Irys pestait. Contre la neige, contre le gel, contre le vent, contre le froid. Elle pestait abondamment, bien que ça ne serve à rien, mais elle ne pouvait pas s'en empêcher. Quelle idée saugrenue elle avait eu de vouloir se rendre en territoire terranide en cette saison !
La mercenaire semi-démone en était arrivée à cette décision face au manque de travail. En ce moment, c'était la période morte dans le mercenariat. Étrangement, si les pics d'activités correspondaient aux campagnes lancées par tel ou tel pays, ville ou guilde, le creux ne suivaient aucune règle fixe. Ils allaient et venaient comme ça, sans régularité et sans prévenir. Du coup, et faute de mieux à faire, Irys avait décidé d'aller visiter la capitale terranide, un choix dont la conséquence est d'être présentement en train de lutter contre le vent des toundras des terres gelées.
Irys était une habituée des territoires inhospitaliers. En tant que mercenaire, elle avait eu des missions impliquant jungles, marécages, montagnes, et les célèbres terres chaotiques d'Ashnard, mais là, un nouveau palier venait d'être franchi. En dépit des nombreuses couches de vêtements qu'elle portait, et des breuvages ingurgités sensés aider à lutter contre le froid, la mercenaire avait l'impression de geler jusque dans la moelle de ses os. Cerise sur le gâteau, elle avait hier échappé de justesse à une tempête de neige, et maintenant déambulait dans un paysage uniformément blanc. C'est ainsi qu'elle ne vit pas le piège.
Le danger d'évoluer ainsi dans de la neige arrivant aux genoux, c'est que l'on ne voit pas où l'on met les pieds. Du coup, la moindre saillie ou dépression dans le sol est sujet à accidents. Alors que dire d'une crevasse d'une demi-douzaine de metres de profondeur ?
Quand Irys sentit le manteau neigeux céder sous son poids, c'etait déjà trop tard. La mercenaire traversa la couche de neige et chuta, prise par surprise et incapable de de rattraper à quelque-chose. La chute fut rude et dure, mais heureusement de la neige couvrait le fond du gouffre, amortissant l'atterrissage d'Irys et lui évitant le pire.
Quand le semi-démone eu reprit ses esprits, elle entreprit de de relever, mais une violente douleur dans la jambe la renvoya au sol. Baissant le regard, elle prit conscience de la vraie situation.
Les stalagmites. Dans les cavités rocheuses, la condensation de l'eau sur les parois entraine la formation de goutes, celles-ci tombant au petit bonheur la chance. Mais quand ces goutes, chargées de sédiments minéraux, tombent régulièrement au même endroit, l'accumulation de sédiments finit par former une bosse, puis un cône, et enfin une stalagmite.
Une stalagmite, en fonction de son âge, peut former un éperon rocheux acéré. Tomber dessus ne vaut donc pas mieux que de tomber sur un pieu, est c'est exactement ce qui vient d'arriver à Irys : sa chute c'est finie sur une stalagmite, laquelle lui a perforé la cuisse.
Immédiatement après ce constat, la mercenaire ne perdit pas une seconde. De ses vêtements inférieurs, elle déchira une bande de tissu qu'elle noua solidement à l'aine. C'était douloureux, certes, mais face à la perspective de mourir d'une hémorragie, le choix est vite fait. Irys s'installa aussi confortablement que possible étant donné le milieu, et se concentra. L'energie démoniaque qui l'habite renforce son métabolisme, lui offrant une régénération accrue. En ce concentrant et en ciblant l'action de cette énergie, Irys pouvait récupérer de blessures graves jusqu'à cinq fois plus rapidement qu'un humain normal. Et quand son sceau était retiré, elle guérissait alors à vue d'oeil. Le problème, si elle retirait son sceau en étant déjà blessée, la libération soudaine d'energie démoniaque dans son corps aggravait la blessure avant de la soigner. Et dans sa situation actuelle, Irys ne voulait prendre aucun risque. La semi-démone espérait donc pouvoir réussir à guérir cette blessure afin de quitter ce lieu. Elle ne croyait pas trop à la possibilité de recevoir de l'aide : personne ou presque ne traverse ces terres, et personne ne l'entendrait ou ne verrait la faille.