Les Sœurs Disparues [Shaka]

Ce RP est la suite du RP « Le Glaive et le Lotus »

Flottant au-delà des nuages, au sommet de l’immense Mont Olympe, l’Olympe était un château qui, en le voyant, semblait briller de mille feux, ses magnifiques et innombrables tours reflétant la lumière du soleil. Le siège du pouvoir des Olympiens était assurément l’un des endroits les plus influents de Terra, abritant le tout-puissant panthéon grec. Diana s’y était rendue il y a quelques moi sen escaladant ce mont interminable, affrontant à cette occasion moult griffons, colosses, minotaures, harpies, et autres manticores. Un sacré voyage, qu’elle se rappelait encore douloureusement.

Cette fois, elle y allait en volant, accompagnée par un individu qu’elle avait rencontré plus bas, dans une cité en ruines, en pensant suivre une piste, alors qu’il s’agissait juste d’une épreuve lancée par Athena : se confronter à l’un de ses plus redoutables chevaliers... Shaka, le Chevalier d’Or de la Vierge, un homme qui avait mis Diana à rude épreuve, avant qu’elle ne réussisse à l’impressionner suffisamment pour qu’il se décide à coopérer avec elle. Leur quête était de retrouver les sœurs perdues de Diana, les Amazones de Themiscyra, celle de la Terre, qui avaient été attaquées et enlevées par un redoutable ennemi, un adversaire surpuissant ayant laissé Diana aux portes de la mort.

Athena avait assurément la mettre à l’épreuve en la confrontant au puissant Shaka, et Diana devait bien admettre que l’homme était costaud. Les Chevaliers d’Or n’avaient pas à démériter de leur réputation. Cependant, elle était encore amusée par le trouble que Shaka ressentait. Quand ils avaient quitté la cité en ruines, il s’était emmêlé les pinceaux en la décrivant comme une « charmante » compagnie, ce qui avait conduit l’Amazone à se dire que l’homme ne devait pas avoir spécialement l’habitude du contact féminin.

Diana se rapprocha donc, et se posa sur une terrasse semi-circulaire, surplombant des jardins, et faisant face à une grande ouverture donnant sur un impeccable couloir avec de grands rideaux et des alcôves dans les coins. Au fond de ce grand couloir, une épaisse statue d’Athena se dressait dans une rotonde.

« Nous y sommes... Le palais d’Athena. »

Diana s’aventura dans le couloir, ne voyant personne, et n’entendant que le léger sifflement du vent soulevant les plus proches rideaux de la sortie.

« Tu es revenue, Diana ? » demanda alors la voix d’Athena, semblant sortir tout droit du décor.

Or donc, en compagnie de Diana, Shaka, Chevalier d'Or de la Vierge, se dirigea vers l'Olympe. Si sa compagne avait utilisé sa faculté naturelle à voler dans les airs, le Saint avait utilisé ses pouvoirs de téléportation pour se rendre à destination, si bien qu'il était arrivé en premier, bien avant elle.

Parvenir jusqu'à cet endroit céleste n'avait pas représenté de difficultés particulières pour le serviteur d'Athéna : après tout, ne le considérait-on pas comme l'homme le plus proche des Dieux ? Il avait eu l'habitude, et ce depuis sa plus tendre enfance, à converser avec les habitants des plans supérieurs et avait même à quelques reprises posé le pied sur leurs domaines.

En attendant Diana, Shaka se mit à admirer les coupoles des palais, les flèches élégantes des tours, les colonnes et les frontons des temples... Les bâtiments ainsi que l'air ambiant baignaient dans une lumière dorée qui ajoutait à la splendeur et à la majesté des lieux un aspect irréel, béatifique.

Il ferma les yeux : il avait besoin de toute sa concentration pour ne pas se laisser emporter par la féérie de l'endroit ainsi que de ne pas se laisser troubler par la beauté de sa compagne qui venait juste d'arriver. En outre emmagasiner du Cosmos ne serait pas superflu dans les combats qui allaient certainement venir...

L'Amazone et le Chevalier d'Or marchèrent dans un couloir désert. D'ailleurs le reste de l'Olympe semblait vide, comme si les occupants s'étaient tous absentés. C'est alors qu'ils sentirent tous deux une présence familière puis une voix à la fois douce et énergique se fit entendre :

- Tu es revenue, Diana ?

Instinctivement, Shaka s'agenouilla devant Athéna, qui venait d'apparaître comme si elle était sortie du décor.

- Ô Déesse !... dit-il dans un souffle.

« Vous m’avez menti, Athéna...
 -  Je t’ai envoyé chercher un allié, rectifia-t-elle. Shaka est l’un de mes plus puissants Chevaliers, et tu auras besoin de lui pour retrouver tes sœurs disparues. »

On aurait pu reprocher à Diana son ton emporté, cette manière qu’elle avait d’accuser rapidement la Déesse, mais Athéna ne s’en choquerait guère. Contrairement à bien d’autres Olympiens, elle était une femme qui appréciait la franchise, et, par conséquent, détestait l’hypocrisie et les flagorneries. Elle invita donc rapidement Shaka à se relever, et se mit à marcher. Les couloirs au sein de l’Olympe étaient très grands, et très beaux, avec d’immenses voûtes, et de grosses statues en marbre le long des murs. Diana ne voyait personne, ce qui, en soi, ne voulait rien dire, car l’Olympe était un palais immensément vaste.

