Le Grand Jeu - Forum RPG Hentai

Bonjour et bienvenue.

Ce forum présente des œuvres littéraires au caractère explicite et/ou sensible.
Pour ces raisons, il s'adresse à un public averti et est déconseillé aux moins de 18 ans.

En consultant ce site, vous certifiez ne pas être choqué par la nature de son contenu et vous assumez l'entière responsabilité de votre navigation.

Vous acceptez également le traitement automatisé de données et mentions légales de notre hébergeur.

Voir les derniers messages - Luxienne et Myriade

Nos partenaires :

Planete Sonic Reose Hybride Yuri-Academia L'Empire d'Argos Astrya Hybride Industry Iles Mystérieuses THIRDS Petites indécences entre amis
Inscrivez-vous

Voir les derniers messages

Cette section vous permet de consulter les contributions (messages, sujets et fichiers joints) d'un utilisateur. Vous ne pourrez voir que les contributions des zones auxquelles vous avez accès.


Messages - Luxienne et Myriade

Pages: [1] 2
1
« Nous n'avons aucun souci, les chambres ont été faite et pour le moment la plupart des chambres sont disponible, hormis celle de la jungle tropical qui est réservée par une cliente régulière. »

C'était une bonne chose. Luxienne avait choisie l'établissement pour son apparent professionnalisme, sa capacité à offrir, à toutes et à tous, même si cette deuxième partie était bien moins importante, un lieu de calme, de tranquillité, mais qui savait se maintenir, et se faire fort d'un confort éminent, qui n'avait que don de faire le plaisir des invités, et la fierté des hôtes. Et que de preuves en cet instant, alors même qu'elle laissait défiler sur le moniteur les différents parties de l'établissement, le florilège d'environnements différents, de plaisantes salles et d'installations plus ou moins nouvelles, plus ou moins spécifiques, mais seulement produite pour offrir un contentement maximale pour les éventuels occupants. Dans le fond, la directrice d'industrie se demandait bien pourquoi elle n'avait pas encore prit de vacances pour en profiter, c'était bien mal vue de sa part, car à peine se trouvait-elle dans les lieux, à faire le détails de son éventuelle chambrée, qu'elle se laissait aller à une légère pensée, celle qui lui disait que, dans le fond, elle s'était tant et tant épuisée parfois, alors qu'un simple séjour en ces lieux aurait eut tout don de la remettre d'aplomb en moins de temps qu'il n'en faut. Bon désormais il fallait juste qu'elle fasse un choix, et vu qu'elle était partie pour se trouver un domaine dépaysant, elle n'eut que peu d'occasion d'attendre. Ce fut bien sûrement sa conjointe qui eut plus de mal à prendre sa décision, peut-être parce qu'elle ne semblait pas avoir la même aisance que la dame aux cheveux bruns au niveau de son laisser-aller, mais finalement chacune put se permettre de donner une réponse claire, laissant dés lors à la directrice des lieux de faire son office.

« Sachez que le personnel est à votre entière disposition, tachez de faire attention cependant, chacun des employés ont leurs spécificités et en tant que dirigeante, je suis à leurs écoute en cas de soucis.
 -  Merci à vous, et ne vous en faites pas. Que ce soit Myriade ou moi-même, je ne vois pas comment nous pourrions faire de mal à autrui, et ne le souhaitons guère. »

Elle omettait de dire par là que Myriade était sûrement une personne suffisamment puissante pour raser le bâtiment tout entier, mais elle ne conservait que l'essentiel, le plus important, à savoir que sa chère et tendre n'avait tout simplement aucune raison d'agir telle une destructrice engeance, encore plus maintenant qu'elle se trouvait officialisée en tant que simple membre de la vie Tekhane, et que jamais, ô grand jamais, elle en ferait l'erreur d’apporter peine et souffrance aux personnes de bonne volonté. Alors bien sur, Luxienne avait comprit les avertissement de travers aussi, parce que Myriade se trouvant dans son dos, elle n'avait pas eut du tout l'occasion de remarquer le regard étrangement soutenu de sa conjointe envers la standardiste, et dans ce cas elle aurait sûrement trouver autre chose à dire. Rien de possessif en soi, mais une remarque qui se voulait en tout cas bien moins formel, bien plus détendue, une boutade peut-être ? De son coté Myriade avait compris le message, et ne sut rien faire d'autre que de détourner les yeux, laissant sa moitié continuer d'échanger avec la directrice le temps que les enregistrements soient produits par Subaru, et que cette dernière parvienne, malgré un ordre qui laissait entendre toute l'attention qu'elle portait à ses affaires et son travail, trouve les clés correspondantes aux chambres que les Tekhanes venaient de réserver. Ce fut assez court pour qu'elle ne se sente pas vraiment mal à l'aise, mais un brin trop long toutefois, ce qui fut suffisant pour qu'elle ne parvienne pas à cacher un léger rougissement quand elle regarda à nouveau Subaru lui tendre l'objet cuivré qui lui servira à entrer dans sa chambre temporaire.

« M-merci Subaru.
 -  Je serais ravie de vous montrer ce que cette ferme peut vous offrir, continua Mora, durant son échange avec l'aînée du duo. Vous pourrez même essayer des produits qui ne sont pas encore en vente. Concernant les bagages, nous avons deux personnes qui pourront vous les mettre. Din ! Jin ! Vous pouvez venir s'il vous plaît ? »

La surprise ne manqua pas de se faire quand les deux terranides approchèrent depuis le plafond. Il y avait quelque chose d'ophidien en elles, mais finalement, une fois plus proches, les détails ne manquèrent pas de laisser Luxienne les voir comme une espèce se plaçant bien plus du coté des lézard que des serpents, la peau écailleuse restant lisse, et leurs yeux n'ayant pas cette pupille si particulière d'éventuels cousins à langue fourchue. Les deux toutefois semblaient conserver un rythme plutôt détendu, enjoué même, et quand elles furent présentées, ce fut par la voix professionnelle de Moira, les deux ne prenant pas apparemment le risque de laisser leur nature frivole manquer au sérieux du bâtiment où elles travaillaient. Luxienne pouvait avouée être un brin intriguée par ces dernières, dans un terme purement scientifique, mais elle préféra se concentrer sur l'aspect social immédiat, et fit donc grand cas de différencier laquelle se trouvait être Din, et laquelle portait le nom de Jin, le mélange de ces derniers ne manquant pas de lui rappeler quelques vieux racontards sur d'incroyables créatures du désert à la puissance quasi-divine. Enfin, il n'y avait guère plus besoin de divagations, et c'est Myriade qui, pour la première fois, se rapprocha assez calmement pour écouter Mora, tandis que la femme la plus mûre ne manqua pas de se laisser porter par le ton légèrement fier de son hôte tandis qu'elle continuait ses rapides commentaires. Décidément, elles auront grande occasion d'échanger, surtout au vue du plaisir de chacune d'échanger en quelques circonstances que ce soit, mais pour l'instant, le plus important : les bagages.

« Si vous souhaitez, ses charmantes demoiselles peuvent s'occuper de vos bagages, ainsi que Subaru d'ailleurs. Je vous laisse le choix, après tout vous êtes nos invités et nous souhaitons que votre séjours soit des plus agréables possible.
 -  Je comprends, eh bien si l'une d'elle voudrais bien m'accompagner jusqu'à ma chambre que je puisse y ranger rapidement mes affaires, j'en serai ravie en effet, merci beaucoup.
 -  Et... Je n'oserais abuser de votre hospitalité, mais si mademoiselle Subaru pouvait me montrer la chambre, je serais plutôt rassurée. »

La différence de ton entre les deux femmes restait remarquable, mais dans le fond, l'une comme l'autre semblait accepter d'avoir une petite aide du service pour aller s'installer. Ceci fait, elles prirent leurs bagages, ou tout du moins une partie, et n'eurent dés lors qu'à se diriger en direction des chambres, pour pouvoir y déposer le tout de leurs affaires, et pouvoir enfin s'occuper de ce brin de dépaysement qu'elles étaient venue chercher.

2
Tekhos Metropolis / Re : Loin de ton monde tu attendras...
« le: mercredi 21 juin 2017, 03:37:34 »
Était-ce prévisible ? N'y avait-il pas, en ce monde, quelques principes qui laissent entendre que lorsqu'une personne à fait le choix de ne plus se défendre, il est normal de lui laisser le temps de s'exprimer, de faire face, de ne pas avoir à souffrir immédiatement de la loi du vainqueur, au moins de manière à s'informer de ce qui est en train de se dérouler, et, peut-être, de se préparer aux traitements auxquels on va devoir s'accorder bien malgré soi ? Myriade, en tout cas, n'y eut guère droit, que ce soit de par sa dangerosité relative, ou de la cruauté naturelle de celle qui s'en était prise à celle qu'elle aimait, mais sa reddition obtenue, la femme en face d'elle, celle qui se trouvait le plus dans les ombres, n'eut pas la patience suffisante, ou le manque de prudence, pour rester stoïque face à la demoiselle aux cheveux décolorés. Elle sortit une arme, quelque chose qui, en Tekhos, n'avait pour ainsi dire jamais exister, selon les connaissances de l'ancienne expérience, mais le tir qui vint se produire avec un bruit sourd ne fut pas pour lui plaire, non sans parler de la douleur aiguë qu'elle ressentit dés lors dans le sein gauche, percé par un lourd aiguillon dont l'extrémité se terminait par une petite vasque au liquide inquiétant. Le temps de réfléchir ? Non, l'élément était bien trop près du cœur, et vint directement se propager dans son être, qui avait le malheur d'absorber à une vitesse folle ce genre de produit. En quelques instants, son esprit lui parut soudainement fort embrumé, bien peu capable de ses primes capacités, tandis que son corps se fit soudain léger... Si léger...

Elle essaye de se déplacer, mais ses muscles n'ont même pas le minimum de force pour lui permettre de faire un pas assuré. Dans l'encadrement de la porte, elle parvient toutefois, dans un déséquilibre total, à s'approcher comme elle peut du salon, arrivant à faire le trajet du vestibule non sans grand mal, mais alors même qu'elle parvient à trouver la première pièce sous ses pas, elle se rend bien compte qu'elle n'aura même pas la capacité de rejoindre celle qu'elle aime, et ses tortionnaires, sa vision comme son corps semblant se relâcher dans un fourmillement étrange, et particulièrement désagréable. Ses muscles sont en coton, mais représentant tout de même un danger croissant, elle se fait attraper au milieu de son mouvement, alors qu'elle cherchait à accomplir un pas supplémentaire, et se retrouve à se rabattre mollement, sans forces, sur le corps de celle-là même qui lui a propulser la drogue avec son arme ridicule, incapable de lutter alors même qu'elle en a l'impérieux désir. Ses pensées sont confuses, mais elle garde en tête son objectif, elle lève d'ailleurs le bras comme elle peut, cherchant à lui donner l'élan suffisant pour tente de mettre un coup à l'ignoble qui est en train de la maintenir, mais se fait bien rapidement interrompre par la force d'une dame en pleine maîtrise de ses moyens. C'est aussi frustrant qu'humiliant, elle a passée sa vie à vouloir être une femme normal, et voilà qu'au moment cruciale où sa nature inhumaine aurait pu lui être utile, elle découvre avec quelle terrible inutilité elle se trouve une fois dénuée de sa nature puissante et vindicative... Les larmes lui viennent aux yeux alors qu'elle est forcée de les écouter, l'inconscience arrivant.

« On ce calme petite pute... Soit gentil et il ne sera fait aucun mal à Luxienne... je te le promet... chuuuut... voila... laisse toi aller... détend toi... »

Quelques secondes plus tard, et elle est au sol, yeux fermés, tête lourde. De sa fière défense, plus rien ne reste, et l’inconscience la poursuit longuement, bien au delà de sa ville natale...

. . . . .

--- Luxienne ---

Privée d'elle même. Difficile de donner une autre définition à cela, la femme se réveille alors même qu'elle ne comprend rien de ce qui l'environne, alors même qu'elle ne peu finalement savoir dans quel état elle se trouve, alors même qu'elle se demande encore si cela ne fait pas bien longtemps qu'elle est réveillée, et qu'elle ne s'en est rendue compte malheureuse que bien plus tard, à cause de son évidente cécité. A moins qu'elle ne rêve encore ? Ses derniers souvenirs sont flous, aurait-elle put imaginer tout cela ? Imaginer qu'une femme était parvenue à dépasser les sécurités Tekhane pour s'installer chez elle, et l'attendre avec une batterie d'hommes aux aguets, prêt à tout pour lui faire connaître des sévices qu'elle n'aurait put que haïr, avant de finalement l'endormir contre son gré, et lui faire elle ne savait quoi entre temps. L'étrangeté de ses souvenirs, cumuler à son état d'autarcie sensitive était quelque chose qui ne lui permettait pas de réfléchir, qui ne lui permettait pas de comprendre, qui ne lui offrait pas le moindre détail pour déduire, calculer, estimer, se permettre finalement de faire le vide dans son esprit, et de trouver le calme suffisant pour se relayer sur son arme la plus puissante, sa pensée. Perdue, et cherchant bien sur un moyen de se repérer, elle essaya de bouger, de donner une direction à son corps, mais elle découvre rapidement que le toucher est impacter par quelque chose qu'elle ne connaît pas, et son corps refuse de lui obéir, la laissant choir mollement quand elle tente quoi que ce soit, s’écroulant de manière terriblement ridicule sur un sol qu'elle ne put même pas goûter. Était-ce la mort ? Cela aurait put être envisageable, mais quelque chose restait en son âme pour lui signifier qu'elle était bien loin d'avoir atteint la fin de sa vie... une conviction sourde, qui s'exprimait par une peur étrange, celle d'être certaine qu'il ne s'agissait que du commencement de quelque chose...

Elle a mal... ça elle s'en rend compte, mais ce n'est pas l'élément qui la surprend le plus dans l'instant. Non, ce qui soudainement lui fait comprendre que contrairement à ce qu'elle pensait, elle ne se trouvait pas seule dans les lieux, c'est un passage dans ses cheveux, une main, quelque chose de rude, de calleux, d'épais qui vient la tirer de manière à la redresser sur ses genoux, la ramenant bien droite au sol, l'obligeant dés lors à ne plus bouger si elle ne souhaitait pas connaître à nouveau un traitement de ce genre. Car elle avait eut mal, terriblement mal, c'est comme si on l'avait attraper par le cou avec une pression déraisonnable pour la jeter sur ses jambes, et l'instruire ainsi de sa condition. Elle essaye de s'exprimer, mais se rend bien compte qu'elle ne peux pas bouger ses lèvres. Sa bouche est sèche, elle n'a sûrement pas dut pouvoir la fermer depuis de longues heures, car elle a l'impression que sa gorge n'a jamais été si douloureusement privée de la moindre humidification, au point où elle en souffre encore un peu plus, en essayant tant bien que mal de déglutir, n’osant forcer sur l'anneau de métal qui lui bloque les mâchoires. Mais alors même qu'elle essaye de faire preuve d'un brin de nature humaine, même privée de son ouïe, de sa vue, de son odorat... Elle sent quelque chose se glisser contre sa langue dénuée de salive, et comprend rapidement de quoi il s'agit, lui donnant immédiatement envie de vomir. Un sexe... Un homme était en train de l'amener à sucer une queue, contre son gré, et elle ne pouvait rien y faire. Elle est terrorisée, elle se sent coulisser sur ce membre malgré elle, comme si elle n'était qu'un jouet, et tout son être frémit de peur et de honte.

Quelle punition est-elle obligée de connaître ? Et pourquoi ? Ce truc ignoble lui rentre dans la gorge sans douceur, et si elle n'avait pas sur elle ce bandeau, les larmes d'un déagoût absolu rouleraient sûrement sur ses joues... Mais là, elle ne peux rien faire d'autre, et ne peux que se résigner... Malgré la honte, malgré la peur, malgré la peine...

. . . . .

--- Myriade ---

Si Luxienne subit sa déroute, Myriade subit son attente. Elle fut réveillée rapidement, sûrement bien plus tôt que beaucoup l'espérait, mais elle n'avait rien eut d'autre à faire qu'attendre. Attendre une présence, attendre une visite, attendre des réponses, car dans son état, elle avait bien du mal à comprendre ce qui était en train de lui arriver. Elle était en … en captivité, et le simple fait d'avoir pensée cela avait provoquée une large vague de panique en elle, une terreur sourde qu'elle n'avait put qu'exprimer qu'au travers de quelques mouvements de paniques, quelques actions déroutante de sauvagerie et de volonté libératrice, contre ses liens, ses menottes même plutôt mais aussi contre la salle dans laquelle elle se trouvait, ayant agit avec un semblant de folie. Les murs ? Ils portaient la trace de son sang quand elle s'était projetée dessus, cage comprise, mais son corps avait immédiatement résorbé les blessures, la laissant d'une pleine pureté au milieu de ces lieux inquiétants. Le sol ? Elle s'était esquintée le front dessus, elle avait cherché à l'abîmer, mais malheureusement, les quelques menues fissures qu'elle avait finalement provoquée n'avaient révélées qu'une sous-couche de métal, bien plus résistantes que ce qu'elle venait de briser. Son propre corps ? Durant sa rage, couverts par ses cris de haine et de panique, elle s'était démise deux fois l'épaule, et une fois le coude, avant que ceux-ci ne se replacent d'eux même. Elle était, finalement, habitée par une rage sans nom, celle-ci toutefois nourries par quelque chose de bien plus prenant, de bien plus terrible : une peur absolue, une crainte qu'elle avait toujours eut, celle de redevenir un rat de laboratoire, un triste cobaye, incapable de se défendre, incapable de vivre...

Le loquet de la porte la tira de son repos relatif. Après avoir lutter plusieurs heures, elle s'était écroulée bien malgré elle, essoufflée, et rien n'ayant sembler lui faire signe, elle s'était presque demander, un instant, si elle n'allait pas finir par mourir dans cet endroit, folle, perdue, incapable de reprendre le dessus sur l'être qu'elle avait autrefois été. Mais non la porte s'ouvrit, et elle se redressa un peu comme elle le pouvait, à moitié avachie sur le sol précédemment, pour voir entrer l'une des deux femmes de la soirée passée, celle qui ne lui avait pas tirée dessus, accompagné par une sorte de mastodonte, un homme d'une carrure monstrueuse, et dont la nudité fut loin de lui plaire, encore plus qu'elle avait eut le bon malheur de pouvoir voir que son propre corps n'était pas non plus couvert. Quelle terrible pensée cette machinatrice avait-elle put avoir, quelle horrible fantasme s'apprêtait-elle à perpétrer ? Elle ne vint rien dire, mais par contre, fut extrêmement attentive, encore plus maintenant que, bien malgré elle, se transposait à l'image de Dame Florenza celle des scientifiques qui l'avait créée... La folie commençait à guetter, déjà, par la simple peur...

« Bonjour esclave. Tu as bien dormi ? C'est l'heure de te sortir. »

Pas le temps de répondre, elle se fait sortir en hâte, et pousser en avant, obliger de suivre la femme à la robe étrangement délavée à son goût, comme si il s'agissait d'une blouse de scientifique qui finalement avait été tâchée de sang, et maladroitement entretenue ensuite... L'homme, bien brutal, digne de sa nature inférieur, ne manqua quand à lui pas de toujours avancer, la frappant certes, mais toujours dans des parties qui se rapportait à sa féminité, qu'elle avait d'ailleurs bien du mal à entre-apercevoir. Finalement, elle aurait put se laisser traîner ainsi longtemps, son esprit ayant bien du mal à ne pas se perdre dans une vision étrange de ses tortionnaires, scientifiques mal fagotés, les même face auxquels elle était toujours restée sage, de peur de se faire punir, et de ne jamais pouvoir être libre... Mais, par malchance, la femme ayant prit la tête fit mention de quelque chose e bien particulier, quelque chose qui la réveilla un peu de sa sourde terreur, et de ses hallucinations :

« Ta petite amie est réveillée depuis plus longtemps que toi tu sais, elle est en train de faire connaissance avec son premier client. Si tu es sage, je t’emmènerais la voir, mais attention, si tu es sage...
 -  Ma petite am.... Luxienne... Luxienne ! Que faites vous à Luxienne !? Je, je suis sage, j'ai toujours été sage, alors pourquoi !? N'allez... N'allez pas lui faire du mal.... C'est moi l'expérience, pas elle ! »

Elle suggérait ce qu'elle savait, mais bien sur, elle avait tout faux...

3
Tekhos Metropolis / Re : Loin de ton monde tu attendras...
« le: jeudi 15 juin 2017, 04:44:53 »
Elle n'aimait pas le comportement de cette femme, elle avait un coup d'avance sur elle, elle en avait conscience, et malheureusement pour elle, elle ne pouvait pour l'instant parvenir à l'égaler, à la rattraper, dans la terrible situation dans laquelle la criminelle l'avait poussée, ne l'amenant finalement qu'à lutter avec des données et des informations incertaines, qui n'avaient tout simplement que bien peu de chances de trouver succès. Alors bien sur, il y avait Myriade mais il fallait aussi qu'elle accepte le fait que sa relation avec la demoiselle n'était pas inconnue de la femme encore dans les ombres, et que donc elle avait toute possibilité de prévoir les mouvements et le comportement de sa bien-aimée, ce qui encore une fois la plaçait bien en avance de sa propre personne en terme de réactivité. Finalement, tout dépendait d'une donnée, à savoir la connaissance de Max en matière des capacités internes de l'expérience qu'avait été la demoiselle Sang-clair, et si elle avait prévue un système suffisamment important pour parer à un assaut dont la brutalité serait normalement suffisante pour réduire en charpie un groupe armée Tekhan, une preuve de force qui avait normalement un impact moral particulièrement important sur les quelques adversaires connus de la belle assistante à la chevelure rose. Mais bon, pour l'instant, Luxienne se trouvait dans la position de la vaincue, et elle acceptait bien malheureusement cela avec un certain à-coup à sa fierté première. Finalement, elle ne vint qu'à observer les différents comportements de ceux qui l'entourait, cherchant à comprendre un peu de ce qu'il allait se produire, non sans présenter une certaine curiosité maline dans le regard. Elle n'était pas encore prête à se laisser faire.

« C'est fait Dona.
 -  Merveilleux... Voyez ma chère, ils peuvent avoir leur utilité. J'irai même jusqu'à dire que je ne pourrais pas me passer deux... sur bien des points. Et très bientôt, vous non plus, vous ne pourrez plus vous en passer. »

Ce commentaire ne fut guère à son appréciation, et encore moins le sous-entendu intrinsèque qui s'en accompagnait, mais qu'avait-elle actuellement à lui répondre pour ce genre d'affront immoral, ce genre d'insulte qui semblait par sa seule prononciation lui cracher au visage de bien terrible manière, comme si elle se trouvait être une catin de bas-étage, que l'on pouvait bien facilement manipuler ? Rien. Rien, et donc, elle ne répondit guère, elle ne prononça pas la moindre parole, et n'eut dés lors que la déception de constater qu'elle avait sûrement manquée un message autre que celui qu'elle avait captée dans les termes de son adversaire de la soirée, car le mastiff qui se trouvait depuis le début de son dos se mit soudainement en branle, et s'activa d'une manière qui ne fut pas à son goût : Rapidement, et dans un mouvement qui traduisait bien tristement son expérience dans le domaine, elle le sentit lui attraper le bras d'une poigne brute, douloureuse, et le lui tordre sans la moindre preuve de mesure, cherchant exactement à provoquer ce qu'elle ressentait, un inconfort terrible, et l'envie très honnête de jurer contre ce traitement. D'ailleurs, cela se serait trouver tout aussi inutile, car elle ne tarda guère à sentir au contact de son nez et de ses lèvres celui d'un chiffon détrempée d'une mixture épaisse et odorante, qui eut rapidement l'effet qu'elle lui devina : embrumer son esprit et sa conscience, l'étouffer dans les vapeurs méphitiques de quelques drogues qui allaient bientôt la mener dans un sommeil lointain. Elle s'exprima toutefois, même si le tissu obstrua le tout de son propos, tandis que la femme s'approcha de son visage...

«  Ffffyy eeuu fiiaiiim
 -  Vous n'êtes que de sales petites gouines arrogantes vous les Tekhannes, vous méprisez les autres peuples et l'autre sexe par... vous avez perdu l'habitude de vous faire baiser par … ais mâles, salement, com... chiennes que vous êtes... »

Elle commençait lentement à se sentir de plus en plus déconnectée de la réalité, ses yeux se mettaient à se fermer malgré ses réticences, son désir de résister le plus longtemps possible à l'emprise de cette femme et de ses gorilles aux poignes aussi détestable que douloureuse, mais elle pouvait bien produire tout les efforts du monde, ceux-ci conservaient le tout de leur futilité face à ce qu'il se produisait. Pire encore, alors même que ses quelques mouvements de protestations désespérer entamaient de se faire moins dignes, moins vifs, elle eut la désagréable sensation du corps de la femme contre le sien, de sa poitrine épaisse contre la sienne, tout aussi maternel, mais surtout, la raideur rêche d'une corde qui vint faire le tout de son cou, cherchant à achever ses vaines résistances par le biais d'une action encore plus violente que celles qu'elle avait subit jusqu'ici. Honnêtement, elle avait comprit le message de la femme, elle savait vers quelles horreurs elle comptait la mener, elle et Myriade, mais les gaz qu'elle avait inhalée jusqu'ici l'empêchait d'y réagir, et l'aspect imminent d'étouffer rendait le tout encore plus complexe à travailler dans son esprit, sa survie tirant en permanence la sonnette d'alarme, et l'empêchant ainsi de produire les quelques derniers brins de sa réflexion au maximum de ses capacités. Elle n'en ressentait que du dégoût, un profond dégoût qui envahissait la moindre des fibres de son corps tandis que ses limites approchaient, et que ses yeux se fermaient désormais lentement tandis qu'un râle sourd s'échappait de ses lèvres, derrière le tissu désormais chaud, et dénué des traces de la drogue volatile dont ils avaient fait usage.

Les derniers mots de Rachele, à son oreille, se perdirent dans son évanouissement programmé :

« Je ... te guérir de ... orgueil, toi et ta petite salope ... vous donner de la bite jusqu'à ce ... chose que vous méprisiez encore... ous-même... »

. . . . .

