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La diplomatie du lit. [PV : Griselda Nadjela]

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Izar Myrrhe

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La diplomatie du lit. [PV : Griselda Nadjela]

dimanche 17 juillet 2022, 15:26:15

La diplomatie du lit.




À la faveur d’un allez-sans-retour au sein de la merveilleuse et très hospitalière Dictature d’Ashnard où tout un chacun était, nul n’en doutait sérieusement, un esclave de S. M. l’Empereur qui coiffait accessoirement le rôle de Conjurateur, invoquant créatures maudites et décharnés avides de se nourrir de cœurs battants. Mes nouvelles capacités en tant que Marchemonde me permettaient de voguer librement d’une réalité alternative à une autre, avec pour seul aiguillon : mon intérêt essentiellement égoïste. Je n’allais pas déguiser ma venue au sein de cette contrée chaotique sous des oripeaux de bienfaisance ; parlons crûment, je me rendais ici pour me remplir les poches, très médiocrement.

Fut un temps, j’avais travaillé au compte de grands magiciens versés dans quelques arts obscurs qui attachent peu d’intérêt à la moralité ; ce fut notamment le cas d’Arthas qui m’embaucha en tant qu’Ordonnateur général de la Non-Vie – un genre de grand intendant muni de pouvoirs exceptionnels afin de maintenir l’obéissance des macchabées devenus outils de guerre – au cours de sa campagne contre les Elfes de Quel’Thalas. Cette expérience déterminante – et opportune – fut l’occasion pour moi de consolider des connaissances acquises et d’en faire main-basse sur de nouvelles à multiples reprises, si bien qu’à défaut d’atteindre l’excellence tant convoitée, je me rapprochais pas à pas, à grandes enjambées dirais-je !, de mes ambitions personnelles.

Les guerres – et généralement, celles qui occasionnent de fortes pertes en vies – retiennent immédiatement mon intérêt. Aussi, la nouvelle selon laquelle un ancien Duché d’Ashnard, devenu la propriété d’une princesse froide comme un tombeau et commandant à des essaims de créatures folkloriques, fit plus ou moins sécession de ladite Autocratie tombait à point nommé dans mon sinistre agenda. Me voici chômeur à longue durée et éloigné de ma réalité ordinaire, je me devais donc d’assigner un nouveau but à mon existence de vampire mégalomane qui, tel un sangsue, se nourrissait du chaos.

J’arpentais alors les contrées d’Elfenard et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elles ressemblaient davantage à des champs de cahutes délabrés… Les rares habitants de la région me paraissaient terrorisés et peu enclins à considérer leur avenir sous un œil favorable ; certains même ne juraient que par un nom…

Un nom qui en bien des bouches avait le goût d’une injure…

Griselda !

On me fit une succincte description de la dame en question ; celle d’une ancienne putain à la solde d’un Seigneur sans foi ni loi ayant fait valoir son droit de cuissage, devenue paria de son propre village, et qui, après avoir été chassée en raison de son catinisme décomplexé, jugea bon de méditer une vengeance exemplaire en infligeant des souffrances inouïes à tous ces culs-terreux dont les têtes vides fournissaient d’amples terreaux aux racontars et aux ragots. Ironiquement, son coup d’éclat accréditait la véracité des rumeurs malveillantes qui salissent son nom – et la majorité des hères que j’eusse rencontrés ne la décrivaient qu’au moyen d’injures – dans le même registre avilissant décrit ci-dessus – et de malédictions, tout en déplorant la mollesse des forces d’intervention ashnardiennes de la région. Vaines étaient, pour ainsi dire, leurs exhortations à combattre cette terrible nuisance que faisait peser « la Grande Catin » et « son serpent de mauvais goût ».

 Je ne jugerai pas cette femme sur sa façon de disposer de son corps, ni sur ses mœurs. Je m’en contre-foutais. Je m’intéressais seulement aux bienfaits d’une possible collaboration entre elle et moi. Sa situation m’intéressait énormément. Je caressais l’espoir de me rendre chez elle, dans son repère, dans sa tanière de louve tyrannique ; les villageois eurent beau jeu de me dissuader, d’évoquer la dangerosité du personnage, de tenter de me convaincre d’attendre les troupes, je n’en fis rien et poursuivis mon bonhomme de chemin après avoir pris congé de mes hôtes, un couple d’aubergistes armés jusqu’aux dents.

