Il n’y avait pas à dire, Shani appréciait vraiment le contact de l’eau sur son corps. Elle s’y immergeait totalement, lui rappelant toute sa jeunesse, où elle allait souvent à la piscine municipale, s’amusant à nager dans l’eau, à se tapir dans les profondeurs, et à observer. Elle observait tout et n’importe quoi : les reflets du soleil sur la surface du bassin, les remous de l’eau, les mouvements des autres baigneurs, les propres bulles d’air qu’elle formait. Un de ses petits hobbys était ainsi de faire un gros *SPLATCH !* en s’écrabouillant dans l’eau, puis d’ouvrir ensuite tout de suite les yeux, afin de voir la multitude de bulles enveloppant son corps. Dans cet état, Shani avait l’impression de flotter, d’être comme une petite sirène. Ce plaisir se retrouvait encore à l’âge adulte, même si Shani se mettait maintenant moins en valeur. Elle se contentait de nager, expirant à chaque fois, plongeant parfois sa tête dans l’eau.
Cette eau fraîche lui faisait tellement de bien ! La température interne de son corps avait bien chuté de quelques nombreux degrés. Elle ne faisait alors pas trop attention au public. Comme d’autres le pensaient, Shani n’était en effet pas du genre à devoir chercher les autres. Oh, il pouvait bien lui arriver de séduire, notamment les jeunes élèves qui venaient à l’administration en quête d’informations, mais il fallait aussi dire qu’on ne se privait pas de le faire, en retour. Pour elle, elle était simplement venue ici pour se détendre... Mais, après tout, ce n’est pas comme si l’un et l’autre étaient incompatibles.
Après plusieurs brasses et mouvements de bassin, la secrétaire fila vers le rebord, afin de se reposer, de détendre ses bras. Elle regarda autour d’elle. Des gens bronzaient sur des transats des gosses jouaient dans un coin avec un gros ballon et des bouées, et les maîtres-nageurs, reconnaissables aux tee-shirts blancs qu’ils portaient, veillaient d’un œil de lynx sur la sécurité des usagers. Quant au soleil, et bien, il dominait toujours, faisant fuir le plus infime des nuages qui aurait essayé de se rapprocher de lui. En somme, tout allait pour le mieux. Shani continuait à regarder autour d’elle, et, évidemment, ne vit pas l’homme en train de se rapprocher d’elle... Tout comme elle ne vit pas son érection naissante, puisqu’il avait eu la bonne idée de s’immerger dans l’eau (même si ça n’aurait sans doute pas dérangé Shani tant que ça).
« Salut, je m'appelle Bryan. J'espère que je ne vous dérange pas... »
La secrétaire le regarda lentement. Il lui souriait, d’un air inoffensif, mais elle croyait discerner une lueur moins sympathique dans son regard... Ou alors, elle se faisait simplement des idées. Cette impression dura moins d’une seconde, le temps qu’elle cligne des yeux sous l’effet de la surprise. Un sourire traversa ensuite ses lèvres, et, d’un geste, elle rabattit derrière l’une de ses oreilles quelques mèches de cheveux rebelles.
« Oh, bonjour, répliqua-t-elle. Non, vous ne me dérangez pas. Les Françaises ont le sens de l’hospitalité, vous savez. »
Elle avait un léger accent, et elle avait bien compris que, pour les étrangers, les Français étaient un peuple très romantique, adepte de bons mots, avec une verve magnifique... Sûrement des touristes qui s’étaient contentés de voir la Tour Eiffel et le Louvres, et n’avaient pas poussé leur curiosité des autochtones en allant voir la Seine-Saint-Denis. Elle se permit de brièvement observer l’homme, et en déduisit rapidement une chose simple : il n’avait pas l’air japonais. Et son nom... Bryan, ça sonnait américain.
« Je m’appelle Shani, précisa-t-elle à nouveau, en se disant que ce ne serait que politesse de lui dire son nom, vu qu’il en avait fait de même. Vous venez vous détendre à la piscine, vous aussi ? »