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« le: vendredi 23 mars 2012, 08:36:23 »
Alys le suivit sans faire d'histoires. A ce stade là de son amnésie, elle faisait confiance à la première personne qu'elle croisait. En l'occurence, Pierre. Il s'appelle comme ça, hein ? L'adolescente espérait que sa mémoire ne revienne pas jouer les emmerdeuses, la privant à nouveau de ces maigres repères. Elle commençait tout juste à se sentir à l'aise, rassurée ... Et elle se laissa emmener dans le laboratoire de chimie. Enfin, je vous avouerais qu'elle ignorait complétement à quoi servaient ces tubes transparentes, ces bocaux aux milles couleurs, toutes ces choses qu'elle entrevoyait. Ses yeux brillants oscultérent chaque objet de la pièce, avec cette moue caractéristique des enfants qui ne comprennent rien, mais alors rien, et puis qui préférerait faire une myriade de bêtises, tiens. Le simple fait qu'il jure qu'il ne regarderait pas donnait envie à la jeune fille d'en profiter. Tout d'abord, suivant ses directives, elle retira l'uniforme scolaire, et ses chaussures compensées, préférant conserver ses sous-vêtements, tout en chantonnant la musique qu'elle écoutait, plus tôt, dans les couloirs. Diable, qu'elle était petite ! Elle peinait à atteindre le métre 65. Une fois cette tenue trempée dégagée, elle chopa une blouse, bien trop grande mais tant pis, et ferma maladroitement les boutons. Comment disait ma grand-mère, déjà ... ? Ah oui, le vendredi avec le dimanche. Bref, c'était une anarchie compléte. Ses cheveux étaient toujours aussi oppulents, et elle avait conservée ses bracelets et les anneaux qu'elle portait à ses oreilles.
- Je te dirais quand j'aurais fini, d'accord, Chou ? ♫
Tic de langage assez étrange, ce " Chou ". Mais il lui épargnait le fait de devoir retenir tous les prénoms. Une fois prête, Alys vérifia qu'il ne regardait pas, et, chantonnant toujours comme une enfant, elle s'approcha des bocaux. Ils étaient bien beaux. Elle grimpa maladroitement - mais tout en silence - sur une des tables, pour venir s'agripper au rebords de l'étagére. Elle avait vu un joli bocal tout rose, là, au fond ...
Haha. Non, je vous jure, tout ne va pas se passer sans encombres. A l'instant même où elle approchait la main du bocal, perchée sur les pointes de ses pieds, une charmante araignée pointa le bout de son nez, et vint se poser sur la main d'Alys. Sa réaction ? Hurler comme une enfant - n'oubliez pas qu'elle ne sait plus ce qu'est une araignée mais que, dans l'instant même, elle trouvait cela laid et terrifiant - en s'agitant dans tous les sens. Ce qui eut effet de la faire vaciller, et, cherchant un appui pour ne pas s'étaler sur le sol, elle posa ses deux mains et tout son poids sur l'étagére. Mauvaise idée. Non seulement elle s'étala sur le sol, mais toute l'étagére avec elle, et ce dans un grincement sinistre. Et la petite araignée mourut, écrasée par le poids d'un bocal. L'adolescente n'eut même pas le temps de crier, joignant ses mains sur son visage pour éviter les chutes d'objets. Ici et là, des bocaux de verres se brisérent, couvrant la jeune fille de poudres et de liquides de toutes sortes. Une poudre rose, une jaune, une blanche qui devint bleu au contact de l'eau sur sa peau ... L'hécatombe. Et elle, elle n'osait guère remuer le petit doigt.