Mes pas me conduisirent donc à Alfenard, le lieu du crime. Minuscule territoire comparativement à la taille du Désert du Crépuscule, il demeure un maillon essentiel dans le commerce avec les peuples du sable brûlant, qui occupe une position névralgique dans l’accès aux landes. Par le biais d’une requête apparemment fondée, je parvenais à atteindre sans encombre le palais de cette reine des péripatéticiennes décriée par les soldats ashnardiens, les voyageurs de passage et les paysans des campagnes aux alentours, en réclamant audience.

Et je n’y fis aucun mystère de mes intentions : je voulais constituer un vivier de mages noirs ici dans cette principauté et pour cela, j’avais besoin et d’un titre de propriété immobilière (pour construire ma future académie) et de fonds pour recruter de jeunes talents. Au détour d’une conférence, S. M. Griselda Nadjela fut instruite de mon appréciable curriculum vitae, mon précieux pedigree, et, pour ainsi dire, convaincue de mes aptitudes, elle m’avait garanti le pactole requis en vue d’ériger une somptueuse académie au cœur de sa capitale. La bougresse se révélait bonne cliente et un délice pour les yeux ; je lui concédais une croupe généreuse, une bouche pulpeuse propice aux fantasmes les plus dingues et des seins à faire pâlir d’envie le plus frêle des eunuques – et il ne fallut que quelques jours pour que je parvienne à glisser mon corps d’Apollon dans la chambre réginale, mettant à l’épreuve la véhémence de la Reine au cours de l’acte. Je lui reconnaissais un rien de hargne pour les choses de l’amour, si bien que mon dos fut couvert de nouveaux stigmates, témoignages de nos heures passées à goûter aux plaisirs de la chair.

Ce soir, j’en émergeais tout juste, par ailleurs. Relevant la tête en dehors des draps, je régalais la Reine d’un de mes sourires espiègles. « Eh bien, ma foi. Je dois, Votre Majesté, finalement admettre que vos sujets ont raison », annonçai-je tout de go, d’une voix ceci dit évasive, en gratifiant ma partenaire d’une ample caresse sur ses fesses superbement moulées. Sans doute l’ardeur du climat, qui exaspérait ses désirs sensuels, émoussant chez cette monarque du stupre au tempérament glacial la délicatesse, la pudeur, la propreté qui préservent la femme ordinaire des habitudes et des contacts aussi torrides et licencieux. « Oui, oui, ils semblent se rapprocher de la vérité lorsqu’ils affirment que vous condamnerez à vous seule tous les bordels de votre Duché à la ruine », conclus-je en me mordant les lèvres de provocation, ponctuant ultimement mes propos d’une ample fessée sur la croupe réginale. Je me relevais alors de mon séant pour me rediriger vers une table où étaient disposés deux verres et une large coupe de vin. « Enfin, passons. Quelles sont les affaires du jour ? En quoi consistent vos projets géniaux afin d’assurer l’avenir de votre principauté ? » demandai-je en versant le précieux liquide vermeille dans les deux verres.
« Modifié: dimanche 17 juillet 2022, 15:36:24 par Izar Myrrhe »

Griselda Nadjela

Créature

Re : La diplomatie du lit. [PV : Griselda Nadjela]

Réponse 1 mercredi 20 juillet 2022, 00:52:05

Les hautes murailles de la forteresse se dressaient devant eux.

Ils venaient de déboucher à la lisière des bois et un spectacle de désolation absolue s'offrait à leurs yeux. Sur plusieurs lieues, nul arbre, pas la moindre végétation, une plaine de roches arides et brûlées s'étendait devant eux. Au bout de ces terres mortes, le tumulte d'un torrent, aussi large qu’infranchissable mais qu'enjambait un impressionnant pont de pierres, plus loin encore les murailles de la forteresse et les lourdes portes d'acier qui en interdisaient l'accès.