Un fracas tonitruant, c'est ce qui se produisit quand Myriade parvint calmement jusqu'au bâtiment où elle habitait avec Luxienne, c'est ce qui survint quand les premiers robots de sécurité se présentèrent devant elle, et qu'elle eut dans l'horreur de se laisser arrêter par ces froides boîtes de conserve sans âme, l'obligeant à produire de nouveau une infime partie de sa force pour les repousser, et même par là, les démonter avec violence, avant de les projeter contre l'entrée de l'immeuble pour la forcer à s'ouvrir. Elle dépassa le trou béant avec une intention furieuse, un désir impérieux de faire un ménage violent dans l'intégralité du bâtiment, et si elle déclencha par sa marche sereine les quelques défenses lasers qui la prirent pour cible, ce ne fut que momentané, deux esquives parfaitement exécutée lui permettant de déloger les dalles se trouvant au sol, puis en récupérer deux dans son mouvement agile pour les projeter immédiatement sur ses attaquants, les réduisant à l'inactivité la plus totale. C'est rapidement risible de remarquer que les défenses réactivées dans l'immeuble ne sont guère capable de freiner un seul instant la marche de la jeune femme, et si elle a bien remarquée que les caméras la poursuivent avec une précision diabolique, elle ne prend guère le temps de s'arrêter pour s'occuper de celle-ci, se dirigeant plutôt le plus directement possible en direction de son appartement, où sa femme, SA Luxienne se trouvait apparemment en bien grand danger. Ses crises de fureurs étaient rares, mais il était là facile de constater tout le potentiel militaire de la jeune femme aux cheveux délavés, et quiconque n'aurait pas eut le droit de connaître les détails du plan finement préparé de Rachele aurait tôt eut fait de sentir une sueur froide lui couler le long de l'échine face à une telle débauche de maîtrise martiale.

Elle ne vint point prendre l’ascenseur, ne voulant guère être limitée dans son mouvement par la lenteur relative de ce monte-charge démodé, et emprunta les escaliers dans une suite de bond proprement inhumain, les murs se fissurant sous ses pas, les rambardes pliants sous l'effet de ses impulsions, et les défenses se trouvant entre les étages ne lui servant qu'un court instant de marche-pied tandis qu'elle approche des étages supérieures dans d'incroyables foulées. Il serait possible de croire la gravité absente à la voir ainsi se déplacer, et il n'est à n'en pas douter que la moindre défense ne saurait permettre de se trouver en sûreté face à l'expérience si étrange qu'est Myriade Sang-Clair. Pour autant, si elle a bien un défaut dans cette frénésie, c'est qu'elle ne réfléchit guère, seul son instinct s'exprime, celui de se conserver, l'amenant à agir toujours de manière à ne pas subir de dommage, de conserver ce à quoi elle tient, la menant à être la plus rapide et efficace possible, ainsi que celui de se venger d'un tel outrage, occupant alors ses pensées de quelques idées pleinement malsaines, mais incontrôlable, le meurtre et la vengeance emplissant ses veines d'un besoin souverain de délivrer souffrance et cruauté. Elle est aveugle, et c'est bien cela qui allait la punir, car une fois arrivée à son étage habituelle, une fois la porte ouverte sur les couloirs sombres des lieux, et une fois la dernière résistance robotique vaincue, elle se trouva finalement devant la porte de son appartement, qu'elle propulsa d'un coup sec hors de ses gonds, avant de voir l'acier se rompre et rebondir sur le solide bouclier énergétique mis en place par Rachele et sa complice. L'instant d'après, elle se figea, perdue, alors que le cliquetis de l'arme à feu lui parvint à l'oreille comme la promesse de mille supplices, avant d'être remplacer par le timbre faussement poli de son ennemie :

« Si tu fais le moindre geste agressif...
 -  Aucuns, aucuns... arrêtez ! »

Elle vint le dire avec empressement, alarmée, apeurée, terrifiée par la scène qui se trouvait actuellement devant elle, cette position terrible de celle qui l'avait récupérée, éduquée, transformée, sur une table, avachie aux portes d'une mort bien trop proche pour être agréable, dévêtue de manière à souligner autant ses formes que la faiblesse éminente dans laquelle elle se trouvait désormais, sans-défenses. Luxienne lui avait demandée de la protéger, de l'aider, mais il était bien trop tard aux yeux de Myriade pour agir, elle ne pouvait se le permettre, pas avec une arme sur le front de celle qu'elle aimait, et aussi étrange que cela puisse paraître, mais elle ne se permettait même pas de reposer sa jambe au sol avec ce qui lui avait été énoncé, tellement dominée par ses instincts qu'elle traduisait le moindre de ses mouvements comme porteur d'une potentielle agression, et donc d'une fin bien trop rapide pour la belle femme aux cheveux bruns. Finalement, ce fut d'ailleurs avec une infinie lenteur qu'elle vint ramener sa jambe auprès de l'autre, puis dénouer son dos et ses muscles pour paraître la plus inoffensive possible. Elle avait vue le bouclier, même une attaque éclair de sa part pour tenter de toucher l'arme de la forme dans les ombres était voué à un échec, alors que pouvait elle faire ? Elle n'avait pas l'esprit de sa protectrice, elle n'avait pas non plus l'analyse lui permettant de constater qu'une telle défense laissait normalement passer les formes organiques, et que normalement elle aurait put les rejoindre. Mais là, c'est avec honnêteté qu'elle tremblait légèrement, incapable de lutter contre ce fameux instinct qui l'avait envahie, et qui lui hurlait désormais d'être obéissante, car elle ne pouvait accepter d'être la source des malheurs, ou de la mort, de celle à qui elle tenait plus que tout au monde.

« Je ne vais rien faire, mais pitié, cessez de pointer votre arme sur Luxienne ! »

4
One Shot / Re : Deux pour le prix d'une ! [PV]
« le: lundi 12 juin 2017, 15:58:48 »
Cela faisait un moment qu'elle attendait, depuis son coin d'ombre, de trouver le bon moment pour agir, et pour l'instant rien ne semblait se tourner en sa faveur, car les quelques occasions s'étant présentées avaient toujours connue, de part la fortune, un renversement qui l'avait obligée à rester dans les ténèbres, immobile, à voir le destin se jouer de ses tentatives. Son passé lui manquait presque, elle serait toujours sur Occlusia, elle n'aurait eut qu'à produire un peu de ses capacités pour agir, mais là, sur Terra, les choses étaient devenues si simples, si basiques, si communes pour elle qu'elle devait accepter ce qu'il se déroulait sans laisser son orgueil prendre le dessus, et ce même si, pour une fois, elle agissait pour un bien qui n'était pas le sien. Elle avait pourtant tout préparée, elle avait prit le temps de vérifier la météo, et les quelques nuages donc qui cachaient, aux meilleurs moments, cette lune pâle qui éclairait bien souvent la place d'une lumière gênante, ainsi que les tours de gardes, mais pour autant, que ce soit un ivrogne un peu mal foutu, un des paysans qui partait travailler un peu plus tôt, où les quelques mouvements nocturnes d'un chien, tout y était passé pour que les lieux se trouvent toujours sous l'observation d'un tierce partie, chose qu'elle ne voulait guère. Et puis, alors qu'elle se décourageait presque de pouvoir agir cette nuit, elle put constater que soudainement, le calme absolu c'était fait, et que, haut dans le ciel, la forme presque providentielle d'un épais cumulus était en train de s'installer progressivement face à l'astre nocturne... Enfin, pour une première fois, les choses semblaient tourner en sa faveur.

L'ombre s'étendit de la rue étroite où elle se trouvait jusqu'à l'intégralité du village, et elle eut enfin le droit de sortir de son point d'observation pour s'avancer silencieusement sur le dallage froid, agissant avec une rapidité des plus surprenante pour une jeune femme, se dirigeant droit vers le pilori où, gisant pitoyablement, se trouvait la cible de son projet d'évasion. La pauvre esclave se trouvait là depuis de nombreuses journées, et elle avait subit, en tout et pour tout, assez de sévices pour pouvoir prétendre à une vie de calme et de sérénité désormais, mais la justice humaine étant ce qu'elle était, elle devait continuer à subir un tel traitement pour encore de longs instants, et cela était, au goût de notre clandestine demoiselle se déplaçant discrètement, parfaitement intolérable. Alors elle avait choisie, il y a de cela deux ou trois jours, de la libérer, et de l'emporter, de lui trouver un lieu où elle pourrait enfin se détendre, reprendre un peu de force, puis partir pour s'éloigner loin de sa vie faite de tourments et d'humiliations, pour enfin retrouver un peu de plaisir, un peu de satisfaction, dans un train-train jovial et plaisant. Approchant donc avec la plus grande des prudences, et ne réveillant pas encore celle qui, dans son épuisement, avait réussi à trouver le sommeil malgré une position terriblement inconfortable, elle vint s'accroupir dans ce qui allait devenir l'ombre du pilori, dans le cas fatidique où la lune venait à refaire son apparition, puis elle alla chercher dans ses poches latérales le matériel qui lui permettrais de faire céder les loquets. Encore une fois, c'est bien tristement qu'elle se rappela son manque de pouvoirs, mais ce n'était pas cela qui allait l'arrêter pour autant.

Un crochet, une cuillère affinée, quelques autres aiguilles en tout genre, puis elle se mit au travail dans le plus respectueux des silences, visant bien sur à se faire aussi efficace qu'elle le pouvait malgré son état d'humaine, et ne manquant pas d'offrir une petite pensée à tout ceux et celles qui avaient du agir ainsi en espérant sa bénédiction dans son lieu d'origine. Elle avait été autrefois divine, et quand les voleurs et autres criminels se trouvaient à délier quelques cordes savamment serrées, ou à crocheter, comme elle le faisait actuellement, un cadenas ou des menottes de bonnes factures, elle avait été bien souvent appelée à les couver d'un regard bienveillant, leur donnant le petit coup de pouce qui permettait finalement d'agir avec le temps restreint qui leur était offert pour s'envoler loin du danger... Maintenant, en ce jour, elle n'avait guère entendue parler d'une déesse, ou d'un dieu alloué à l'art des brigands et des gredins sur Terra, sinon elle aurait bien sur offert une petite prière tandis qu'elle s'affairait, de toutes ses connaissances, à trouver les différents points d'attaches du cadenas pour libérer la pauvre esclave. Mais elle progressait du moins à une vitesse qui lui convenait, et alors qu'elle sentait le premier céder, elle vint récupérer ses affaires en tout hâte une fois le cliquetis significatif entendu, pour s'occuper du deuxième cadenas se trouvant sur les deux planches en bois à quelques centimètres de celui qu'elle venait de déverrouiller. A ce rythme, elle avait toute occasion d'imaginer que d'ici quelques minutes, elle allait pouvoir réveiller l'esclave, et l'emporter rapidement au loin, jusqu'à sa maisonnée.

Les bruits fins que produisaient les différentes aiguilles étaient à peine audible malgré la cour vide, l'expérience du métier faisant, et la jeune femme se trouvant à moitié couchée pour ne pas que sa forme puisse alerter une quelconque présence lointaine, ce qui lui donnerait assez de temps pour s'enfuir si elle entendait des bruits de pas, elle acceptait cette situation un brin inconfortable et la perte de temps qui s'en accompagnait par sûreté. Beaucoup de voleurs le dirait, mais ce n'est pas foncièrement d'être rapide qui comptait dans ce genre d'action, mais plutôt le fait d'être efficace, et de ne pas venir faire un faux-mouvement qui alerterait, de manière gravissime, les autorités alentours, ou l'attention d'un voisin s'approchant d'une des fenêtres de sa demeure. De temps en temps, d'ailleurs elle laissait son regard filer vers les larges ouvertures triangulaires qui se trouvaient partout en périphérie de la place, et se sentait toujours aussi rassurée de ne pas y découvrir la lumière d'une bougie, ou d'une lampe à huile, ce qui serait extrêmement dommageable car elle devrait abandonner son travail de crochetage immédiatement pour user du pilori comme relative cachette. Peut-être cela fusse de la chance, mais elle ne fut pas interrompue encore une fois quand elle parvint à faire sauter le deuxième cadenas, et ainsi, put se préparer à ouvrir le pilori pour libérer le poignet et le cou de celle qu'elle était venue sauver de la tyrannie de ses concitoyens... Mais avant cela, discrètement comme toujours, elle se glissa auprès de la tête de l'esclave après avoir ranger son matériel, et vint lui tapoter légèrement les joues pour qu'elle ouvre les yeux, pour immédiatement placer sa main devant sa bouche, et l'un de ses doigts devant ses lèvres. Elle l'invitait au plus parfait silence, puis chuchota :

« Désolé de te réveiller. Je viens de te libérer, et tu vas me suivre jusqu'à chez moi. Ne pose pas de questions pour l'instant, et si tu ne me fais pas confiance, dis toi que je fais preuve de bonne foi parce que je risque gros à te faire quitter le pilori. Ok ? Très bien, j'ouvre le pilori, tu retires ta tête, puis je le repose sans bruit et on file. Un, deux, trois ! »

Elle fut contente de découvrir que les gonds avaient été huilés, elle se serait sentie bien moins en sûreté si l'ouverture des deux larges planches en bois avait produit un bruit tonitruant qui aurait résonné dans toute la place, et du coup n'eut qu'à attendre qu'Amenas quitte l'horrible support qu'elle avait occupée ces derniers jours pour le reposer délicatement, pour enfin se tourner vers celle qu'elle venait de libérer. C'était une belle femme, elle ne connaissait pas sa provenance, n'ayant trouvé sur Terra de gens qui possédaient des traits comme ceux de la suppliciée, mais elle ne manquait pas d'y découvrir une finesse et une beauté qui n'avait, fondamentalement, aucune raison de finir ainsi accrochée au milieu d'un village pour servir de vide-bourse à tout les vieux pervers qui voulaient faire usage d'une jeune femme. Mais elle quitta sa contemplation pour rapidement s'avancer, et lui faire signe de se faufiler dans ses pas, la menant d'abord vers la première rue où elle s'était dissimulée, puis plus loin, en direction des quartiers résidentiels, où elle aura toute possibilité de choisir son chemin pour éviter les lève-tôt, et les cuve-misère, afin d'atteindre son propre logement. Finalement, elles atteignirent la maisonnée alors qu'au loin, dans la nuit sombre, le clocher central vint à sonner lourdement pour annoncer cinq heure, et ainsi offrir aux quelques paysans se devant de travailler l'horaire du levée. L'ancienne divinité ne tarda point, et ouvrit rapidement sa porte pour que la demoiselle exténuée rentre chez elle, loin de toute complication éventuelle, puis elle la suivit prestement, avant de fermer à double-tour les lieux, les plongeant toute deux dans le noir.

Une petite flammèche démarra alors, et elles purent enfin savourer la réussite de cette mission de sauvetage, la voleuse émérite lui offrant un grand sourire, tandis que la faible lumière de la bougie éclaira ses traits.

« Enchantée du coup, je me présentes, Melphit. Et si tu comptes me dire merci, je t'en prie, ne le fais pas, tu ne méritais pas de rester là-bas, et ç’aurait été un outrage que de te laisser y subir une journée de sévices supplémentaires ! Vas t'asseoir, je vais te chercher de quoi manger et boire... si tu as des questions, je suis tout ouïe, alors n'hésites pas ! »

5
C'était le matin. Elles avaient remarquées qu'elles auraient sûrement un brin d'avance, si bien que Luxienne, ne souhaitant guère que son don à la ponctualité soit entachée par une arrivée soudaine et imprévue, décida de prendre les commandes du vaisseau pour quelques instants, et se balada dans les environs après avoir activée le camouflage optique, ce qui lui permit de découvrir un peu le domaine de Mora sans pour autant y avoir encore accostée. Les lieux étaient fort élégant, et elle en vint à apprécier son choix d'être venue, mais remarquant dés lors qu'elle devait écourter ce petit tour improvisé du propriétaire, elle vint se diriger en direction de la ferme tranquillement, et arriva dés lors dans le cadre des horaires qu'elle avait contactée à son hôte, qui semblait quand à elle avoir prévu fort en amont leur approche, les lieux semblant grouiller d'une activité certaine. L'amarrage ce fit sans le moindre problème, les indications des aides de Mora Linda étant somme toute des plus précises, et c'est alors qu'elles atteignirent tranquillement le sol que la belle directrice de L'OESA vint à réveiller doucement celle qui l'accompagnait, la sortant de sa nuit pour lui indiquer qu'elles étaient arrivées à destination, et qu'ainsi il était temps que Myriade se réveille, et fasse un peu d'efforts avec sa courte chevelure rebelle pour ne pas apparaître en bien triste conditions devant les femmes qui se trouvaient plus bas... Quelques minutes plus tard, le temps que la brune coupe les moteurs, enclenche le système de sécurité, et fasse tarder un peu l'ouverture du sas pour donner quelques instants à sa moitié pour s'occuper d'un épi récalcitrant, et les deux atteignirent le plancher des vaches, pour finalement paraître devant leur hôte, qui semblait être de fort bonne humeur, et conviviale en plus de cela :

« Bonjours, mesdemoiselles. Je me nomme Mora Linda. Le voyage s’est-il bien passer ?
 -  Excellement bien, merci Dame Linda. Je suis Luxienne Mueller, celle qui vous a contactée, et je vous présente Myriade Sang-Clair, ma moitié. Nous sommes ravies de vous rencontrée, et de pouvoir passer un peu de temps chez vous. »

Elle parlait pour sa camarade, mais le fait que Myriade soit encore endormie, dans le gaz, les yeux à peine ouverts, et encore en train de lutter contre quelques cheveux qui se faisaient la malle justifiait sûrement cette présentation rapide de la part de la directrice de l'OESA. En tout cas, ayant analysée la manière de saluer de la terranide, Luxienne ne manqua guère de lui rendre le geste avec forte précision, puis de se laisser entraîner par son hôte en direction de l'établissement où était logée les convives, laissant dés lors à la femme l'occasion d'observer un peu les environs, et de s'imprégner de l'ambiance authentique des lieux, tandis que la demoiselle aux cheveux roses maugréait légèrement, mécontente de son état. La ferme était charmante, un lieux des plus agréables où semblait se trouver plus qu'une simple grange pour accueillir quelques bêtes, au vu des logements qui étaient offert, et de l'apparente technologie dissimulée de-ci, de-là, dans les différents recoins, mais qui ne manquèrent pas d'attirer l’œil de la Tekhane. Certains dispositifs eurent même le don de titiller sa curiosité, comme un système électrique complexe se trouvant près de l'enclos à bétail, ou les solides barreaux en alliage dont certaines fenêtres étaient pourvues, mais elle ne fit pas encore de commentaires et préféra simplement emboîter le pas de celle qui les avaient accueillie jusqu'à un hall joliment décoré, où elles finirent auprès d'un large stand, avant de se faire longuement dévisagée par celle qui s'y trouvait. Événement habituel ou non, en tout cas la chef des lieux ne tarda pas à s'exprimer pour rappeler la jeune femme à l'ordre, pour qu'enfin celle-ci s'exprime avec politesse, prouvant finalement qu'elle pouvait surpasser sa surprise première :

« Désolée Mora-sama. Une vilaine habitude. Vous pensez les mettre dans une chambre en particulier ?  Geecku-san à tout fait et elle est partie manger un truc, comme d'habitude. »

La description des diverses chambres suivirent, et si Luxienne y prêta une oreille attentive, ce ne fut guère le cas de Myriade, qui après un bon bol d'air frais commençait enfin à émerger, et ne manqua pas d'adresser à la jeune femme derrière son large bureau un regard tout aussi soutenu que celui qu'elle-même lui avait adressée un peu plus tôt. Elle... était aux goûts de la demoiselle aux cheveux à la couleur délavée, et si cela ne manquait pas de lui donner l'impression d'avoir trouver quelqu'un avec qui elle apprécierait fortement la discussion, elle ne manqua pas de se demander ce que cette occupante des lieux avait de si spéciale pour qu'elle se trouve obnubilée par sa présence. Bien heureusement, elle fut fondamentalement coupée dans sa réflexion par les questions de dame Linda, celle-ci semblant chercher à savoir ce qu'elles sauraient apprécier entre les diverses suites et « univers » dont étaient constituées les chambres préparées pour les invitées, et si Luxienne semblait plutôt partie pour se permettre un véritable dépaysement, et trouver son bonheur dans quelque chose de plutôt rustique, sa moitié avait bien plus de mal à l'idée de ne pas quémander un brin de confort fade et inutile, mais satisfaisant. Elle vint faire un rapide commentaire quand la dirigeante des lieux s'exprima sur une suite de chambres relativement bien entretenue, peu technologique, mais déjà au-delà de ce que l'on pouvait attendre des mondes médiévaux, tels Ashnard ou Nexus, et s'attendit presque à une riposte de sa compagne plus âgée, mais une arrivée surprise vint les couper dans ce qui allait sûrement tourné en un échange virulent entre les deux Tekhane sur la valeur d'un tel voyage...

« Je m'appelle Geecku et vous êtes Luxi et Myri ?
 -  Hum... Luxi ?
 -  Myri ? »

La standardiste tenta bien de régler ce soucis, mais rien n'y fit, si bien que la terranide proche du lézard vint tirer une langue d'une étrange longueur devant ses interlocutrices, et reparties fâchées, laissant aux mains de Mora deux Tekhanes des plus circonspectes, qui ne manquèrent guère d'adresser un regard pleins de questionnements à celle-ci, avant qu'elle ne désamorce le comportement de sa subordonnée avec une légèreté désinvolte :

« Ne soyez pas étonnées, certaines terranides sont issue de famille très primaire et leurs éducations n'est pas toujours une partie de plaisir. Rassurez-vous, Geecku ne mord pas, elle a juste son tempérament à elle.
 -  Ha ah n'ayez donc crainte, je n'ai pas beaucoup étudiée l'anthropologie, mais je sais quand même qu'à peuples et races différents, mœurs différentes. Nous discutions des chambres, non ? Vue que nous sommes en désaccord, je penses que nous allons nous permettre deux chambres différentes pour le séjour. Si cela te convient bien sûr, Myriade ?
 -  J'ai pas de problèmes avec ça... Vous pouvez nous montrer un plan des lieux, avec les types de chambres ? »

Nulle doute qu'elles aient cela. Les plans sous les yeux, il ne fut guère compliquée pour les femmes de trouver un terrain d'entente, et c'est l'une après l'autre qu'elles firent leurs choix, avant de le présenter avec grand calme à la femme qui les accueillaient pour les quelques jours à venir. Luxienne vint d'abord choisir une des chambre les plus rustique, voulant connaître un véritable dépaysement, et proposa de s'installer dans une des chambres du rez-de-chaussée, dans l'aile Est des lieux. De manière bien étrange ensuite, Myriade ne manqua pas d'hésiter un peu plus, mais vint à demander si l'une des chambre technologique au premier pouvait lui être réservée, indiquant d'ailleurs l'aile Ouest, précisant qu'elle trouvait cela agréable d'avoir une vue certaine sur la campagne à l'arrière du bâtiment. Elle insista même étrangement, comme si elle voulait s'assurer que l'un des parties présents actuellement sache qu'elle se trouverait là, et sachant qu'elle n'avait pas grandes raisons de le souligner à la directrice, ou sa compagne, il fut peut-être un peu trop évident qu'elle signalait ces détails pour tenir au courant la belle jeune femme qu'elle avait remarquée derrière le bureau, et dont sa curiosité s'était un peu emballée à sa vue. Cela n'obtint comme simple réponse de Luxienne qu'un sourire intéressée, mais elle ne fit guère plus de commentaire, et chacune eurent alors la possibilité de finalisée leurs réservations, pour finalement quérir leurs clés respectives, et allez s'installer. Toutefois, avant de se séparer pour un court instant, Luxienne s'arrêta auprès de Mora Linda, et vint lui parler tranquillement, d'un air calme :

« J'y pense, mais juste après que nous ayons déposées nos affaires, je serais ravie que vous puissiez nous faire un tour des lieux, et nous présenter les fruits de votre travail. Je dois vous avouer avoir été très intéressée, si bien que je risque de vouloir passer pas mal de temps en votre compagnie, j'espère que vous n'êtes pas trop occupée en ce moment. »

6
Tekhos Metropolis / Re : Loin de ton monde tu attendras...
« le: mercredi 07 juin 2017, 08:12:40 »
La nuit n'aidait rien à analyser ses chances de se porter à son sac, ni d'y trouver, de manière efficace, l'arme qui s'y trouvait pour pouvoir tenter quelque chose de stupide au vu du nombre de personnes présentes dans la pièce, et de sa capacité à savoir tirer sur quelqu'un efficacement malgré sa visée relativement médiocre, et surtout sans manque de vision sur la victime de cette action de défense improvisée. De plus, si la fatigue qui l’assommait n'était pas déjà en soi une tare, car même si elle s'était rapidement éveillée face au danger, elle manquait toujours de sommeil, il n'était pas à douter que l'adrénaline du moment la ferait agir de manière preste, mais en faisant trembler son corps, et sa main, ce qui finalement n'était guère utile quand on voulait faire l'usage d'une arme de tir. Enfin, et ce malgré toute considération pour sa propre personne, la femme avait grande conscience que si elle tentait un mouvement de trop, il y avait ici suffisamment de personnes entraînées pour mettre sa tentative de rébellion en échec, et elle n'était guère suicidaire, ce qui dans ce genre de situation pouvait largement se traduire par un instant de doute bien trop long pour sa propre survie. Devait-elle donc se résoudre à rendre les armes sans avoir essayée ? Elle était en train de se poser la question à vitesse grand v, imaginant peu à peu les situations d'urgences, et ses pensées filant avec aisance au travers de son esprit particulièrement entraînée, elle ne voyait bien qu'une porte de sortie, celle qui se trouvait juste derrière elle, si elle parvenait à récupérer son arme, et faire sauter le loquet avec un tir rapide pour ensuite se jeter dans le couloir, et fuir. Les chances étaient faibles, mais avec une action, et la surprise de son tempérament inflexible, elle pouvait peut-être éviter la catastrophe.