Le trio s’approcha d’une ouverture sur la droite donnant à de magnifiques jardins grecs, mais la Déesse avança encore devant. Diana savait qu’elle avait besoin d’aide, et, derrière ce reproche, elle en voulait surtout à Athéna de ne pas avoir été honnête avec elle. Et, puisqu’il s’agissait de franchise, Athéna le fut :

« À l’image du Sanctuaire, Themiscyra était l’une des dernières places fortes que nous, Olympiens, avons conservé sur Terre avant de reconstituer notre panthéon ici. Jadis, tous les panthéons s’étaient ligués pour repousser les menaces ancestrales... Themiscyra était l’héritage de ça. Vous, Amazones, aviez pour objectif de rester, et de défendre la Terre contre ces anciennes menaces. Or, vous avez disparu. Tu n’as pas été à la hauteur, Diana, alors, il me semble naturel de t’adjoindre l’aide de Shaka.
 -  De quelles menaces parlez-vous, Athéna ? Les Titans ? Hadès ? »

Un léger sourire traversa les lèvres d’Athéna, qui secoua la tête. Ses pas la guidèrent vers un couloir filant sur la gauche, qui conduisait à une sorte de grande pièce cylindrique.

« Non... Une menace bien différente des Titans, Diana. »

Se voulant énigmatique, Athéna leva la main, et des poussières dorées jaillirent de ses doigts, formant d’élégants filaments qui scintillèrent dans le vide, et formèrent deux phrases lapidaires, mais qui firent frissonner Diana :

« N'est pas mort ce qui à jamais dort
Et au long des siècles peut mourir même la mort »

Diana se pinça les lèvres.

« Les... Les Grands Anciens ? Mais... Ils sont morts !
 -  Morts ? Oh non, Diana... Ils ont été bannis en des temps immémoriaux, mais continuent à errer... Les gens qui ont attaqué Themiscyra n’étaient pas que de simples mercenaires, comme tu l’as compris. Tu as combattu leur leader, Diana, et cet être... La magie qu’il utilisait était similaire à celles des Grands Anciens, j’ai reconnu sa signature.  »

De nouvelles images se formèrent, montrant le combat terrible que Diana avait mené contre l’envahisseur, cet homme vêtu de rouge qui avait tué sa mère, et manqué la tuer, elle aussi.

« Alors... C’est un émissaire des Grands Anciens ?
 -  Je ne sais pas... Mais, ce que je sais, Diana, c’est que des ramifications importantes ont lieu sur Terre et sur Terra. Les Grands Anciens se réveillent, et, plus que jamais, les barrières qui empêchent ces créatures de revenir dans notre réalité s’atténuent. J’ignore ce que cela signifie, mais, si cet homme a attaqué les tiennes, c’était bien pour affaiblir la présence des Olympiens sur Terre, en nous privant de l’une de nos place-fortes ancestrales.
 -  Alors... Où sont-elles ?! »

Encore une fois, une nouvelle image se forma, et montra des monts escarpés et enneigés, effrayants. Diana vit des manticores, et les silhouettes massives et sinistres de dragons noirs, tournoyant autour d’une sorte d’immense et colossale tour, plantée au milieu de ces monts sauvages et dangereux, filant vers le ciel.

« On l’appelle la Tour Noire. Elle a été bâtie il y a des siècles, et, quand ceux qui t’ont attaqué sont partis, Diana, le Portail qu’ils ont utilisé est arrivé jusqu’ici. Cette tour était jadis le refuge d’un puissant mage noir, et, même maintenant, elle est encore habitée par des nécromanciens, et autres sorciers maléfiques puissants.
 -  Le mage qui a bâti cette tour est mort ?
 -  Je ne sais pas... Peut-être. Je n’ai pas beaucoup d’informations sur cette tour, elle se trouve dans un endroit très inhospitalier de Terra, et peu peuplé. Je sais que les fondations de cette tour s’enfoncent très profondément dans cette chaîne de montagnes, et qu’elle a, à son pied, une ancienne cité naine qui a servi à en poser les fondations. Si tu veux retrouver tes sœurs, Diana, alors, c’est par là qu’il faut commencer. »

Athéna invita Shaka à se relever puis le trio marcha à travers les couloirs du palais. Ce dernier était immense et leurs pas se répercutaient en écho à travers les corridors et les salles du bâtiment. Finalement ils s'arrêtèrent devant une fenêtre qui donnait sur un beau jardin orné d'ormes et de cyprès, arbres qui étaient devenus de plus en plus rares sur Terre, à cause de la pollution.

La Déesse prit la parole :

- À l’image du Sanctuaire, Themiscyra était l’une des dernières places fortes que nous, Olympiens, avons conservé sur Terre avant de reconstituer notre panthéon ici. Jadis, tous les panthéons s’étaient ligués pour repousser les menaces ancestrales... Themiscyra était l’héritage de ça. Vous, Amazones, aviez pour objectif de rester, et de défendre la Terre contre ces anciennes menaces. Or, vous avez disparu. Tu n’as pas été à la hauteur, Diana, alors, il me semble naturel de t’adjoindre l’aide de Shaka.

L'intéressé sentit le reproche dans le ton d'Athéna mais Diana ne releva point et lui demanda quelles menaces se profilaient à l'horizon. Ils continuèrent à marcher et finirent par aboutir dans une pièce circulaire. Là, la divinité fit apparaître dans l'air une poussière dorée qui se mirent à former des lettres et bientôt Diana et Shaka purent l'inscription suivante :

« N'est pas mort ce qui à jamais dort
Et au long des siècles peut mourir même la mort »

- Eh, mais je connais ça ! C'est dans les œuvres de Lovecraft ! dit le Chevalier d'Or qui s'empressa de renseigner ses deux interlocutrices sur la manière dont il connaissait le père de l'horreur contemporaine : mon mentor possédait une bibliothèque assez fournie. Outre les écrits ésotériques, comme le Baghavad Gita, les écrits de maître Eckhart, le Tao Te King, il y avait également des ouvrages plus profanes, tels des romans d'espionnage, de SF, d'heroic-fantasy, ainsi que des nouvelles de Lovecraft. Il y avait même des livres plus...

