En quête d'une nouvelle modèle ? [pv Lucie Moreau]

Un peu de soleil haut dans le ciel, Dieu que ça fait du bien, mais surtout nous change des basses températures des semaines dernières. Autant en profiter pour sortir et se promener, plutôt que de rester inutilement enfermer dans la chambre au lycée. Oh bien entendu, je ne vais pas me contente d'aller au centre-ville comme le font la majorité des étudiants. Non que ce genre d'endroit ne me plaise guère, bien au contraire, mais après tout le travail fournit en cous, rien ne vaut une sortie en-dehors de la ville. D'autant plus que ça va me permettre d'éviter la foule bruyante et surtout, avec un peu de chance de trouver un coin parfaitement calme et de nouvelles sources d'inspiration pour le dessin. C'est pour cette raison que tout en marchant, j'ai sur le dos mon sac. J'ai bien fait attention avant de partir à ne rien oublier. Que ce soit mes crayons, comme mon carnet à croquis, mais aussi de quoi manger si l'estomac le réclame, j'ai vraiment hâte de voir le déroulement de cette journée. Pas après pas, c'est le sourire aux lèvres que j'avance. Comme je l'ai prévu, pas l'ombre d'une personne dans les alentours. Même pas l'un des rats que l'on trouve pourtant facilement dans ce genre d'endroits plus que désert.

Enfin qu'importe, car semblant sortir de nuls endroits, les contours d'une bâtisse se dessine au loin. Ai-je marché tant de temps que je me suis perdu ? Connaissant mon sens de l'orientation, qui malheureusement n'est pas aussi bon que mon niveau en dessin, j'en suis bien capable. En même temps, lorsqu'on est dans un calme total, qui nous change du brouhaha d'un lycée bondé d'élèves tous plus énergétiques les uns que les autres. C'est donc avec une grande curiosité que j'accélère mes pas, sans pour autant me mettre à courir. Rien ne me permet de savoir de quoi j'approche. Il est autant possible que ce soit la maison de campagne 'un couple de vieux, tout comme une ferme ou que sais-je encore ? Mes parents ont ce genre de maison, alors au moins je ne vais pas être dépaysé. Par contre, j'espère que je ne vais pas être au mauvais endroit, au mauvais moment. Ce qui serait trop cliché avec les pseudos films d'épouvantes du dimanche, qui font davantage rire que pleurer. J'ai encore trop de choses à vivre pour me faire avoir par le fermier cinglé à la tronçonneuse.

Oh, mais en fin de compte, maintenant que je suis bien près de la demeure, je comprends qu’elle est habitée. D’ailleurs, quand j’observe un peu mieux les alentours, je peux noter sans mal le calme presque religieux qui domine. Derrière les premiers murs de petites tailles, ce qui semble être un jardin pas vraiment petit et… Celle que je présume être la proprio de la maison, dans une tenue pas vraiment couverte, en plein travail dans le fameux jardin. Un petit coup d’œil suffit pour voir les formes de cette femme. Sa vue me change des brindilles en cours, non que je ne trouve aucune de mes camarades charmantes, bien au contraire d’ailleurs, mais même si j’en ai dessiné plusieurs, je n’ai jamais eu la chance d’avoir pour modèle une femme comme ça. Hum… Que et comment faire ? Ce n’est pas courant d’aller vers une parfaite inconnue pour ça… Bah je vais tenter une approche moins commune, on verra bien le résultat. M’approchant d’un pas léger, j’affiche un petit sourire et une fois en vue de la dame….

Bonjour madame.  Je suis désolé si je vous dérange. J’étais en pleine promenade dans le coin, à chercher ou m’asseoir pour faire quelques dessins et je suis tombé sur votre demeure. J’espère que vous ne m’en voulez pas de m’être tant approcher ? Si c’est le cas, je peux éventuellement me faire pardonner en vous donnant un coup de main ?

Il faisait beau. Il faisait chaud. Alors…Autant en profiter ! Seule chez elle, dans ce petit coin de paradis pourtant si proche de la ville, Lucie s’était mise à l’aise. Hé ! La rouquine est chez elle et elle ne gêne personne de toute façon. Il y avait beaucoup à faire aujourd’hui, aussi bien dans sa maison, sa grange ou son jardin. On ne s’ennuie jamais chez la française. Oh, elle pourrait très bien jouer les fainéantes et profiter de la journée pour lézarder sous le soleil nippon. Elle le fait, parfois seulement. Lucie est une curieuse et une touche-à-tout. De plus, vivant seule, il faut bien que quelqu’un fasse à manger, la vaisselle, le ménage, l’entretien de la maison en fait, en plus de celui du jardin-potager, de l’autre bâtisse, et il fallait aussi s’occuper des bêtes. Et bien, la rondouillette avait là bien du courage pour faire tout cela sans l’aide de personne. C’était dur parfois, et en fin de soirée, elle se laissait volontiers tomber et se blottir dans les bras de Morphée après une dure journée de labeur. Mais pour rien au monde, elle n’échangerait sa place, sa vie même, avec un autre.