« Ts ts ts... On ce détend Madame Muller, vous ne devriez pas crier comme ça. Pour commencer ça ne sert à rien, personne ne vous entendra, j'y ai veillé. Et ensuite ça risque d'énerver mes employés. »

Clic.
Tant pis pour le dernier plan qu'elle avait.

Le bruit qui se trouvait derrière elle, et aux alentours, mais de manière moins impressionnante, était celui d'une arme rudimentaire, moins précise que les outils Tekhan, moins létale, mais malheureusement bien trop proche de son dos pour qu'elle puisse imaginer avoir la chance de se débarrasser de l'opposant sans qu'une des balles ne vienne se loger dans sa chair, et causer les tristes dommages qui la mèneront à une mort aussi rapide que douloureuse dans les derniers instants qui lui resteraient. Elle n'avait pas d'échappatoire, et si ce qui agressa ses sens fut plus l'odeur de sueur de l'employé qui venait de la mettre en échec sous les ordres de la dame se trouvant dans son appartement, que le fait que le canon froid et méprisable de l'arme faisait quelques mouvements inconfortables au travers de son vêtement, elle ne fit pas mine de bouger, restant stoïque. C'était, dans le fond, la seule action sereine qu'elle pouvait pratiquer pour prouver de sa bonne tenue, et de son instinct orgueilleux, le fait de ne pas sur-réagir, de jouer le jeu de celle qui s'attendait à la voir paniquer sans pour autant lui offrir la satisfaction de la voir perdre le contrôle de ses actions, et finalement de ne pas s'exprimer plus que de raisons, maintenant que le tout des événements la portait à agir docilement face à ses ennemis. Pas le choix, la seule chance qui lui restait désormais se trouvait entre les mains de sa conjointe, et de l'intelligence de celle qui avait organisée cette tactique agressive. Bien sur, elle ne doutait pas de celle-ci, mais malgré tout, les erreurs pouvaient être fatales pour un être à l'intellect humain, et si elle arrivait à tirer son épingle du jeu, elle auraient quelques instants pour se trouver une porte de sortie.

« Appelez moi simplement Max pour le moment, vous me donnerez bientôt un autre nom mais en attendant celui-ci fera l'affaire. Je tenais simplement à vous parler pour apprendre à mieux vous connaître, cerner un peu la personne que vous êtes. Je dois avouer que je ne suis pas déçu, bien au contraire, je sais maintenant que nous allons faire de grandes choses ensemble.
 -  Je dois avouer, Max, que si je reste flattée de savoir que cette courte entrevue a la capacité de vous satisfaire, je n'ai pas foncièrement la même considération vis-à-vis des éventuels travaux que vous voudriez accomplir en ma compagnie. Avouez le donc, mais l'on offre peu souvent un partenariat à une personne que l'on menace d'armes automatiques, et je me dois de déplorer la nature toute masculine de vos compagnons dans une ville telle que Tekhos Metropolis. »

Mentionner le sexe des gardes n'était pas important, surtout pour la femme qui avait sut apprendre de longue date que la différence de sexe n'était fondamentalement pas la tare absolue que grand nombre de Tekhane considérait, mais elle espérait que cette atteinte, même modeste, aux valeurs masculines et à l'orgueil des gardes ne mène les gardes à produire le faux-mouvement que la chef ne semblait offrir. Malheureusement, aussi bien dressé qu'il se trouvait, cette tentative ne fit que rencontrer un échec cuisant, la forme massive dans son dos ne venant même pas rehausser son souffle d'un brin, comme si la remarque ne lui faisait ni chaud ni froid, et ses muscles continuèrent de se trouver parfaitement détendu, preuve qu'il aurait plein contrôle de ses moyens si elle surenchérissait, ou qu'elle cherchait un autre moyen de taper dans leur self-estime. Bon, nouveau plan qui échoue, ça commençait à faire beaucoup dans une soirée. Elle écouta d'un air distrait donc, relaxé autant que possible, si on considérait que ses traits exprimaient un mélange de rancoeur et d'insatisfaction, les bruits de pas qui l'entourèrent à mesure que quelques bourrins sans noms n'aillent chercher ses affaires dans le coin où elle les avait jetée, dans l'entrée et l'apporte non sans plus de preuve de sa lourdeur à la chef de cette troupe entraînée. Il en sort le portable dont elle faisait normalement usage, et le lui tend après l'avoir ouvert, et encore une fois les propos légers de la femme s'élève avec ce même ton de victoire convaincue qu'elle possédait depuis que l'occupante des lieux avait passée la porte de son large appartement :

« Maintenant je vais vous demander d’appeler votre petite amie et de lui demander de vous rejoindre. Je dois vous parler à toute les deux...
 -  Tiens donc cela m'aurais étonné. Que dois-je faire, la prévenir que nous avons une invitée qui a sut faire son approche de manière toute aussi diligente que loquace, avec une armée de gros bras qui auraient, en temps normal, dut être éliminer à cause de la possession d'armes sur le territoire Tekhan ? Non je ne suppose guère, hein ? Très bien. »

Elle se portait tout autant à la bravade qu'elle savait que rien ne lui serait fait pour l'instant tant qu'elle obtempérait aux ordres qui lui était donnée. Pourquoi ? Parce que de toutes manières elle était déjà menacée de la pire des choses, la mort, et que si il ne l'avait pas déjà éliminée, c'était bien parce qu'il y avait, dans les plans de cette femme tranquillement assise en face du vestibule, quelques projets, quelques idées qu'elle se devait de conserver le temps que tout les éléments n'étaient pas réunis pour lui offrir le tout de sa satisfaction. Alors oui, elle vint prendre le téléphone, lentement, non par crainte, mais pour prouver encore une fois qu'elle était en pleine possession de ses moyens, vaste farce étant donnée qu'elle était largement en dessous de ses principales capacités à cause de la fatigue, et commença à passer au travers des numéros affichés pour trouver celui de Myriade, prenant son temps pour s'offrir les quelques secondes lui permettant de savoir quoi dire. Pour être tout à fait honnête, la lumière de l'écran l'aveuglait un peu, mais permettait à ceux dans la pièce d'observer la beauté de son visage, bloqué dans une expression désormais stoïque, un dénis silencieux de leur présence tandis qu'elle se focalisait sur le plus important. Voilà, le numéro en main, elle apporta à son oreille l'appareil pour ensuite appuyer tranquillement sur la touche d'appel, et laisser les tonalités défiler tranquillement jusqu'à ouïr son aimée décrocher son propre téléphone, et lui répondre.

« 
 -  Oui, bonsoir ma douce. J'aurais besoin que tu ne tarde pas à rentrer, as-tu finis de régler les dossiers ?
 - 
 -  Oh non rien de tout cela. Tu devras juste faire attention, la porte est un peu récalcitrante ce soir. Hum ? Non pas plus que d'habitude.
 - 
 -  Très bien, à de suite mon cœur. »

Elle raccrocha, et ce fut sans attendre qu'elle vint jeter le téléphone dans une belle ellipse pour que celui-ci tombe sur les jambes de la femme assise au milieu de la pièce, la lumière de l'écran ne manquant pas de venir produire une fine luminescence au travers du tailleur de celle qui, jusqu'ici, n'avait pas eut à se déplacer un seul instant de sa place privilégiée. Luxienne aurait appréciée que son outil de communication se soit tourné dans l'autre sens, auquel cas elle aurait au moins put placer un visage sur les mots paradoxalement courtois de celle qui la menaçait par la présence de ses hommes de mains, mais elle n'eut pas pour autant de déception en remarquant que cela ne se fit pas, et ce pour de biens bonnes raisons : Elle n'avait pas reconnue la voix, et elle savait qu'elle n'oubliait jamais les inflexions infimes qui se cachent entre les paroles pour lui permettre de reconnaître une précédente connaissance. Alors, oui, elle savait qu'elle avait affaire à une inconnue, quelqu'un qui semblait posséder nombres d'informations sur elle, mais qui en revanche n'avait jamais été menée à sa connaissance. Tranquillement, d'ailleurs, et se doutant bien que son geste avait put, en quelques situations, paraître un brin agressif ou impoli, elle ne manqua pas de croiser lentement les bras pour attendre de voir l'évolution de la situation, mais une réponse tardant à se faire sentir dans les premières secondes, elle vint à prendre la parole avec beaucoup de calme, et s'exprima avec cette même fausse courtoisie qu'on lui servait depuis le début :

« Soyons claires, je n'ai fait ceci que pour vous permettre de vérifier le numéro que je viens d'appeler. Je ne vous considère pas assez sotte pour avoir eut le défaut de me laisser le téléphone sans vérifier juste après de la personne que j'ai contactée. »

Myriade bien sur, et suffisamment mise en alerte pour qu'elle arrive sous peu, avec en prévision une action, contactée par un brin de message largement étranger à leurs coutumes : Le fait qu'elle l'avait appeler en soulignant que rien d'anormal ne se déroulait, ce qui était déjà suffisant pour lui permettre de comprendre avec désinvolture que si, quelque-chose de non-coutumier s'était produit, et la mention de la porte, « récalcitrante », alors même que normalement celle-ci ne pouvait poser de problèmes à cause du loquet rustique que la femme avait fait placée, leur évitant les soucis informatiques qui pouvaient se produire habituellement. C'était peut-être une vaine contre-attaque, mais Luxienne était sérieuse dés qu'il s'agissait de se défendre, et par chance, elle avait une force de la nature à ses cotés, une force qui d'ailleurs comptait agir avec une certaine véhémence : Défoncer la porte des lieux, entrer avec fracas après que les corps séparant l'entrée et le mur se soient fait réduire en bouillis par le passage inexpugnable de la plaque métallique, et réduire les autres formes de vie au silence suite à la stupeur générale... Oui, la seule riposte à cela était l'intelligence de cette « Max », et sa capacité à remettre en cause sa mise en scène orgueilleuse pour privilégier le succès de son action...

7
Tekhos Metropolis / Re : Loin de ton monde tu attendras...
« le: mercredi 31 mai 2017, 00:26:42 »
Elle ne rentrait pas souvent avant sa chère demoiselle, mais la situation étant ce qu'elle était, Luxienne était dans un tel état de fatigue qu'elle se trouvait dans l'obligation de ne pas prolonger plus que nécessaire sa journée de travail, les paupières se faisant lourdes, et son esprit tournant légèrement au ralenti après une semaine qui avait sut se faire particulièrement épuisante au fil des jours. Entre les réunions, les problèmes qu'avait rencontré les industries pour lui faire parvenir ses commandes en matériau, et la rencontre peu agréable d'une journaliste employée par un concurrent pour trouver dans son comportement et ses pratiques quelques problèmes singulier de direction, elle avait dut jouer de tout son calme pour ne pas fauter un seul instant, ce qui avait bien sur finit par lui user les nerfs, puis l'user tout court. Elle avait donc fait le choix, pour une journée, de quitter les bureaux aux heures habituelles, laissant à sa chère secrétaire le don de s'occuper des différents dossiers, et de s'occuper de ses mails pour s'assurer que tout se déroule comme d'accoutumée, avant de finalement quitter le bâtiment de l'OESA avec les jambes molles, les yeux qui piquent, et un besoin le plus rapide d'un café, ainsi que de son canapé, pour aller s'y écrouler dans une mollesse toute particulière. Le chemin pour rentrer, elle le fit en conduite automatique, se moquant de perdre une dizaine de minute pour attendre son logement si cela lui permettait de diminuer singulièrement les risques d'accident, et vint même à quasiment s'assoupir sur son siège, en se laissant bercer par le vrombissement léger du moteur.

Quand elle parvint enfin au garage, et que l'alarme délicate se déclencha pour lui signaler qu'elle était arrivée à destination, elle ouvrit les yeux avec difficulté, puis s'ébroua pour sortir de sa voiture, et récupérer son sac à l'arrière, pour enfin se dirigea lentement vers l’ascenseur en fond de la grande salle, se demandant bien en quelle situation elle avait put connaître suffisamment de stress pour se trouver aussi épuisée. Se rappeler d'ailleurs de la face antipathique de la journaliste ne manqua pas de la faire maugréer quelques secondes tandis que son moyen de transport la fit attendre lors de sa rapide descente, et quand elle rentra enfin dans la petite cage vitrée pour appuyer mollement sur le bouton du quinzième étage, ce ne fut pas sans remarquer au loin que la caméra habituelle du sous-sol était actuellement désactivée. Étrange, mais elle ne se voyait que peu s'en alarmée dans l'immédiat, elle irait en faire part à la sécurité du bâtiment une fois qu'elle aura prise un peu de repos, et laissa simplement les deux battants métalliques se clore devant son regard pour finalement l'emporter tranquillement jusqu'aux étages, tandis qu'elle laissait ses pensées imaginer quel genre de situations permettraient au système de surveillance de ne pas continuer de fonctionner. Elle en vint finalement à imaginer qu'une mise à jour devait être en train de se produire, et ainsi, elle ne fit rien contre, attendant simplement d'atteindre le lieu de son appartement pour espérer y trouver le confort absolu qui lui était nécessaire. Encore une fois, elle ne fit même pas attention au fait qu'elle fermait les yeux, et ce fut le son retentissant de l'ascenseur qui la rappela à la réalité une fois le quinzième étage atteint.

Les lieux étaient sombres, les couloirs vides. Là, c'était surprenant, y'avait-il une coupure de courant ? Elle n'aurait sut le dire, mais alors qu'elle sortit lentement de l'habitacle pour poser le pid sur la légère moquette parfaitement propre des lieux, elle leva la tête pour essayer de vérifier sa théorie en observant les caméras. Ouais, celles-ci aussi montraient qu'il n'y avait absolument aucune activité de la part des machines de surveillances, et si cela ne manqua pas de rentrer en désaccord avec le fait que l'ascenseur avait tout de même parfaitement fonctionné pour la mener jusqu'ici, elle ne sembla pas y faire attention pour l'occasion, le sommeil faisant des ravages sur sa capacité analytique, et ses pensées étant de toutes façons trop paresseuses pour qu'elle y prête suffisamment d'énergie pour bien les faire fonctionner. Alors, paresse faisant, elle ne vint pas le moindre instant douter d'un véritable problème, et mit tout cela sur le compte qu'un bug informatique, meilleur moyen de justifier un tel défaut dans la haute bâtisse où elle avait achetée son petit havre de paix, avant qu'elle ne se dirige finalement en direction du couloir à droite pour atteindre la porte de son domicile et chercher mollement ses clés das son sac. Elle n'était pas discrète, grommelait et pestait contre le fait que cette « saloperie de trousseau » s'était encore engouffré au fond de son sac, et qu'elle n'arrivait pas à l'attraper sans mettre la main sur la boîte de chewing-gums qui le jouxtait. Mais finalement, elle vint placer la clé correspondante dans la serrure, et ouvrit enfin la porte avec une joie difficilement perceptible au vu de son faciès ensommeillé, rentrant dans les ténèbres de son appartement en ôtant immédiatement ses chaussures, en jetant son sac... et en s'arrêtant net, constatant malgré la pénombre qu'elle n'était pas seule.

« Bonsoir Madame Mueller... soyez la bienvenue chez vous...
 -  Que... qui êtes vous ? Que faites vous chez moi ? »

Si la femme a peur, elle ne le laisse pas pressentir, et semble même plutôt agir avec un certain sang-froid, la fatigue ayant laissé place à l'instinct primaire de conservation, celui qui oblige quelqu'un se sentant en danger de ne pas laisser sa vigilance s'évanouir, et l'oblige à agir en quelques circonstances que ce soit pour sa survie la plus imminente. Sa main se dirigea vers l'interrupteur, mais pour l'occasion, la lumière ne se fit guère dans l'appartement, malgré le cliquetis agréable qui laissait normalement entendre que le courant avait traversé les circuits pour offrir ce qu'il fallait aux ampoules pour s'illuminer. Quand à la porte qu'elle n'avait pas refermée de prime abord, elle ne put que constater, suite à son pas silencieux en arrière, que son talon frottait contre la surface épaisse de la traîtresse qui s'était refermée sans un bruit, prouvant par là que le système mécanique était en cause. Elle n'appréciait pas cela, l'idée qu'elle puisse avoir été piégée à cause de la fatigue, et de son manque de prudence n'était en soi pas des plus agréables, mais de savoir que l'automatisation de son appartement se retournait contre elle n'était pas foncièrement des plus plaisants non plus, elle qui avait justement fait poser une serrure à l'ancienne pour limiter en partie que quiconque puisse avoir les connaissances suffisantes pour retravailler l'intelligence artificielle de son appartement, et la retourner contre elle. Mais il fallait bien qu'elle l'accepte, la porte ne s'ouvrait pas, et même si sa main vint appuyer légèrement sur la poignée, sans le faux moment de crainte que la femme mimait, ce ne fut que pour s'activer dans le vide, la porte restant close par voie magnétique... Cela n'était pas bon du tout...

« Vous allez me répondre peut-être !? Qui êtes vous, et ne croyez donc pas que j'utilise le vouvoiement par forme de politesse, je me doute bien que vous n'êtes pas seule. »

En effet, elle n'était peut-être pas douée d'une fantastique capacité auditive, ou visuelle, son acuité se tenant pour quelque chose de parfaitement humain, car la mécanique, aussi efficace soit-elle, avait tendance à prendre de la place dans le circuit cognitif et qu'elle ne voulait guère faire l'impasse de son esprit sur ses capacités charnelles, elle savait tout de même que deux personnes ne pouvaient pas affecter à elle seule un tel bâtiment, à moins d'avoir son génie, ce qui était toutefois terriblement rare. Non, pour pouvoir affecter les caméras de surveillances, réduire la luminosité ambiante des couloirs, investir son domicile, et surtout l'attendre de manière aussi sereine au milieu de la pièce qui suivait, il n'était qu'envisageable qu'il y ai bien plus de monde que les deux femmes qui se trouvaient en face d'elle, se présentant sous tout bon rapport malgré le ton pinçant de la voix qu'elle avait entendue à son arrivée. Bon, elle serait bien incapable non plus de deviner combien de personnes s'étaient trouvées à agir en ce domaine, et si tout ce beau monde était concentrée dans son appartement, mais au-delà de toutes ces probabilités, le plus important était sûrement de savoir pour quelles raisons ce petit groupe se trouvait chez elle, à l'attendre, patiemment, et elle n'était clairement pas sure que la réponse allait lui plaire. Mais elle allait le savoir bientôt, quelques bruissements dans son domicile baigné de silence lui laissait entendre que quelques personnes étaient en mouvements, et que par là-même, les choses allaient sûrement s'envenimer. Seul problème, elle avait jeté son sac au sol, et son arme de défense se trouvait dedans... alors tout allait dépendre de sa réactivité !

8
Des vacances.

Oui, des vacances, non seulement c'était bien mérité, mais surtout, Luxienne commençait à sentir qu'à force de voyage inter-stellaire, sa chère camarade avait tendance à se trouver un peu trop souvent la tête dans les étoiles, au point même où, finalement, elle ne faisait même plus attentions à ce qu'il se déroulait dans la vie de  tout les jours, un peu comme si le cumul de ses voyages la menait lentement à une sorte de « mal de la terre ». Alors oui, c'était un brin prévu que les choses finissent par devenir ainsi, après tout Luxienne était loin d'être sotte, et sans même avoir encore voyagé au delà de son lieu natal, elle avait la quasi assurance que se trouver au milieu des plus fantastique des domaines, l'infini espace, ne pouvait finalement que provoquer cette espèce de fascination, de vague à l'âme profond pour ceux qui l'avait connu, et qui se trouvaient pourtant obliger de retrouver le plancher des vaches relativement fréquemment. Et, étant le case de Myriade, il devenait important à ses yeux que l'une, comme l'autre, fasse un petit départ loin de la zone pleinement technologique, puis dévastée de Tekos, pour finalement se diriger en direction d'un lieu où elles pourraient se reposer, se refaire une santé, et surtout profiter de la végétation et des terres pour pouvoir se remettre d'aplomb, s'assurant ainsi de revenir en pleine forme, mais surtout avec, en tête, la beauté d'un autre lieu, bien plus proche, que la profondeur infini du domaine spatiale. Et pour cela, il ne fallait finalement qu'une chose... qu'elle trouve le lieux où elles pourraient enfin s'arrêter et profiter du grand air.

Ce qui était somme toute bien complexe. Rares étaient celles qui partaient de Tekhos pour rejoindre quelques lointains pays, et encore plus rare étaient celles qui finissaient par s'y installer pour pouvoir, en quelques occasions, y démarrer une vie faite de travail honnête, et de situations plus ou moins typique d'un retard singulier envers la grande et magnifique ville technologique de Terra. Il était, à l'évidence, plus probable que du monde soit partie en direction du Royaume de vapeur, mais bon, si elle voulait absolument quitter son boulot un instant pour se ressourcer, ce n'était pas pour qu'elles finissent, Myriade et elles, dans une partie du monde technomagique remplit de singuliers idiots capable de tout faire pour prétendre être les détenteurs de la création du siècle, ou des charlatans qui auront tôt fait de jouer sur leur méconnaissance pour leur faire croire que leurs bidules sont en effet effectif. Non bien au contraire, elle cherchait une destination bien plus rurale dans le fond, quelque chose d'un peu éloigné du monde, agréable toutefois, où elles pourraient passer un doux séjours, auprès des fleurs, des arbres, et elle ne savait quoi d'autre. Alors elle fit jouer ses connaissances, chercha auprès de sa famille, et de ses amies, si il y avait quelqu'un qui avait déjà fait pareil voyage, et si il y avait dés lors une destination qu'elles pourraient lui conseiller pour pouvoir s'échapper un peu de la direction de la compagnie. Deux semaines de pareilles questions ne furent que trop peu pour qu'elle parvienne à trouver le moindre élément satisfaisant, et elle se préparait presque à se rabattre sur un tour en montagne quand, lors d'une tardive soirée, elle finit par trouver ce qu'elle cherchait tant, et ce avec un engouement qu'elle eut bien du mal à conserver, en témoigne son cri de joie qui vint réveiller la tête rose cachée sous les couettes dans la chambre d'à coté.

Ce qui lui était proposer était une ferme. Alors bon, pas mal de personnes considèrent généralement ce genre de voyage assez impropre à la condition d'une femme libre de Tekhos Metropolis, mais elle se trouva plutôt charmée par la présentation qui en était faite, ainsi que par la tenancière des lieux, qui prouvaient ses origines Tekhanes, sa bonne éducation, et sa nature pleine de bons sentiments et de travail dévoué. Le deuxième avantage, particulièrement important du point de vue de Luxienne, était cette possibilité d'un logement au lieu, celui-ci se trouvant somme toute clairement éloigné du moindre domaine de vie, ce qui l'amenait finalement à ne pas faire de demande quand à une possible chambre, mais plutôt de directement en louer une à celle qui s'occupait du domaine. Enfin, il y avait le fait que ce domaine se trouvait au delà des terres Tekhanes, dans une partie géographique bien rapidement nommée les terres sauvages, et qu'ainsi, elles auront non seulement tout la tranquillité du monde, mais pourront surtout s'y diriger le plus simplement du monde par engin aérien sans craindre de faire la colère de quelques seigneurs locaux, pour qui la présence de membre de la technopole pouvait créer certaines angoisses politiques. Tout simplement parfait. Elle n'eut qu'à enregistrer une demande, prévenir d'une date, et vint même offrir, de manière bien polie, un mail expliquant notamment son approche, mais aussi ses plus humbles sentiments envers la façon de vivre joliment présentée, et accomplie, de cette Tekhane qui vivait si loin de chez-elle désormais :

« Bien le bonjour à vous.
Je me présentes, Luxienne Mueller, directrice de la compagnie OESA.

Je vous soumet le présent message pour vous faire parvenir ma demande d'un séjour de quelques jours en votre compagnie, par le simple plaisir de découvrir un autre domaine que les hauteurs déroutantes et lourdes des buildings Tekhans, ainsi que le plaisir pittoresque de la campagne et des bêtes que nous saurions découvrir dans votre ferme.

Je me tiens à votre disposition pour la moindre information quand à notre venue (car je me dirige vers votre maisonnée en compagnie de ma chère et tendre), et souhaites de tout cœur que nous nous entendions sans le moindre problème, vous et moi, afin de passer un agréable séjour, où je serais ravie que vous m'appreniez vos manières, et la façon dont vous pouvez vous occuper de votre terrain, et des différentes bêtes s'y trouvant.

Avec l'égard de ma considération la plus sincère, et mes sentiments chaleureux.
Luxienne Mueller
 »

Ceci fait, il ne manqua guère aux deux femmes qu'à se préparer. Faire les bagages ne fut qu'une sinécure, chacune ayant le don de faire grand cas d'un rangement des plus ordonnés, ou plus exactement, Myriade faisant le travail pour les deux, comparativement à une Luxienne qui avait grande tendance à projeter ses affaires dans tout l'appartement sans jamais se poser la question de la propreté, ou de la tenue de la maisonnée. Prendre un véhicule volant ne fut guère embêtant non plus, la fortune de la femme aux longs cheveux bruns allant à de tels extrêmités qu'elle aurait facilement put se payer une compagnie entière sans jamais avoir à se poser la question de son budget, mais elle préféra simplement louer un petit transport rapide avec un camouflage modéré, afin de s'assurer que personne dans ces terres sauvage ne fasse une crise en voyant un oiseau de fer se balader au-dessus de sa tête. C'est que c'était nécessaire, ces camouflages optiques quand on se trouvait être le seul pays organisé et civilisé du monde. Enfin bon, chacune fit donc le tour de ses affaires, emportant ce qu'elle désirait pour une bonne semaine, puis l'une comme l'autre retournèrent à leurs travaux jusqu'à la date fatidique, où l'une comme l'autre quittèrent finalement l'Oesa pour se rejoindre à la compagnie de location. Luxienne fut en retard, faute d'avoir eut à choisir une remplaçante et de lui donner les directives nécessaire pour son absence, puis elles purent finalement  trouver leurs places à l'intérieur du transport volant, Myriade prenant rapidement les commandes, étant la seule à avoir une quelconque maîtrise en terme de déplacements aériens. La brune n'en tint guère outrage, et embrassa sa belle demoiselle aux cheveux roses pour finalement s'installer à ses côtés, une revue scientifique entre les mains.

