Noir. Sensation de malaise, d’être transportée, de ne pas pouvoir contrôler son environnement. Les lueurs, parfois, l’aveuglaient, au milieu de visages indistincts et stériles qui l’observaient. Peur, incompréhension. Les mots venaient dans tes oreilles et en ressortaient, tandis que tu plongeais dans le noir et en ressortait. Les machines clignotaient, émettant des bruits stridents, agressifs. Tu te voyais tourner la tête, légèrement, voyant des blouses blanches, des portes closes, des murs froids et gris, ternes et sinistres. Tes mains ? Tu ne les sentais plus, tout comme le reste de ton corps. Ta vision était flouée, tu t’absentais, filant dans les limbes de l’inconscient. Non, avais-tu envie de dire... Que me voulez-vous ? Que me faites-vous ? Mais rien n’arrivait à sortir de tes lèvres... Ou alors, tu ne l’entendais pas. Tes oreilles te donnaient l’impression d’être noyées derrière des voiles rendant impossible d’entendre quoi que ce soit. On te traînait, et tu voyais des fils électriques filer le long du plafond, formant comme de longs serpents rouillés te défiant. Rien à faire, et tu avais peur. Tu te débattais, jusqu’à arriver dans une salle.
Il y avait des instruments partout, des gens qui parlaient entre eux, te montrant leur dos. L’un d’eux se rapprocha de toi, et tu vis, par tes yeux effrayés, une seringue hypodermique apparaître dans sa main gantée. Elle se rapprochait de ton cou, comme le dard d’une guêpe prêt à te répandre son venin dans le corps... Tu te débattais, tirant vainement sur tes sangles., essayant d’écarter ta tête. Il n’y avait rien à faire. La seringue s’enfonça dfans ta nuque, et le poison se répandit, te faisant hurler.
«
NOOOOOOOOOOOOOOONNN !! »
Le hurlement rugit dans tout le studio quand Carol se releva d’un coup, en nage. Ce qui l’avait réveillé était le son strident du tramway, faisant trembler les murs frêles de son studio. Elle se releva, sortant de son lit, et se mit à marcher, rejoignant rapidement sa petite salle de bains, et se regarda dans le miroir. Son pouls battait follement dans sa poitrine, et elle fit tourner l’eau du robinet, s’aspergeant le visage d’eau fraîche. Elle avait terriblement chaud, sans pouvoir se l’expliquer, et elle haletait.
*
Qu’est-ce qui t’arrive, Carol ?! se demandait-elle en s’observant devant le miroir.
Est-ce que tu es en train de perdre la raison ?*
Le même cauchemar, en boucle et en boucle, revenant fréquemment depuis plusieurs jours... Chacun des agents opérationnels du SHIELD dotés de capacités paranormales voyaient souvent un psychiatre. Carol savait que son dossier psychologique était suivi, que ce soit à cause de ses problèmes d’alcool, ou ses antécédents avec l’armée... Et, pour ne rien arranger, voilà qu’elle était en train de cauchemarder sur quelque chose... Quelque chose qu’elle ne s’expliquait pas, mais qui était pourtant bien là. À chaque fois, elle se revoyait dans ce couloir noir, le corps sanglé, les bras et les jambes attachés. Elle avait beau tenté de se débattre, elle n’y arrivait pas, et elle revoyait l’homme avec cette seringue... Que signifiait ce rêve ? Comment l’interpréter ? Miss Marvel ne savait vraiment pas quoi en penser
Elle se regarda à nouveau devant le miroir, et soupira.
*
Il faut que je me trouve un nouveau taf’...*
Elle avait officiellement démissionné du boulot qu’elle faisait depuis qu’elle était à Seikusu : caissière dans une petite épicerie de quartier. Son patron était un raciste obèse, misogyne et xénophobe, qui était actuellement en procès contre une ancienne employée l’accusant de harcèlement sexuel. Il vomissait sur Carol autant qu’il avait envie de se la faire, la sous-payant. Avant que Rachel ne la retrouve, et qu’elle ne se décide à retourner au service du SHIELD, Rachel peinait à boucler ses fins de mois. Maintenant, l’argent commençait à s’accumuler dans son compte en banque, et elle envisageait très sérieusement de déménager, de quitter ce studio pourri pour un bel appartement au cœur de la ville... Ou près de la plage. Cependant, Carol ne voulait pas
que travailler pour le SHIELD. L’armée l’avait déjà trahi une fois, et elle ne tenait pas à refaire cette même erreur.
