INTERLUDE
Dol Thuinn
« HNNNNNNNNNNNNN... !!!! »
Les yeux de la femme s’ouvrirent en grand, et elle roula sur le sol, sortant d’une espèce de mare verdâtre, roulant sur le sol d’une galerie silencieuse. De l’eau coulait le long de son corps, nu, une eau particulière, et elle se mit à tousser, avant de grelotter, en se rappelant ce qui lui était arrivé... Le yéti, ce maudit type avec son masque et ses tentacules, le combat dans la neige, le blizzard... Elle toussa à nouveau, et se retourna, posant sa main sur son visage, le tâtonnant. Elle était bien là... Mais le yéti... Il lui avait aplati le visage ! Elle avait senti le froid, sa masse énorme, puis... Elle venait de se réveiller ici, totalement paniquée, nue, couverte d’eau, dans ce qui semblait être une galerie, avec des stalactites au plafond, et un petit escalier menant à la sortie, avec une ouverture lumineuse.
Elle éternua à nouveau, incapable de se relever, et entendit des bruits de pas. Clignant des yeux à plusieurs reprises, claquant des dents, elle sentit une onde lumineuse venir la réchauffer. Un cerf... Un cerf argenté apparut, et lui lécha le visage, la regardant silencieusement, et, en voyant ce visage, Ciri’ sentit une onde de chaleur la traverser. Le cerf s’écarta alors, comme une sorte de torche dans la nuit, et, quand Ciri’ entreprit de se relever, ce fut pour voir, devant elle, ses vêtements... Des torches s’étaient allumées le long des murs, et Avallac’h, ce maudit elfe qui faisait office de guide, était face à elle, dos tourné vers la cuve verdâtre.
Ciri’ ne disait rien, les souvenirs lui revenant rapidement...
« J’ai été tuée... finit-elle par dire.
- En effet », acquiesça doctement Avallach’ en continuant à observer les reflets verdâtres du puits.
Elle avait été tuée... Ce constat s’imposait en elle avec horreur et consternation. Tuée et massacrée, après avoir été traquée pendant des heures par un ennemi impitoyable, qui lui avait volé ses armes, brisé ses potions...
« Alors... Alors quoi ? Je suppose que j’ai échoué dans votre précieux petit Tournoi entre Dieux ?
- Pour commencer, je vous encourage à vous habiller... La neige a commencé à tomber à Dol Thuinn, et je ne voudrais pas que vous affrontiez votre prochain adversaire avec un rhume.
- Mon... Mon prochain adversaire ? »
Est-ce qu’il était sérieux ? Elle avait perdu ! Le yéti l’avait massacré ! Comment aurait-elle pu remporter le combat ? Eberluée, Ciri’ vit Avallac’h se tourner légèrement.
« Vous avez remporté ce combat. Le jugement des Dieux ne s’attache pas qu’à une simple victoire, mais ils déterminent tout un ensemble de critères pour apprécier la valeur d’un participant. Il me semblait vous l’avoir déjà dit... »
Ciri’ n’ajouta rien, en baissant la tête, revoyant, encore et encore, le visage hideux de ce yéti, son corps s’écroulant sur le sol, et le froid, qui recouvrait et noyait tout... Une ultime et terrible sensation. Silencieusement, elle enfila ses vêtements, et s’habilla, sans rien dire, dans un silence pesant.
« J’ai été tuée...
- Une mort purement physique, même si je ne cherche nullement à minimiser votre souffrance. Le fait est que votre esprit, lui, était conservé par les Dieux. Une condition indispensable pour que l’ensemble des Dieux y participent, certains, comme Cernunnos, n’appréciant guère les morts inutiles, faites uniquement pour contenter les plaisirs de quelques jeunes divinités insouciantes...
- Bordel... Je me suis faite tuer ! »
Ciri’ avait haussé le ton, et frappa l’homme au visage, un coup auquel Avallac’h ne s’attendait visiblement pas, car il trébucha sur les marches, sa main venant s’appuyer contre la rambarde de la source verte.