Il était tard, et elles partirent sous le couvert des étoiles... Elles arriveront le lendemain matin, simplement, un peu fatiguée, mais avec une Luxienne déjà revigorée à l'idée de rencontrer cette Mora Linda, et de découvrir les lieux.

9
Le coin du chalant / Re : Ouverture au public de l'OESA
« le: jeudi 11 mai 2017, 22:36:17 »
Ce serait cool en effet mais...
Déjà il nous serait utile de finir le rp avec Belphy avant de nous attaquer à un autre rp non ?

10
Le coin du chalant / Ouverture au public de l'OESA
« le: mercredi 10 mai 2017, 14:32:27 »
Bonjour, bienvenue, et nos plus sincères salutations !
Ici seront répertoriées quelques idées de bases pour d'éventuels rps en compagnie de Luxienne, Myriade, ou les deux à la fois. Afin de vous simplifier la vie, voici un résumé léger autour des demoiselles pour pouvoir vous aider à trouver quelque chose qui saurait vous plaire :
Vivant ensemble, Luxienne et Myriade sont les deux principales représentantes du voyage spatial Tekhan. L'une dirige la firme permettant la construction des différents vaisseaux, l'autre est la pilote principale, celle qui, pour l'instant, reste l'unique personne agréée pour transporter quoi que ce soit en dehors de la zone orbitale Terrane. Chacune ayant ses propres occupations, elle n'en reste pas moins amante, et si Luxienne, de part ses origines, est une Tekhane purement homosexuelle, Myriade a quand à elle des idées bien plus libre en terme de sexualité, même si elle n'en fait pas vraiment le détail à ses connaissances.

Trame duo 1 : Vous êtes une officielle de Tekhos, une personnalité, une scientifique avec un projet ? Eh bien venez donc en discuter dans le bureau de dame Luxienne, en compagnie de sa charmante secrétaire.

Trame duo 2 : La vie de tout les jours est assez simple pour ces deux femmes... Sauf quand bien sur, un petit coup de douceur naturelle de la part de Luxienne ne l'amène à ramener n'importe qui à la maison ! Criminelle en fuite ? Chose instable ? A vous de nous dire de quelle manière vous comptez profiter de cette hospitalité.

Trame Luxienne : Toujours à la recherche d'informations complémentaires vis-à-vis de son amante, et de l'enfant de sa soeur, la scientifique traîne parfois son nez dans des recoins peu accueillant, l'armée, ou le service d'espionnage par exemple. Alors que vous en fassiez partie, ou que vous soyez engagée pour lui tirer les vers du nez, allez-y, ne vous retenez pas !

Trame Myriade : L'espace, si grand, si beau. L'avantage de l'OESA, c'est que sa méthode de voyage stellaire est déjà très efficace... le désavantage, c'est qu'ainsi on peut rencontrer de bien problématiques événements. En serez vous ? Ou au contraire, faite vous partie des personnes accompagnant la femme aux cheveux rose ? Les passagers clandestins auront toute valeur à être aussi reconnu par l'équipage comme personne ayant rapidement besoin d'un retour sur Terra !

En gros voici de petites propositions, renouvelables et modulables, aussi n'hésitez donc guère à faire tout les commentaires nécessaire, où à me contacter par messagerie privé pour que nous en discutions !
Dernier détail, mais je répond bien plus aisément et rapidement sur Darthestar, aussi ayez tendance à privilégier un contact via sa boîte de messagerie.

11
Tu me hais ma chère Louve ?
Il ne faut pas voyons ^^ Merci ma chère !

Et ne t'en fais pas Ikami, y'a rien de grave, pas besoin de présenter des excuses.

12
Prélude / Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.
« le: vendredi 05 mai 2017, 11:50:46 »
Merci à vous trois, Cassidy, Ahri, et Ikami.

Bon par contre ... Deux posts mister Naiko ? Vous comptez bien mal, il y en a 4 en tout ^^ !

13
Prélude / Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.
« le: jeudi 04 mai 2017, 21:23:22 »
   Aussi étrange cela fut-il pour la dame affolée, mais le ton de son interlocutrice ne portait ni trace de rejet, ni de colère, et encore moins de ressentiment... Elle semblait juste fière d'avoir prononcé son nom et son prénom, et semblait à coté passablement perdue, comme si elle n'avait pas du tout conscience de ce qu'il venait de se dérouler, et qu'elle était juste sortie d'un rêve, un peu trop brusquement pour retrouver ses repères dans la réalité. D'ailleurs, au vu de la beauté de cette « enfant », il était en effet envisageable pour Luxienne que la demoiselle ne soit qu'une entité céleste, rêvée par quelque citadine en manque de réconfort charnel, et que cette dernière était tombée du songe à la réalité sans grande raison, pour débarquer soudainement au devant de ses roues. En tout cas, peut-être que les mots de la fameuse Myriade, détendus et peu vindicatifs eurent au moins un avantage certain, celui de rappeler un peu la scientifique à la réalité, de lui permettre de se rendre compte qu'elle parlait à une adolescente dénuée de tenue, et que sa nudité dans le froid des environs était peut-être agréable à sa vue, mais ne devait pas manquer de faire l'inconfort de son interlocutrice, perdue dans le froid nocturne... Enfin, la femme reprenait un peu du poil de la bête, ne craignait plus d'avoir produit une grave faute sur le territoire de Tekhos Metropolis, et se précipita donc en propos un peu désordonné, mais qu'elle espérait au moins assez clairs pour celle qu'elle venait de rencontrer, afin de lui indiquer quelques directives rapides, sûrement un peu plus propres à la situation que de bien agréables, mais futiles présentations.

« Tu... Tu dois être gelée, non ? Installe-toi donc dans la voiture, j'ai des vêtements dans une valise !Tu n'es pas blessée hein ? Tu me l'assures ? Oui bon euh, monte sur le siège conducteur, je vais chercher ce qu'il faut. »

   Elle lui tourna le dos, et vint à se diriger vers la partie arrière du véhicule, ouvrant la portière avec hâte pour aller quérir son sac du bout du bras, l'attirant jusqu'à elle pour l'ouvrir rapidement et chercher dedans quelques unes de ses tenues qui sauraient couvrir la nudité de la jeune femme, quitte à ce que ce soit un brin grand, mais au moins pour s'assurer que le froid ne pénètre pas sa chair, et ne vienne lui offrir un rhume ou quelques maladies désagréables. Pour être parfaitement honnête, elle ne comprenait pas bien pourquoi elle faisait cela, hormis le sens du devoir, le fait de ne pas laisser une si jeune femme dans le froid et complètement dénudée, car il n'était pas vraiment de bon aloi de traîner seule dans les ombres sans la moindre tenue, mais malgré tout elle se sentait la prime obligation de prendre soin d'elle, comme si soudainement elle était investie de cette mission alors même qu'elle ne savait que peu de cette demoiselle aux yeux turquoises. Alors Luxienne fouillait vivement ses affaires, faisant fi pour l'instant des sous-vêtements et autres vêtements de peu d'importance pour essayer de déceler parmi le bordel de ses affaires quelque chose comme un gros pull et un pantalon solide, des tenues dont le confort ne saurait que se prouver salutaire, et elle était tant concentrée sur sa tâche qu'elle ne fit même pas attention aux bruits de pas lents qui se rapprochaient d'elle, qui se trouvaient dans son dos, la laissant pleinement vulnérable au moindre problème envisageable. Dans d'autres lieux, d'autres circonstances, tout aurait pu arriver à la scientifique. Là, bienheureusement, seule la surprise vint la cueillir.

. . . . .

   Myriade avait bien du mal à comprendre ce qu'il s'était déroulé, ayant quitté son état de « méditation » de manière bien soudaine pour se retrouver finalement face à cette femme, belle, surprenante, douce, quelque chose qu'elle n'avait jamais vu au travers de ses tortionnaires, au travers des autres scientifiques. Elle était là, et la questionnait, la regardait comme un être humain, et en même temps comme quelque chose qu'elle semblait ne pas oser concevoir ou comprendre, comme si elle n'avait jamais eu l'occasion de connaître l'existence d'être de sa création. Elle était avec elle comme elle pourrait être envers une autre citoyenne, elle n'en doutait guère, mais tout cela était... agréable, touchant ? De manière quasi instinctive, complètement arbitraire, le projet inconnu se sentit lentement attirée par celle qui venait de lui parler, de s'inquiéter pour elle, puis de courir vers ses affaires pour lui en offrir, elle qui se trouvait nue comme un ver, sachant pourtant pertinemment que toute personne civilisée portait normalement des vêtements. Myriade venait-elle de trouver son attache ? Elle ne le savait guère mais ses pas la menèrent lentement sur les propres traces de celle dont elle venait de faire la rencontre, et sans un mot elle se glissa dans son sillage, oubliant volontairement les conseils de cette dernière pour dépasser le siège conducteur, puis se trouver dans son dos, la regardant fouiller frénétiquement son sac, en rejetant une partie des affaires s'y trouvant sur le siège arrière du véhicule. Elle l'appréciait, beaucoup, elle avait envie de rester auprès d'elle. Myriade avait froid aussi, alors elle n'attendit point, et réduisant encore un peu la distance entre elles, la jeune expérience tout juste libre se lova dans son dos, vint se coller tout contre la femme aux longs cheveux bruns, goûtant à la chaleur d'un contact humain... Et elle sut qu'elle ne voulait plus quitter cette dame au demeurant si généreux.

« Madame Luxienne ? Je veux vous suivre. Je n'ai pas d'endroit où me réfugier... Je n'ai pas d'endroit où vivre... Laissez-moi rester avec vous ! »

   Elle avait été directe, mais elle suivait son instinct. Elle savait que la femme prendrait soin d'elle, elle le sentait, et elle savait aussi de manière certaine que cette personne, qui en pleine nuit s'arrêtait pour faire attention à elle sans même faire preuve de la moindre méfiance, du moindre doute, était digne de sa confiance, de son attachement, de son appréciation. Elle avait bien ressenti que cette personne s'était tendue, les fibres de ses muscles ayant répondu instantanément à la surprise qu'elle venait de lui offrir, mais pour autant elle ne fit même pas le plus petit geste pour la repousser, interdite, et sûrement estomaquée par l'information soudaine qu'elle venait d'obtenir. Myriade ne doutait pas qu'elle pouvait refuser, après tout elle ne la connaissait que depuis quelques instants, et elle pourrait trouver cette invitation tellement étrange, tellement saugrenue, que comme beaucoup de monde elle n'aurait qu'à faire un rapide pas en avant pour se soustraire du contact soudain, et fermer la portière pour la laisser ici, sans d'autre réponse que le déni... Mais elle n'était pas comme les autres, et au bout de bien longues secondes, elle la sentit tourner lentement la tête, et la regarder avec un air confus, un peu perdu, un doute profond dans le regard. Sûrement se demandait-elle si elle pouvait faire cela, si même l'inconnue de la route ne venait pas de fuir une situation désastreuse pour sa jeune personne. Dans les pupilles brunes se trouvait l'apparence du choix, d'une décision importante, et pour l'occasion, Myriade n'avait pas tort un seul instant sur ce qui se déroulait dans l'esprit de Luxienne... qui ne parvint finalement qu'à s'exprimer de manière douce, incertaine, mais accueillante dans le ton, comme si elle venait d'accepter que le destin prenait parfois des décisions à sa place, et qu'elle n'avait d'autre possibilité que d'accepter celle-ci.

« Je n'ai moi-même pas de logement fixe à l'heure actuelle... Tu es sûre de vouloir me suivre ? Non pas que je refuserais, mais ma situation est...
 -  Certaine, je ne veux être qu'avec vous. »

   Quelque chose dans la voix de l'adolescente ne laissait même pas place au doute, ou au refus de la part de la concernée. Elle aurait pu tout dire, lui exprimer qu'elle n'avait rien pour elle, qu'elle ne pouvait s'occuper d'une jeune femme, ayant déjà bien du mal avec sa propre condition, ou qu'elle était en chemin pour une affaire importante qui ne pouvait être reportée, Luxienne pressentait tout de même qu'elle n'aurait aucune possibilité de refuser ce rapprochement, alors que le corps léger et délicat de la jeune fille continuait de se lover dans son dos. Elle se décala un instant tout de même, quittant le contact de la demoiselle aux yeux turquoises, et quand elle vint à se trouver nez à nez avec elle, observant son visage attentivement, y remarquant cette étrange lueur dans les yeux, elle n'eut même pas la force de s'imaginer résister à son injonction. Quelque part, peut-être que la scientifique ressentait qu'il était déjà trop tard pour faire marche arrière d'une quelconque manière, et elle vint la prendre dans ses bras, lentement, pour l'approcher de sa poitrine, et la conserver tout contre elle, lui offrant dès lors autant sa chaleur que son affection, son appréciation. C'était illogique, inconcevable pour la partie la plus stricte de son esprit, mais dans un autre sens elle acceptait que parfois, un événement aussi étrange ne puisse trouver de justification. Elle allait prendre soin de cette jeune femme, et de manière assez rapide, après l'avoir étreinte, elle la relâcha pour prendre d'une manière bien plus calme, bien plus sereine, deux épais vêtements qu'elle vint à lui tendre sans la moindre hésitation, avant de lui parler avec un tout empli d'une bienveillance désormais souveraine dans sa manière de concevoir l'incongrue situation :

« D'accord. Habille-toi Myriade, nous allons trouver un endroit où dormir au chaud, et tu m'expliqueras ce que tu faisais ici, d'accord ?
 -  C'est promis, répondit vivement la jeune femme en enfilant à la hâte la tenue réconfortante, puis prenant place dans la voiture, tandis que Luxienne partit pour redémarrer celle-ci, et se remit en route, à la recherche d'un quelconque hôtel. Merci.
 -  Je... Tu n'as pas besoin de me remercier. Nullement besoin. »

   Si elle comprendra un jour pourquoi le destin l'avait mise sur sa route, pour l'instant, elle n'y comprenait rien, mais avait juste fait un choix crucial, et tout simplement irresponsable selon elle : elle prendrait soin de cette adolescente, et avec un peu de chance, pourra même lui offrir quelque chose de bien plus important qu'elle n'aurait jamais pu l'imaginer, une vie simple, et normale.

. . . . .

   Si Luxienne eut fort à faire pour trouver un moyen de prendre soin de la jeune femme qu'elle avait recueillie dans les jours qui suivirent, ce ne fut pas pour rien, l'adolescente semblant étonnement peu au courant des us et coutumes des citadines, non sans parler de sa curiosité sans faille sur les différents éléments qu'elle semblait découvrir , de manière bien surprenante, comme le simple fait qu'un lit avait été source de multiples discussions, ou qu'une cafetière avait presque été insultée d'outil du diable au vu de sa capacité à faire couler de l'encre de manière continue et profuse. Finalement, la scientifique avait l'impression de devoir prendre soin d'une jeune femme dans le corps, mais d'une jeune enfant dans l'esprit, et le rapprochement forcé qu'appliquait Myriade envers sa tutrice avait peut-être comme avantage de leur offrir bien des instants pour que la cadette Mueller puisse lui enseigner ce qu'elle savait, mais cela avait aussi le défaut de montrer à la femme aux cheveux bruns le manque clair de retenue et de sang-froid que possédait parfois sa protégée, celle-ci étant capable de passer par des phases de panique, ou de trouble, si violentes qu'elles avaient tendance à la désarçonner. Mais elle faisait l'effort, et si pour l'instant elles ne vivaient toutes les deux que dans une pauvre chambre d'hôtel que la scientifique avait pris soin de louer discrètement, de peur qu'on ne la prenne pour une proxénète vu qu'elle avait dans la main une jeune fille à la nudité parfois troublante, ce n'était pas pour autant que les deux ne parvenaient pas à s'y plaire, Luxienne développant bien malgré elle un attachement croissant face au comportement aimant et attendrissant de l'adolescente.

   Le seul bémol de cette histoire, c'est qu'elle n'avait pas encore eu le temps de contacter sa sœur, ou le personnel exécutif du domaine scientifique pour mettre en marche son projet, et commencer à établir son plan premier, qui était malgré tout la raison pour laquelle elle était revenue à Tekhos Metropolis à la base. Elle dut ruser par plusieurs fois pour tenter d'ailleurs d'approcher le téléphone, Myriade étant tant et tant incapable de ne pas chercher l'attention de celle qu'elle avait choisie comme soutien, comme compagne, comme mère et comme unique famille, qu'elle avait eu la malheureuse tendance à l'empêcher de se déconcentrer d'elle, toujours en allant pour l'obliger à se tourner vers elle, à l'observer, à lui parler encore et encore de ce monde, ou d'elle-même. Finalement, ce fut tard dans la nuit, quand elle put s'assurer que la jeune femme soit bien endormie, qu'elle ait trouvé le plus profond des sommeils, le plus doux des repos, que Luxienne parvienne enfin à s'éloigner un peu sans qu'elle n'ouvre immédiatement les yeux pour la rattraper, et la ramener contre elle, une expérience qu'elle avait d'ailleurs déjà vécue, et dont elle avait compris que ses futiles résistances ne sauraient la sauver, tant l'étreinte de l'adolescente était puissante et implacable. En tout cas, ce soir-là, elle put enfin quitter la pièce principale, et vint chercher le téléphone accroché a mur dans l'entrée, avant de commencer à taper tranquillement le numéro de Dénève, puis de lancer un appel, le plus calmement du monde, se préparant déjà à s'excuser pour l'heure tardive, avant quelle ne se trouve bien surprise d'entendre sa sœur décrocher immédiatement après le premier signal, bien trop alerte pour être en train de dormir :

« Allô, Dénève Mueller, j’écoute...
 -  Bonsoir grande sœur, je ne m'attendais pas à ce que tu répondes si vite !
 -  Luxienne ! Bon sang, tête de nœud, j'avais plus la moindre nouvelle depuis que tu m'avais annoncé ton retour, je me suis fait un sang d'encre !
 -  Pardon, je suis désolée pour cela, mais je dois avouer que j'ai eu... un petit problème, une surprise, qui d'ailleurs ne m'a pas vraiment laissée approcher du combiné... Enfin, que fais-tu levée à cette heure ?
 - … Une surprise qui ne me laisse guère me reposer...
 -  Est-ce que cela sous-entend une partenaire se...
 -  Tais-toi, tais-toi de suite ou je viens te voir pour t'étrangler ! »

   Elle ne put s'empêcher de rire à la réaction si vive de sa sœur. C'était étrange de se retrouver ainsi, de se savoir si proche, dans la même ville, mais qu'elle ne pouvait pas encore faire autrement qu'échanger par téléphone, Luxienne pour une raison qui sommeillait à quelques pas d'elle, et Dénève pour des raisons qu'elle ignorait, mais qui semblaient assez importantes du point de vue de sa sœur pour qu'elle n'accepte pas qu'on fasse preuve du moindre humour à ce sujet. En tout cas, même en dehors du fait qu'elle adorerait la voir, et que cela ne semble guère possible en l'état actuel des choses, elle vint à sourire avec grande joie en entendant les propos de son aînée, et prenant tout de même le temps de calmer son léger rire, non seulement parce qu'elle ne voulait pas vexer la plus proche membre de sa famille, ni réveiller la plus proche demoiselle des environs, elle fit l'effort de se concentrer pour finalement tourner son esprit vers les sujets les plus importants, voire même urgents. C'est donc de manière bien surprenante pour la femme se tenant de l'autre coté du fil que la voix de Luxienne vint soudainement se faire plus claire, plus directe, plus simple aussi dans son ton, mais surtout beaucoup plus assurée qu'elle ne l'avait jamais été, alors que le propos prit de suite le tout de son sérieux. Aller, première étape, prévenir Dénève de son projet, et lui demander de contacter si possible le personnel capable de financer tout cela. Deuxième étape, lui demander de plus amples informations sur ce qu'elle avait recherché depuis son arrivée dans la chambre d'hôtel, afin de découvrir qui est la jeune demoiselle désormais sous son aile :

« Désolée grande sœur. Bon je ne t'appelais pas pour te taquiner, mais j'avais besoin de te parler, rapport à ce fameux projet que j'ai théorisé, ainsi qu'un autre un peu plus particulier.
 -  Je t'écoute.
 -  Tu t'y connais mieux que moi, j'aurais besoin que tu me mettes en contact avec d'éventuels investisseurs. Des personnes capables de débourser de manière à ce que je puisse acquérir un siège d'action, et énormément de matériel.
 -  Cela va être compliqué, tu n'as que peu de notoriété scientifique, encore plus maintenant que tu es sortie du circuit depuis plusieurs années.
 -  Tu peux le faire ?
 - … Y'a des chances. Je te tiendrais au courant... Et sinon quel est l'autre sujet ?
 -  J'ai besoin que tu me fasses une recherche sur la compagnie Firmament, notamment sur leurs derniers projets d'armement. J'ai vu qu'ils avaient été placés sous « coque », mais... Mais je crois que quelqu'un est sorti de celle-ci... Dénève ? Dénève tu es là ?
 -  … Couleur des cheveux ? »

    Le ton que l'aînée venait d'employer ne laissait pas vraiment de place aux doutes, non seulement elle savait pertinemment ce qui s'était passé à la compagnie Firmament, mais surtout elle avait eu le soin de comprendre immédiatement que sa sœur ne s'intéressait pas à ce sujet sans raison. Et Luxienne comprit tout aussi bien que Dénève n'était pas foncièrement enchantée de savoir qu'elle avait recueilli la jeune adolescente :

« Rose...
 -  Elle est dangereuse, Luxienne.
 -  Elle est perdue.
 -  Tu me fatigues, bon sang ce que tu peux être épuisante. Il a fallu que tu rentres au pire des moments, et en plus tu as trouver le moyen de te compliquer la vie avant même d'arriver à bon port...
 -  Que veux-tu, je suis pas à l'aise dans le rôle de la Tekhane modèle.
 -  Je ne répondrais pas à cela ! Bon, je sens que tu ne vas en faire qu'à ta tête, alors je vais t'envoyer les informations que j'ai, mais je te prie de considérer que tu n'as pas affaire à un être humain !
 -  Oui oui, bien entendu.
 -  Le ton n'y est pas... Enfin bon, tu auras tes informations dans la semaine, autre chose à dire avant que je n'aille déchirer mes oreillers de frustration, à cause d'une imbécile de petite sœur suicidaire ?
 -  Un grand merci Dénève, je t'aime !
 -  Je t'aime aussi insupportable petite peste. A tout bientôt. »

   Et l'appel se termina, laissant alors la cadette, dans le noir, un doux sourire aux lèvres, poser le téléphone sur son support pour quitter le couloir et retourner auprès de celle qu'elle avait si étrangement rencontrée il y a de cela plusieurs nuits. Dangereuse ? Sûrement, elle avait remarqué lors de son dernier déplacement que la résine utilisée pour condamner un bâtiment avait été brisée, juste devant l'endroit où elle l'avait récupérée, mais... Elle était aussi dangereuse qu'incapable de désirer la douleur, ou l'affrontement. Elle s'en était rendu compte assez vite, la jeune demoiselle n'avait dans le fond que le souhait de la liberté, de la vie hors de sa cage, et sa curiosité, autant que son être tout entier, exprimait finalement qu'elle aimait ce qui l'entourait, et qu'elle voulait par dessus tout faire attention à ses gestes pour ne rien briser, ne rien abîmer. En quelques jours, Luxienne avait bien remarqué que cette adolescente luttait presque contre elle-même pour ne pas devenir une source d'ennuis, de problèmes, et elle trouvait cela non seulement incroyablement touchant, mais surtout honorable, de la part d'un être qui devait sûrement posséder en son cœur nombre de griefs envers l'unité scientifique de Tekhos Metropolis, et qui aurait ainsi pu largement quitter un comportement aussi pacifique pour se lancer dans une action bien plus vindicative et violente. Alors non, elle ne voulait pas l'abandonner, elle ne voulait pas suivre les sous-entendus de sa sœur, et l'abandonner à des autorités qui ne sauraient que lui offrir l'occasion de perdre le contrôle, et de devenir ce qu'elle ne souhaitait être, un monstre.

   Non, elle voulait plutôt accepter son attachement, et, se posant sur le bord de son lit, passant tendrement ses doigts dans la tignasse rose de la jeune demoiselle, elle se promettait de continuer de veiller sur elle, de la protéger, de la garder le plus affectueusement possible à ses côtés... Parce que ce petit bout de femme l'avait choisie, elle, sans chercher à lui demander ce qu'elle faisait là, sans lui demander si elle allait lui faire du mal... Elle lui avait offert le tout de sa confiance, et au plus profond de son cœur, Luxienne savait pertinemment qu'elle ne pourrait jamais briser pareil présent.

. . . . .

   Les informations que détenait Dénève lui furent envoyées quelque jours plus tard, et si ce ne fut pas la surprise qui l'affecta, ce ne fut pas pour autant que Luxienne ne manqua pas de ressentir un léger pincement de cœur en observant la jeune femme qui se trouvait actuellement à dormir auprès d'elle. Si calme, si douce, si tendre, elle ne s'était guère imaginé que cette demoiselle qu'elle avait eu l'audace de récupérer en pleine nuit était si dangereuse, en contrepartie de son bon comportement, qu'elle se trouvait littéralement en compagnie d'une forme de vie créée de toutes pièces et dont le seul et unique but premier était la destruction et la mort. Pourtant, quand elle vint à finir le message, elle eut l'étrange et intime conviction que sa sœur n'avait plus vraiment le don de lui offrir un propos aussi tranché, et qu'elle l'invitait presque à la garder à ses cotés pour lui apprendre une autre forme de vie, une autre façon de voir le monde, et comme ci cela n'était pas suffisant, elle put même lire entre les ligne une invitation des plus singulières, à savoir d'offrir à Myriade le statut de native de Tekhane, pour s'assurer qu'elle puisse avoir les même droits que ses consœurs. Honnêtement, cela prendrait du temps, mais il était vrai que s'il y avait bien un moyen de lui permettre de vivre convenablement, elle se trouverait dans l'obligation de cesser de la cacher aux yeux de tous, et de lui prouver par  la même qu'elle était tout à fait apte à vivre comme chaque femme se trouvant dans ce beau pays. Fermant le clapet de son ordinateur portable, elle ne manqua pas de commencer à réfléchir à ses actions futures, et si le planning lui paraissait serré, elle comptait bien contre-balancer pareille complexité par une efficacité à nulle autre pareille...

