savoir pourquoi. Les réponses se trouvaient quelque part dans le brouillard nébuleux que constituait son passé chaotique, mais dont les souvenirs ne lui revenaient que par bribes.
*
Ce que je sais à coup sûr, c’est que c’est ce Flagg qui a provoqué mon bannissement, et a participé à la discorde entre les Dieux…*
Ce que Sha avait progressivement découvert, notamment en se rapprochant de Sanguilia*, mais encore en retrouvant l’une de ses anciennes sorcières, Mélisandre Swann**, c’est que les Olympiens étaient devenus fous. Jadis, quand les Grands Anciens avaient été vaincus, Zeus et sa famille s’étaient chargés de protéger la Terre et Terra, deux mondes parallèles-pivots au sein de cette grande carte multidimensionnelle que représentait le Multivers. Une tâche très importante, qu’ils avaient acquitté pour le mieux, jusqu’au jour où leurs divisions internes et leurs propres défauts avaient fini par les trahir. En l’occurrence, les Olympiens, après la chute des Grands Anciens, avaient regroupé les traces nuisibles qu’ils avaient laissé derrière eux, comme des esprits maléfiques uniquement voués à la corruption, les enfermant dans une boîte magique posée au cœur de l’Olympe, la boîte de Pandore.
Sha savait qu’Héra, en succombant progressivement à sa jalousie contre les amantes de Zeus, s’était fait manipuler par Flagg, et lui avait permis d’ouvrir la Boîte de Pandore. Et les esprits contenus dans la Boîte avaient corrompu les Olympiens, les isolant. Et, derrière tout cela, il y avait la main persistante du Roi Cramoisi, qui avait utilisé les Olympiens et la jalousie d’Héra pour sceller Sha, et continuer à affaiblir les Dieux, ceux qui, jadis, avaient pu réussir à vaincre les Grands Anciens en parvenant à faire fi de leurs oppositions pour s’allier. Une telle chose serait-elle possible désormais ?
*
D’une manière ou d’une autre, je dois retrouver Effy. Peut-être que ça ne me servira à rien, peut-être que la voir, étudier son livre, m’aidera à en savoir davantage… Mais, dans tous les cas, elle est l’une de mes sorcières, et il m’incombe de la protéger.*
Du peu que Sha avait cru comprendre, l’
Agamemnon n’avait pu s’ouvrir qu’en sa présence, de sorte que, même si la Theuggia récupérait le livre, la secte allait sûrement rechercher encore Effy. C’est pour ça que Sha avait pris ses dispositions. Son esprit étant relié à celui d’Effy depuis qu’elle avait visité le sien (le monde onirique qu’Effy ayant vu n’étant, somme toute, qu’une représentation très élaborée, et quelque peu grandiloquente, de la psyché de Sha), elle savait précisément où elle était, et déploya l’une des siennes.
Sur Terre, Effy descendait les marches menant vers le hall d’entrée de l’hôpital. Ce soir, il n’y avait pas grand-monde de ce côté-ci… Mais, tandis qu’elle descendait, la porte située à hauteur du rez-de-chaussée s’ouvrit brusquement sur plusieurs individus.
«
Quel service ? -
Réanimation. Chambre 313. »
Soit… Le numéro de la chambre d’Effy. La Theuggia ! Ils montèrent précipitamment les marches. Un petit groupe d’hommes, rien à voir avec les deux sorcières qui avaient attaqué Effy plus tôt. De simples exécutants, mais qui maîtrisaient des sorts de magie élémentaire basique, et qui comptaient bien ramener Effy au bercail. La jeune femme ne put donc, en toute logique, que repousser chemin, pour chercher une autre porte de sortie.
Toutefois, alors qu’elle s’aventurait dans les couloirs, un autre groupe tomba sur elle, lui coupant la route, alors qu’ils étaient en train d’interroger (et d’effrayer) une infirmière. Ils la regardèrent silencieusement, et s’approchèrent alors, leurs mains se mettant à s’illuminer.
«
Vous n’avez pas le droit d’être là ! s’exclama l’infirmière.
-
Ta gueule, salope ! »
L’un des ennemis tendit sa main vers elle, et envoya une onde d’Air qui envoya l’infirmière heurter douloureusement le mur. Ils se rapprochèrent ensuite d’Effy.
«
Dame Barow souhaite vous récupérer, Mademoiselle Swann. S’enfuir n’était vraiment pas intelligent. Pensiez-vous vraiment avoir une chance ? Vous appartenez corps et âme à la Theuggia ! »
Ses issues semblaient bloquées, et un homme lança vers elle une série d’arcs électriques, afin de la neutraliser… Quand une silhouette débarqua brusquement devant Effy, brandissant un
wakizashi qui se posa sur la trajectoire des éclairs, et les réfléchit.
«
Hey, les mecs ! Vos mères ne vous ont jamais appris de ne pas attaquer les filles à trois ?! »
Une élégante femme en combinaison violette particulièrement moulante venait d’apparaître devant Effy… Et, avec le temps que la jeune femme avait passé avec l’esprit de Sha, peut-être pouvait-elle ressentir la présence de Sha sur cette femme, une présence très marquée, sur tout son corps, mais également dans le creux de ses hanches, au sein de son ventre… Devant la menace, Sha avait déployé celle qu’elle considérait comme étant sa plus puissante sorcière, la redoutable
Kiriko Hattori.
«
Reste derrière moi, petite, dit-elle à Effy,
j’ai pour mission de te ramener auprès de notre Déesse. »
Les mystérieux agresseurs attaquèrent alors à nouveau, et le premier d’entre eux lança une boule de feu, que Kiriko coupa en deux avec son arme. Ses yeux se mirent alors à s’illuminer, et Kiriko fit appel aux pouvoirs de l’une de ses précédentes incarnations, lançant une puissante onde de choc qui frappa les ennemis. C’était le pouvoir redoutable de Kiriko : elle pouvait puiser dans ses anciennes incarnations pour obtenir, non seulement un morceau de leur personnalité, mais aussi – et surtout – leurs pouvoirs magiques.
Elle se retourna ensuite vers Effy, pour se présenter :
«
Je m’appelle Kiriko, Effy. Ma Déesse m’a chargé de te protéger pour te ramener à elle. »
* :
Cf. RP « Après l’effort »
** : Cf. RP « Libération ».