La forteresse s'élevait, taillée dans la montagne, sertie de tours, de remparts, de chausses trappes. Les plus anciens parmi les guerriers la connaissaient bien. Ils s'y étaient cassés les dents durant de longs mois, sans jamais pouvoir en venir à bout. Nulle machinerie, nulle attaque n'avait pu faire céder ces épais remparts. Nombre de guerriers avaient laissé leurs vies sous les flèches des défenseurs ou broyés par de lourds rochers, lancés du haut des tours.

Ils fixaient cette masse sombre avec appréhension, tandis qu'ils s'alignaient en formation d'attaque dans la plaine. Les plus aguerries quêtaient sur le visage du seigneur Miller un signe qui leur eut permis de comprendre ce qu'il attendait d'eux. Mais rien ne transparaissait. Posté au milieu des portes étendards, entouré par les soieries flamboyantes qui flottaient au vent, il se tenait, silencieux, les yeux rivés à la forteresse. C'était folie de s'avancer ainsi sur la plaine, tous étaient unanimes sur ce point au moins ; ils étaient à découverts, sans machine de guerre, pas la moindre tour d'assaut, pas de baliste, pas même un bélier pour attaquer la porte. Ils s'étaient mis en formation, rangés en bataillon, armes au poing et avançaient sur le sol calciné, le couvert des arbres s'éloignant de plus en plus : ils seraient bientôt à la merci des assauts des Alfeniens. L'évocation de ces monstres faisait passer des frissons dans le dos des soldats.

Des rumeurs faisaient état de soldats monstrueux, les plus gros que l'on avait jamais vus. Recouverts d'une armure quasiment indestructible, ils étaient capables de magies et pouvaient déchaîner un océan de flammes sur leur passage, les flèches n'entamaient même pas leurs lourdes protections. Les guerriers d’Ashnard avançaient néanmoins vers la forteresse, suivant Miller, le guide et le plus sage des Général que la Cité Noire n'eut jamais connu. Ils le suivraient, même s'il devait les emmener à la mort. À ses côtés, ce serait une mort honorable. Nul ne connaissait son plan. Au dernier moment, il envoyait des messages auprès des chefs de troupes, pour donner ses ordres. On disait que même son fils, avec qui il semblait avoir une discussion animée, ne savait rien de ses projets.

Griselda se tenait sur le premier rempart et observait la ligne que formait l'armée dans la plaine. Qu'espérait donc cet imbécile de Miller ? L'impressionner avec l'étalage de son armée ? Lui faire peur ? La pousser à se rendre pour éviter la confrontation ? Ses yeux se portèrent sur la grande cour intérieure du château où ses guerriers trépignaient d'impatience. Près de dix milles fanatiques assoiffés de sang se préparaient à jaillir des sous-sols pour se lancer sur les pathétiques guerriers d'Ashnard. Elle sourit doucement. Peut-être n'auraient-ils pas même besoin de se battre. Elle fit un signe de la tête à son aide de camp qui agita un étendard rouge. Un grondement sourd se fit entendre alors que les dragonniers prenaient leur envol depuis les hautes tours de la forteresse. Ils étaient impressionnants, noirs comme l'enfer, cuirassés et grondants. Leur vol était lent et majestueux tandis qu'ils avançaient vers l'armée ennemie. Griselda sourit. Ils n'auraient pas le temps de rejoindre le couvert des arbres avant que les dragonniers ne soient sur eux. Ce soir, la plaine sentirait la chair rôtie.

Et tout s’embrasa.

Dans un cri, Griselda se réveilla tremblante et en sueur.

Un cauchemar, un de plus.  Ce n’était pas comme ça qu’elle était et pourtant les gens la voyaient ainsi. Un monstre sans cœur. Peut-être l'était elle devenue.