   Un mois, puis deux, et elle commençait déjà à sentir que les choses allaient se dérouler sans le moindre accroc. Elles commencèrent à sortir au dehors, tout d'abord pour pouvoir chercher, à droite ou à gauche, et en laissant à la chance toute possibilité de s'exprimer, un logement qui saurait convenir à la scientifique et à sa protégée, enchaînant avant tout les appartements de bonne qualité pour pouvoir cumuler le confort monétaire, et la joie de vivre dans un lieu assez digne pour que les deux femmes ne se marchent pas dessus. De même manière, et avec un plaisir relativement optionnel, Luxienne eut toute occasion de faire face à l'administration Tekhane pour faire enregistrer Myriade en tant que citoyenne, et put enfin découvrir que si son aisance au langage et sa vivacité d'esprit étaient de grands avantages dans de telles situations, sa beauté naturelle commençait aussi à faire ses preuves, et plus d'une personne soutenait une réponse plus rapide si elle avait le don de répondre à certaines attentes... Il ne lui fallut que choisir entre l'accord ou le chantage face à de tels propos pour faire avancer la procédure. Et puis, parallèlement à tout cela, elle faisait l'éducation de celle qui s'était infiltrée dans sa vie sans prévenir, avec ses yeux d'une si belle couleur, et cherchait à lui offrir la plus grande partie de son savoir, trouvant chez elle une élève attentive et sérieuse, ce qui ne manqua guère de faire sa fierté. Ceci, cumulé au simple plaisir de ne pas être à nouveau seule, et d'avoir quelqu'un avec qui échanger à chaque jour que Dieu faisait, était une source intense de satisfaction pour la femme, qui put finalement trouver le calme nécessaire pour s'attarder à de plus importants projets...L'OESA.

   Bon pour l'instant cet acronyme ne voulait guère dire grand chose, mais grâce aux contacts de sa chère aînée, et du temps qu'elle parvenait à s'allouer pour passer coups de fil et envoyer d'autres importants messages, elle se mit lentement à mettre en place le système de financement nécessaire à son grand projet, et se préparait même à une des entrevues les plus importantes de son histoire. De sa requête, trois réponses des plus intéressées avaient fait écho, et si la date n'était pas encore définitive, elle ne manqua guère pour autant de préparer une présentation des plus claires, des plus précises, chiffres à la clé, ainsi qu'explication du projet sur son évolution dans la durée au vu des différents soutiens monétaires qui pourraient lui être proposés. Finalement, dans ces moments-là, où elle se trouvait penchée sur ses feuilles pendant de longues heures, le plus dur était de faire accepter à Myriade qu'elle devait se concentrer, et que donc elle ne pouvait la soutenir dans son ennui croissant, jusqu'à ce qu'elle cède finalement devant les grands yeux implorants de la demoiselle, et qu'elle finisse par rattraper son retard dans la nuit. D'ailleurs, elle eut fini sa présentation bien avant que la date du rendez-vous ne soit atteinte, si bien qu'elle eut tout le bonheur et l'amusement de se préparer à cette rencontre en compagnie de sa chère camarade de vie, cette dernière ne manquant pas de lui poser parfois des questions particulièrement pointues, la déstabilisant assez souvent, mais lui offrant dès lors le soin de corriger ou de préciser son discours avec empressement.

   Et en six mois, elles avaient un logement, ainsi qu'une carte d'identité pour la jeune Myriade, qui n'arrivait même pas à s'en détacher, la gardant auprès d'elle comme la preuve de sa vie Tekhane, et de sa liberté désormais assurée. Ne restait finalement à Luxienne qu'à rendre son projet vivant, qu'à le concrétiser, et la date de son entrevue approchait à grand pas.

   En moins de temps qu'il n'en fallut, elle se retrouva là, dans cette pièce aux murs simples, à la table ronde exagérément grande pour le nombre de personnes conviées, et sortit lentement son premier rapport pour le tendre en direction des trois femmes qui se trouvaient là, à la regarder d'un air intéressé mais glacial, avant de commencer à présenter son projet, théorie à la clé.

« Mesdames, je vous remercie de vous être déplacées pour m'offrir un peu de votre temps. Je suppose que vous avez pris le temps de vous informer un peu sur ma personne, et je souhaite que vous ne voyez guère en mon absence de la capitale un manque de sérieux, mais le besoin de préciser mes idées, et mes savoirs, dans le but de vous offrir aujourd'hui un projet viable, clair, et dont la réussite n'est affaire que de ressources. »

   Elle prit une pause, avant de se redresser, et de se diriger vers le tableau nécessaire à ses explications, ramassant un marqueur sur le chemin pour commencer à inscrire les éléments les plus importants de sa thèse à mesure qu'elle en faisait la présentation.

« Ce projet, nommé OESA, pour Organisme d'Exploration Spatiale Avancé, est ici pour palier à l'un des plus grands problèmes de notre société pourtant si avancée : l'envoi de véhicule au delà de notre territoire en direction de l'espace, du vide stellaire. Si je dois vous faire un résumé rapide, avant d'entrer dans un propos plus détaillé, je me permettrais de dire que nous avons toujours eu le savoir, les matériaux, les forces et les ressources pour pouvoir le faire, mais nous bloquions sur notre énergie, dont les valeurs de puissances trop importantes menaient nos tentative à l'auto-destruction. Nous, peuple Tekhan, avions tant et tant progressé que nous manquions de base, tout particulièrement pour de premiers tests en vue de calibrages, et de précisions, sur nos données et informations en matière d'évolution spatiale. »

   Elle prit un fascicule, l'ouvrit à la page la plus importante pour souligner son propos, et l'envoya glisser le long de la table pour se trouver en face des trois femmes, qui la regardèrent avec un mélange d'intérêt et de doute. Elle avait accroché le poisson, il était temps que le reste de sa présentation vienne à annihiler leurs réticences quant à son projet. Tant mieux, elle avait du temps.

« Je compte faire un pas en arrière, prendre le temps de développer une technologie précise, peut-être ancienne du point de vue du monde Tekhan, et me baser sur les résultats de cette création pour transposer le tout sur une base technologique équivalente à nos meilleures productions. Ce que je vous propose, mesdames, c'est de me soutenir, financièrement, pour un projet dont le coût sera de toute manière bien inférieur, car passéiste, et de nous revoir au terme des premiers résultats afin de définir les besoins de l'entreprise pour transformer cette phase de test en le fleuron du travail spatial Tekhan. Ce projet ne vous lance dans aucun risque, mais sa réussite, son aboutissement, aura de quoi vous assurer une place bien supérieure à tout ce que vous avez pu imaginer en terme de domination technologique. Avant de poursuivre, toutefois, je souhaiterais entendre vos avis, vos questions, pour m'assurer de votre coopération.
 -  Votre projet... j'attends d'en connaître de plus amples détails, malgré votre prétendu génie. En revanche, quoi que vous fassiez, il va vous falloir une équipe, un lieu de travail, et je ne crois pas que vous ayez quoi que ce soit pour parvenir à monter cela suffisamment rapidement pour être efficace, même en considérant la viabilité de votre travail.
 -  Une équipe, je peux vous assurer de sa formation dans un délai de deux semaines, en considérant que je puisse hausser un peu le prix du salaire étant donné la largesse monétaire qui me serait attribuée, au vu du faible coût de notre première phase d'accomplissement du projet. Et un lieu, j'en ai un aussi, car je compte demander le rétablissement de la zone de recherche Firmament, selon les lois 458-a, et 463-c du code scientifique Tekhan. »

   Un court silence... Puis une des trois femmes s'exprime après un rapide coup d’œil auprès de ses camarades, un léger sourire aux lèvres :

« Continuez donc, nous sommes toute à votre écoute. »

. . . . .

   La réponse ne tarda guère à venir, une semaine après leur entrevue, le résultat était unanime : non seulement elle obtenait les fonds suffisants pour mettre ses recherches en marche, mais elle avait obtenu en sus de quoi employer une équipe complète, et ne lui restait plus que l'accord juridique viable pour prendre possession du bâtiment de l'ancienne compagnie Firmament, afin de s'y installer de manière claire, et de commencer à mettre en place le projet. Le seul détail gênant à cela venait de la loi 458-a, stipulant « qu'un bâtiment qui a été condamné ne pouvait être réutilisable et rendu à une entreprise scientifique qu'à la preuve ultime que celui-ci ne portait en lui aucun élément capable de mettre en danger le peuple Tekhan », et ainsi qu'il était du devoir de Luxienne de s'y rendre, en compagnie d'un groupe armé, afin de produire une observation minutieuse des lieux. Pour être parfaitement honnête, elle vint à profiter des fonds qui lui avait été offerts pour contacter une personne des plus utiles, Dame Enorie, chasseuse de prime et passable brigande, pour l'employer deux jours avant sa venue dans les locaux pour s'y faufiler, et ôter les quelques éléments dangereux s'y trouvant, sa grande sœur lui ayant passer une liste des éléments troublants qui avait valu la fermeture obligatoire de la compagnie, et l'élimination d'une partie des chercheuses qui s'y trouvaient. Point besoin de préciser qu'elle eut aussi le don de lui offrir une bombe de résine, obtenue sur le marché noir, afin qu'elle puisse reboucher le trou une fois sortie, ce qui fut fait avec un savant savoir-faire... Quelques magouilles ne sauraient lui faire de mal n'est-ce pas, surtout quand elle était capable de s'arranger pour que les données les plus dangereuses disparaissent d'elle-même.

   La visite ? Elle se fit sans encombre, rien ne put être découvert dans les environs, et seul un éboulement fut remarqué dans la zone la plus basse de la structure, réduisant le matériel technologique en pièce. De même, les données les plus dérangeantes, celles qui avaient valu la fermeture des lieux se trouvèrent être corrompues, détruites par quelque virus ou technologie visant à crypter des informations de manière irréversible sans le code nécessaire, et il fut accepté par tous que leur élimination n'était donc pas une grande perte, ce qui permit à la femme de s'assurer tranquillement d'effacer elle-même, et avec un soin tout particulier, les données qui pourraient permettre un jour de comprendre que sa protégée n'était pas humaine, comme elle l'avait signifié dans les papiers de citoyenneté. Tout se déroula donc comme elle l'avait prévu, et ce fut sans la moindre hésitation de la part des hautes instances qu'elle put rapidement former l'OESA au cœur du bâtiment, les lieux passant de vides à effervescents en moins d'une journée, le tout sous le regard ravi d'une femme qui sentait enfin trouver sa place au cœur de l'univers scientifique de Tekhos Metropolis. La prochaine étape serait, bien entendu, de s'assurer qu'elle puisse rapidement quérir les parts de société suffisantes pour ne plus avoir besoin du soutien de ses créditrices, mais elle avait deux bonnes années devant elle pour s'en occuper, aussi se permit-elle enfin une détente fortement appréciée, et se tourna donc bien plus vers un sujet d'importance : sa protégée.

   En effet, Myriade grandissait, et il fallait absolument que Luxienne s'assure de lui trouver une place agréable en ce monde, où elle ne saurait souffrir de ses activités, ou de ses connaissances, si bien qu'elle eut la belle idée de lui trouver elle-même un emploi dont elle pourrait être fière une fois qu'elle aurait atteint l'âge nécessaire à celui-ci. Toutefois les discussions autour de ce sujet furent rapidement avortées par la demoiselle aux cheveux rose : elle ne comptait ni quitter la scientifique, ni même se trouver loin d'elle plus d'une journée, et ce ne fut pas sans de longues tentatives de la part de la belle brune pour l'inviter à trouver un moyen de vivre sans elle. Non, Myriade était claire à ce propos, si elle devait vivre quelque part, c'était aux côtés de Luxienne, et rien au monde ne saurait lui faire choisir une autre façon de concevoir ce monde.

   Alors, lentement, une autre idée leur vint en tête. Myriade, dans toute son enfance, dans toute sa vision de la beauté de ce monde, où elle pouvait vivre libre, loin des expériences, loin des cages et des essais, n'avait toujours eu que le souhait de rejoindre les étoiles, et de pouvoir un jour s'y laisser porter avec toute la joie du monde, de manière insouciante... A la lumière de ce constat, Luxienne vint un soir avec une proposition envers sa protégée, une proposition qu'elle craignait, car elle ne savait comment la belle jeune femme pouvait y réagir, ni si cela avait des chances de transformer leur relation en quelque chose de moins naturel, de moins sain. Mais elle espérait sincèrement que cela puisse marcher, que cela lui offre non seulement un projet dans la vie autre que de toujours rester à ses cotés, et franchement, elle ne voyait pas d'autre possibilité de concilier  à la fois la nature des plus affectueuses de Myriade à son encontre, et ses passions, mais aussi de lui permettre d'atteindre des rêves qu'elle n'avait jamais considéré comme réalisables. Alors, la prenant entre quatre yeux un soir, tandis que les deux femmes finissaient un repas plutôt bon marché, acheté à la traiteur du coin, Luxienne prit son courage à deux mains, et se décida pour la première fois de raconter à sa protégée ce qu'elle avait fait, comptait faire désormais, et voulait donc lui proposer, afin qu'elles soient toutes deux toujours ensemble, tout en offrant à Myriade sa propre occasion pour briller. La première fois, elle manqua d'ailleurs de s'étouffer avec une boulette de viande épicée, mais après un bon coup d'eau, elle parvint enfin à s'exprimer :

« Myriade, cela fait combien de temps que je t'ai récupérée ?
 -  Hum... huit cent quatre-vingt quatorze jours, précisément, pourquoi ?
 -  Écoute, je... Je voulais te dire quelque chose. Tu te souviens de mon projet ? Celui de créer un véhicule spatial, et de pouvoir l'industrialiser, de manière à offrir à la société Tekhane un moyen de partir pour les étoiles ?
 -  Oui, je m'en souviens, mais ça ne répond pas à ma question.
 -  Désolée, j'y viens. En fait, j'avais besoin d'un bâtiment pour y créer le centre de recherche, et... j'ai fait usage du bâtiment devant lequel je t'ai trouvé. J'espère que ça ne te gêne pas.
 -  Pas le moins du monde, mais s'il n'y avait que ça, tu ne m'en parlerais pas. Donc qu'y a-t-il d'autre ?
 -  Eh bien... Comment te dire... Est-ce que cela te gênerait de t'y retrouver à nouveau ? »

   Le silence, un silence de plomb. Sans un mot, mais non sans que son expression parle pour elle, Myriade vint à poser lentement sa fourchette sur le bord de son assiette, et ne lâchant du regard sa tutrice, semblait laisser ses pensées se percuter dans son crâne avec un manque de contrôle prévisible. Retourner dans le lieu où elle a été conçue, et utilisée comme une source d'expérience et d'amusement par des femmes au manque clair d'humanité, capable de la transformer en arme sotte et servile sans le moindre libre-arbitre ? L'idée même de poser un pied dans l'entrée lui était désagréable, lui était difficile, lui était violent. Elle ne comprenait juste pas pourquoi sa tutrice, celle qu'elle aimait, celle qu'elle adorait, voulait la renvoyer là-bas, d'une quelconque manière, et si cela ne tenait qu'à elle, elle serait sûrement sortie de table immédiatement, mais elle se voyait mal couper court à la demande d'échange de Luxienne sans pour autant lui donner une réponse claire... ou au moins d'essayer de comprendre les motivations qui l'avaient menées à faire une telle erreur d'appréciation dans son discours. Alors elle vint à lâcher son couvert, se posa de manière à croiser les bras devant sa poitrine, qui gonflait de plus en plus désormais, la gênant bien souvent, et continua de planter son regard dans celui de la scientifique avec un clair manque de contrôle de ses émotions, paraissant presque agressive pour le coup. Et puis, malgré cette situation de malaise, la jeune femme parvint enfin à s'exprimer, non sans mal, et avec un brin de colère dans la voix, mais au moins sans que ses termes ne soient teintés de peur ou d'appréhension :

« Je ne veux pas, je n'aimerais pas, je t'ai... raconté ce qu'il s'y était passé. Luxienne je veux juste, juste être avec toi, et toi seule. Alors s'il te plaît, dis-moi pourquoi tu me parles d'une telle chose, surtout que tu savais que ça allait me faire du mal...
 -  Eh bien... Je ne veux pas que tu restes seule ici, à ne rien faire et … et j'ai eu une idée, à un moment. Tu pourrais travailler avec moi, en tant que secrétaire mais surtout... je voulais t'offrir ton rêve.
 -  Mon... rêve ?
 -  Tu aimes les étoiles, non ? Eh bien... Nous aurons besoin de pilotes quand les projets seront aboutis et du coup... Connaissant tes performances, tes forces, ton endurance, je ne pourrais rêver d'une meilleure pilote que toi Myriade.
 -  Tu... souhaites donc m'employer, dans le lieu où j'ai grandi, auprès d'autres scientifiques, et m'offre l'Espace en échange ?
 -  En gros, c'est cela. »

   Plus un mot... Lentement, la jeune femme poussa sa chaise, se redressa lentement, et se mit à approcher lentement de sa tutrice sans laisser le moindre petit signe pour permettre à la scientifique de comprendre quelles étaient ses intentions. Elle fit le tour de la table, tandis que Luxienne l'observait, et quand elle se posta à ses cotés, la brune ne manqua pas de se déplacer un peu avec sa chaise pour se tourner en direction de sa protégée, l'observant alors de plus près, avec son air décidé, son regard droit, et sa posture un peu raide, qui laissait toutefois entendre, désormais, qu'elle avait bien du mal avec ce qu'elle s'apprêtait à lui dire. Allait-elle encore rejeter son offre, lui dire qu'elle n'avait rien de mieux à faire que de rester terrée dans cet appartement, loin du moindre écho social, et qu'elle préférait n'avoir jamais personne d'autre à rencontrer que la scientifique un peu perdue qui se trouvait assise juste devant elle ? Très honnêtement, Luxienne priait que ce ne soit pas le cas, elle espérait qu'autant d'hésitation ne soit que la preuve qu'elle comptait agréer à ses demandes, qu'elle allait lui offrir non seulement son accord, mais aussi par là lui montrer qu'elle était prête à faire des efforts pour se comporter effectivement en citoyenne de Tekhos, et non comme une expérience en liberté qui ne peut oser montrer son visage à d'éventuels tortionnaires. Elle l'espérait toujours quand, rapidement, sa protégée se pencha pour se tenir aux accoudoirs de la chaise qu'occupait la cadette des Mueller, et qu'elle vint placer son visage à quelques centimètres du sien, pour enfin s'exprimer avec un ton déterminé, direct :

« Je peux le faire. Pour toi je peux le faire Luxienne, je peux y aller, si tu me l'ordonnes, je peux aussi être tout ce que tu souhaites... Mais en retour, je ne demande qu'une chose, qu'une seule et simple chose...
 -  Je t'écoute Myriade.
 -  Je veux que toi, tu sois à moi, rien qu'à moi, et que tu fasses ici la promesse de ne jamais, absolument jamais, t'éloigner de moi.
 -  Myriade c'est... c'est une sacrée de...
 -  Promets-le ! »

   Luxienne dut déglutir, mais ne pouvait pour autant échapper aux prunelles de la jeune femme, exprimant le tout de son attachement, le tout de son envie. Myriade, nouvelle citoyenne et membre de l'OESA, en échange de sa promesse d'être « à elle » ? La scientifique comprenait ce qu'elle entendait, et ne savait guère si elle est en droit de répondre au vu de la relation qu'elle entretenait avec elle... Mais pouvait-elle répondre autre chose que ce que la demoiselle aux cheveux rose attendait ? Plus maintenant, plus jamais :

« Oui. Oui je le promets, toutes les deux, nous serons toujours ensemble. »

   Myriade fit un dernier mouvement, et scella ces mots entre leurs lèvres.

. . . . .

   Et tandis que leur relation évoluait, que l'une comme l'autre découvrait désormais qu'elles ne sauraient se séparer, que leurs destins se trouvaient liés par un accord bien plus fort qu'elles ne l'avaient de prime abord imaginé, l'entreprise de Luxienne prit de l'ampleur, de la grandeur, et commença à se faire de plus en plus remarquer par l'univers scientifique Tekhan. Se faisant connaître, notamment par des tests plus que positifs, en terme d’envoi de sondes et de projets spatiaux, les différents partis de Tekhos Metropolis commencèrent à observer d'un œil intéressé les résultats de l'OESA, et se mirent même en tête de proposer des offres alléchantes pour tenter d'obtenir une part des privilèges liés à une potentielle expansion spatiale. Bien sûr, cela ne pouvait se faire de manière indirecte, chacune des trois femmes ayant offert un prime engagement auprès de Luxienne n'ayant guère dans l'esprit de laisser passer leurs parts de marché dans la compagnie, alors le tout fut de converser avec la principale intéressée, menant lentement la scientifique aux cheveux bruns sur le terrain des intrigues politiques et militaires, à son triste constat. Mais plutôt que de se laisser emporter par tant de considération, et de belles langues, la femme ne tarda pas à chercher à tirer son épingle du jeu, notamment sur le point de vue monétaire, commençant à former des alliances, des contrats, renflouant ainsi ses poches, et se permettant ainsi d'obtenir un capital conséquent pour mettre en place la deuxième partie de son plan, à savoir acquérir définitivement suffisamment de son entreprise sur le marché pour devenir seule directrice du domaine spatial, et ainsi se trouver en place forte de la technologie de son pays.

   Ainsi, le même jour, la femme offrit à toutes le loisir de découvrir le premier grand succès de l'expansion spatiale, la navette Erian, et à son bord Myriade, qui commençait déjà à se préparer à son premier grand voyage. Et même si la présentation se faisait de manière fort honnête, Luxienne avait déjà prévu de profiter d'une telle situation pour déclencher ses projets, car son ordinateur, chez elle, lançait au même moment un programme longuement mis en place par ses soins, un petit démon de l'informatique qui commença à quérir lentement de petites compagnies, de petits bouts des appuis monétaires de ses premières créditrices. Et tandis que le vaisseau prenait lentement de la hauteur, s'élevait dans les airs avec une démonstration surprenante de maîtrise et de légèreté, que dans son euphorie la demoiselle aux cheveux rose continua sans le moindre doute, et avec un sourire béat, sa course vers les étoiles, les ressources des trois femmes anciennement alliées à la scientifique chutèrent, soudainement. Un crash monétaire pour une envolée céleste, Luxienne en jubilait presque quand elle vint arrêter à distance son virus, observant enfin sa position atteindre des summums encore inestimés, tandis que son amour, sa belle protégée, sa camarade de toute une vie atteignait quant à elle les limites de son rêves. L'une avait la tête dans les étoiles, l'autre les contemplait, les deux vivaient enfin le pic de leur bonheur, loin des préoccupations passées, loin des doutes et de la peur, l'une comme l'autre libérée.

   Les mois qui suivirent furent des plus simples, des moins embêtants, la vie devint soudainement d'un tel plaisir que Luxienne comme Myriade commencèrent enfin à profiter d'une situation plus agréable, plus large, les deux découvrant le plaisir de ne plus avoir à craindre un retournement de situation inattendu. Tandis que l'une commença à produire de plus en plus de départs en direction de la zone stellaire grâce aux premiers vaisseaux Tekhan, l'autre se mit en tête de concevoir des modèles de plus en plus performants au travers de recherches de plus en plus pointues, approchant dès lors de manière conséquente du niveau de technologie général de Tekhos Metropolis. Tout filait parfaitement, si bien même au vu de l'évolution globale que Luxienne prit volontairement le temps de ralentir la progression de la compagnie, enchaînant les manques de présence et de directives de manière significative, cherchant à ne pas être plus rapide qu'elle ne l'avait escompté lors de ses premiers traités, se donnant toujours plus de temps pour faire avancer ses observations théoriques. Et cela pour une bonne raison : Myriade. Après tout, elle était sa pilote, son amour, et s'il y avait bien une seule chose qu'elle pouvait lui offrir en ce moment, c'était d'être la seule Tekhane privilégiée à pouvoir se déplacer selon ses désirs dans le grand domaine stellaire, loin des futurs trafics spatiaux, et autre forme d'expansion coloniale à la nature bien déplorable. Non, pour l'instant, elle laissait sa belle jeune femme contempler Terra au loin, seule, et heureuse... Son propre succès attendrait que Myriade ait pu en profiter.

. . . . .

   Luxienne rentra dans son bureau, tranquillement, un jour calme où tout semblait vouloir lui dire que le monde de Tekhos n'était encore qu'à l'aube de ses découvertes, et c'est avec une fierté incomparable qu'elle observa, par les grandes baies vitrées de la pièce, la belle capitale se profiler à l'infinie dans la chaude lumière du matin. Elle était partie de si loin, avait fait tant d'efforts pour devenir une femme que l'on respecterait, que l'on honorerait pour ses talents, et maintenant qu'elle avait atteint ce stade, elle se demandait encore de quelle manière son génie pourrait lui permettre de surpasser les plus grandes difficultés scientifiques du monde Tekhan. Mais quoi qu'elle fasse à ce propos, ce qu'elle ressentait par dessus tout, c'était du calme, de la sérénité, comme si au delà de tout ces affrontements, de tout ce travail, de sa croissance d'une jeune adolescente frêle et faible à une femme puissante et aux pouvoirs quasi illimités, ce qui en restait n'était rien d'autre que la satisfaction d'avoir traversé toutes ces épreuves sans jamais courber l'échine, sans jamais n'avoir perdu de vue ses objectifs...