Il s'interrompit et se mit à rougir un peu : il ne voulait pas avouer aux deux immortelles qu'il avait lu en catimini quelques passages du Kama-Sutra ! Enfin bref, je connais un peu les Grands Anciens. Par contre ça veut dire que ces histoires n'étaient pas finalement de la fiction mais bel et bien la réalité ?...

La Déesse fit un nouveau geste de la main et bientôt apparut l'image d'un homme à la longue chevelure blonde, vêtu de rouge et dont le regard brillait d'une intelligence malveillante... S'ensuivit une conversation entre la Déesse et Diana, la première les informant que les Grands Anciens cherchaient par tous les moyens à briser le voile qui séparait leur monde de la Terre afin de l'envahir.

Puis la Déesse fit apparaître de nouveau une autre image : celle d'une tour à l'aspect peu engageant et qui rappelait à Shaka certaines illustrations qu'il avait vues sur Le Seigneur des Anneaux. Selon Athéna c'était là-bas qu'étaient emprisonnées les sœurs de Diana ou tout au moins qu'elle pourrait en savoir plus sur le sort qui leur avait été réservé.

Shaka prit la parole : je propose que nous partions sur le champ, Diana ! Plus nous tardons, plus tes sœurs souffriront de leur éventuel emprisonnement.

Une telle hâte chez le Chevalier d'Or de la Vierge avait de quoi étonner mais il en était ainsi avec les gens réfléchis : ils pouvaient se montrer très réactifs quand les circonstances l'exigeaient.

« La fiction et la réalité sont des notions qui sont plus proches qu’on ne le croit, Shaka. »

Diana resta silencieuse pendant quelques secondes, avant de prendre finalement la parole :

« C’est l’un des effets du Multivers. Là d’où je viens, il existait une vieille série de bandes dessinées, que mes amis adoraient lire quand ils étaient jeunes. Et, un jour, nous nous sommes retrouvés accidentellement projetés dans une dimension ressemblant trait pour trait à ce qu’ils avaient lu dans ces bandes dessinées. »

Une aventure qui avait littéralement explosé le Quatrième Mur, mais qui confirmait certaines théories autour du Multivers.

« Et, pour information, je connais aussi Lovecraft.
 -  C’est exact, Diana. Le Multivers, l’arbre infini des possibles, est comme un tronc commun, où chaque branche porterait sur elle un univers. »

Encore une fois, des images se formèrent devant eux. Même si Shaka avait désiré partir instamment, Athéna devait encore leur expliquer bien des choses. Un arbre se matérialisa devant elle, et Diana vit des branches pousser dans toutes les directions, avec des pommes brillantes sur les branches. Sauf que ces « pommes » étaient en réalité un Univers. L’une des pommes cosmiques tomba, et Diana put voir une multitude de points brillants dedans, des points si denses et si nombreux que, en voyant la pomme de loin, on pourrait croire qu’ils forment un tout unique. Mais, en se rapprochant mieux, on pouvait voir que chaque point ressemblait à des espèces de spirales brillantes, des galaxies.

« L’infinité du Multivers... Des infinités dans des infinités. Chaque Univers vit sa propre existence, séparée des autres, sauf pour quelques exceptions... Mais, pour autant, il existe aussi des interactions entre elle. Ce qui est une oeuvre de fiction dans un monde donné est une réalité dans un autre. De là réside une autre question, à laquelle même la Déesse de la Sagesse n’a pas la réponse. Qui créé l’autre ? Est-ce que c’est l’imaginaire d’un artiste, amplifié par la force de conviction et la capacité de croyance de ses lecteurs, qui créé un autre Univers ? Ou est-ce que l’imagination n’est, finalement, qu’un réceptacle d’images subliminales provenant des confins du Grand Cosmos ? Après tout, personne ne peut répondre à cette question... Qu’est-ce que l’imagination ? D’où vient notre capacité à imaginer des scènes ? »

Athéna se tut pendant quelques secondes, comme pour les laisser méditer sur ce qu’elle venait de dire. Sa question n’appelait pas vraiment de réponses, et elle s’avança ensuite. Il y avait, chez Athéna, quelque chose que Diana n’arrivait pas encore clairement à comprendre. On pouvait s’étonner de sa passivité quand la Déesse lui avait reproché d’avoir échoué à protéger Themiscyra, ou pourquoi elle avait envoyé sur elle un Chevalier d’Or.

« La Tour Noire est située dans l’une des régions les plus dangereuses de Terra, et proches de l’Olympe. Tu étais passée à proximité quand tu as rejoint le Mont Olympe de Terra, Diana... Les Malterres de la Discorde. La Tour est l’un des forts de cette grande région. »

Au centre des Malterres, on trouvait un château gigantesque, si grand qu’il abritait, en son sein, un second château : Château Discordia. La Tour Noire était à une autre partie des Malterres.

« Même pour un Chevalier d’Or, ce n’est pas une région à prendre à la légère, Shaka. Je vous conseille donc de passer une nuit ici. Vous allez devoir coopérer ensemble. Profitez-en pour vous familiariser, et pour parfaire vos techniques ensemble. »

Diana n’était pas contre cette idée, en réalité, qui lui permettrait aussi de se renseigner sur les Malterres.

« Et puis, nous devons encore nous reposer suite à notre combat dans les ruines. Autant rejoindre cette Tour en étant en pleine forme. »

Ou, comme le disait l’éternel proverbe... Prudence est mère de sûreté.

