Rubis regardait le jeune Blackardien se réchauffer en silence. Elle réfléchissait encore à la situation de ce dernier, venu d'un tout autre monde. Si la plupart des humains lui auraient rit au nez, l'auraient accusé de folie ou de démence, elle, cela la laissait rêveuse dans un sens. Les coutumes, les cultures, le mode de vie, les paysages. Difficile de se faire une idée réaliste en tête avec un seul individu à porter de main et, qui plus est, avec lequel vous n'avez échangé que peu de conversation. Ce n'étaient pas les questions qui lui manquaient, mais elle s'y refusa. La raison était simple, le questionner sur sa planète d'origine revenait à devoir faire de même. Cela aurait été la moindre des choses après tout et elle se doutait bien que Seto ne devait pas tout à fait la classer dans la race Humaine. Raison de plus donc, pour éviter d'emprunter cette voie de dialogue. Comme le débat dans sa tête était clos, elle reporta son attention sur le jeune homme. Le poêle semblait lui prodiguer la chaleur nécessaire à lui, et ses vêtements, afin d'éviter tout refroidissement par la suite. Tant mieux, elle pourrait donc repartir l'esprit tranquille.
-Pourquoi voulez-vous rester à l’écart de cette source de chaleur ? C’est étrange pour un être vivant … Vous aimez tant que cela le froid ?
Finement remarqué. Non plus sérieusement, elle l'attendait cette fameuse question bien qu'une partie de la réflexion de Seto pouvait se justifier au sens large. Etrange pour un être vivant? Non, pas tant que cela. Nombreux sont les animaux du nord qui se délectent des basses températures et du milieu polaire. Maintenant, peut-être que sur sa planète ce type de faune n'existait pas. D'ailleurs est-ce que l'hiver existait chez lui? Enfin. Rubis supposa qu'il avait voulu tourné sa question par "étrange pour un être humain". Elle choisit de lui répondre en fonction de cette hypothèse, s'asseyant dans la neige à la frontière de la ruelle là où la chaleur ne pouvait l'atteindre.
- Je suppose que cela se voit comme le nez au milieu du visage. Oui, j'adore le froid.
Néanmoins, Seto ne semblait pas au bout de ses théories sur le fait qu'elle se tienne à l'écart. Elle ne put retenir un petit rire lorsqu'il évoqua le fait qu'elle pouvait encore avoir peur de lui et que cela se justifiait par la distance qu'elle mettait entre eux en ce moment. Là encore, c'était un peu risible. Si, réellement, la moindre inquiétude résidait encore en elle à propos du Blackardien cela ferait longtemps qu'elle s'en serait allée. Elle aurait pu prendre congé au parc ou bien même ici, après avoir veillé à ce qu'il se soit réchauffé un minimum. Mais même si cela n'était pas une question de crainte, pourquoi restait-elle là au juste? A cette pensée, elle effaça son sourire, en proie à une interrogation pour le moins inhabituelle. Elle venait de s'en rendre compte, aucun motif plausible à son sens expliquait encore sa présence après du jeune homme. Elle qui n'avait nullement cherché à entrer avec autrui auparavant, elle se retrouvait à rester auprès de cet inconnu alors que rien ne la retenait. Alors pourquoi? La jeune femme réfléchit. Peut-être avait-elle besoin d'un peu de compagnie finalement? Les humains qualifient les différentes relations comme bénéfiques pour eux, souvent remèdes de coup au moral. La présence de Seto lui faisait-elle du bien indirectement? Le fait de parler avec lui simplement arrivait-il à lui faire sortir ses soucis de la tête? Peut-être après tout. La jeune femme avisa les tâches de sang présentes sur ses habits datant de son combat de l'après-midi. Son regard se rembrûma au souvenir de cet affrontement qui ne sortirait sans doute pas de ses pensées avant un moment. Il était vrai que le moral de Rubis n'était pas favorable avec ce qu'elle traversait pour l'instant. Pas vraiment heureuse depuis qu'elle avait attérit ici, la solitude était sa seule forme de compagnie. A vouloir en garder trop à l'intérieur d'elle-même, cela se refoulait parfois en surface de façon désagréable et pénalisante. Elle releva de nouveau les yeux vers Seto. Celui-ci la regardait toujours gentiment, attendant la réponse à sa question qu'elle n'avait pas encore donnée. Elle désapprouva doucement.
- Ne vous inquiétez pas, vous ne m'effrayez pas. Vous pouvez rester sur votre première idée.
La répulsion de chaleur donc. Elle n'avait pas besoin de lui en dire plus, c'était suffisament clair. Tournant la tête sur le côté, elle avisa une boule grelottant dans la neige. Plissant un peu les yeux pour y voir plus clair, elle put enfin reconnaître la silhouette d'un chat blanc, celui-ci semblait frigorifié. En y repensant, ils en avaient croisés quelques uns sur leur chemin, les pauvres félidés devaient avoir la vie dure avec ce climat. Retirant sa veste, la jeune ange alla saisir l'animal transit de froid au creux de celle-ci, revenant s'assoir ensuite à sa place de départ. A présent en T-shirt, ses ailes cachées par ce fin dessus, Rubis aurait pu paraître pour quelqu'un cherchant à se donner la mort avec ce temps hivernal. Elle se mit à frictionner le corps du félin avec les pans de sa veste, tentant de faire repartir le sang dans ses membres engourdis par le froid. Au bout de quelques minutes, le petit animal bougea les oreilles, puis le museau. Relevant ce dernier vers sa bienfaitrice, il dévoila deux yeux vert émeraude. La jeune femme songea que ceux-ci ressemblaient beaucoup à ceux de Seto. Une vingtaine de minutes défilèrent encore avant que le matou ne se redresse doucement sur ses pattes. Rassurée, Rubis le posa sur le chemin du poêle, ne pouvant l'y accompagner. Ayant retrouvé sa mobilité par les carresses reçues, le jeune chat ne se fit pas prier, allant s'installer à côté du jeune homme pour se réchauffer tout comme lui, jetant de temps en temps quelques coups d'oeils étonnés à la créature sans en avoir peur. Devant ce tableau, l'ange sourit. En y repensant, elle avait pris Seto pour un Terranide au début. Même Blackardien, de quel animal pouvait-il tirer ses attributs? Elle avisa les grandes oreilles noires qui s'échappait de sa chevelure qu'elle attribua plutôt du côté des Nekos mais en ce qui concernait la queue... scorpion peut-être?
Un léger baillement lui échappa. Fermant à demi les yeux sous la fatigue qui la prennait soudainement, elle leva les yeux vers le ciel nocturne. Elle détestait dormir, car son sommeil était toujours agité. Elle ne se sentait en sécurité nulle part et donc, dormait très peu. Juste le minimum pour ne pas tomber en pleine rue et avoir un tant sois peu d'énergie. Mais avec le poid que représentait son "meurtre" de tout à l'heure, sa nuit serait encore parsemée de cauchemards et de sueurs froides, elle le savait, mais elle n'avait déjà plus la force ni l'envie de se remettre debout. Soupirant lassement, elle ramena ses genoux à sa poitrine, luttant contre ce sommeil qu'elle redoutait à chaque coucher de soleil.