Un bien drôle d'homme [Batman]

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1 : Mythilène, chaman
2 : Léda, chaman
3 : Danaé, guerrière

« Mieux que cela, ma sœur ! »

Danaé esquissa un léger sourire. Assise sous sa souche d’arbre, elle croquait distraitement dans une pomme, utilisant l’ombre des feuilles pour se mettre à l’abri du soleil, qui tapait plus fort dans cette vaste forêt. Son peuple y bivouaquait depuis maintenant plusieurs semaines, et le départ était imminent. Les Amazones ne restaient jamais bien longtemps au même route. Elles étaient un peuple de nomades, des femmes guerrières  qui n’avaient nulle ville pour les accueillir, et se contentaient d’avancer. Cet arrêt de quelques semaines avait été rendu nécessaire pour plusieurs raisons : d’une part, les récentes femmes qui serviraient à donner naissance à de fières Amazones étaient épuisées. Il est vrai que le peuple venait de traverser une épaisse chaîne de montagnes, et que gravir les monts était toujours fatigant ; d’autre part, on manquait de ressources pour nourrir le peuple, et Andromaque avait donc décidé de s’implanter dans cette forêt, afin d’aller se ressourcer auprès des autochtones locaux. Des fermiers terrorisés et minables qui, quand ils avaient vu ces fières guerrières débarquer, avaient hésité entre devenir leurs esclaves ou craindre un pillage. Il n’y aurait eu aucune gloire à massacrer de tels gueux. Les Amazones aimaient le combat, pas les carnages inutiles !

Pendant ce temps, la plupart des Amazones s’entretenaient, et c’était précisément le cas de Léda et de Mythilène. Si la seconde était l’une des plus puissantes magiciennes du clan, la première, en revanche, l’était moins, tout en l’étant plus. Léda était l’élève de Mythilène, et cette dernière lui apprenait à manipuler plusieurs sorts magiques en même temps. Danaé, elle, les observait, à défaut d’avoir autre chose à faire. Elles s’étaient éloignées du camp principal, de manière à éviter d’être sélectionnées pour être de garde afin de surveiller les enfants et les femmes ouvrières.

« Contrôler cinq sorts élémentaires en même temps n’est pas chose aisée, ma sœur ! riposta Léda.
 -  Tu en as les capacités, Léda, rétorqua rapidement Mythilène. Si tu avais un peu plus confiance en tes capacités magiques, tu pourrais même me surpasser.
 -  Ne dis pas de bêtises pour m’encourager, je ne touche guère à la flatterie ! »

Léda, comme la plupart des Amazones, était née dans la caste ouvrière, de la part de ces filles que les Amazones capturaient ou récupéraient, et enfantaient pour avoir de la chair fraîche. L’ancienne esclave avait des affinités magiques, mais sa fille, par un quelconque miracle de la Nature, s’était révélée douée d’une capacité magique bien plus élevée que sa mère. Ceci expliquait pourquoi Mythilène l’avait pris sous son aile.  Elle apprenait à Léda un exercice magique visiblement difficile : utiliser simultanément plusieurs sorts magiques de nature différente. Pour cela, chacun des doigts de Léda laissait s’échapper une petite boule magique, correspondant à un sort élémentaire concentré, et elle devait réussir à en faire plusieurs, ce qui nécessitait une grande concentration, et une grande maîtrise des arcanes magiques.

A dire vrai, Danaé aurait préféré aller chasser du monstre, mais les chasseresses avaient déjà été désignées. C’était sa pause avant d’aller s’entraîner, pour ainsi dire.

Un mal de crâne l’avait assailli, une lumière aveuglante et voilà qu’il s’était retrouvé en extérieur dans un endroit dont il ignorait tout. Et encore et toujours ce même rire qui résonnait en écho à ses oreilles, ricanement débile et infâme de son ennemi juré. La douleur lancinait ses tempes alors qu’en lieu et place de l’obscurité totale, il avait affaire à cette nuit aimable qui se voulait chaleureuse et claire. Agression permanente de ses prunelles alors que la chauve-souris titubait dans ses sous-bois. Un pas, puis un autre, elle avançait, seule, et livrée à elle-même. Une nouvelle illusion ? Un quelconque gaz ? Une autre manipulation du joker ? Bientôt, lasse, la haute silhouette s’effondra dans un des buissons. Ses mains fébriles s’activèrent pour retirer son masque, la tiédeur de la nuit sur son visage se fit sentir alors qu’il respirait plus facilement.