C’est l’un des effets du Multivers. Là d’où je viens, il existait une vieille série de bandes dessinées, que mes amis adoraient lire quand ils étaient jeunes. Et, un jour, nous nous sommes retrouvés accidentellement projetés dans une dimension ressemblant trait pour trait à ce qu’ils avaient lu dans ces bandes dessinées. dit Diana au Chevalier d'Or de la Vierge. Ce dernier émit un gloussement et dit d'une voix mi-amusée mi-perplexe :

- Moui, je ne sais pas vraiment si j'apprécierais de me retrouver dans une bande dessinée... Quoique tout dépend de la bande dessinée en question : cela ne me déplairait pas d'évoluer dans une des aventures d'Astérix ou encore des Schtroumpfs !

Il avait toujours aimé ces petits personnages bleus qui vivaient dans des maisons en forme de champignons et qui menaient une vie paisible et harmonieuse, jusqu'à ce qu'un élément féminin vienne en quelque sorte troubler cette quiétude.

La Déesse matérialisa l'image d'un arbre couvert de pommes brillantes. Un examen plus attentif leur montra qu'en réalité ces fruits étaient des univers. L'un d'entre eux tomba au sol et éclata en une myriade d'étoiles minuscules qui s'avéraient être des galaxies. Cela n'était pas nouveau pour Shaka : bon nombre Traditions représentaient le Monde, c'est à dire la totalité de la manifestation, sous forme d'un arbre ; l'exemple le plus connu étant Ygdrasill, l'arbre-monde des vikings.

Athéna entama ensuite un long monologue dans lequel elle parla de l'interaction de ces mondes entre eux et ce qui était qualifié de virtuel dans l'un était réel dans un autre. Cela souleva une question : d'où venaient ces univers ? Avaient-ils été crées par l'imagination d'un artiste ou d'un écrivain et avaient ainsi pris forme dans un quelconque recoin du Cosmos ?

Shaka secoua légèrement la tête : il ne faut pas confondre concevable et imaginable ! pensa-t-il. Mais il préféra garder cela pour lui.

Puis la divinité revint à un sujet plus terre à terre : la tour évoquée précédemment se trouvait dans une région de Terra appelée les Malterres de Discorde. Elle fit apparaître l'image d'une puissante forteresse qui se trouvait au centre de ce lieu au nom sinistre : le Château Discordia. Athéna mit en garde le Chevalier d'Or car, selon elle, cette région pourrait donner du fil à retordre à un être de sa trempe.

L'intéressé ne dit rien mais ne put s'empêcher de hausser un sourcil et de sourire : j'ai l'impression qu'elle me sous-estime... songea-t-il.

Finalement elle leur conseilla de se reposer un peu et de peaufiner leurs techniques. Diana approuva cette idée et Shaka hocha la tête pour marquer également son approbation. La Déesse s'éloigna d'un pas gracieux et le Chevalier d'Or s'inclina devant elle. Au bout de quelques secondes elle avait disparu et ils se retrouvèrent tous les deux seuls.

D'une impulsion, Shaka enleva son Armure Sacrée : les pièces la composant se détachèrent par enchantement, restèrent en suspension autour du corps du porteur pendant une seconde avant de se réassembler quelques mètres plus loin pour finir par former la forme-totem de la Cloth : une jeune femme portant des ailes dans le dos, priant à genoux, les yeux clos. C'était surtout son expression à la fois mélancolique et sereine qui frappait le plus et Shaka se souvint de la première fois qu'il l'avait vue : il avait ressenti comme une sorte d'absence en elle, comme si elle était détachée des contingences terrestres.

Sans son Armure, il était vêtu simplement d'une robe blanche et portait des sandales de cuir fin.

- Même si elle ne pèse presque rien, j'aime de temps à autre l'enlever pour me sentir plus à l'aise. Viens, je pense que ce jardin sera l'endroit idéal pour poursuivre notre conversation.

Ils s'assirent sur l'herbe qui était fraiche et douce au toucher. Shaka se mit en position du lotus, comme si cette posture était naturelle pour lui, et entama la conversation :

- Bien, apparemment tu as l'air d'en connaître suffisamment sur mon humble personne. Moi, en revanche, je ne sais pas grand chose sur toi, si ce n'est que tu es une Amazone et que tu cherches tes sœurs...

Athéna n'avait pas tort sur un point : mieux ne valait pas se lancer à l'aventure sans préparation. Qui plus est, même s'il n'en laissait rien paraître, il brûlait d'en savoir plus sur Diana. Intérêt purement amical à n'en point douter...

Après cette conversation sur le Multivers et sur l’infini des possibilités, le duo se retrouva dans le jardin. Shaka, en signe d’apaisement et d’amitié, avait retiré son armure. Cette dernière avait pris la forme d’une sorte de grosse boîte à l’effigie de la Vierge. Diana, qui n’avait encore jamais vu l’occasion de voir ça, resta silencieuse, admirative devant le talent de ces armures. Elle ignorait leur origine, mais était sûre qu’Athéna avait dû faire commande auprès d’Héphaïstos. Un tel ouvrage, un mélange si réussi de magie et de technologie, ne pouvait venir que des forges du célèbre Dieu-forgeron.

Traversant un couloir ouvert sur des jardins à gauche et à droite, les deux guerriers rejoignirent une petite place avec plusieurs arbres, et une fontaine. L’Olympe était un endroit très paisible, rappelant à Diana ce qu’elle avait perdu, son foyer, sa Themiscyra. Elle huma l’air frais qui se dégageait d’ici, tout en ne pouvant pas se départir de ce mauvais pressentiment qui la traversait, cette impression que quelque chose lui échappait… Puis Shaka l’invita à parler d’elle.