   Quittant lentement la vue de la cité, elle se tourna sur son bureau. Sur celui-ci, non seulement une pile de dossiers faramineuse, mais surtout, et avant tout, une petite clé USB jaune, laissée là dans la nuit, dans le plus grand des secrets, par une personne dont elle connaissait parfaitement les intentions. Elle fit quelques pas, vint la quérir avec un mouvement rapide, précis, et plaça celle-ci dans le port de son ordinateur avec le plus grand des calmes, avant de se mettre à ouvrir les fichiers qu'il contenait, les observants d'un regard un peu absent, mais non moins concentré sur ce qui défilait devant elle. Toutes les informations sur Myriade Sang-Clair. Sa venue au monde, ses capacités, sa nature. Peu étaient ceux qui avaient encore le droit de contempler de tels fichiers, très peu étaient ceux qui étaient encore en capacité de les comprendre, et Dénève Mueller comme Luxienne Mueller étaient les deux seules femmes en Tekhos connaissant les secrets derrière ces rapports. Les deux femmes avaient accueilli, sensiblement au même moment, les deux enfants des astres, et toutes deux avaient largement compris que ces entités, elles les aimaient tout autant que celles-ci les appréciaient, mais qu'elles n'existaient pas sur le même plan de ce monde. Myriade plus encore que Belphy Mueller, l'enfant adoptive de l'aînée de la famille, car elle ne possédait guère les limitations naturelles que l'originale subissait depuis sa sortie de l'Oeuf. Luxienne et Dénève échangeaient donc couramment, et continuaient de garder leurs chères demoiselles à l’œil, pour s'assurer qu'elles puissent toujours vivre dans le bonheur.

   Et en parlant de cette dernière, Myriade, maladroitement, avec bien des difficultés, poussait comme elle pouvait la porte du bureau de son amour, deux cafés dans les mains, et manqua même d'en renverser la moitié, le temps que la brune se lève de son siège, et ferme tous les fichiers pour finalement se porter à sa rescousse. Une porte ouverte, une tasse récupérée, et c'est une charmante demoiselle aux cheveux roses qui vint lui sourire, se dissimulant derrière un manque d'aise flagrant pour lui parler avec empressement du planning de la journée.

« B-bonjour Luxienne. Pour tout à l'heure, tu as rendez-vous avec le chef de l'industrie minière pour t'assurer de l'apport des métaux fondamentaux à nos systèmes connectiques, et après tu dois retrouver Dame Aleyna pour un déjeuner d'affaire autour de la production d'un système de propulsion bien supérieur à celui de la navette Octan...
 -  Du calme mon ange stellaire, du calme. Assieds-toi donc, d'accord ?
 -  Oh euh... hum... bien sûr...
 -  C'est fou ce que tu changes quand nous sommes ici, je ne m'y fais toujours pas, tu sais ? La prochaine exploration est prévue dans deux jours, tu es prête ?
 -  Oui, évidemment !
 -  C'est le plus important à mes yeux. Ne t'en fais pas ma Myriade, tout se passe bien de mon côté, tout ce que tu as à faire, finalement, c'est de réussir à créer d'autres liens que ceux que tu as avec moi, d'accord ?
 -  Je peux même te promettre que je tente de le faire... Mais j'ai encore tant de mal.
 -  Fais-toi confiance, ne t'en fais pas, tu es une jeune femme merveilleuse. Et crois-moi, d'autres que moi le remarquent.
 -  Oh flatteuse ! Je dois y aller, j'ai des dossiers à photocopier, à plus tard, mon amour.
 -  A plus tard, mon amour... »

   Luxienne l'observa passer la porte. Une journée normale, stable. Une vie normale, stable. Des relations normales, stables. C'est tout ce dont avait besoin Myriade pour pouvoir rester au loin de sa nature, pour qu'elle puisse vivre à jamais en humaine, et non en monstre. Et si elle devait y veiller pour le restant de ses jours, elle le ferait, pour celle qu'elle aime, et pour elle-même.

   Elle reprit place à son bureau. Une journée normale, pour une vie normale. Qu'allait-elle donc imaginer pour changer encore une fois la face de ce monde ?

~ ~ ~ ~ ~

Fin.

~ ~ ~ ~ ~


Note optionnelle : Comme nombreux le remarqueront, où se douteront au vu des noms des personnages, cette fiche fait longuement référence à une autre fiche, « la longue histoire d'un projet catastrophe », qui parle, entre autres, du personnage de Belphy Mueller. Si vous souhaitez satisfaire votre curiosité, n'hésitez pas à cliquez sur ce lien : projet 37-C-Delta

Doublette or not doublette : Vraiment besoin de répondre ?

14
Prélude / Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.
« le: jeudi 04 mai 2017, 21:08:42 »
   Compte rendu n°001, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Cela m'a pris de longues heures, et plusieurs ré-évaluations de mon travail pour comprendre comment cette peau pouvait être vivante auparavant. Ni trace de terminaison nerveuse mineure,ni trace de capillarité sanguine, ni trace d'activité cellulaire. Pendant un long moment, j'ai crû faire face à de la pierre, et si ce n'était pour la confiance que j'ai dans les professionnalisme de notre directrice, j'aurais pu me poser la question d'une quelconque farce de la part de cette dernière. Je me devais de chercher un autre moyen d'observer cet élément.
      Détection laser, observation au microscope nucléaire, étude de la composition chimique, ces éléments me permirent de commencer à approcher un peu plus de la vérité : il n'y avait tout simplement rien à observer sur cette peau, et pourtant celle-ci se trouvait en parfait état. Deux possibilités s'offraient à moi, soit ce que j'observais n'existait pas, soit c'était composé de matériaux et d'une énergie que nous, Tekhanes, n'avions encore jamais observé dans l'univers. Le projet commençait à devenir de plus en plus complexe à mesure que j'obtenais des résultats.
      Le jour arrivant, je ne pouvais continuer mes recherches aux yeux de toutes, j'ai donc pris le temps de ranger l'échantillon, d'éteindre la moindre machinerie, et d'aller boire quelque chose pour me réveiller un peu. Tout ce mystère ne me donne que plus envie de m'attarder sur ce projet, et je pense qu'il va devenir de plus en plus nécessaire que nous lui trouvions un nom complet, quitte à ce que cela soit un peu imagé, ou alors bateau, mais simplement pour pouvoir classer ces enregistrements, que je compte faire de manière régulière, pour garder une trace de nos avancées.
      Aujourd'hui, je dois trouver les personnes capables de m'accompagner dans ce travail. Je ne sais encore combien en sont dignes, ou même ont la connaissance suffisante pour s'attaquer à ce morceau. Quel dommage que nous n'ayons pu engager la cadette Mueller, je ne doute guère que cette femme nous aurait été d'une grande aide.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°003, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Il est clair que nous ne pouvons tout simplement pas obtenir de résultats avec nos moyens traditionnels, mais je crois pouvoir être certaine que les échantillons commencent à évoluer, à changer, ce qui commence légèrement à m'inquiéter quant aux résultats éventuels d'une reconstruction physique, ou d'un clonage. Notre directrice souhaitait un résultat optimal, et si les éléments primaux commencent à différer, à évoluer, il n'est que concevable que nous allons nous écarter de l'entité de référence, 37-C-Delta.
      En revanche, les équipes ont été mises sur pied. Nous sommes donc une vingtaine, chefs de projet comprises, à travailler sur la mise en place de ce clonage, et si chacune y va de sa théorie, nous n'en sommes encore qu'aux balbutiements de ce travail de longue haleine, et au deçà du moindre petit avancement. J'enverrai un premier compte-rendu écrit à madame Morovik une fois que l'intégralité de nos membres aura pu comprendre l'ampleur du projet, et j'espère que nous aurons déjà quelques avancées à soumettre.
      Un détail toutefois me paraît important à soulever avant que je ne coupe cet enregistrement. Alors que j'étais encore à l'observation des différents fichiers contenus dans la carte magnétique qui m'a été confiée, j'ai crû remarquer que le projet 37-C-Delta était accompagnée d'armes, armes ayant la capacité de converser avec le projet. Peut-être est-ce trop demander, mais je crois sincèrement qu'un échantillon de celles-ci saurait être d'une grande aide pour l'approfondissement de nos travaux, voire pour sa progression. Une demande officielle sera faite sous peu vis-à-vis de ce besoin, et j'espère qu'il trouvera un écho positif. Après tout, nous cherchons des armes, il est normal que nous nous intéressions à l'équipement de 37-C-Delta ! Je pense même que cela serait parfait pour dissimuler nos véritables travaux.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°006, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Nous avons obtenu, tôt ce matin, les échantillons de K'leir, et de Ter'er, les deux armes utilisées par le projet 37-C-Delta, et il faut l'avouer, ces objets sont tout aussi fascinants que peuvent l'être les échantillons de leur utilisatrice. Tantôt leur masse est nulle, tantôt il devient impossible de déplacer leurs échantillons, à tel point que nous avons été obligées à un moment d'en laisser un au beau milieu de la pièce, le temps que celui-ci puisse de nouveau être soulevé pour qu'on l'amène en analyse. En revanche, une fois cela réussi, les résultat furent tout aussi clairs que ceux obtenus avec mes premières observations, résumés dans le compte-rendu n°001.
      Pas de conceptions remarquables, matériaux parfaitement inconnus, et aucune trace de micro-composant une fois mis à l'observation cellulaire ou atomique. Ces choses ne sont pas existantes, ou elles ne possèdent pas d'éléments contenus sur Terra. L'idée de la magie, utilisées dans d'autres pays, nous a été apportée par une personne ayant voyagé jusqu'à l'Empire Ashnard, avec lequel nous entretenons un pacte d'alliance plus ou moins agréé, mais le fait est que nous n'avons pour l'instant personne pour évaluer une telle possibilité, nous forçant à laisser de côté d'éventuelles observations sur ce point.
      Je commence à croire que nous ne parviendrons guère à faire de réelles avancées sans un miracle, ou sans l'évolution du groupe D dans leurs recherches, ceux-ci s'étant attardés sur la conception de nouveaux outils de mesure, plus généraux, qui auraient potentiellement une chance de réussir. Je dois pour cela échanger avec madame Jeruss, qui dirige cette partie de notre travail. J'espère qu'elle saura nous assurer de l'avancée de leurs propres travaux, ou je crains de ma prochaine rencontre avec madame Morovik.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°007, projet de création d'une entité égale à 37-C-Delta :

      Il nous fallait un coup de génie, une surprise magistrale, quelqu'un qui ait eu l'incroyable idée de produire l'inconcevable alors même que nul autre n'en avait eu l'idée. Finalement, cela nous parvint du groupe B, et je dois avouer que je ne m'attendais guère à voir l'un des membres débarquer dans mon bureau en début de soirée pour me demander immédiatement de l'accompagner, mais sentant le parfum de l'évolution, je n'ai eu guère le choix que d'emboîter son pas, afin de rejoindre le reste de l'équipe dans la salle d'observation. Toutes étaient en transe, commençaient à aller de droite à gauche en enchaînant les recherches et les observations, et je ne sus m'expliquer telle effervescence... C'est là qu'on me présenta l'événement miraculeux :
      L'une de nos chercheuses, relisant un rapport sur 37-C-Delta, eut cru bon de cesser d'observer les deux éléments séparément, mais en symbiose, prenant en présentation le fait que d'apparence, l'entité inconnue ne vivait qu'en compagnie de son armement, et ne les abandonnait jamais. Le résultat fut splendide, car l'un comme l'autre révélèrent dès lors à l'observation l'une des choses les plus importantes pour notre projet : un génome. Celui-ci n'était clairement pas humanoïde, et ne permettait guère de s'imaginer le degré évolutif de l'humanoïde considéré 37-C-Delta, présentant un ensemble de 207 chromosomes différents.
      Le chiffre est tout simplement faramineux, une telle quantité d'informations sera non seulement difficile à décrypter, mais surtout fastidieux. Toutefois, je pense que nous allons au moins pouvoir nous pencher dès maintenant sur un éventuel clonage, une première tentative d'observation, de création, et éventuellement en tirer des conclusions pour nos futures évolutions. L'équipe B, forte de sa découverte, sera assignée à la lecture du génome. L'équipe C, encore non-assignée à une tâche claire, se trouvera désormais à la partie technique et mécanique, permettant la liaison entre l'équipe B et D. Enfin, l'équipe A, ainsi que moi-même, engagerons les travaux de clonage dans la semaine, une fois l'information pleinement analysée.
      Enfin, nous avançons.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°032, projet renommé *37-prime, Sang-Clair* :

      Il est difficile d'appeler cela un échec. Tant de travaux, d'évolutions, de résultats, nous n'avons fait que progresser, mais il est de mise d'accepter cette triste vérité : notre première forme de vie clonée est un vaste échec. Nous avons pu créer une cellule souche, mais sa division archaïque, sa lente transformation, son point vital étant inconnu, notre tentative de faire accélérer sa croissance nous a mené à quelque chose d'immonde, dont nous ne sommes même pas sûres de l'humanité, de la conscience. Cette chose n'est qu'un amas de chair noire, au sang vitreux, et à la dangerosité bien trop élevée pour que nous nous en approchions sans risque.
      Une membre de l'équipe A s'est trouvée absorbée par 37-prime il y a deux heures, et nous n'avons rien pu faire pour empêcher sa destruction, ne faisant finalement que grossir l'entité de trois centimètres général de diamètre. Ayant contacté l'équipe D, nous avons pu nous assurer de la création d'un outil de destruction pour ce modèle défaillant, même si cela nous fait mal d'imaginer que tant de travail finisse ainsi. Toutefois nous ne pouvons concevoir que cet être puisse continuer d'exister, sa libération étant un risque potentiel pour le labo, et la ville alentour. Nous espérons que l'arme soit bientôt opérationnelle, et pour éviter tout soucis, nous avons clos complètement l'étage inférieur, gardant l'espoir que cela soit suffisant pour qu'en cas de brèche, 37-prime ne puisse se libérer.
      Tant de mois pour un tel résultat, je ne peux m'empêcher de ressentir un pincement au cœur, mais il va bien falloir que nous l'éliminions. Dès que sa destruction sera accomplie, nous retenterons le projet, les observations de l'équipe B sur le génome de 37-C-Delta en renfort. Avec un peu de chance, ceci suffira à nous donner les clés de sa maturation, et le contrôle de son évolution, pour ne pas nous retrouver à nouveau face à de tels problèmes.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°094, projet renommé *37-prime, Sang-Clair* :

      Nous parvenons enfin à obtenir autre chose que des fleurs de chair, mais le travail que nous parvenons à mettre en place reste pour l'instant peu fructueux en terme d'esthétique Tekhan. Je parle d'esthétique d'ailleurs parce qu'autrement, nous commençons enfin à atteindre un degré fonctionnel dans ce que j'appellerais la puissance brute de notre création. La force y est, l'endurance aussi, et il est vrai que si nous n'avions créé dès le départ le sérum de cristallisation, il nous serait sûrement bien complexe d'éliminer les créatures que nous parvenons à constituer. Mais encore une fois...
      ...Il reste que leur apparence actuelle ne plaît pas beaucoup à madame Morovik. Et je peux la comprendre, les unités font plus de deux mètres, tiennent plus du monstrueux que de l'humain, et présentent surtout une forme s'apparentant grandement à ce que nous définissons comme étant insectoïde. Je dois avouer que cela rend le tout un peu délicat, car si nous présentons finalement des soldats qui ressemblent à nos ennemis, je nous vois mal réussir à obtenir facilement l'approbation du plus grand nombre. Et si nous ne voulons pas nous faire questionner sur l'origine de nos « armes », il va être nécessaire que rien de ces dernières ne puisse créer le doute, ou l'inquiétude ! Et pour l'instant c'est loin d'être le cas.
      Mais je n'ai pas bien peur, le groupe B avance de plus en plus rapidement, notamment grâce aux différents extraits que nous parvenons à récupérer sur les quelques fleurs de chair que nous gardons en culture, et ainsi nous parvenons de plus en plus à nous rapprocher d'un hybride de type humanoïde. Une fois cela fait, nous pourrons progresser encore un peu pour parvenir à stimuler l'évolution de notre sujet, et, je n'ai aucune inquiétude à ce propos, finir par concevoir une soldate pleinement fonctionnelle, et digne de la grande supériorité Tekhane. Finalement, nous avons tant et tant progressé, je ne vois guère ce qui pourrait nous arrêter désormais en si bonne marche... D'un projet fou, nous atteindrons bientôt un miraculeux succès, et avec, les honneurs qui nous sont dus !
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°117, projet renommé *37-prime, Sang-Clair* :

      Suite à l'élimination de 37-prime-16, un élément curieux nous est apparu, et cet élément, aussi aléatoire peut-il être, va sûrement devoir nous forcer à accélérer un peu plus les choses, ou du moins à cesser de faire des tests à tout va et nous concentrer sur la création d'une entité viable d'ici peu de temps, au risque de rendre notre travail bien plus complexe. Le sérum de cristallisation commence à perdre de son effet. Ou plutôt devrais-je dire que, naturellement, les projets 37-prime ont commencé à synthétiser quelque chose pour s'en défendre.
      De peur de faire une erreur, nous avons préféré observer les différents résultats obtenus lors de la cristallisation des sujets, afin de ne pas faire la moindre erreur, et nous avons malheureusement eu la bêtise de ne pas remarquer plus tôt ce fait grave, du moins jusqu'à aujourd'hui, où la différence fut telle que nous ne pouvions passer outre son observation. Le premier projet avait mis trois secondes à se cristalliser entièrement afin d'être ensuite évacué, le second aussi... mais nous n'avions guère pris le temps de regarder l'évolution de cette courbe. Trois secondes, puis quatre, puis cinq... les sujets prenant de la masse, il n'était que logique que le temps s'allonge un peu...
      Mais là, il lui a fallu plus d'un quart d'heure. C'est trop, bien trop, et il devient donc absolument nécessaire que nous trouvions une forme viable, intelligente dans les prochains tests, sinon je ne doute guère de la difficulté que nous allons devoir considérer pour les éliminer. Je compte diminuer dès maintenant la fréquence de nos test de création, tant pis si nous nous éloignons un peu du sujet par moment, mais il faut absolument que nous endiguions cette capacité protectrice. Par souci évolutif, nous ne récupérerons aucun élément de 37-prime-16, c'est malheureux en un sens mais je préfère être prudente.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°145, projet renommé *37-prime, Sang-Clair*, Seconde étape :

      Aphrodite et Bételgeuse. Elles sont les premières à enfin avoir une forme humaine, et le sérum de cristallisation a prouvé une efficacité de quelques secondes sur un morceau de leur chair, les rendant viable au niveau du contrôle de masse, si on décide d'en faire la production. Je dois avouer que la curiosité m'étreint un peu quand je pense au travail fourni jusqu'ici, et il m'arrive parfois de repenser à ce projet 37-C-Delta, à me demander à quoi elle ressemble désormais, pour savoir à quel point mes propres « filles » lui ressemblent.
      A. et B. sont jumelles, nous n'en avions que peu conscience lors de la phase de création, mais le passage embryonnaire n'a laissé aucun doute quant à leur maturation simultanée. N'ayant guère envie de perdre à nouveau quelques semaines de production, nous avons continué de les faire grandir sans nous impliquer dans le projet, essayant même de voir s'il n'y avait pas un moyen de leur offrir un lien symbiotique particulier de par leur liaison naturelle, avant de finalement abandonner l'idée pour nous rattacher à une simple observation. Parfois, elles semblent se parler depuis l'intérieur de la cuve, et je me demande toujours ce qu'elles peuvent échanger...
      Mais au delà de toutes ces considérations je me permets tout de même de souligner encore un peu plus à quel point nous avons progressé ! Nous atteignons bientôt les deux années de travaux, et il est à noter toute l'évolution de notre compréhension de ce génome, de cette entité qui est apparue en Tekhos Metropolis, et de ses capacités. Nous somme passées d'un stade d'évolution purement embryonnaire à la création d'une entité humaine complexe, de deux entités même... Et surtout, nous voyons enfin le résultat de nos efforts. Je ne sais guère si Aphrodite et Bételgeuse seront notre projet final, mais en tout cas, je ne peux plus douter un instant que nous ne puissions parvenir à sublimer leur être au bout de quelques autres tentatives, afin d'obtenir enfin notre ultime soldate.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.


   Compte-rendu n°176, projet renommé *37-prime, Sang-Clair*, Seconde étape :

      Aphrodite et Bételgeuse : une entité faible, une entité puissante. Présence d'une harmonie lors de la présence de l'une auprès de l'autre, mais la moindre séparation les rendaient instables, non sans parler de leur langage, qui n'a jamais pu être élucidé. Éliminées.
      Céleste : Entité puissante, capable de se défendre, mais à la forme instable, dégradée. La première mutation ne fut pas dangereuse, et même vue comme une potentielle forme adaptative de notre projet. Celles qui suivirent rendirent Céleste impropre à la création en masse. Éliminée.
      Diane : Entité puissante, incontrôlable. Elle eut l'intelligence d'attendre la fin de sa maturation pour briser le verre de sa cuve, et chercher à s'attaquer aux différentes membres de notre groupe scientifique. Désormais toutes nos cuves se verront renforcées lors de la mise en culture d'un embryon. Éliminée.
      Eris et Firmament : Puissance colossale, présence d'une harmonie, action en symbiose. Elles auraient pu être le sujet d'une étude plus poussée, mais tandis qu'elles ont atteint le stade adolescent, leur langage s'est adapté au notre, et ce que nous avons pu comprendre nous força à arrêter le projet les concernant. Éliminées.
      Gorgonea : N'a pas survécu à l'apport constant des enzymes pour accélérer sa croissance. Confirmation que son sang ne possédait pas l'aspect vitreux découvert chez tous les autres sujets. Nous ne savons encore s'il s'agit d'une erreur de création. Morte.
      Heracles et Ikarus : Respectant le sexe de ces jumeaux, nous leur avons offert des noms masculins. Pour autant, ils prouvèrent être tout aussi belliqueux que les autres jumeaux que nous avions élevés, nous laissant comprendre que nous ne pouvions tout simplement les laisser évoluer ainsi. Éliminés.
      Jerrah et Kornephorros : Nous avions déjà choisi de ne plus faire de test sur les jumeaux, mais apparemment une cuve était déjà en production alors que nous étions en train d'essuyer le dernier échec, avec Heracles et Ikarus. J. et K. prouvèrent que nos doutes étaient fondés, et ont tenté de mettre à sac l'intégralité du laboratoire. Éliminées.
      La Superba : Entité à la puissance phénoménale. Elle semblait viable, divinement agréable à l’œil, et surtout possédait enfin la capacité d'échange et de compréhension que nous souhaitions. En d'autres circonstances, elle aurait pu être notre projet final, mais l'action d'une de nos consœurs à valu l'élimination de L. et l'éviction d'une des membres du groupe A, que les événements n'avaient que trop affectée. Éliminée.
      Nous espérons de tout cœur que le prochain projet soit aussi satisfaisant que La Superba, et ferons tout pour que ces dernières années n'aient pas été que des recherches sans fondements.
       Fin de l'enregistrement, Jolyne Desrepand, Membre du groupe A.


   Compte-rendu n°179, projet renommé *37-prime, Sang-Clair*, Seconde étape :

      Nous savions déjà que toutes les potentielles créations du projet 37-prime allaient avoir des caractéristiques similaires. Toutes ont eu les cheveux d'un rosé étrange, chose provenant d'une décoloration dans les premiers jours de vie d'une abondante chevelure rouge, que semblait posséder le projet 37-C-Delta. De la même manière, toutes les entités ont connu une certaine forme d'attachement envers un des membres du labo, celui-ci devenant soit une personne privilégiée, soit la cible d'une haine tenace, nous obligeant à tenir le personnel éloigné de la cuve le temps de la maturation. Ajoutons à cela une force physique démentielle, et surtout une sensibilité accrue aux échantillons de K'leir, et de Ter'er, produisant des effets allant de la violence à l'apparition d'un certain nihilisme dans la manière de penser (voir la suite de rapport 153 à 156).
      Myriade... possède tout cela, et plus encore. Elle parvient à déjouer certains de nos tests avec une aisance qui frôle l’insolence, elle commence dès son plus jeune âge à accepter des aspects du combat et des techniques de défense tekhanes qui sont pourtant d'une grande complexité. Elle est parfaitement stable, et même si elle n'est pas encore poussée à maturation, n'ayant encore que 8 à 9 ans physiquement, elle semble être capable de comprendre et d'interpréter de bien nombreux sujets sans faire part d'une vicissitude extrême dans l'esprit, contrairement à certains de ses prédécesseurs. Plus, elle semble déjà si jolie pour une petite demoiselle de son âge, il n'est à n'en pas douter tout à fait envisageable qu'elle devienne une bien charmante jeune femme, exactement le genre de personne que nous pourrions souhaiter dans les rangs de l'armée.
      Nous sommes encore en phase d'observation, mais si le sujet semble être en parfaite condition d'apprentissage et de préparation, nous ne tarderons guère à cesser l'évolution accélérée pour nous laisser plus de temps pour lui offrir les informations nécessaires pour faire d'elle une parfaite tueuse, l'exemple de la soldate Tekhane. Je ne saurais décrire la hâte que je ressens à l'idée de voir ce projet se concrétiser... Je n'ai finalement plus qu'un désir, pouvoir la présenter à notre directrice, en tant que grande réussite de notre projet de soldate améliorée.
      Nous n'avons plus qu'à confirmer nos espoirs.
      Fin de l'enregistrement, Alexandra Purelle, Chef de projet de la compagnie d'armement Tekhan Firmament.

. . . . .

   La cuve. Elle n'avait jamais connue que celle-ci. Cette cuve froide, épaisse, dans laquelle elle nageait plus ou moins, sans jamais en toucher les bords, sans jamais en atteindre le plafond, sans jamais parvenir à mettre pied à terre, et à se déplacer par ses propres muscles, par ses propres forces, toujours obligée de se laisser flotter avec, sur elle, cette batterie d'équipement qui n'avait pourtant aucun attrait à ses yeux. Elle avait bien tenté de les ôter, quelques fois, quand ces femmes n'étaient pas là pour l'observer, et que la caméra qui filmait les lieux se tournait juste assez pour ne plus faire attention à elle, mais l’électricité qui s'en était échappé lui avait grillé le corps, l'obligeant finalement à se défaire de cette idée, et de continuer à jouer le jeu de la bonne petite fille silencieuse, docile. Elle avait cru comprendre qu'elle n'était pas la première à s'être trouvée ici, elle avait remarqué les autres cuves, celles qui portaient des lettres, celles qui n'en portaient pas, mais jamais elle n'avait vu d'autres personnes qu'elle en ces hautes jarres de verre sans ouverture. Parfois, elle écoutait les femmes parler entre elle, comme si elle n'était pas là, découvrait que certaines avaient peur d'elle, et que d'autres étaient plutôt curieuses, intéressées, cherchaient avant tout à la comprendre, malgré son masque qui lui permettait tout autant de respirer, que de rester parfaitement muette, bien malgré elle. Parce que oui, entre le fait que cela coupait le son de ses termes, et que le liquide autour d'elle déformait ses dires, il devenait complexe pour ces scientifiques de voir autre chose que ses lèvres bouger.