Il faisait beau. Il faisait chaud. Et une Lucie en maillot de bain ! Comment ça, « ce n’est pas une tenue de travail » ? Je vous assure que si. Et puis d’abord, si cela vous gêne, si cela vous dégoûte, ne regardez pas, et puis c’est tout ! Voilà, c’est dit. En petite tenue donc, ses chaussures en tissu aux pieds, la rousse s’était aventurée dans son garage, petite partie reliée à sa maison. Il était un peu en désordre, il faut l’avouer, mais c’était un désordre dans lequel la jeune femme s’y retrouvait volontiers. Dans son foutoir organisé, elle y trouva une bêche, une binette, un plantoir et en sortit son gros arrosoir d’onze litres. Ainsi armée jusqu’aux dents, Lucie s’en allait au front. La presque trentenaire sortit du garage et se dirigea vers son potager. Il y avait déjà quelques plantations, des pieds de légumes, comme des tomates, de différentes variétés, ainsi que des pâtissons, artichauts, des poivrons également. Lucie avait acheté quelques jours auparavant des pieds de courgettes rondes à la grande jardinerie du centre commercial de Seikusu. Il était grand temps de les mettre en sol sinon elle aurait acheté tout cela pour rien. Et la rondouillette n’était pas tellement du genre à gaspiller.

Bêche en main, la française entama de retourner la terre sur une ligne qu’elle avait préalablement tracé à l’aide d’un cordeau. La terre était assez lourde, pesant son poids sur l’outil de jardin à cause des pluies qui avaient balayé les jours précédents. Mais la jeune femme savait ménager son dos dans ce genre de situation, lui évitant une forte douleur le soir venant. Terre retournée, Lucie devait maintenant passer un premier coup de binette afin de casser les grosses mottes pour rendre plus facile les plantations de ses pieds de courgettes. De cette manière, elle traçait aussi un sillon, légèrement surélevé. À l’aide du plantoir, elle s’activait à creuser des trous, bien espacés pour les futurs pieds de légumes. Un plant à côté de chaque trou prédéfini, Lucie n’avait qu’à les enfoncer dans la terre, et ensuite arroser le tout.

Alors qu’elle était accroupie pour planter son premier pied de courgette, les mains pleines de terre, Lucie entendit quelque chose approcher. Ou plutôt, quelqu’un. Aux bordures du potager, se tenait là une jeune homme, probablement un lycéen, à vue d’œil, de la taille de la rondouillette. Se redressant doucement, elle se frotta les mains l’une contre l’autre, histoire d’enlever le maximum de résidus terreux sur sa peau. Elle écouta attentivement le jeune inconnu. Apparemment, il s’était aventuré hors des chantiers battus et était tombé sur la maison de la française. Il s’excusait d’être rentré sans permission, et cela fit sourire la jeune femme. Lucie n’était pas du genre à refouler les personnes qui s’aventuraient par chez elle, volontairement ou par simple mégarde. Quand le jeune homme ajouta qu’il s’était perdu en cherchant un endroit où dessiner, la rouquine ne put répliquer que ceci.

- Faites à votre guise. Je ne vais pas empêcher un artiste de faire ce qui lui plaît le plus. Promenez-vous dans ma propriété si vous le souhaitez. Le jardin est très grand, et très calme aussi. Enfin, il y a les bêtes qui braillent parfois, mais ce n’est pas méchant. En tout cas, le fait que vous soyez ici est très loin de me déranger !

Lucie lui offrit un joli sourire chaleureux. S’il le voulait même, il pouvait rentrer dans la grange et voir les animaux qui passaient la journée à l’ombre, à l’abri de la chaleur dans la bâtisse. Ah oui, et avant de se remettre à ses pieds de courgettes rondes, le jeune homme proposa de l’aider aux plantations pour se faire pardonner.

- Vous faire pardonner de quoi ? Vous n’avez rien fait de mal, enfin. Mais si vous le voulez, venez…

Jardiner mais seulement à condition qu’il ne se sente pas obliger. Parce que bon, à l’origine, ce jeune homme était venu là, par hasard, pour trouver un coin où dessiner. Et pas pour faire le boulot à la place de Lucie. Pour sa part, la française alla se placer devant un autre plant de légumes, pressant la motte légèrement défaite par ses soins, avant de l’enfoncer dans le trou déjà fait, ramenant de la terre bien au niveau de la tige, sans trop tasser.