Les cérémonies officielles, ça avait toujours embêté Kagura. Elle n’aimait pas se mêler à la foule des actionnaires de la société de son père et avait donc pris congé de la réunion qui se tenait en plein centre-ville. Comme c’était un jour important pour lui, elle avait quand même accompagné ses parents et avait décidé de voir un peu les collègues et autres personnes en lien avec son père. Des vieux, des gens de la pure bourgeoisie, aucun d’eux ne semblait vraiment intéressant pour la jeune fille qui espérait secrètement trouver quelqu’un de son âge ou quelqu’un ne parlant pas bourse ou affaires. Malheureusement, il n’y avait que ça, que des costumes cravates sérieux et pas très engageant. Elle se dirigea alors vers sa mère et lui dit qu’elle allait ailleurs, elle ne pouvait se décider à rester là, à attendre sans rien faire. Après avoir reçu son accord, elle descendit l’immeuble et ouvrit la voiture pour récupérer son sabre, elle se sentait tellement mieux avec.
Une fois son arme récupérée, elle referma la voiture et alla rendre les clefs à ses parents avant de repartir. Jusque là, la journée s’était bien passée mais il suffisait d’un truc, une seule chose pour tout faire basculer et elle préférait ne pas prendre le risque de ne pas savoir se défendre si on venait à l’agresser. A cette heure peu avancée, les rues du centre-ville étaient encore envahies par les passants cherchant à faire des courses de dernière minute, des couples se promenant main dans la main ou encore des gamins courant dans tous les sens. Kagura, elle, se contentait de marcher calmement, observant par moment les vitrines des magasins de vêtements tout en évitant les marmots qui faillirent lui rentrer dedans. Finalement, elle arriva à un carrefour et attendit au feu que les piétons puissent traverser. Ce qui l’étonna, c’était la foule digne d’une de celles que l’on ne trouve que dans les grandes villes comme Tokyo. Des tas de gens se pressaient de rentrer chez eux ou de faire d’autres choses dont elle ne voulait rien savoir. Pour le moment, elle profitait de cet instant solitaire.
Bientôt, elle arriva près du quartier de la Toussaint et hésita s’y aventura sans s’en rendre compte. Les grandes rues éclairées laissèrent place aux petites ruelles mal éclairées, la foule diminuait pour ne plus laisser place qu’à quelques brigands tentant de se cacher dans l’ombre pour surprendre une éventuelle victime. Malgré son jeune âge, l’épée que tenait Kagura semblait dissuader les moins forts d’entre eux tandis que les plus téméraires complotaient déjà pour l’attaquer dans le dos. Attendant le dernier moment, se basant sur le bruit des pas de ceux qui la suivait, Kagura se baissa et frappa horizontalement le premier des bandits avec le fourreau de son katana. Elle observa alors les deux restants, le visage fermé, l’air sévère et les invita à venir la chercher. Voyant leur compagnon à terre, ils hésitèrent et se lancèrent finalement tous les deux vers la jeune fille qui réagit au quart de tour, envoyant le bout de son fourreau dans l’estomac du premier avant de frapper le second de la garde de son arme. La bataille dura deux courtes minutes et Kagura reprit son chemin, ces bandits n’étaient pas du niveau de son grand-père, ils n’avaient aucune chance de pouvoir la battre à eux trois.
Après une dizaine de minutes d’errance sans autre tracas, Kagura vit le corps d’une jeune fille et s’en approcha pour vérifier le pouls. Aucun, elle voulu vérifier le souffle mais rien ne sortit. Devant ce cadavre, elle ne sut que faire et se laissa tomber sur les fesses, le regard vide. Ce n’était pas étonnant de trouver un cadavre dans ce genre d’endroit mais c’était le premier qu’elle voyait. Et puis, il y eut ce qu’elle aurait préféré ne pas voir. Elle était toujours là, hagarde devant ce corps inanimé et ne savais pas quoi faire quand, soudain, elle vit les doigts de la jeune fille bouger. Elle crut tout d’abord à un mirage, une hallucination mais c’était loin d’être le cas. Elle ne sut pas ce qui avait suivi dans les mouvements, elle savait juste qu’elle se trouvait face à une femme morte la minute d’avant et vivante à l’instant où elle tentait de reprendre ses esprits.
- Qu... C... Qu’est-ce qu’il s’est passé? Qui êtes-vous?
Inconsciemment, Kagura fit glisser une de ses mains sur le fourreau de son arme, pensant avoir affaire à une démone. Elle était toujours là, assise par terre, observant avec de grands yeux la jeune fille aux cheveux noirs alors que son corps tremblait, à la fois effrayée de se trouver devant une fille ressucitée et énervée à l’idée d’avoir rencontré une démone. Sa journée qui s’était bien passée dans l’ensemble s’écroula lorsque l’inconnue se releva, se trouvant debout alors qu’elle-même n’avait pas encore réalisé la chose dans son intégralité.