   Et elle ne leur en voulait pas de ne pas chercher à la comprendre, encore une fois elle s'en accommodait, elle l'acceptait, elle se disait même qu'un jour, peut-être, elle sortirait de la cuve, comme avait l'air de l'avoir fait les autres avant elle, et d'ainsi pouvoir s'exprimer avec ses propres termes auprès de ces femmes qu'elle n'aimait pas, mais qui auraient peut-être la capacité au moins d'essayer de la comprendre. Elle se sentait seule aussi, terriblement seule, elle aurait bien aimé s'attacher à quelqu'un, pouvoir vraiment s'approprier une personne pour que ce soit une femme « à elle », une amie, une mère, mais malheureusement personne ici n'avait la moindre valeur à ses yeux, ou ne lui permettait de se sentir mieux. Alors elle s'en accommodait, encore une fois, elle faisait surtout cela aussi d'ailleurs, elle considérait qu'en « s'en accommodant », elle serait capable de prouver qu'elle pouvait faire ses propres choix, qu'elle était, en soi, une entité vivante, même si elle ne ressentait pas, même si elle ne touchait pas, même si elle ne sentait pas, même si elle ne vivait pas. Oui, elle avait du mal à se croire vivante, à rester là, aussi nue, aussi statique, incapable de baisser la tête à cause des longs tubes placés autour de son crâne et de son cou, mais elle faisait tout pour l'être, et sûrement serait prête à tout pour l'être, quitte à ce que cela fasse sa tristesse, ou sa colère. Parce que c'est ainsi qu'on vit non ? En exprimant des sentiments, et prenant parti ? Du moins, c'est ce qu'elle comprenait du flot d'informations qu'on lui envoyait directement dans son esprit, et elle comptait s'y accrocher, pour vivre !

   Et puis... Elle commença à les entendre parler d'une libération, d'une mise à l'étude. L'idée était salvatrice pour elle, une véritable promesse de vie, de liberté, quelque chose qu'elle n'avait jamais connu, elle fut tant et tant intriguée qu'elle essaya, par tous les moyens, de lire sur leurs lèvres si elles avaient le malheur de prononcer une date, ou une durée, ou moins de quoi lui confirmer que cette idée n'était pas simplement quelque chose d'évoqué par l'une de ces femmes dans un cadre hypothétique, mais bien une possibilité future ! Et elle crut même comprendre que cela n'allait pas tarder, ce qui fit toute sa joie, l'amenant à vouloir se montrer d'une exemplarité totale dans le seul et unique but de quitter cette cuve froide, vide de sensation, et d'enfin toucher la terre ferme. Bon apparemment elles avaient encore quelques essais à faire, quelques tests, qu'elle n'eut aucun mal à accepter et à traverser, malgré la douleur. La pression ? Elle sentit bien un de ses os se disloquer lorsqu'elles parvinrent à solidifier le liquide dans lequel elle avait vécu jusqu'ici sous une force de plusieurs dizaines de tonnes, mais qu'est-ce que cela était en comparaison de son besoin de quitter cette prison de verre ? La force ? Elle n'eut guère à leur prouver sa valeur quand elles commencèrent à l'envelopper grâce à ces espèces de tentacules mécaniques, et les brisa même une fois qu'elle fut complètement étreinte par ceux-ci, afin de montrer à quel point ces choses étaient insignifiantes pour elle. L'obéissance ? Rien ne vint la faire osciller, même pas les pires preuves de sadisme de la part de ces scientifiques abominables. Les connaissances ? Toutes leurs questions furent répondues rapidement grâce à l'écran de la cuve, sans qu'elle n'ait à hésiter.

   Tout ce qu'elle voulait, c'était sortir.

   Alors elle eut bien du mal à comprendre lorsque qu'elle ne vit soudain plus personne. Pas la moindre femme ne passait désormais les portes de cette salle, les grésillements des différentes machines se turent lentement, et seule resta la lumière légère de sa cuve dans le noir. Du jour au lendemain, elle se retrouva seule, terriblement seule, et alors qu'elle espérait toujours entendre le fin chuintement des portes coulissantes venir faire réagir son ouïe, elle n'eut que le droit à l'écho pesant d'un silence parfait, qui ne révélait finalement quelques brins de son qu'à l'instant où elle cherchait à se déplacer un peu dans sa cuve, par inconfort. Elle ne comprenait pas, elle avait tout bien fait, elle avait respecté les ordres qui lui avaient été donnés, elle avait fait absolument tout ce qui était en son pouvoir pour s'assurer que chacune de ses réponses, de ses propos, de ses actes soit porteur de sa volonté de découvrir le monde extérieur... Que faisait-elle donc alors à être encore dans cette cuve, à attendre inlassablement qu'une douce âme ne vienne l'en libérer ? Elle ne savait pas quand c'était le jour, quand c'était la nuit, aussi elle ne tarda pas à cesser de dormir, se posant simplement dans sa prison, les genoux ramenés contre son corps encore bien juvénile, et continua tranquillement de revoir les différentes informations auxquelles elle avait encore accès via la base de données, y trouvant sa seule voie de sortie. Elle y trouvait les plaines, les villes, les gens, et au dessus de tout cela, les étoiles dans le ciel, scintillantes formes qui n'exprimaient que des découvertes, lointaines, si lointaines... Et pourtant qu'elle souhaitait tant découvrir, elle qui se trouvait encore sous terre.

   Depuis combien de temps se trouvait-elle seule, ici, dans le noir et dans le silence ? Elle ne savait guère, pour elle cela ne lui semblait pas très long, mais elle ne doutait pas qu'au vu du nombre de « leçons » qu'elle était allée quérir dans le serveur central, il n'y avait pas de grands doutes à avoir, elle avait dépassé depuis bien longtemps les deux semaines d'attente, et commençait à se demander si quelqu'un passerait désormais les portes de sa captivité un jour. Mais peut-être qu'il y avait d'autres solutions que de simplement attendre en se languissant de la présence d'autrui, peut-être qu'il était nécessaire qu'elle fasse désormais ses premiers pas par elle-même ? Dans le fond elle avait peur. Peur que tout cela ne soit qu'un autre test, et que sa tentative de sortir de la cuve soit perçue comme un acte belliqueux, une rébellion qui ne finirait que par lui faire outrage dans sa bonne volonté et son désir de suivre les ordres pour enfin découvrir un peu de liberté, un peu du monde dans lequel elle a vécu jusqu'ici sans avoir le droit de le côtoyer. Elle avait peur que, sitôt sa sortie, les femmes rentrent d'un coup, et lui tombent dessus pour la ramener en captivité, ou pire encore, la neutraliser. Elle avait entendu une scientifique en parler, elle savait que quelque part dans la structure se trouvait un objet capable de la tuer d'un coup net, et ne voulait absolument pas avoir à souffrir de ses effets. Elle voulait vivre ! Et avec cette envie de vivre, elle avait bien compris à quel point elle avait peur de mourir, de n'être rien d'autre qu'une forme absente, abandonnée, loin de tout, dans le noir et le si...

   Se pensées la menèrent à cette conclusion. Si elle ne résistait pas maintenant, elle n'était pas différente d'une personne déjà morte, attendant passivement qu'on la « mette au monde » sans qu'elle ne fasse le moindre effort, alors qu'il était peut-être justement temps qu'elle fasse preuve d'un peu de personnalité, d'un peu de force, de montrer qu'elle était un être en lui-même, une entité vivante, pas une simple petite chose qui obéit sagement. Elle regarda tranquillement le verre qui se trouvait face à elle. Quelle épaisseur faisait-il ? Elle ne pouvait clairement pas le voir, mais elle ne pouvait pas savoir s'il résisterait à un de ses coups tant qu'elle n'essaierait pas de le mettre au « défi ». Elle leva sa main lentement, puis serra son poing, fort, extrêmement fort, avant de commencer à bander les muscles de ses bras, et de projeter le tout avec force contre la paroi devant elle, ne cherchant clairement pas à faire preuve de la moindre retenue vis-à-vis de sa puissance : ce coup était le signe de son désir de liberté, son désir d'exister. La vitre ne sembla pourtant guère frémir au premier abord, elle resta droite, insensible, jusqu'à ce qu'un premier craquement se fasse entendre au niveau du poing encore engourdi de la jeune femme, et que celui-ci se propage en de nombreuses fissures dont le nombre augmentait en permanence, jusqu'à ce que deux de celles-ci se rencontrent, et entraînant l'explosion de sa prison de verre, le tout volant en éclats, tandis que le liquide étrange se vidait à toute vitesse. Sentir de l'air contre sa peau nue, quelle sensation étrange, quelle incroyable et divine caresse, quelle douceur... Le froid qui fit frémir sa chair un instant, elle le vécut comme la plus réconfortante des sensations : elle ressentait.

   Et ressentir autre chose que de la douleur l'amena à s'éveiller, enfin, à se trouver pleine de forces, de capacités, de compréhension, qu'elle n'avait guère eu la chance de ressentir jusqu'ici, elle se sentait entière, elle se sentait vivante, et elle ne comprenait pas comment, pendant tant de temps, elle n'avait pas eu la présence d'esprit de comprendre que tout ce qui l'entourait, ce carcan, n'était rien d'autre que quelques vaines limitations qu'elle aurait dû ôter depuis bien longtemps. Suspendue par les tuyaux qui se trouvaient autour de sa tête et de son cou, elle commença à les arracher, à les détruire, comme s'il s'agissait de constructions de papier, se libérant définitivement de cet amas lugubre de fer et de plastique, pour finalement les rejeter dans la pièce, la gravité finissant son travail quand, finalement, son poids devient trop important pour le reste de la machinerie, et qu'elle s'arrache alors d'elle-même pour concéder sa victoire à la jeune femme désormais au sol. À moitié dans l'eau, à moitié à l'air libre, les fesses écrasées sous son propre corps, elle découvre, et pendant un instant elle se perd en d'étranges expérimentations, plaçant le reste du liquide sur son visage pour sentir à quel point la fraîcheur l'affecte dans ce genre de situations, ou attrapant un bout de verre pour l'écraser dans sa paume, ressentant dès lors le mélange de douleur et de plaisir destructeur... Elle n'a que grand mal à se rendre compte de son état, de cette liberté, mais elle sait désormais qu'elle n'a plus à s'en faire, qu'elle va pouvoir agir comme elle le désire. Et plus rien ne lui fait peur, absolument plus rien !

   Elle se releva au bout d'un moment, ivre de bonheur. Sautant de la cuve au sol, évitant dans son bond particulier les bouts de verre qui tapissent le dallage métallique, elle se rattrape sans le moindre problème, et se pose donc avec légèreté dans les lieux avant d'observer les alentours sous un autre angle, curieuse de découvrir à quel point le monde peut être autre chose que la même vision en permanence, les mêmes tubes, les mêmes machines... Et justement, la jeune femme se trouve intriguée par un petit morceau de fer en bas de sa cuve, un petit écriteau, sur lequel semble se trouver inscrites quelques lettres dont elle se demande l'utilité, même si rien ne lui permet de le lire à cette faible distance. Elle a encore de l'eau plein les yeux après tout, normal que ce soit compliqué pour elle de voir loin. S'agenouillant, après avoir viré une partie des bouts de verre d'un revers de sa main blessée due à ses expérimentations, la demoiselle aux cheveux roses se penche en avant pour continuer de réduire la distance avec les inscriptions, jusqu'à avoir enfin la possibilité de les traduire malgré sa vision affaiblie. Encore une fois, elle devait plutôt se reposer sur ce qui lui avait été transmis par les machines plutôt que sur ses propres expériences, si bien que ce ne fut pas sans mal pour la jeune femme qu'elle parvint peu à peu à identifier les différentes lettres, puis à les accoler les unes aux autres pour commencer à identifier les mots. Et pourtant, s'aidant à haute voix, elle parvint tout de même à recoller les morceaux, finissant par se reculer avec un sourire satisfait, se mettant à s'exprimer par la même, découvrant enfin sa douce voix sans que celle-ci ne soit déformée par la cuve et son contenu :

« Myyyy...Myyyrrrraaaa....Myriaaaa...de ? Myriade, prrrooo...projet... trois et sept... trente-sept pri-me. Myriade, projet 37-prime. Sanegue Clahir? Non ça ne peut  pas être ça. Sang ? Sang-Clair ?...Hummm »

   Elle se releva lentement, et se tourna vers la porte.

« Myriade Sang-Clair, c'est pas mal quand j'enlève le reste. Je suis Myriade Sang-Clair, je suis libre, et je vais désormais sortir ! »

   Un autre petit bond, et la voilà en direction des lourdes portes automatisées qui servaient d'entrée au lieu. Pas d’électricité toutefois, ou bien trop peu, elle imaginait bien qu'elle ne parviendrait pas à passer normalement par celles-ci, mais à mesure qu'elle s'approchait, elle faisait jouer sa mémoire, cherchant avant tout à se rappeler de l'épaisseur du double-battant pour imaginer si elle avait la capacité de les passer par la force brute. Finalement point de réponse une fois qu'elle se trouva en face, hormis le fait d'essayer, afin de voir si elle était en effet aussi puissante que les scientifiques pensaient l'avoir créée, et soufflant encore longuement, elle prit un grand élan en arrière, avant de se projeter en avant avec violence, fichant son poing dans la porte, puis continua d'un trait, sans cesser de forcer, déformant le métal sous l'impact, puis rompant les quelques contenus offrant à ces portes leur résistance si particulière... Jusqu'à ce qu'elles volent en éclats, s'écrasant dans la pièce avec un fracas terrible qui se répercuta dans le silence du bâtiment. Il faisait toujours aussi sombre, mais l'absence de fenêtre en était sûrement la cause, ainsi que la coupure en énergie qui ne permettait donc guère de nourrir les différentes lampes de manière suffisante pour offrir un peu de clarté. Elle fit avec, passa par dessus les lourds pans métalliques avec un certain dédain, et continua de se faufiler dans des couloirs vides, et des salles tout autant vivantes, tout en se questionnant de manière ininterrompue : Comment cela était-il possible que personne ne se trouve dans les environs ?

   Elle n'avait guère de réponse, mais au point où elle en était, elle n'avait pas de grande raison de rebrousser chemin face à ce mystère, si bien qu'elle progressa sans le moindre doute, cherchant à se repérer dans ce flot de nouveautés qu'elle ne comprenait guère. Passant à coté d'un sandwich emballé dans un film plastique, elle s'en approcha lentement, curieuse, mais ne tarda pas plus dessus en décelant l'apparence grisâtre de ce dernier, comprenant par là que celui-ci n'était clairement plus propre à la consommation. Elle avait faim pourtant. Alors elle chercha un « distributeur », en ayant eu quelques informations par le biais de ses leçons, et surtout sachant pertinemment qu'il devait y en avoir dans la bâtisse, ayant déjà remarqué que certaines des femmes qui s'approchaient de sa cuve avait parfois une de ces choses appelées canette, ou sachet, et que ces éléments contenaient normalement quelques denrées qui ne sauraient sûrement que satisfaire son appétit. Finalement, la jeune demoiselle trouva les deux objets de sa recherche en même temps, une échappatoire, sous la forme d'un escalier qui semblait se diriger vers les strates supérieures du bâtiment, et un distributeur, juste à coté, qui semblait encore avoir en son sein quelques éléments comestibles, malgré la difficulté à les différencier à cause des ténèbres environnantes. Seule une vitre la séparait de l'objet de son désir, et comme jusqu'ici la violence avait toujours fait ses preuves, elle se concentra et vint mettre un petit coup rapide dans celle-ci pour la réduire en morceaux, s'offrant dès lors l'accès à une foule d'éléments qui ne saurait que combler ses besoins !

   Un sachet, puis deux, puis de quoi boire, puis à nouveau de quoi manger. La gourmandise eut tôt fait de lui faire consommer bien plus qu'elle n'avait normalement besoin, mais elle avait tellement soif de cette découverte que la moindre chose qui pouvait satisfaire sa curiosité venait immédiatement finir dans son gosier, du moins jusqu'à ce que sa satiété s'exprime par de léger grondement de la part de son ventre appréciant peu le soudain bourrage. Elle se redressa alors et repartit rapidement, grimpant les escaliers avec un certain empressement, se dirigeant immédiatement vers l'étage, et ne fut pas surprise de découvrir que les lieux étaient dans le même état de déperdition que les sous-sols, comme si soudainement la présence humaine avait disparu des environs, emportée par une tornade qui avait fait le choix de laisser intacts les meubles, mais de prendre une à une chacune des scientifiques du labo pour ensuite s'éloigner en la laissant en bas, seule et obéissante. Pour elle, c'était une bonne nouvelle dans le fond. Personne envers qui obéir, personne à satisfaire, Myriade allait pouvoir vivre pour elle-même, et donc s'offrir la joie de connaître ses expériences sans avoir à subir les lourds regards de toute une équipe prête à lui faire comprendre que le moindre de ses gestes pouvait être lourd de conséquences ! Filant hors des bureaux, rapide, agile, bondissant parfois par dessus une chaise renversée, ou les restes d'une table aux pieds brisés, elle parvint enfin auprès de la large porte à double-battant, et parvint par le plus grand des bonheurs dans le haut hall vitré qui servait d'entrée à l'ancienne compagnie d'armement. L'air frais arriva des vitres brisées, et elle en inspira une grande bouffée revigorante...

   Elle y était, la vie au dehors. Il faisait toujours aussi sombre quand elle regardait au dehors, mais elle n'avait pas la moindre crainte quant à ces ténèbres-ci ; ces formes étranges qui s'y déplaçaient lentement, ces êtres vivants qui y riaient avec la plus grande des honnêtetés, ces lumières au dehors qui avaient légèrement tendance à l'éblouir étant autant de signes d'une vie belle, d'une vie qui allait la changer, lui offrir enfin un renouveau, loin de sa cuve, loin des tests. Sautillante, la jeune demoiselle s'approcha de l'entrée, et vint à y remarquer une étrange couche de résine sur les premiers mètres, lui permettant enfin de comprendre pourquoi les lieux étaient vides et froids, privés de toute vie. Le bâtiment entier avait sûrement été vidé à la hâte, et ensuite il avait été bloqué, « muré », mis en quarantaine par quelques forces de la loi Tekhane, lui offrant dès lors toute possibilité pour se libérer, elle qui se trouvait dans les tréfonds de cette institution militaire. Pour le coup, elle aurait bien pu les remercier, mais se doutait que si les lieux avaient été ainsi mis à l'écart, ce n'était pas foncièrement pour qu'une expérience puisse de nouveau sortir, lui laissant à l'occasion quelques instants de réflexion pour se poser une importante question : si elle osait passer cette gangue de résine, allait-elle être poursuivie ? Il y avait des chances, la demoiselle expérimentale avait crû comprendre de ses apprentissages que Tekhos Metropolis était une ville fortement surveillée... Mais finalement peu lui importait, tout ce qu'elle souhaitait était de partir, de découvrir, de vivre. Et cette résine se trouvait entre elle et son idéal.

   Un coup, pour que la double-porte bien sommairement résistante vole en éclats, puis un second qui vint fragiliser l'épaisse couche désormais solidifiée de résine claire. Le troisième vint définitivement créer une brèche, par laquelle elle s'engouffra sans attendre, se faufilant sans la moindre hésitation, avant de débarquer de manière un peu maladroite dans la rue à cause de son empressement, enchaînant deux petits bonds pour tenter de garder son équilibre avant de rouler en avant, sur la route.

   Lentement, elle rouvrit les yeux, qu'elle avait bien étrangement fermés instinctivement quand elle était venue perdre l'équilibre, et ce qui vint capter son attention fut dans les plus grandes et inconcevables hauteurs de ce monde. Que connaissait-elle du monde ? La guerre, l'armement, le militaire, le scientifique... Bien des choses dont on lui avait bourré le crâne pour que Myriade devienne la meilleur arme de Tekhos Metropolis, et même la petite expérience acceptait le fait qu'elle serait tout à fait capable d'éliminer le moindre danger sans grand souci. Mais là, ce qu'elle avait devant les yeux, c'était autre chose que tout cela. Ce n'était ni la ville froide, ni les terres désolées qui entourent les environs, ni même la plus petite chose qu'elle avait vu dans ses rapports. Elle ne parvint à comprendre qu'en se rappelant à partir de quelles données ses prédécesseurs et elle-même avaient été nommées. Ce qui se trouvait actuellement haut dans le ciel, bien trop loin de sa portée, bien trop loin de toute tentative d'entravement, d'appropriation, ce qui brillait si haut au dessus de sa tête, c'étaient des étoiles. Et elle les aimait. Ces formes fantastiques, brillantes comme des joyaux, petites comme des têtes d'aiguille à cause de la distance, mais qui étaient si libres, intouchables, c'étaient des étoiles... Et elle, toute nouvelle vie en cette terre, les contemplait avec le besoin inhérent de graver en sa mémoire l'instant même où sa première erreur lui offrit son premier soupçon de beauté naturelle. La petite expérience, confuse, charmée, ne sachant plus quoi faire, restait là, au milieu de la route, contemplant ces petits points brillants dans le ciel...

   Et quand elle reprit contact avec la réalité, ce fut avec un crissement de freins, et l'éblouissante lumière d'une paire de phares.

~ ~ ~ ~ ~

Chapitre 3 : Les deux têtes du projet OESA


   Luxienne n'avait pas cherché à calculer le temps qu'elle passait au chalet. Elle avait un soutien financier personnel, elle avait de quoi tenir longuement grâce à l'approvisionnement constant en nourriture, et surtout elle pouvait passer du temps avec une personne de confiance quand elle n'avait plus la tête à travailler, même si de nombreux sujets restaient souvent orientés autour des nouvelles technologies, et de ses projets en terme de recherches. Kirosu n'était pas foncièrement plus intelligent qu'elle, plus doué, ou plus malin, mais il possédait nombre de connaissance qui lui avaient échappé de prime abord, et qui s'étaient révélées particulièrement utiles lors de ses propres tentatives d'amélioration de ses travaux. Finalement, il lui avait dit un jour qu'elle « possédait l'esprit pour voir au-delà de bon nombre de problèmes, mais les bases, si importantes, te manquent pour concevoir ». Et ce n'était pas faux, à tel point qu'elle fut grandement étonnée que les dites bases ne lui aient jamais été inculquées lors de son apprentissage, lors de ses écoles, laissant finalement la femme sur la touche lors de ses premiers mois de triturations intellectuelles, le temps qu'elle puisse quérir de son ami de tous les jours le savoir suffisant pour prendre ses travaux sous un autre angle, progressif, et compréhensible. Et la plus grande des différences avait été énergétique, la menant à faire de nombreux calculs pour transposer cela sur un schéma Tekhan, la façon de procéder selon les Terriens étant tellement différente qu'elle s'était parfois casser la tête sur des semaines pour avancer une simple ligne d'équations...

   Mais, des années plus tard, son projet était viable. Elle ne l'avoua guère au vieil homme, mais elle avait en main tout ce qu'il lui était nécessaire pour pouvoir quitter le chalet normalement, et usa de quelques moments supplémentaires auprès de lui pour l'accompagner sur sa propre tentative de création technologique supérieure, lui offrant le tout de son savoir pour faire avancer ses hypothèses, ses recherches, au delà de son propre possible. Finalement, en quelques mois, elle lui offrit ce qui lui permis de retourner chez lui, et la soirée qui vint à préparer son départ fut des plus amusantes pour la jeune femme, un peu trop d'alcool peut-être, une crise de foie en plus, mais en tout cas, ils fêtèrent en grandes pompes leurs résultats, chacun profitant des clairs derniers instants qu'il leur restait avant de se séparer définitivement, eux qui s'étaient tant plus dans la compagnie de l'autre, par un esprit identique, et une volonté de savoir qui dépassait les espérances de chacun. Si Luxienne était plus mesurée sur l'éventualité d'ailleurs qu'ils ne puissent se revoir, au vu de son avancée, elle joua tout de même le jeu, se permit d'accorder à l'homme un sourire sincère, une discussion soulignée d'émotions, mais surtout de nombreux remerciements pour tout ce qu'il avait pu lui offrir, socialement et scientifiquement. Elle s'était attachée à cet homme dans le fond, et se dire qu'elle n'aurait plus d'occasion de le revoir était en soi source de grandes difficultés, mais elle faisait preuve d'une certaine résilience. Si elle ne pourra désormais lui reparler, elle gardera toutefois en tête sa personne, douce, et à l'écoute, qui avait tant permis à la femme de progresser...

   Et vinrent alors les adieux. Kirosu disparut grâce au portail de son invention en un instant, comme si il n'avait jamais existé, et Luxienne prit soin de venir quérir l'une des parties de la machine pour s'assurer que le portail ne puisse se rouvrir, ou que personne ne vienne en faire usage depuis les contrées de Tekhos, afin d'éviter toute forme de choc culturel entre deux mondes particulièrement différents. C'était la dernière demande que lui avait fait son ami, et elle comptait bien s'y tenir, n'imaginant pouvoir décevoir celui qui lui avait tant offert sur leurs années de colocation. Puis la scientifique commença à empaqueter ses affaires, à vider les lieux, à procéder à un nettoyage méthodique pour offrir au chalet sa pleine beauté, rendant les lieux dans l'état dans lequel le vieux couple de Tekhane le lui avait loué, pour finalement se diriger lentement hors de cet abri de bois et de chaleur avec un certain pincement au cœur, se rappelant encore de l'époque où elle s'y était installée, si innocente, si différente. Aussi étrange que cela puisse paraître, cette maisonnée lui évoquait désormais l'une des plus grandes évolutions de sa vie, un apprentissage de tous les jours qui l'avait changée, lui avait permis de trouver sa place, socialement. Désormais, elle retournait à Tekhos avec un projet, mûrement réfléchi, maîtrisé, elle ne comptait plus agir comme un simple rat de laboratoire... Non désormais, alors que ses pas se marquaient encore légèrement dans la neige perpétuelle des lieux, et que son sac volait au travers des airs pour atterrir lourdement à l'intérieur du véhicule adjacent, Luxienne faisait une croix sur le reste de son passé scientifique, et rentrait dans son outil de locomotion avec un léger sourire aux lèvres : elle avait le projet de devenir l'une des prochaines forces technologique de Tekhos, et seuls les kilomètres la séparaient désormais de son but.

