Il est vrai que la jeune fille c'était très mal exprimée une fois de plus, mais... tout ceci lui paraissait si étrange ! Pourquoi parlait-il de lui comme s'il n'était pas dans son corps, mais simplement spectateur de ses propres actions ? Etait-il un genre de schizophrène ?
A cette pensée, Kohana ne put réprimer un frisson. Ce personnage l'intriguait réellement, mais elle n'arrivait pas du tout à le comprendre. Peut-être étati-ce cela d'ailleurs qui lui plaisait. Sa curiosité avait été toujours l'un de ses plus grands défauts. Si elle avait acquis toute cette culture au cours des années, sans se rebeller contre des parents stricts qui ne la laissait pas sortir, c'était parce qu'elle était curieuse. Dès qu'elle ouvrait un livre, il lui en fallait tout de suite au moins trois ou quatre autres pour comprendre, analyser, approfondir ce que le premier narrait.
Un livre... depuis combien de temps n'en avait-elle pas vu ? Peut-être que cela n'existait pas à Terra ? Elle n'en savait rien, mais elle n'en avait jamais aperçu là-bas. Elle eut une soudaine nostalgie et des larmes lui montèrent aux yeux.
Elle sentait Sandji qui tirait sur son bras et se résolut à avancer à sa suite. Mais son esprit était ailleurs. Ses pensées dérivaient maintenant loin, très loin du quartier de la Toussaint. Elle ne remarquait même pas les rues qui défilaient et le regard perçant de son partenaire cherchant un endroit pour manger.
Le garçon avait faim, faim de nourriture. Tandis que la fille était affamée elle aussi, mais c'était une autre forme de nourriture qui lui fallait, une nourriture plus abstraite : la connaissance. Ce n'était même pas vraiment de la faim, mais plutôt une sorte de soif. Ce n'était pas douloureux comme un ventre qui gargouille, mais c'était là, et ça ne bougeait pas, attend de recevoir son dû.
"Soif."
Kohana ne réussit pas à articuler un mot de plus. Il lui fallait quelque chose à apprendre. Elle voulait savoir, elle devait savoir ! N'importe quoi ! C'était un besoin aussi irrépressible qu'aurait pu l'être une pulsion sexuelle. Elle n'était même pas loin de se jeter sur Sandji et de découvrir ce que c'était que faire l'amour avec un être bizarre, mais magnifiquement candide.
Après tout, faire l'amour était un besoin physique, mais aussi une satisfaction morale, de part le fait que cela apportait du plaisir, mais aussi de la connaissance ! Diversifier les partenaires, c'était étendre ses connaissances sur les individus et sur le sexe en lui-même.
L'adolescente se mit à tapoter le bras du garçon comme si elle avait une envie pressante. Elle ne le regardait pas, elle ne l'invitait pas vraiment, rien ne pouvait montrer ce dont elle avait réellement besoin. Mais elle ne pouvait pas s'en empêcher. Elle tapotait le bras comme si celui-ci pouvait lui apporter une réponse concrête à ses besoins métaphysiques.