Une jeune femme, sa dame de compagnie qui dormait dans la chambre voisine, vint alors précipitamment. Griselda l'avait trouvé au fond d'un cachot. Elle était l'un des jouets de l'ancien Seigneur. La jeune femme était l'une des rares personne à ne pas avoir été manipulée mentalement. Trop heureuse de sortir de son trou, elle était restée au service de Griselda en tant que secrétaire personnelle et cette dernière le lui rendait bien. La jeune femme, du nom de Calsiria, était une ancienne Noble et avait aussi apprit à lire et à écrire à sa nouvelle Maîtresse.

- Vous faites de plus en plus de cauchemars depuis votre retour. Je m’inquiète.

- Tout va bien, ce ne sont que des cauchemars, ils vont s’estomper avec le temps.

Du moins, elle l’espérait.

Le lendemain, elle reprit le court de sa vie et se retrouva, comme souvent, derrière un grand bureau où Calsiria posait divers missives qui réclamaient son attention. Une missive en particulier l’attira. Un homme souhaitait ardemment la rencontrer afin de faire construire une académie dans sa ville. C’était là une drôle d’idée. Pourquoi venir dans ce qui était, comparativement à Ashnard, un trou perdu ?

Elle consenti finalement à le recevoir. Elle devait avouer qu’il présentait bien. L’homme qui se dévoila avait un physique agréable à l’œil. L’homme était entièrement vêtu d'une tenue sombre à la coupe impeccable. Il s'avançait, souriant, grand, le visage anguleux, un front volontaire et un nez aquilin au-dessus duquel brillaient deux yeux clairs traversés d'éclairs. Il avait cette aura particulière que les êtres de la nuit ont, tout en ayant la grâce des elfes. Un métisse à n’en point douter. Outre son aura physique, Griselda décela la magie qui coulait dans ses veines. Sa tête bien faite était aussi bien remplie. Il sut rapidement convaincre la jeune Reine du bienfondé de son entreprise.

Soit. Elle accepta.

Rapidement, trop diront certains, l’homme qui se nommait Izar se rapprocha de la Reine jusqu’à rejoindre sa couche plusieurs fois par semaine. Les cris et gémissements qui parvenaient aux oreilles de ceux qui avaient l’impudence d’espionner les faits et gestes de leur Reine n’étaient que des preuves de sa compétence dans les arts érotiques.

Au moins depuis qu’il partageait ses nuits, elle n’avait plus de cauchemars.

Et c’est après un énième ébat endiablé qu’Izar se montra plus loquace qu'à l'accoutumée. Il tenta de flatter son égo en la complimentant sur sa manière de faire l'amour et puis il sembla s’intéresser à son emploi du temps.

Elle se leva en le suivant. D’un pas gracieux, elle se cola à lui, dans son dos, glissant sa dextre sur son épaule alors que sa consœur flattait sa taille. Sa main glissa le long de son bras et vint se saisir du verre rempli de vin tout en le gratifiant d’un baisé à la naissance de son cou. Et elle s’échappa, virevoltant presque, et bu une gorgé du nectar pourpre. Elle se laissa tomber, lascive mais élégante, sur le lit.

- Mes projets géniaux ? Si seulement tout cela pouvait être aussi simple.

Des plans elle en avait, mais ils étaient bien plus grand que ce qu’il pouvait imaginer. Son Maître lui avait fait part de son envie de conquérir Ashnard. Nul doute que ce ne serait pas simple mais Helel semblait confiant.

- Pourquoi tu t’intéresses à ça tout à coup ?

Ils couchaient ensemble mais de là à lui faire totalement confiance, elle n’en était pas certaine.

- Il me faut une armée plus importante…j’arrive à défendre mais si un jour je veux être apte à faire plus que défendre…je dois rendre Alfenard plus attrayante. Ce n’est pas tout les jours qu’un mage talentueux vient proposer ses services.

Malheureusement, la Reine qu’elle était très peu populaire. Des histoires saugrenues étaient lancées à son égard. Elle regardait son verre de vin en le faisant tourner légèrement. Elle était pensive mais se tira de sa torpeur cachant une fois de plus une fragilité qui lui semblait être une faiblesse.

- Toi qui viens de l’extérieur, qu’est ce qui t’as donné envie de venir ici ?
« Modifié: mercredi 20 juillet 2022, 14:44:06 par Griselda Nadjela »


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