Jusqu'à présent, la journée avait été très calme. Smash n'avait pas eu grand chose à se mettre sous la dent et commençait à avoir faim. Elle avait néanmoins été prévoyante, choisissant de se promener avec une bouteille d'eau. En passant près de son ancien foyer, le passé lui était revenu en mémoire. Toutes ces disputes, ces moments de désaccords, tout ça n'avait plus aucune raison d'être mais retourner là-bas et juste saluer serait trop bizarre pour elle. Depuis sa fuite, elle avait beaucoup plus évolué qu'en quinze ans enfermée dans sa chambre à étudier des matières qui lui semblaient si futiles désormais. Oui, elle était moins cultivée que la moyenne des personnes de son âge mais qui s'en souciait au final ? Elle n'avait pas besoin de tout ça et pensait avoir réussi sa vie. Certes ce n'était pas ce qu'on rêvait pour elle mais c'était ce que Mashiko, la jeune fille en elle, désirait depuis longtemps. Elle était libre, elle pouvait bouger comme elle le voulait et n'avait pas à répondre de ses actes ni de ses sorties nocturnes. Elle avait quartier libre tous les jours et gérait ça beaucoup mieux que n'importe quel élève de son âge.
L'alcool, elle n'y touchait pas souvent, prenant juste une bière de temps en temps. Son temps de sommeil était toujours respecté. Il faut dire que sans emploi du temps réel, ce n'était pas trop compliqué pour elle de dormir tout son soûl. En fait, contrairement à ce que ses vieux lui disaient, elle vivait plutôt bien dans la rue et n'avait rien à voir avec ses mendiants dont on lui parlait. Lentement, elle leva une main et l'observa un moment, changeant parfois pour regarder son ancien foyer. Elle pensait que ses parents devaient certainement avoir une réponse à ce qui lui était arrivé. Peut-être qu'ils pourraient lui expliquer mais c'était encore incertain et elle ne tenait pas réellement à les revoir. Le soir où elle avait fuit, elle avait décidé de tout laisser derrière elle pour recommencer une nouvelle vie. Plus remplie, plus active et elle se plaisait dans ce mode de vie rejeté par la communauté de bien pensants. Finalement, elle laissa tomber et repartit. Ce n'était certainement pas le moment de ressortir les cadavres du placard.
La soirée tombait, les lampadaires s'éclairèrent et il commençait à y avoir un peu moins de monde dans les rues. Ce n'était pas calme pour autant, une grande ville comme Seikusu était toujours active et les prostituées commencèrent à s'aligner pour attirer les riches clients. Smash, elle, contrastait énormément avec ces filles de joie. Elle se baladait les mains dans les poches de son jean, veste ouverte et volant au vent accompagnée de ses courts cheveux. Après avoir discrètement dérobé une pâtisserie à un stand qui fermerait bientôt, elle s'écarta des rues et fit quelques tours dans les ruelles pour semer ses éventuels poursuivants. Une fois certaine de ne pas être suivie, elle déballa sa friandise et l'avalait. Une confiture avait été cachée dans ce pain et ça l'avait ravie. En cette soirée, beaucoup de choses pouvaient la revigorer. Et puis, elle entendit du bruit. Rien de tout ça ne l'étonnait, le ciel s'était obscurci et elle se trouvait dans le pire quartier de Seikusu, celui dans lequel elle même avait été agressée trois ans plus tôt, le soir où tout commença pour elle. Curieuse, elle s'approcha du coin de la ruelle et observa rapidement.
Elle y voyait un homme grand, costaud qui semblait agresser un autre type. La victime ne semblait pas en état de se battre, même pas capable de se défendre face à cette grande silhouette. Smash prit quelques instants à réfléchir. Elle n'avait rien à voir dans l'histoire, cette agression ne faisait pas partie de ses affaires mais, en même temps, cet homme imposant semblait être un adversaire impressionnant. Elle ne comptait pas tant agir pour sauver l'autre, ce n'était pas son genre mais plutôt se bouger pour la baston. Ça, c'était ce qu'elle voulait, ce qui la remettrait d'aplomb pour la semaine. Elle avait hésité car elle ne reconnaissait pas ce dominant malgré ses connaissances des gangs et autres mafias du coin. Finalement, l'appel de l'action avait été plus fort qu'elle et elle se montra.
- Hey le grand là. Ça ne te dirais pas de t'attaquer à quelqu'un de ta taille ?
Par réflexe de survie et par habitude de combat, elle était déjà en garde. Cette fois, elle allait se rebattre là où elle avait pris sa première dérouillée et comptait bien équilibrer le score. Cet inconnu n'avait aucun lien avec les deux premiers mais tant pis, il était là et elle était prête à en découdre avec lui désormais.