Tout était allé si vite….Leur poursuite dans leur usine de traitement, leur empoignade…. « Bye…Bye Batou ! » Et on lui avait fait traversé une porte…Un portail…Et voilà qu’il se retrouvait au fin fond d’on ne sait où…

 Bientôt, après de longues minutes, il se rendit compte qu’il n’était pas seul. A proximité, du bruit…Des silhouettes.. Aucun doute possible, des sbires du Joker lancés à sa poursuite. Péniblement, il se redressa de sa couche, remettant tant bien que mal son masque pour faire face à ses nouveaux ennemis. Se faufilant dans le bosquet sans un bruit, déjà il bondissait tant bien que mal sur l’un de ses « assaillants ». Mais alors  qu’il maintenait au sol, fermement l’une des enchanteresses, sa bouche s’ouvrit de surprise alors qu’il lâchait de sa voix gutturale… « Une femme ?! » Ecrasée sous son poids, ses mains enserrant ses épaules, il demeura l’espace d’un instant sous le choc mais déjà, les autres silhouettes se rapprochaient et d’une esquive, il libéra la femme en partie dénudée qui était sous sa haute stature, reportant déjà son attention sur les autres.

« Des femmes ? Vous êtes les nouveaux sbires du Joker ? Son dernier tour ? Sa dernière plaisanterie ? Où suis-je ? Qui êtes-vous ? Allez-vous donc me dire ce qui se passe ici ? »

Tant de questions et si peu de réponses, trois adversaires en perspective, trois femmes…Qui sait ce qu’elles seront capables…

Danaé était en train de manger une pomme, et c’est sans doute ce qui expliqua pourquoi elle traîna tant à réagir. Entre les entraînements des deux magiciennes, il était difficile d’entendre des bruits de pas, et elle ne réagit vraiment que quand Léna pousse un cri de panique, et que Mythilène se retrouve au sol, une sorte de troll noirâtre sur le corps. Elle se releva rapidement, abandonnant sa pomme, et brandit son épée, se rapprochant rapidement, tandis que les mains de Léda se mirent à scintiller, transpirant d’une intense énergie magique. L’agresseur retourna Mythilène, dont le visage n’affichait nulle angoisse, et il sembla surpris. Il se mit à débiter des propos incohérents, mas les Amazones ne l’écoutèrent même pas. Il eut à peine le temps de se redresser et de parler que les doigts de Léda libérèrent une décharge électrique, fauchant de plein fouet le torse de l’inconnu. Heurté avec violence, ce dernier s’envola dans les airs, et s’écrasa contre un arbre, avant de tomber par terre.

« Encore en vie ? Par la Déesse, cet homme est résistant ! »

Se rapprochant d’avoir agi si tardivement, Léda s’apprêta à lancer une autre décharge, quand Mythilène leva la main, lui intimant de se calmer. Danaé, de son côté, se rapprochait prudemment de l’homme.

« Il vous a attaqué ! se justifia Léda. C’est un sacrilège qui mérite la mort !
 -  Sœur, cet homme est indéniablement fou. Vois son accoutrement, et la manière dont il tient des propos incohérents. Il est perdu, et paniqué.
 -  Mais... tenta de dire Léda.
 -  La Déesse nous interdit de tuer les faibles. Nous sommes des Amazones, ma sœur, pas de vulgaires guerriers masculins guidés par leurs hormones ! »

Danaé fit la moue. Elle avait sorti deux de ses lames, et poussa l’homme qui tentait de se relever, l’allongeant sur le dos, où elle glissa ses lames autour de son cou, une à gauche, l’autre à droite.

« Fais un seul geste, l’avertit Danaé, et, faible ou non, je te jure que tu rejoindras la Mère. Je ne crois pas que tu sois faible ; l’éclair aurait tué n’importe quel faible. »

C’était un argument convaincant, et Danaé ne plaisantait pas. Ses mains ne tremblaient pas, et elle lâcha, en regardant l’inconnu :

« Qui es-tu ? Et que signifie cette attaque ?
 -  Sans doute un amnésique... »

Les paroles de l’homme revenaient à l’esprit de Mythilène. Étant la plus expérimentée des trois, elle était aussi la plus calme, et s’avança vers Danaé et l’homme.

« Tu es devant les Amazones, petit homme costumé de manière étrange. Je m’appelle Myhtilène, et le fait d’avoir porté la main sur moi, ou sur n’importe quelle Amazone, est perçue par notre culture comme une offense susceptible de recevoir la mort immédiatement. »