Carol avait vu la brochure en allant à l’agence de Seikusu se chargeant de l’emploi. Elle y avait trouvé un papier parlant d’une offre d’emploi dans un aérodrome privé, et le nom lui avait rappelé de lointains souvenirs. Le passé revenait la voir, et elle était convaincue que les visions qu’elle avait étaient des réminiscences... Il ne pouvait clairement pas s’agir d’un cauchemar issu de ses phobies.
«
Il faut que tu te calmes, Carol, se disait-elle, parlant à elle-même.
Ces rêves finiront bien par partir... »
C’est ce qu’elle espérait... Mais pas uniquement. Carol se retourna, délaissant sa salle de bains, et fila dans son lit, l’esprit embrumé par des pensées contradictoires. D’un côté, elle voudrait bien retrouver un cycle nocturne paisible, mais, de l’autre, elle voulait aussi réussir à mieux comprendre ces rêves... Car elle avait le sentiment que ces rêves voulaient dire quelque chose... Mais quoi ?
*
Je deviens folle...*
Le pire, c’est que c’était demain qu’elle avait rendez-vous à l’aérodrome… Ou ce matin, plutôt.
Macross Air... C’était le nom d’un aéroport privé situé près de Seikusu, dans la grande forêt entourant cette dernière. Un aéroport privé avec des petites pistes, le genre d’endroits que les gens allaient voir pour faire leurs baptêmes de l’air, ou se lancer dans des sauts en parachute. Et Macross... Ce nom lui avait dit quelque chose, et les souvenirs avaient afflué tandis que le conseiller chargé de l’aider à trouver un emploi lui expliquait calmement toutes les démarches à faire et les entreprises les plus susceptibles de correspondre à son profil.
Avant d’être Miss Marvel, une super-héroïne super-sexy capable d’absorber l’énergie et de voler à une vitesse supersonique, Carol avait été une pilote de l’US Navy... Une pilote douée, suffisamment talentueuse pour piloter les prototypes expérimentaux de l’armée, notamment ceux faits par Stark Industries. On ne devenait cependant pas pilote sans formation, et son entraînement avait été fait dans l’une des meilleures écoles d’aviation de l’armée américaine, l’United States Navy Figher Weapons School... Plus connue sous l’appellation «
Top Gun ». Une école mondialement connue depuis le fameux film avec Tom Cruise, un film qui avait bercé l’enfance de Carol. Les avions l’avaient toujours passionné depuis son enfance, et il suffisait parfois de peu de choses pour ça... Les enfants étaient tellement manipulables.
Elle avait été à Top Gun, et elle s’en était bien sortie... Si bien que l’US Navy l’avait accepté sans trop de difficultés. Et, pendant ces quelques années de formation, elle avait rencontré différentes personnes... Dont Kyle Macross. Le retrouver ici tenait du prodige, mais Carol était depuis longtemps convaincue que Seikusu devait exercer une sorte de magnétisme mondial amenant tous les individus de la planète à finir par s’y retrouver.
Pour l’occasion, Carol avait enfilé un
costume sobre et élégant à rayures, nouant ses longs cheveux en queue de cheval. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elle n’était pas très habituée à une telle tenue... Elle avait l’habitude des débardeurs, des treillis, ou de sa combinaison moulante. Cependant, il valait mieux faire bonne impression pour la première fois. Même si elle pouvait désormais voler par elle-même, elle devait bien admettre que se retrouver dans le cockpit d’un avion la démangeait... L’aviation, ça avait toujours été sa grande passion.
Il ne restait plus qu’à espérer qu’elle n’avait pas trop perdu en cours de route. Sa voiture filait le long de la route menant à l’aérodrome, partant à la rencontre de son passé... Pour le meilleur et pour le pire.