Le Chevalier s’était assis en prenant la forme du lotus. Elle, elle resta debout, croisant et décroisant les bras, tout en parlant :

« Comme tu as dû le comprendre, je viens de la Terre. Je suis la fille de la Reine Hippolyte. Mon peuple, les Amazones, vivait en isolation depuis des décennies sur Themiscyra. »

L’île, située au sein de la Méditerranée, le long des côtes grecques, avait été dissimulée des humains par la volonté des Dieux, afin de protéger Themiscyra et ses Amazones de la malfaisance des hommes. Un lieu figé dans le temps, où les Amazones avaient reçu le don de longévité, et avaient pu grandir hors de l’évolution du monde, jusqu’à ne devenir plus, qu’aux yeux des hommes, une légende.

« La légende disait que, pour me mettre au monde, Hippolyte avait passé la nuit à prier Zeus le long de la plage, en lui suppliant de me donner vie à partir d’une statue faite d’argile et de sable… Et, au petit matin, Zeus aurait entendu les prières de ma mère, et aurait été réveillée par les pleurs d’un bébé… Moi-même. Pendant longtemps, j’ai cru à ces légendes et à ces fadaises. »

Diana le disait avec amertume. Elle lui expliqua qu’elle avait quitté Themiscyra pour rejoindre la Terre, afin de faire face aux menaces la peuplant. De fait, Hippolyte était déjà partie avant elle sur Terre, devenant la première Wonder Woman, mais n’était pas restée longtemps. Elle était revenue sur Themiscyra pour gérer l’île, et il avait fallu attendre l’invasion de Darkseid sur Terre pour que sa fille, Diana, ne quitte l’île, et ne vienne prêter main-forte à d’autres super-héros pour repousser les forces d’Apokolips, donnant naissance à la Justice League.

Pour en revenir à Themiscyra, elle expliqua à Shaka que, en réalité, elle était née des suites d’une relation adultérine entre Zeus et Hippolyte.

« Surtout, au-delà de ça, j’ai appris que, traditionnellement, les Amazones procréaient en attaquant les navires qui passaient près de Themiscyra, violant et tuant ensuite les marins, les jetant à la mer, et coulant leurs bateaux. »

Derrière la légende dorée d’une île paradisiaque pleine de vertus, Diana avait vu le vernis se craqueler, se fissurer, révélant la noirceur qui se trouvait sur l’île et dans son peuple.

« Quand Héra a découvert que Zeus l’avait trompé, elle a transformé ma mère en pierre. Ensuite, je me suis retrouvée à différentes péripéties impliquant les Dieux, qui ont finalement amené à ce que je sois provisoirement Déesse de la Guerre, avant qu’Arès ne reprenne son titre, et, surtout, Reine des Amazones. »

Sa première décision avait été de mettre fin à l’isolement qui avait atteint Themiscyra.

« Les marins tués par mes sœurs avaient été récupérés par Héphaïstos. Je voulais ouvrir ma nation au reste du monde, et mettre fin aux pratiques barbares. J’ai donc amené des réfugiés masculins sur Themiscyra, et… Il y a eu un courant réactionnaire. »

D’autres Amazones, réactionnaires, menées par une vieille harpie, Derinoe, avaient attaqué les réfugiés, et les avaient massacrés. Diana avait dû intervenir, et avait rétabli l’ordre à Themiscyra.

« Et, alors que l’île se reconstruisait, nous avons été attaquées… Le reste, tu le connais. »

Diana le regarda ensuite, après ce long monologue :

« Maintenant, je vais retrouver mes sœurs, et reconstruire Themiscyra sur de nouvelles bases. Je ne veux plus qu’il y ait de légendes hypocrites, et que mon peuple prenne sa place légitime. Themiscyra était une utopie, et je veux qu’elle le redevienne, et qu’elle soit un phare de tolérance et d’amour qui éclairera le monde et les hommes sur ce qu’ils doivent faire. »

Et Diana ferait tout pour que les choses aillent en ce sens.

La dénommée Diana répondit à la sollicitation de Shaka quant à ses origines. Elle était la fille d'Hippolyte, reine des Amazones. Ces dernières vivaient sur une ile appelée Themiscyra. Pendant longtemps elle avait cru qu'elle était née grâce à Zeus qui avait donné vie à une effigie en argile représentant un nourrisson, et qui avait été façonnée par Hippolyte, alors qu'en réalité elle était tout simplement la fille du Roi des Dieux et de cette dernière.

Bah, ça n'a rien d'étonnant dans le fond : Zeus a eu plus d'enfants hors-mariage qu'avec son épouse Héra... pensa Shaka. Pour ce qui était de Themiscyra par contre, il avait toujours cru que ce n'était qu'une légende parmi tant d'autres de la Grèce Antique et découvrir que ce lieu existait bel et bien était assez étonnant en soi.

Diana évoqua d'autres noms, comme Darkseid ou encore la Justice League, qui était une sorte de confrérie de super-héros. Le Chevalier d'Or de la Vierge avait déjà entendu parler de ces êtres possédant des pouvoirs hors du commun alors qu'ils n'avaient jamais développé de Cosmos. Il se promit de demander plus de précisions à la guerrière mais pour l'instant, il se contentait d'écouter, hochant de temps à autre la tête, histoire qu'elle évite de croire qu'il s'était endormi...

La suite était plutôt macabre car les Amazones se reproduisaient en violant les marins qui avaient eu la malchance de passer trop près de l'île avec leur navire pour être ensuite exécutés. Quand la Reine des Dieux, Héra, avait découvert l'infidélité de son époux, elle avait changé Hippolyte en pierre ce qui avait amené Diana, suite à maintes péripéties, à se retrouver dans un premier temps Déesse de la Guerre, avant qu'Arès ne reprenne son titre, puis reine des Amazones.