« J’ai été massacrée, violée, et j’ai vu ma tête se faire exploser dans votre stupide Tournoi à la con ! Alors, allez vous faire foutre, vous et vos jeux débiles ! Je ne suis pas une putain de poupée qu’on envoie à l’abattoir ! »
Furieuse, Cirillia se retourna, et grimpa les marches de la caverne, sortant dehors. Elle était aux abords de la vaste forêt de Dol Thuinn, en hauteur, voyant, sur sa gauche, la tour du mage, et, au loin, la mer. Fini les conneries ! Elle était morte, et l’image de son supplice la hantait encore, revenant régulièrement danser dans sa tête, vision cauchemardesque et terrifiante... La femme dévala la pente, et s’avança le long de la forêt, pour rejoindre le village abandonné. Son petit bateau était toujours là, amarré au quai, le long de maisons en bois abandonnés, de caisses poussiéreuses, d’anciens établis de pêches.
« Vous déclarez donc forfait ?
- Non... Je te dis d’aller te faire foutre par des vaches, et de me foutre la putain de paix ! »
Une légère brise matinale s’abattait, amenant quelques flocons de neige.
« Bien sûr, rien ne vous oblige à vous battre... Vous pouvez continuer à fuir, ça a toujours été votre spécialité, après tout. »
Ciri’ serra les dents, voyant rouge, et se retourna alors.
« Qu’est-ce que ça veut dire, ça ?!
- Que vous n’avez jamais cessé d’être la petite fille en pleurs fuyant devant le dragon qui a ruiné votre vie ! Vous avez fui votre formation de sorceleuse car vous craigniez de ne pas survivre à l’Épreuve des Herbes ! Vous avez fui Sylvandell car vous aviez peur de ne pas être un bon Commandeur ! Vous avez fui toutes les guildes qui ont tenté de vous recruter sous des prétextes fallacieux ! Et vous avez fui l’installation de votre frère, pour une vie de manante au bord des rues, en vous contentant des maigres deniers que des paysans appauvris par la guerre daignent vous offrir quand ils ne cherchent pas à vous escroquer !
- FERME TA GUEULE, CONNARD ! »
Ciri’ se rua sur lui, mais son coup de poing se heurta à une tête qui semblait être un véritable mur. De quel droit est-ce que ce salopard d’elfe arrogant osait lui parler ainsi ?
« Il est temps de vous débarrasser de votre passé... Je ne vous ai pas contacté sans raison, Cirillia. Je ne me suis pas rapproché de vous par pitié. Il y en vous un potentiel inestimable, une force qui dépasse de loin les enjeux misérables de ce Tournoi pathétique, uniquement fait pour satisfaire l’égo mal blessé de Dieux gras et imbéciles. J’ai choisi d’y participer pour vous offrir une chance, Cirillia... Une chance d’accepter enfin votre destinée, et de comprendre... De comprendre pourquoi le Dragon noir vous a attaqué, il y a des années, et pourquoi, en votre for intérieur, vous fuyez toute approche...
- Mais qu’est-ce que vous racontez ?
- Le Dragon n’a pas attaqué votre ville au hasard. C’est vous qu’il visait, Cirillia ! Vous, et le risque de ce que vous étiez susceptibles de devenir. Une destinée que vous vous êtes toujours refusé à admettre, que vous n’avez jamais voulu voir. Ne comprenez-vous pas ? Ce Tournoi est votre chance... Votre chance de lutter contre cette peur enfantine qui n’a jamais cessé de vous bloquer, de vous restreindre. Alors, vous pouvez choisir de fuir, encore, ou vous pouvez accepter d’assumer que vous valez plus que ce que vous pensez valoir... Infiniment plus. »
Après ces ultimes mots, empreints d’une sorte d’étrange morale, Avallac’h disparut, et Ciri’ reste là, dans ce village abandonné, pendant de longues secondes, en contemplant le bateau, faiblement relié au quai. Partir ? Rester, et être à nouveau le dindon d’une farce divine ? Il lui sembla attendre là pendant des heures... Puis elle observa la tour, grogna, et s’en approcha.
