Depuis peu, Yllina avait la désagréable sensation d'être observée. Elle avait commencé par prendre ça comme un accès de paranoïa, mais la sensation avait persisté, tenace. La belle s'était donc mise à rechercher ce qui pouvait lui donner une telle impression. Pour cela, rien ne vaut la bonne vieille technique du reflet. Que ça soit en faisant semblant de regarder une vitrine, ou en consultant son portable, Yllina observait son entourage via le reflet dans la vitre ou l'écran, cherchant un élément suspect. Elle finit par remarquer qu'une personne revenait sans cesse dans son champ de vision. La jeune femme aurait pu tenter de l'approcher et d'en savoir plus, mais elle se méfiait, à la fois de qui il était et pourquoi la suivait-elle, mais aussi et surtout d'elle-même. Quand l'esprit se persuade de quelque-chose, il est facile de partir en erreur et de faire des fausses accusassions, ou de voir ce que l'on veut voir. Yllina repoussa donc ses envies de clarification et continua son manège pendant plusieurs jours. Et ses doutes devinrent des soupçons, ses soupçons devinrent des certitudes. Ne restait plus qu'à trouver un moyen de coincer le coupable.
Yllina avait sa petite idée sur comment procéder. Elle avait remarqué que l'inconnu avait tendance à la suivre partout. Aussi elle mit au point un stratagème pour le coincer. Stratagème qui commençait par demander de changer d'endroit. La belle se leva, paya sa consommation, et quitta le café. Après avoir fait quelques pas dans la rue, elle sortit son portable, comme pour consulter un message. En réalité, l'écran était toujours en veille, et Yllina vit dans le reflet son stalker sortir à son tour du café et la chercher du regard. Bien, la ligne était en place. La jeune femme changea de trottoir, puis de rue, ses pas la conduisant vers son "filet" : un karaoké. Après une dernière vérification sur son portable, histoire de s'assurer que le "poisson" était toujours appâté, Yllina entra et s'adressa à la réceptionniste.
" Bonjour mademoiselle. J'aimerai réserver une cabine pour deux, mon copain ne va pas tarder à me rejoindre. Cela vous ennuierait-il de le guider à son arrivée, s'il vous plait ? "
Yllina enchaina ensuite sur une description de son "copain", à savoir le stalker, puis se laissa guider jusqu'à la cabine. Elle s'installa confortablement sur l'un des canapés, et délaissa le micro : quelqu'un d'autre allait "chanter", et dans pas très longtemps...