Voulant rompre avec les traditions de l'île, Diana avait ouvert Themiscyra au reste du monde et avait accueilli des hommes, ce qui n'avait pas manqué de provoquer des frictions au seins des guerrières, créant ainsi deux camps antagonistes. Celui de Diana l'avait emporté mais l'île, théâtre des opérations, n'avait pas eu le temps de panser ses blessures que les Amazones survivantes ont dû faire face à une nouvelle menace.

- Maintenant, je vais retrouver mes sœurs, et reconstruire Themiscyra sur de nouvelles bases. Je ne veux plus qu’il y ait de légendes hypocrites, et que mon peuple prenne sa place légitime. Themiscyra était une utopie, et je veux qu’elle le redevienne, et qu’elle soit un phare de tolérance et d’amour qui éclairera le monde et les hommes sur ce qu’ils doivent faire.

Shaka garda le silence un long moment avant de répondre :

- Je souhaite de tout cœur que ton souhait se réalise bel... ma chère Diana et ma proposition de t'aider tient toujours. Maintenant, je vais te parler un peu de moi, car je pense que tu me connais surtout de réputation, et des évènements qui bouleversé le Sanctuaire il y a quelques années.

Il se morigéna intérieurement car il s'était aperçu que sa langue avait encore fourché. Bon sang mais qu'est ce qui m'arrive ?!. Il n'en entama pas moins son récit d'une voix égale :

- Même si je ne fais pas très "couleur locale", je suis originaire de l'Inde. Bien entendu mes parents sont occidentaux mais ils sont morts peu de temps après ma naissance. J'ai été recueilli par un ermite, un saint homme, qui m'a élevé comme si j'étais son propre fils. Vers l'âge de 6 ou 7 ans, j'ai été amené au Sanctuaire des Chevaliers Sacrés d'Athéna où j'ai reçu l'enseignement de Bahrât de la Vierge. C'est lui qui m'a tout appris : à extraire mon âme hors de mon corps afin qu'elle puisse parcourir les mondes et les dimensions - c'est ainsi que j'ai pu converser avec les Dieux, non seulement de ce monde mais d'autres mondes - à projeter mon Cosmos sur de longues distances, à méditer durant des heures entières, à ignorer la douleur, la faim et la soif...

Il passa sous silence les tentatives de son maître de l'initier au beau sexe : Bahrât était un excellent mentor mais il était un peu obsédé sexuel sur les bords. Il n'y avait qu'à voir les ouvrages sur différentes les positions sexuelles de sa bibliothèque pour s'en rendre compte.

- Quand j'ai endossé l'Armure d'Or de la Vierge, j'ai pensé, naïvement il faut bien le dire, que j'avais atteint le summum, l'Illumination, et que plus rien ne pourrait m'atteindre et que personne ne pourrait me vaincre. J'étais devenu arrogant, suffisant et je n'avais aucune compassion ; je me réfugiais derrière ma soi-disant sagesse, des formules creuses, pensant qu'il suffisait de se mettre en position du lotus et de méditer pour être parfait.
J'avais tort.
Un jour, des chevaliers de Bronze renégats ont entamé la montée des marches pour franchir les Douze Temples du Zodiaque. Comme la plupart des mes confrères, je pensais qu'ils s'étaient rebellés contre l'autorité du Grand Pope, trompés par les paroles mielleuses d'une gamine qui se faisait passer pour Athéna.
Le Temple de la Vierge aurait dû être leur tombeau car je me suis débarrassé sans trop de mal de trois d'entre eux - d'ailleurs j'avais du mal à comprendre comment ils avaient pu traverser les cinq premières Maisons - quand le Chevalier du Phénix est apparu...

Shaka se tut un moment, revivant cette journée avec précision comme si elle avait eu lieu la veille. Il raconta à Diana son combat contre Ikki, comment ce dernier avait survécu aux 6 Mondes de la Métempsycose, à ses attaques, revenant à chaque fois plus fort et plus puissant que jamais.

- Même son Armure, que j'avais réussi à détruire, était revenue à la vie, tel l'oiseau des légendes. Bien entendu il n'était qu'un simple Chevalier de Bronze et il ne pouvait pas me faire grand mal mais j'avais senti que la situation aurait pu s'éterniser, aussi ai-je utilisé mon arcane ultime, le Trésor du Ciel. Je n'ai pas besoin de t'en décrire les effets vu que tu les as vécu. Eh bien, même privé de ses cinq sens, il a réussi à me vaincre : pendant un court instant son Cosmos a dépassé le mien et nos corps se sont évaporés en milliards de particules.

Shaka se souvint de la panique qu'il avait ressenti à ce moment là, des paroles qu'il avait prononcé avant, arguant que la victoire d'Ikki n'avait aucun sens puisque lui-même allait perdre la vie.

- C'est alors que, tandis que nos deux âmes erraient à travers les dimensions, que pour la première fois de mon existence, j'ai commencé à douter. le sacrifice d'Ikki m'a aidé à me remettre en question, ainsi que ma fidélité envers le Grand Pope que je pensais être juste et bon. J'aurais pu revenir dans ce monde, recomposer mon corps et le réintégrer mais Ikki n'en était pas capable. J'ai donc contacté le Chevalier d'Or du Bélier qui, grâce à ses pouvoirs psychiques, nous a aidé à revenir sur Terre.
Peu de temps après, alors que le Phénix ait prêté main forte à Seiya de Pégase, nous, les Chevaliers d'Or, avons reçu un message télépathique du Vieux Maître, le Chevalier d'Or de la Balance, dernier survivant de la Guerre Sainte qui a eu lieu au 18° siècle, nous informant que le Grand Pope avait été tué il y a quelques années auparavant par le Chevalier d'Or des Gémeaux, Saga, qui a ensuite pris son identité et a tenté de tuer Athéna, sa réincarnation pour être plus précis, qui n'était encore qu'un bébé ; fort heureusement, elle a été sauvée in extremis par Aioros du Sagittaire.