« Putain de merde... »
FICHE DE PERSONNAGE
ÉQUIPEMENT
Petite variante par rapport aux autres tours :
- 1 épée elfique ;
- 1 hache, qui est portée à la hanche de Ciri’ (et non à son dos, comme ses épées) ;
- 1 couteau de lancer ;
- 1 dague.
Ce à quoi on ajouta sa ceinture, pouvant contenir jusqu’à quatre élixirs, qui sont les suivants par défaut :
- Un décocté de Raffard le Blanc, qui soigne une grande partie des blessures physiques, sauf les plus graves (mutilation, par exemple, mais une hémorragie interne peut être soignée). Le taux d’intoxication pour un décocté est de 40% ;
- Une Forêt de Maribor, qui augmente nettement l’endurance de Cirillia, en ce sens qu’elle peut courir plus vite, et ressent moins les effets de la fatigue. Le taux d’intoxication pour cet élixir est de 30% ;
- Un Blizzard, l’un des plus puissants élixirs d’un sorceleur, qui augmentent toutes les caractéristiques physiques du sorceleur. Les sens de Ciri’ sont plus affutés, et sa concentration sanguine est accélérée, ce qui lui permet d’avoir des réflexes surhumains. Le taux d’intoxication est de 50% ;
- Un Philtre de Petri, qui augmente l’intensité des Signes d’un sorceleur (cf. catégorie ci-dessous), avec un taux d’intoxication de 30%.
Le taux d’intoxication est une notion importante, car elle empêche un sorceleur de multiplier les élixirs. En effet, chaque élixir d’un sorceleur a des effets sur son sang, et le contamine. Si le taux atteint 100%, le sorceleur meurt. Et, plus on approche de 100%, plus on sent les effets de l’intoxication. Maux de têtes, douleurs intestinales... Globalement, c’est à partir d’un taux d’intoxication de 75% que les effets commencent à se ressentir.
Ainsi, par rapport au Handicap spécifique à ce match, Ciri’ commencera avec un taux d’empoisonnement élevé, mais, ce taux n’étant pas permanent, il diminuera progressivement. En effet, le taux d’intoxication descend avec le temps, mais il descend plus vite lorsque le sorceleur médite, ou se bat, grâce à la concentration d’adrénaline.
Il existe aussi un élixir permettant de réduire à zéro le taux d’intoxication d’un sorceleur, le Miel blanc, mais, par souci de respect avec le Handicap, je vais partir du principe que Ciri’ n’a pas cet élixir en stock. Elle peut éventuellement le fabriquer, mais il lui faudrait pour cela méditer, ce qui la couperait totalement du monde extérieur.
INVENTAIRE
Par rapport à cet équipement, Cirillia dispose aussi d’un sac à dos comprenant son inventaire. Il y a bien plus d’élixirs, ainsi que des substances alchimiques, et divers objets :
- 1 pistolet-grappin relié à une corde elfique ;
- Différents élixirs. On peut voir une liste d’élixirs possibles au lien suivant, même si cette liste n’est pas exhaustive, et que Ciri’ dispose d’autres élixirs. En revanche, comme précisé précédemment, elle ne dispose pas, en stock, de Miel blanc ;
- Différentes substances alchimiques, accompagné d’une bouteille d’alcool fort, de la liqueur de cerise. En effet, Ciri’ peut préparer ses propres élixirs, mais la préparation nécessite une base alchimique, soit un alcool fort. On utilise généralement de la Mouette Immaculée, mais un alcool nain, comme la liqueur de cerise, fait aussi l’affaire. Néanmoins, la préparation nécessite de méditer, ce que Ciri’ ne se risque à faire que quand elle est sûre de ne pas se faire surprendre (en méditant, elle se coupe du monde extérieur).
