Les voyages interplans sont une forme de téléportation encore mal comprise par la plupart des individus. Dans le monde d'origine des trois furry ci gisantes, l'on dirait simplement qu'il n'est pas accessible à des personnages normaux. Seuls des êtres particuliers, aux noms aussi dissonants que ridicules, comme des xXFireDickXx, possèdent cette capacité incroyable. Ils changent ainsi de serveur pour quelques crédits seulement, changement de plan en somme. De fait la chose est bien connue, mais pas des habitués de la normalité dans un monde qui place la barre plutôt haut pour juger d'une entité qu'elle est anormale.
Cela nous amène donc à la fin de cette digression, dans le crâne des charmantes jeunes femmes étendues au sol. La première ouvre des yeux aux pupilles dilatées, les neurones se trouvant derrière la rétine quasiment liquéfiés par l'alcool. Elle entend vaguement un bourdonnement sourd qui lui rappelle que passé vingt bouteilles la compréhension orale devient compliqué, et replonge.
La seconde éternue, le museau dans la poussière sa truffe se couvre d'un mélange de morve et de particule terreuse. Le museau se fronce alors, révélant un adorable minois malgré la grimace mécontente qui le marque. Irredka n'ouvre pourtant pas encore les yeux, en revanche le son à ramené Kerrar chez les conscients.
Aussi immuable qu'un bloc de marbre et disposée comme un cactus face à une peau tendre, la grande charr se relève dans un gémissement de métal. Son armure renvoie l'éclat du soleil et mille reflets chatoient sur le sol. Ses oreilles frémissent, elle se tient déjà aux aguets bien que l'intérieur de son crâne roule encore à un rythme de lessiveuse. Sa pogne massive se referme sur le pommeau de son épée géante qu'elle tire d'entre ses omoplates. La lame est longue des deux tiers de sa propre hauteur, large comme une assiette, un barrage d'acier, un éperon froid et mortel. Ses yeux clignent, la lumière soudaine l'aveugle après le sous bois et l'inconscience qui ont précédé son réveil. Ses sens la trouble, elle est perdue, mais elle sait encore reconnaître un humanoïde quand elle en croise un. Sa lame se lève en posture défensive, sa propriétaire campant fermement sur ses appuis.
«Tu as intérêt à me dire tout de suite ce qui nous arrive»
Bien que son maintient ne la caractérise pas comme la championne qu'elle est lorsqu'elle n'a pas l'impression d'avoir encaissé un coup de bélier dans chaque tempe, le ton n'a rien d'une plaisanterie. Kerrar craint de devoir combattre, mais s'il le faut elle sera prête, et vendra chèrement sa peau.
«Mzgrlkfdsiozgfnj...»
Irredka rouvre les yeux, reniflant en aspirant poussière et gravillons, ce qui élance tout son corps d'une quinte de toux puissante, la faisant rouler sur le flanc et se recroqueviller sur elle même. Diomède quant à elle, reste stoïque. L'alcool la grise, elle sait qu'il s'est passé quelque chose de suffisamment étrange pour qu'il ne soit pas seul fautif de son état, mais un gramme de plus un gramme de moins, ça ne fera pas de différence pour ses aptitudes au combat. Tentant de se relever, elle réalisa qu'Irredka se trouvait sur elle, et décida que c'était la goutte de rhum qui faisait déborder la bouteille, en se vautrant à nouveau par terre.
La renarde se détendait peu à peu, elle était parvenue à recracher le gravier qui avait passé ses sinus jusque dans la bouche. Sa salive se tentait de rouge mais ses jours n'étaient pas en danger, elle se trouvait seulement terriblement perdue et le corps tout endolorit. C'est encore en râlant, le museau en feu, la pierre en poussière crissant entre ses dents, et l'air rare dans ses poumons, qu'elle parvint à se relever.
Kerrar avait désormais retrouvé la pleine maîtrise de son corps. Elle était bien plus résistante que les deux autres. De plus, il lui fallait être un rempart, comme toujours, et jamais elle ne faillirait dans sa tâche. Sa nuque craqua lorsqu'elle fit rouler les muscles sous sa cuirasse, son dos se remit en place et la prise s'assura sur l'épée. Dès lors, mauvaise idée pour une vilaine bestiole de surgir des buissons comme un diable de sa boite. La créature n'eut pas le temps de crier kamikazy qu'elle se retrouvait déjà broyée par la lame épaisse de son opposante. Entre les stats, les passifs de bris d'armure, de dommages ajoutés, de dégâts bruts, la bestiole n'avait pas l'ombre d'une chance. Ses pattes restèrent un temps agitées de soubresauts, juste devant Irredka, qui se pencha dessus pour vomir avant de tourner de l'oeil. Avec un grognement méprisant, la grande guerrière la rattrapa par le col et la souleva du sol. Elle pointa Diomède du museau pour celle qui se trouvait toujours là. D'autres bruits se rapprochaient, et la charr avait remarqué le véhicule, semblable à ceux de certaines villes de chez elle.
«Porte là, il faut se replier avant que la marée ne monte et ne nous submerge. Je couvre les arrières.»