A ce moment là, Shaka ouvrit les yeux et regarda l'Amazone avec intensité, le rouge empourprant ses joues :

- Je te laisse imaginer mon désarroi : je me targuais d'être le plus sage des 88 Chevaliers d'Athéna et je n'ai pas été fichu de voir l'imposture de Saga durant toutes ces années ! Bien sûr, il y avait eu des rumeurs étranges qui couraient sur lui, notamment la mort ou la disparition de certains de ses serviteurs personnels, mais je ne pouvais concevoir qu'un homme élu par les Dieux puisse être l'incarnation du Mal. Comme tu peux le voir, j'ai été aveuglé...

Le Chevalier d'Or baissa la tête, fixant un point imaginaire sur le sol herbu, avant de reprendre :

- Voila tu sais tout maintenant.

Après les explications de Diana, ce fut au tour de Shaka de parler. Le Chevalier d’Or de la Vierge, un étrange chevalier imprégné de philosophie hindoue… Qui aurait cru cela possible, de la part de chevaliers défendant une divinité grecque ? Il lui raconta son parcours, et surtout un épisode dont Diana avait vaguement entendu parler : une guerre intestinale au sein des Chevaliers d’Athéna, quand des Chevaliers de Bronze inexpérimentés avaient entrepris d’attaquer le Sanctuaire d’Athéna. L’autorité religieuse suprême locale, le Grand Pope, avait affirmé qu’ils étaient des traîtres emmenant avec eux une fausse réincarnation d’Athéna. Shaka avait affronté ces renégats, et avait trébuché face à Ikki, le Chevalier du Phénix, qui avait subi les mêmes attaques que Diana tantôt.

*Brrr, j’en frissonne rien qu’à y repenser !*

Ce combat avait été central pour Shaka, lui permettant de réaliser, d’une part, que le Grand Pope était le véritable traître, un Chevalier d’Or devenu fou, Saga, et, d’autre part, que sa sagesse l’avait aveuglé. Diana l’écouta silencieusement, et hocha doucement la tête.

« Je vois, Shaka. Ton parcours n’est pas dénué d’intérêt. En tout cas… Je crois que tu as expérimenté par toi-même la maxime de Socrate, Shaka… »

Diana avait eu l’occasion de longuement étudier la philosophie grecque à Themiscyra. La guerrière n’était pas destinée à être Reine pour rien, car, si Diana savait se battre, et excellait même plutôt dans ce domaine, elle était aussi une femme très sage et très avisée, ce qui expliquait sans doute pourquoi Athéna l’appréciait. Elle venait en tout cas de se relever, et compléta ensuite la phrase qu’elle avait laissé en suspens :

« …Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien. »

Une maxime qui s’appliquait plutôt bien au parcours de Shaka, selon Diana. Lui qui avait cru tout apprendre et s’était empêtré dans ses connaissances avait été vaincu, et avait découvert que, du haut de son perchoir, l’ennemi s’était gaussé de lui sous son nez. Toutefois, vu la manière dont Shaka avait abordé Diana tantôt, elle se demandait s’il avait vraiment compris la leçon ou pas… Puis elle sourit ensuite.

« Et… Tu passes tes journées à méditer en faisant la position du lotus ? Je me suis toujours demandée à quoi pouvait ressembler le quotidien d’un Chevalier d’Or… »

Quand Shaka eut terminé son récit, que Diana avait écouté sans l'interrompre une seule fois, l'Amazone hocha la tête en signe d'approbation et évoqua une célèbre maxime de Socrate "Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien" et qui s'appliquait à merveille, selon elle, au cheminement du Chevalier d'Or de la Vierge.

L'intéressé haussa un sourcil amusé : il n'était pas très calé en philosophie grecque, ayant plutôt reçu un un enseignement axé sur le Mahabharata, la Roue du Dharma, la vie de Bouddha, le zen, et ainsi de suite, mais il connaissait quand même ce personnage illustre de la Grèce Antique qui avait été forcé de se suicider en buvant de la cigüe.

Diana s'était levée pour prononcer cette phrase et, une fois de plus, Shaka ne put s'empêcher d'admirer les courbes parfaites de son corps, ses cuisses musclées, sa taille fine, ses seins fiers, sa chevelure d'ébène... Lui souriant chaleureusement, elle lui posa une question sur ses occupations :