SIGNES
Cirillia étant une sorceleuse, elle maîtrise un panel de sorts magiques, appelés «
Signes » par les sorceleurs. En voici la liste, exhaustive :
- Aard. Ce premier Signe consistait à générer une onde de choc qui repoussait les éléments ;
- Axii. Le Signe d’Axii permettait de manipuler les esprits faibles, d’envoûter certains monstres, ou générer des illusions ;
- Igni. Le Signe du feu, l’un des plus redoutables, qui consistait à générer des ondes de feu du bout des doigts, en faisant brûler l’atmosphère alentour ;
- Quen. Le Signe défensif, qui avait sauvé à bien des reprises la vie de Cirillia, et qui consistait à générer autour de soi un dôme magique, un bouclier qui vous entourait, et qui explosait lorsqu’il recevait une attaque, encaissant les dégâts ;
- Yrden. Le cinquième Signe consistait à placer sur le sol un piège magique, dont les effets variaient ; classiquement, Yrden servait à engourdir les ennemis, permettant ainsi de les ralentir, mais certains sorceleurs maîtrisant bien ce Signe pouvaient aussi faire en sorte qu’il soit douloureux pour la personne marchant dessus.
FINALE
Ciri’ atterrit sur le sol, un sol poussiéreux, appartenant visiblement à une ancienne grange puant le moisi, avec un plancher branlant, et une odeur écœurante de chair en putréfaction... Ainsi qu’une migraine épouvantable.
«
Rooh, bordel... ! »
La bouche pâteuse, elle sentit sa vision devenir floue, avant de rester floue sur les bords, tandis qu’elle posait un genou à terre, et posait une main sur sa tête. C’était comme si son corps souffrait des effets d’une intoxication poussée, alors qu’elle n’avait encore rien mangé. Sa bouche était pâteuse, avec une furieuse envie de vomir, et elle dut fermer les yeux, se concentrant, tentant de retrouver son souffle, tandis que ses boyaux remuaient, et qu’elle grognait. Son sang venait de passer d’un taux d’intoxication zéro à 70%, ce qui était... Dur à avaler.
Mais, au moins, elle n’avait pas de carton sur la tête !
«
UUUUUURRGGGHHHHH... !! »
Se tenant les côtes, elle recracha de la salive, avant de soupirer à nouveau... Puis d’entendre le plafond craquer au-dessus d’elle.
Ciri’ se redressa subitement, et saisit son épée, venant la sortir. Cette fois, elle avait opté, non pas pour deux épées, mais pour un mix’. Elle avait une épée et une hache, s’étant rappelée les leçons de son précédent combat. Une hache lui aurait été très pratique contre son adversaire tentaculaire, ou même contre ce fichu yéti... Mais là, dans cette grange puante, elle n’était visiblement pas seule... Et sa tête continuait à lui tourner dangereusement.
«
Hmmmm... »
Se dépêchant, Ciri’ forma du bout de ses doigts le protecteur Signe de Quen, et sentit le halo doré l’envelopper... Mais, malgré sa vigilance, sa tête continuait à lui tourner...
Cependant, elle entendait clairement des grognements et des bruits de pas. Un escalier menait vers le toit de cette grange, une grange remplie de carcasses de chevaux morts, d’asticots, de larves, de vers de terre... Et le plafond s’écroula brusquement devant elle, à quelques centimètres, faisant apparaître un redoutable monstre, dont le hurlement supersonique la frappa, la faisant reculer.
Un
noctule !
Sans attendre plus longtemps, Cirillia se retourna, et courut vers une fenêtre, puis bondit de l’autre côté. Elle roula le long du sol, et atterrit en contrebas d’une petite colline, près d’une gadoue puante... Et vit devant elle, en relevant la tête, le spectacle mortifère, en pleine nuit, d’un ancien champ envahi d’herbes sauvages, et de multiples carcasses de vaches, sur lesquelles des
noyeurs étaient joyeusement en train de manger, arrachant leurs intestins pourris.
Ciri’ avait débarqué au milieu d’un marais des plus sinistres, et, quand le noctule se mit à hurler, les noyeurs relevèrent la tête.
Fort heureusement, la bête ne semblait avoir guère envie de sortir de son terrier...
Après les neiges et le yéti, le marais puant envahi par les monstres...
Ciri’ allait regretter sa selle et les Contrées du Chaos !