«
Pierre, je m'appelle Pierre, madame. »
Le dénommé Pierre semblait totalement pétrifié, comme s’il était persuadé qu’il allait mourir... Ce qui, en soi, n’était pas faux. La vampire envisageait
réellement de le supprimer, tout comme elle savait qu’elle ne ressentirait guère de pitié à l’idée de le supprimer. La redoutable vampire était ainsi : délicieusement cruelle et sadique. Horrible, monstrueuse, mais
tellement irrésistible. Comment lui dire non ? On aimerait presque qu’elle nous tue, pour avoir le plaisir de se dire qu’on avait été abattus par la plus belle et la plus magnifique des tueuses.
Dans un sourire, Mélinda se releva, et laissa l’homme se rhabiller, enfilant les seuls vêtements disponibles : ceux du défunt Matoko... S’il était bel et bien mort, ce qui, en l’état actuel des choses, n’était guère une certitude. L’homme enfila promptement les vêtements, mais n’avait visiblement guère envie de se séparer de la vampire... Comment le lui reprocher, après tout ?
Qui n’aurait pas envie d’être près de la vampire ? Proche de la magnifique Mélinda, qui enchantait les rêves, hantait les nuits, et poursuivait les rêveurs dans leurs fantasmes ? Mélinda se contenta d’un léger sourire amusé, dos tourné à l’homme, qui entreprit de défendre son dossier, de défendre l’idée de devoir suivre une femme qui avait sérieusement envisagé de le tuer.
Il devait vraiment être dans une triste situation pour devoir ainsi quémander la pitié de la femme.
«
Je ne connais rien de cet endroit. Je crois avoir compris pourquoi je suis là, mais pas je suis où. Et je sais pas où aller non plus. Ni comment rentrer chez moi. Je crois que je vais être obligé de m'aider vous demander. »
Le ton était hasardeux. Les
kanjis étaient là, mais pas dans le bon ordre. Le langage occidental était fondamentalement différent du langage oriental. Les différents idiomes reposaient sur des modes de communication totalement différents entre eux. Mélinda se pinça les lèvres, sa langue claquant brièvement, avant qu’elle ne regarde Bran. Elle ne faisait pas dans la charité gratuite, et ce type désemparé avait tout l’air d’être un boulet... Légèrement cinglé, de surcroît.
*
Cependant...*
Oui, il y a avait quelque chose qui l’étonnait, là-dedans. Sa peur était normale, mais elle semblait...
Anormale. Sa peur ne semblait pas tant justifiée par le fait d’être tombé sur une vampire que par le fait qu’il avait failli mourir. Il s’adaptait tout simplement bien trop vite à cette situation, au fait de passer d’un endroit totalement différent à un autre... Comme si, dans une certaine mesure, il
savait où il était, comme si, inconsciemment, son cerveau reconnaissait cet endroit. S’il était vraiment un simple quidam ramassé par hasard, son cerveau se serait totalement bloqué, et il aurait fait une crise. Là, il s’adaptait bien trop vite.
Un tel comportement était, en définitive,
suspect.
Mentait-il ? Disait-il la vérité ? Quelle était cette histoire de «
forum » ? Qu’avait-il voulu dire ? Que, quelque part, dans ce pays où on mangeait du pain chaud avec du beurre, il y avait un individu qui relatait sa propre existence ? Cette histoire semblait totalement délirante, incompréhensible, tellement grotesque qu’elle n’avait même pas envie de l’entendre... Mais ce mensonge paraissait tellement éhonté, tellement énorme, tellement impensable, qu’il n’était tout simplement
pas crédible.
Bran attendait que Mélinda se décide. Elle pouvait tout simplement partir, et le laisser là. Elle ne craignait pas grand-chose de cet homme, et, de toute manière, s’il devenait gênant, elle pouvait tout à fait le tuer. La vampire réfléchit donc, et trouva assez rapidement des solutions possibles
«
Très bien, jeune Pierre. Je vais t’offrir mon hospitalité. »
En contrebas, une limousine noire attendait Mélinda. Elle était conduite par une jeune étudiante qui bénéficiait de son permis de conduire :
Gia.
Une autre des esclaves de Mélinda Warren.