- Et… Tu passes tes journées à méditer en faisant la position du lotus ? Je me suis toujours demandée à quoi pouvait ressembler le quotidien d’un Chevalier d’Or…
- Hum, finit-il par dire au bout d'un moment, effectivement je passe le plus clair de mon temps à méditer. Quand j'étais plus jeune, enfin moins âgé, je faisais souvent des sorties en astral : mon âme quittait mon corps afin de voyager à travers les contrées de la Terre mais également à travers les dimensions ; j'ai pu ainsi converser avec des divinités de toutes sortes, des entités dont l'aspect te dérouterait ou te terrifierait, voire même avec les morts. Ces sorties en astral ne sont pas sans danger : outre le fait qu'une entité animée d'intentions malveillantes - en général un démon - peut investir ton corps durant ton absence, il y a le danger que ton âme soit capturée, blessée, voire anéantie, ce qui signifie la mort purement et simplement, sans possibilité de réincarnation. Cependant, le danger le plus fréquent est que l'âme n'arrive pas à réintégrer son corps : dans ce cas elle flotte autour de son enveloppe de chair et la personne n'est ni morte ni vivante. Si tu te demandes pourquoi certaines personnes sont dans le coma, c'est que tout simplement leur âme a été séparée de leur corps, soit à cause d'une sortie en astral mal préparée, soit le plus souvent à cause d'un traumatisme.
Fort heureusement, grâce à l'enseignement que j'avais reçu, l'entraînement de mon mentor ainsi que la maîtrise des Septième et Huitième Sens, mes sorties en astral ne représentaient guère de dangers pour moi, mon âme étant protégée des multiples désagréments que peut rencontrer un voyageur astral. Ajoute à cela que mon Armure peut également se manifester dans le domaine spirituel, ce qui prouve qu'elle ne sont pas de simples protections physiques, et que durant mes sorties mon corps se trouvait dans le Temple de la Vierge, qui est un espace sacré, tout comme le reste du Sanctuaire d'ailleurs.

Il s'interrompit un court moment et reprit :

- Sinon, pour parler du quotidien d'un Chevalier d'Or, il faut savoir que la plupart du temps nous sommes assignés à résidence dans nos Maisons, surtout en cas d'invasion ou de Guerre Sainte et que nous sortons peu du Sanctuaire. Il peut nous arriver d'effectuer des missions à l'extérieur mais le plus souvent elles sont confiées à des Chevaliers de Bronze ou d'Argent ; pour qu'un membre de notre caste soit missionné, il faut vraiment que le danger soit conséquent... Sinon le Chevalier d'Or du Bélier possède une demeure quelque part dans l'Himalaya où il répare les Armures endommagées ; le Chevalier d'Or de la Balance, le Vieux Maître dont je t'ai parlé, reste au Cinq Pics en Chine, afin de s'assurer que les 108 Étoiles Maléfiques d'Hadès ne quittent pas leur prison terrestre érigée par Athéna durant la précédente Guerre Sainte. Je sais que le Scorpion, en période de paix, se rend souvent à San Francisco où il hum... s'amuse.

On pouvait sentir dans cette dernière phrase un ton de reproche. Le terme "s'amuser" était un euphémisme : Milo parcourait souvent les rues de San Francisco sur sa Harley Davidson, seul ou en compagnie d'autres bikers, trainait dans les bars, draguait dans les boites de nuit, provoquait des bagarres et finissait parfois la nuit au poste de police avec les poivrots et les prostituées, avec une gueule de bois plutôt carabinée... Même s'il désapprouvait ce comportement, Shaka devait bien admettre qu'il éprouvait une sorte d'attirance envers ce mode de vie qui permettait à Milo de se débarrasser, pour un temps du moins, de ses démons intérieurs.

« Donc... Vous ne résidez pas si souvent que ça dans vos temples respectifs, hein? Enfin... En ce qui me concerne, je n’ai pas encore eu l’occasion d’aller dans le Sanctuaire d’Athéna. Qui sait, tu me feras peut-être visiter un jour, mais j’ai cru comprendre que la région n’était pas très touristique. »

Le Sanctuaire se trouvait dans une région assez hostile en Grèce, dans des montagnes au nord d’Athènes. Originaire de Themiscyra, Diana connaissait plutôt bien la culture grecque, et avait souvent visité la Grèce, notamment Athènes, ou Sparte. La Grèce était un lieu chargé de légendes, un pays aussi beau que dangereux, avec ses lagons, ses magnifiques montagnes, ses forêts... Mais le Sanctuaire était plutôt bien dissimulé. Elle avait d’ailleurs cru comprendre qu’un voile divin recouvrait le Sanctuaire, le rendant assez invisible aux yeux des étrangers... Ce qui expliquait sans doute pourquoi Diana n’avait jamais pu s’y rendre.

*La même protection que bénéficiait Themiscyra...*

Mais, maintenant, les Olympiens avaient perdu de leur influence. L’Olympe ne se trouvait plus en Grèce, mais à Terra. Comme les Amazones de Themiscyra, les Chevaliers avaient perdu leur lien avec Athéna. Diana se déplaça donc un peu, regardant autour d’elle.

« Et donc, tu n’as aucun plaisir, Shaka ? Tu sais, quand j’ai quitté Themiscyra, je ne pensais qu’à me battre, à faire mon devoir, ce genre de choses... Je n’imaginai pas à un seul instant que la Terre pourrait m’apporter des sources de plaisir, bien au contraire. J’y ai découvert que ce que je prenais pour du sérieux n’était qu’un mélange d’arrogance et de peur. J’ai découvert que les Terriens ont des plaisirs simples mais non moins agréables, dont des choses merveilleuses que je n’aurai jamais imaginé sur Themiscyra. »

Sans être la fille d’Athéna, Diana semblait en tout cas partager avec cette Déesse sa sagesse et son amour des humains. De tous les Olympiens, Athéna était réputée pour être la plus proche des humains. Même si certains mythes mettaient en valeur sa vanité, comme le mythe d’Arachné, il était indéniable qu’elle n’était pas comme les autres.

« J’ai découvert les glaces... J’adore ça ! Ainsi que diverses autres choses. Ce que je veux dire, Shaka, c’est qu’il n’est peut-être pas très bon pour toi de toujours rester dans de grands palais vides à méditer. Enfin, je ne suis pas un Chevalier d’Or, bien sûr, mais tu gagnerais peut-être à te renseigner davantage, à enrichir ta culture. Voir des musées, des opéras, assister à des séances de théâtre... C’est ce que Confucius disait, non ? Pas trop d’isolement, pas trop de relations ; le juste milieu, voilà la sagesse. »