   Elle déposa ses clés chez le vieux couple, et aussi étrange cela fut, l'étreinte que toutes deux lui offrirent fut pour le coup particulièrement difficile à supporter moralement. Elles aussi, il y avait des chances que la femme n'ait plus l'occasion de les revoir, et il était difficile d'accepter que des personnes aussi tendres, aussi agréables, soient ainsi laissées en arrière de sa part pour nourrir son besoin de vivre non pas comme une simple aide laborantine, mais bien comme la directrice d'un Empire technologique. Pourtant elle fit l'effort de leur offrir une accolade sincère, essayant de leur exprimer par celle-ci combien elle tenait à elles, qui avaient été si bienveillantes à son encontre, puis quitta les lieux pour se diriger le plus rapidement possible en direction de la capitale de son pays, voulant non seulement y retrouver sa sœur, et lui exprimer le tout de son idée, mais surtout s'installer une bonne fois pour toutes, et clouer le bec à tous les serpents qui n'ont sûrement pas chômé durant son absence pour la rabaisser cruellement, en partie grâce à son absence imprévue. Dans le fond elle jubilait un peu. Imaginer ces langues de vipère, ces idiotes, ces imbéciles, ouvrir leurs mirettes assez grand pour avoir l'air de poissons décérébrés devant l'excellence de son projet, de son travail, c'était une idée tellement plaisante, tellement satisfaisante pour la femme, elle n'espérait qu'être là pour l'observer de ses propres yeux. Mais pour l'instant, son regard était adressé à la longue route qui défilait devant elle, et aux sombres échos qui apparaissaient au loin, premiers signes d'une nuit rapide, pleine d'étoiles... Et elle avait encore beaucoup de chemin à faire.

   Dans le fond, quelle tristesse d'avancer de manière horizontale quand elle savait que le vertical était si proche d'elle, quasiment à sa portée...

   Quand elle entra dans Tekhos, la nuit était déjà tombée depuis un moment, et seuls ses phares éclairaient la route, ne lui offrant que bien peu de vision, l'astre nocturne étant quasiment absent en cette soirée, et les étoiles à peine suffisantes pour offrir un brin de lumière. Mais cela ne lui déplaisait pas, elle avait presque l'impression de se cacher de ses consœurs pour revenir, de fomenter un mauvais coup, c'était amusant. Elle laissait ses pensées se balader un peu en sus, n'ayant guère de crainte maintenant qu'elle ne se trouvait plus dans les grandes steppes arides qui environnent le territoire Tekhan et sa capitale, et si cela influait un brin sur sa concentration, elle n'en ressentait pas le moindre danger, les rues de la ville étant toujours sûres, et les accidents inexistants. Non, à la lumière des lampadaires, encore rares aussi bas dans la grande cité, mais tout de même suffisamment présents pour lui permettre de distinguer au loin les embranchements lui permettant de rejoindre le cœur de la ville, elle profitait encore autant que possible de sa solitude, et ne voyait pas ce qui pourrait l'empêcher, de quelque manière, de rejoindre dans les minutes qui suivent son objectif premier. Et pourtant, alors qu'elle tourne à gauche de manière tout à fait mécanique, innocente, suivant le traceur GPS munit avec l'automobile de location pour lui permettre de rentrer, la voilà qui débarque dans un lieu dénué de tout éclairage urbain, une longue route sombre en plein milieu de la cité. Surprenant, mais elle ne va pas rebrousser chemin sans raison, n'est-ce pas ? Elle progresse un peu plus lentement, seulement, par simple prudence, et ne saura que louer pareille prévention durant le reste de sa vie...

   Une forme, au beau milieu de la route, au beau milieu des ténèbres ! Elle pile, paniquée, écrase violemment le frein sous son pied, braque le volant pour tenter de se décaler de cette présence diaphane allongée au sol. Elle prie de ne pas la toucher durant les quelques instants où elle voit son véhicule s'approcher dangereusement, sans vouloir faire mine de cesser son mouvement meurtrier.

   Et elle s'arrête, sans un choc... Elle ne voit plus rien, le capot l'empêchant d'avoir une ligne de vue suffisamment correcte pour vérifier qu'elle n'ait pas touché ce qui se trouvait au sol. Sur son siège, le souffle chaotique, elle tente pendant un instant de reprendre son calme tandis qu'elle se pose encore la question de ce qui se trouvait en face d'elle, et qui ne semblait pas avoir fait preuve de la moindre réaction alors que le véhicule s'était apprêté à lui fondre dessus avec une vitesse qui n'aurait eu comme résultat que de réduire n'importe qui en bouillie. Il n'y a plus un bruit, il n'y a de lumière que les phares, et Luxienne ne remarque même pas le reflet miroitant de la résine à gauche de son véhicule, tant elle manque de clarté d'esprit face à la situation... Puis, incapable de rester une seconde de plus sans rien faire, elle ouvre vivement la portière, et saute de l'habitacle avec un empressement tout compréhensible, se rattrapant un peu maladroitement sur la route pour avancer rapidement en direction de l'avant du buggy pour s'assurer qu'elle ne vient pas de tuer quelqu'un dès son retour en ville. Bon dieu, elle revient avec une idée géniallissime, capable de changer définitivement le visage de Tekhos Metropolis, et elle se retrouverait immédiatement en tribunal pour avoir manqué de prudence, et ainsi d'avoir écrasé une innocente qui avait fait un malaise ? Elle ne pourrait jamais assez s'en vouloir si c'était effectivement la vérité. Alors elle se presse, elle craint ce qui pourrait se révéler à ses yeux, mais elle ne se laisse pas plus de temps pour réfléchir, ayant horreur de ne pouvoir sauver la victime de son manque de précautions si elle perdait trop de temps...

   Et elle se fige. Devant elle se trouve une adolescente, dénuée du moindre vêtement, mais surtout pleinement consciente, et attentive, relevant lentement les yeux pour que ses prunelles turquoises se posent droit dans le regard affolé de la conductrice tremblante d'émotions, s'imaginant déjà constater une charpie sanguinolente devant le pare-choc de son moyen de locomotion. Luxienne est... paralysée. Aussi étrange soit-elle, cette rencontre presque inconcevable la déstabilise, elle qui pourtant à fait tant d'efforts pour pouvoir agir normalement en société, mais elle ne s'était clairement pas préparée à une telle rencontre, et ne peut que rester là, interdite, muette, complètement désarçonnée, alors que la jeune femme allongée sur la route roule lentement, se plaçant sur le ventre pour ensuite commencer à se lever. Et finalement, la scientifique parvint à se faire un peu violence en voyant la demoiselle aux cheveux décolorés se déplacer, se remettant un peu en tête le fait que malgré l'aspect si étrange de la situation, elle avait tout de même manqué écraser cette « enfant », et qu'il était de son devoir de s’enquérir de son état, même si la honte étreignait son cœur à l'idée de lui avoir potentiellement fait du mal. C'est donc d'une voix mal assurée, difficilement maîtrisée, bégayante, et manquant clairement d'une intonation adulte que Luxienne tenta vainement d'échanger avec la figure pâle, en pleine quiétude, de l'accidentée, qui quant à elle se trouvait désormais bien campée sur ses deux jambes, droite, et le regard placé de manière toujours aussi directe dans celui bien moins à l'aise de la conductrice.

« B-b-bonsoir... Je m'appelle Luxienne, pardon de... d'avoir manqué de vous écraser, je... Vous allez bien, je ne vous ai pas blessée ?
 -  Luxienne ? Je m'appelle Myriade... Myriade Sang-Clair »

15
Prélude / Re : Les deux femmes les plus hauts-perchés de Terra.
« le: jeudi 04 mai 2017, 21:01:35 »
Elle tremblait face à la colère de Dénève, car non seulement elle n'y était tout simplement pas habituée, mais surtout parce qu'après de nombreux mois à se perdre dans sa lente et longue dépression, la jeune femme n'avait plus vraiment de mécanisme pour se défendre moralement, et la moindre inflexion de voix avait le don de la toucher au plus profond de son être, comme un coup de poignard cruel, une sorte d'assaut qu'elle ne pouvait contrer. Toutefois, ce fut dans un silence tout autant troublant que l'aînée entra dans l'appartement sombre, laissant le soin à sa sœur de fermer la porte, et qu'elle atteignit en quelques pas le salon où elle commença par ouvrir l'intégralité des volets électriques, laissant la chaude lumière du soleil révéler l'état pitoyable dans lequel se trouvaient les lieux, accompagnant cette contemplation d'un long soupir. De son coté, la cadette s'était échappée dans la cuisine pour lancer une cafetière, espérant que la boisson aurait au moins le don d'adoucir les mœurs de son invitée, sachant très bien qu'elle appréciait d'autant plus échanger autour d'un bonne tasse de la mixture noire qu'elle en adorait le goût. Finalement, ce fut du salon qu'elle entendit sa sœur reprendre la discussion de manière particulièrement directe, ne cherchant pas à passer par quatre chemins pour lui exprimer à quel point cette situation lui était des plus énervantes, et qu'elle devrait elle-même ne pas supporter de vivre pareil enfer :

« Non mais regarde moi ce merdier. Regarde-toi Luxienne ! Ça fait combien de temps que tu n'as pas rangé les lieux, pris le temps de nettoyer... et de te nettoyer ! Qu'est-ce qu'il se passe bon sang, dis-le moi vite ou je te jure que je t'explose à la figure !
 -  Dénève je... Je ne sais pas je n'arrive juste pas à...
 -  A quoi ? Regarde-toi, merde. Tu es splendide quand tu prends soin de toi, et j'ai l'impression de faire face à une souillon. Tu alignes les mots savants comme un poète aligne les vers normalement, et en deux phrases, tout ce que je vois est un chiot blessé qui bégaie... Merde, viens là, je ne veux pas te parler au travers d'un mur ! »

   L'ordre est ultime, et la voilà qui quitte la cuisine mollement, traînant la patte, ayant presque l'impression d'être une condamnée à mort qui fait ses quelques pas en direction de l'échafaud, laissant cafetière et bonnes intentions derrière elle pour passer la porter reliant les deux pièces la tête baissée, droit vers la moquette chauffante parcourue de tâches. Devant elle, la grande sœur était tellement remontée qu'elle n'était pas loin de faire voler le moindre des meubles qui se trouvaient dans la pièce, si elle n'avait pas encore la conscience de se dire qu'elle ne pouvait le faire au risque de briser l'intégralité de la vaisselle sale qui s'y trouvait exposée, cela ferait déjà sûrement un moment que l'intégralité des lieux aurait connu sa colère. Mais non, elle ne reste que statique et dépitée devant l'état de sa petite sœur, tellement abattue qu'elle ne sait même plus si la colère est de mise. Mais comment peut-elle savoir comment agir envers sa cadette si celle-ci reste ainsi mutique, passive, ne répondant qu'à ses ordres sans jamais se laisser le droit de s'exprimer comme le ferait une pauvre petite bête domestique peureuse. Voilà, c'est exactement ça qui la met en colère, qui est en train de l'insupporter : Luxienne est une jeune femme fantastique, qui a toute valeur à s'exprimer et à offrir aux autres le tout de son intelligence, et de la voir ainsi incapable de se défendre, se contentant de se taire et de baisser la tête, ça la met hors d'elle. Elle ne voulait pas sortir de sa carapace ? Très bien, Dénève allait la faire craquer, la pousser à bout jusqu'à ce qu'elle lâche enfin ce qu'elle avait au plus profond d'elle :

« Putain mais tu vas causer oui ? Allez, lève la tête, arrête de faire la petite gosse apeurée, regarde-moi, et réponds moi ! Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu sais pas réfléchir ? Es-tu une sotte qui ne sait quoi dire ? Bouge-toi, je veux avoir une réponse !
 -  Dénève je... Je...
 -  Arrête de bégayer pour l'amour de Dieu ! Parle clairement !
 -  Pardon je... Eh bien je...
 -  SOIS CLAIRE OU JE T'EN COLLE DEUX EN PLEINE TRONCHE !
 -  Ils me haïssent ! Personne ne veut travailler avec moi, personne ne veut même me parler ! Je me sens seule, inutile, je n'arrive plus à faire quoi que ce soit ! Dénève j'en peux plus, je peux pas aller travailler sans me faire écraser et insulter, et finalement je ne parviens même pas à progresser sur mes recherches... je... Je... Je suis fatigué de tenter de leur parler sans résultat, de me faire envoyer chier à chaque tentative pour avoir deux mots avec le moindre d'entre eux... C'est... C'est trop dur...

   La jeune femme tomba en larmes, craqua en effet face à son aînée et commença à se vider de tout ce qu'elle avait sur le cœur de manière aussi pitoyable qu'honnête, laissant l'aînée contempler le triste résultat de ses provocations les plus directes, avec un léger air satisfait sur ses lèvres, contente dans le fond que sa cadette ait enfin réussi à se libérer de ce poids qu'elle avait sur le cœur. Sans attendre, alors que la petite forme encore adolescente de sa sœur était en train de tressauter mollement, portée par les soubresauts de sa tristesse, et les hoquets pathétiques dus à ses larmoiements, ce fut avec une tendresse légère, et un mouvement relativement délicat que Dénève vint à quérir sa petit protégée entre ses bras, et la serrer fortement contre sa poitrine. Alors voilà ce qui l'avait tant et tant laissée à l'abandon, voilà ce qui avait provoqué cette fuite dans ses appartements ? C'est vrai que Luxienne était loin d'être douée pour ce qui était du relationnel, mais pour le coup, l'aînée n'avait jamais imaginé qu'elle puisse avoir autant de soucis pour de simple échanges avec ses collèges de travail, ce qui, désormais, paraissait bien plus plausible maintenant qu'elle s'était enfin exprimée, et qui allait enfin lui permettre d'agir auprès de sa chère petite sœur pour lui offrir un peu de réconfort, et sûrement les conseils qui lui permettront de reprendre du bon pied son travail. Mais avant cela, elles restèrent immobiles, l'une contre l'autre, la cadette laissant ses larmes s'échapper en un flot ininterrompu, l'intégralité de son malheur s'échappant en des pleurs qui semblaient intarissables.

   Il lui fallut plus d'une demi-heure, trente minutes de geignements et de tremblements incontrôlés pour que finalement elle se remette un peu de son état, et qu'elle puisse se sentir enfin la capacité de quitter les bras de sa chère, si chère sœur, et de la regarder avec l'un des airs les plus terriblement perdus que Dénève avait eu l'occasion de contempler. Elle allait avoir besoin d'aide, de s'échapper un moment, de partir un peu de Tekhos pour se remettre de ses émotions, et pour l'occasion, la grande sœur avait déjà en tête quelques idées, si bien qu'elle attendit que sa cadette se sépare d'elle, et se dirige mollement vers le canapé pour s'y asseoir, afin de libérer ses jambes molles de la faiblesse due à l'émotion. Ceci fait, elle se dirigea tranquillement vers le premier moniteur de la pièce, et l'alluma, afin de laisser l’électronique se mettre en marche, tandis qu'elle se tourna doucement vers sa chère Luxienne, et lui adressa un doux sourire, désormais sortie de sa colère, pour enfin chercher des solutions qui permettront à la jeune fille d'enfin se permettre de progresser sans avoir à sentir le défi insurmontable de vivre avec autrui, de mettre en place un projet commun où elle ne parvenait à trouver sa place :

« Luxienne, dis-moi. Est-ce que tu penses que tu serais capable de te débrouiller seule pour travailler ? De trouver de toi-même les solutions ?
 -  Hum... S-Sûrement ? Je ne sais plus trop désormais, mais je m'en crois capable... »

   La grande sœur opina légèrement du chef, puis se tourna vers l'écran et ouvrit quelques pages net, avant de finalement trouver ce qu'elle cherchait, instant où elle tourna le moniteur vers sa chère petite sœur, lui présentant ce qu'elle venait tout juste de chercher, avant de reprendre la parole. Sur l'image holographique terne se trouvait une annonce pour une maisonnée, à des lieux de Tekhos Metropolis, une sorte de domaine de recueil qui se trouvait loin, très loin dans les montagnes voisines, dans les cimes de ce territoire quasiment vide, et avec tout cela était annoncé un paiement, ainsi que plusieurs petits détails pour qui serait assez proche pour les lire. Ce fut d'ailleurs un peu intriguée que la jeune fille observa cela, puis qu'elle leva les yeux avec une grande lenteur sur le visage fier de l'aînée, qui elle ne doutait pas un instant de ce qu'elle se préparait à lui annoncer. D'ailleurs, elle ne tarda nullement, parce que voyant que sa sœur allait se mettre à lui poser des questions sur le pourquoi de cette mise en scène, elle se racla la gorge de manière bien rapide, une main devant la bouche, puis commença à lui offrir le détail de son plan d'une voix quasiment universitaire, comme si elle donnait là à Luxienne un cours tout bête. Et bien sûr, l'adolescente vint à se taire respectueusement, ne faisant rien d'autre que d'ouvrir grand ses esgourdes pour ne pas manquer le moindre détail de ce dont son aînée allait l'informer, non sans bien sur se demander ce que l'adulte avait en tête pour sa pauvre petite personne en pleine dépression :

« Écoute petite sœur. On va présenter ta démission à l'institut dans lequel tu bosses, tu y perds ton temps. Pendant ce temps-là, je vais discuter avec la communauté pour te valider un permis de chercheuse autonome, afin que tu sois payée, et je vais te financer un petit voyage pour que tu ailles te reposer là-bas. Je veux que tu y restes le temps que tu as besoin, mais à une condition : quand tu reviendras, ce sera avec une idée révolutionnaire, et réalisable, et je veux que tu montres à l'intégralité du monde scientifique que tu n'es pas qu'une petite adolescente perdue, mais bien la plus grande génie de ce monde ! Compris ? »

   Un instant d'hésitation, une fraction de doute... Puis, lentement Luxienne acquiesça lentement.

« D'accord, faisons ça.
 -  Fantastique. »

. . . . .

   Deux mois plus tard, elle était là, dans cette zone enneigée, et bon sang ce qu'elle pouvait grelotter dans ce froid hivernal. Elle n'avait pas prévu qu'il y fasse si froid pour être honnête, elle savait bien que ce genre de domaine était particulièrement rude, oui, mais elle n'avait jamais présupposé qu'elle aurait autant de mal à s'habituer au changement si soudain de température, comme quoi elle pouvait toujours être surprise par le fonctionnement du monde, même après en avoir compris une grande partie des mécanismes. Elle venait de sortir de la voiture qui leur avait permis d'atteindre les lieux si lointains de la capitale Tekhane, et avec elle se trouvait les deux tenancières du domaine,  un joli couple de femmes âgées qui ne manquaient pas de lui offrir à chaque croisement de regards un chaleureux sourire au demeurant des plus réconfortant, pour être parfaitement honnête. Elle les trouvait sympathiques, elle les aimait bien, et si elle ne se sentait pas si mal à l'aise en compagnie d'autrui, elle aurait sûrement choisi depuis un moment de leur faire la conversation, mais avait peur de tout gâcher par quelques termes maladroits, comme elle en avait tant l'habitude. Pour autant, elles l'avaient menée jusqu'à l'impressionnant chalet, qui dominait les lieux, et c'est avec un léger soulagement qu'elle observa la haute bicoque en bois, y trouvant un charme bien différent des hautes tours de fer de Tekhos Metropolis. Encore une fois, un sourire de la tenancière, alors qu'elle vint lentement lui offrir la clé de la bâtisse, puis elle vint à l'accompagner tranquillement jusqu'à l'entrée, ayant choisi de lui faire une rapide visite des lieux, afin qu'elle n'ait pas à chercher les différents outils qui lui seront nécessaires pour vivre durant les prochaines semaines.

   La porte ouverte, le tour des lieux débuta notamment avec le grand salon d'entrée, un feu puissant permettant à la belle maisonnée d'être délicieusement chauffée, grâce au rayonnement de l'âtre où il était en train de brûler, puis le duo continua tranquillement la visite pour permettre à la jeune Luxienne de contempler les chambres, la salle à manger, les cuisines, ou encore les endroits plus scientifiques, comme la cave, dont l'aspect technologique contrastait drastiquement avec la beauté ancienne des lieux. Ce n'était pas gênant, après tout elle était une Tekhane, et elle savait qu'en tant que chercheuse autodidacte, elle allait avoir besoin d'un domaine de recherche, d'approfondissement, afin de pouvoir continuer encore un moment ses recherches une fois qu'elle aurait su reposer un tant soit peu son esprit et son âme, y trouvant les ressources nécessaires pour se remettre à un travail des plus précis et efficace. Mais pour l'instant, elle continua avec beaucoup de respect et de calme le tour du chalet, observant autant le vieux bois que l'ancienne décoration, se demandant bien en quelle occasion quiconque avait pu avoir l'idée de venir construire un lieu pareil dans un tel recoin montagneux, avant de se laisser tout simplement charmer par ce petit bout d'antiquité architecturale, et de simplement emboîter le pas de la tenancière qui semblait trouver fort plaisir en la compagnie de l'adolescente. Peut-être était-ce la différence d'âge, peut-être était-ce autrement le simple fait d'une nouvelle compagnie ? En tout cas, elle ne manqua pas de continuer sa présentation fidèlement, avant qu'elles ne reviennent tranquillement devant l'entrée, et que le passage des clés se fasse dans le plus grand calme, et sûrement un autre surplus d'amabilité.

« Pour les courses, ne vous en faites pas, il y a un service permanent qui se fait par demande automatisée, vous n'aurez donc pas à faire vos propres achats, à moins que vous ne souhaitiez acquérir un aliment particulier, en ce cas vous n'aurez qu'à envoyer une demande, on le fera livrer.
 -  Merci beaucoup, et pour le paiement eh bien...
 -  Pas de crainte pour cela, votre sœur a payé pour plus d'une année déjà, donc profitez simplement des lieux. S'il y a la moindre malfonction n'hésitez pas à nous contacter.
 -  Je n'y manquerais pas, merci encore !
 -  Mais de rien, à bientôt, faites attention à vous jeune fille. »

   Elle ne manqua pas d'acquiescer tandis que la femme quitta tranquillement les lieux, la laissant donc seule dans cette gigantesque maisonnée, un peu perdue, un peu craintive, mais déterminée à se retrouver, et surtout, à ne pas décevoir sa chère grande sœur, qu'elle ne puisse la voir retourner chez elles, à la capitale, avec le regret dans les yeux, et la honte dans l'âme. Tranquillement, elle alla donc se positionner tout prêt du feu, et s'accroupit pour goûter à la divine chaleur qui s'y trouvait, sentant enfin un peu de réconfort dans ses muscles qui commençaient sérieusement à geindre du contact prolongé avec la neige et la glace extérieure, laissant ses pensées se perdre dans quelques constats des plus agréables, notamment l'un qui ne sut que lui offrir un doux sourire sur les lèvres alors qu'il venait tout juste d'apparaître dans sa petite tête : elle avait pu discuter simplement avec cette femme, elle ne s'était pas moquée d'elle, ni ne l'avait rejetée de par ses compétences. Sûrement n'en avait-elle même aucune connaissance, peut-être était-ce cela qui lui avait permis de rester aussi simple, aussi directe envers elle, sans jamais cacher de son amabilité et de sa douceur ? Elle le découvrirait sûrement en temps voulu, mais l'idée germait dans son esprit : peut-être qu'il fallait qu'elle cache ses capacités pour aller mieux avec autrui, pour pouvoir leur parler sans détour ? Elle allait essayer, et peut-être que l'avenir viendrait lui dire s'il ne s'agit que de vaines suppositions, ou si elle venait de toucher là le secret de l'art de la communication entre les êtres humains : ne pas chercher à faire automatiquement preuve de sa supériorité, mais d'être tout simplement égale aux autres...

   Et pendant ce temps-là, au dehors, une voiture redémarrait tranquillement, emportant le couple de Tekhanes avec un léger vrombissement plaisant dans l'épaisse neige, alors que celle qui venait de faire la visite vint à se permettre un petit commentaire amusé, taquin, mais surtout curieux, face à un événement qu'elle n'avait tout simplement pas compris en entrant dans le haut chalet qu'elles louaient :

« Dis-moi, quand est-ce que tu as eu le temps aujourd'hui d'aller faire un feu dans la cheminée ? Surtout qu'il était fort, tu n'as pas dû y aller de main morte avec le bois, ma chérie !
 -  Un feu ? Hum, je ne me souviens plus, tu sais, avec l'âge ma mémoire faiblit, sûrement ce matin, un peu avant qu'elle arrive.
 -  Hum peut-être. Tu es tellement prévenante mon amour.
 -  Oh arrête cela voyons, flatteuse ! »

. . . . .

   L'installation de la demoiselle prit plusieurs jours, elle dut même attendre quelques semaines au final pour obtenir le tout de son équipement, autant dans les machines de calcul que pour les échantillons les plus sensibles dont elle avait fait la commande, ce qui avait passablement ralenti son envie de recherche, mais lui avait octroyé en revanche le plein temps dont elle avait besoin pour se sentir un peu mieux, pour se plaire dans son nouvel environnement, et surtout pour mettre un peu d'ordre dans sa pensée tant et tant anarchique depuis les tristes événements de sa vie de citoyenne Tekhane. Découvrant au passage le plaisir de converser avec d'autres personnes, notamment par le biais de ses locatrices qu'elle pouvait passer voir de temps à autre, elle eut aussi le grand plaisir de se laisser aller à de longues discussions, et à un attachement somme toute des plus surprenant pour elle, qui n'avait jamais été aussi proche de qui que ce soit, hormis des deux autres femmes de sa famille. La découverte de ce petit couple lui offrit d'ailleurs le droit à de nombreux questionnements, autant sur la nature d'une relation amoureuse, qu'elle n'avait guère la capacité de comprendre encore, mais qui l'intriguait sérieusement, mais surtout sur le fait que deux femmes puissent ainsi vivre une pleine harmonie, année après année, loin de tout, commençant à l'obliger à se poser quelques questions vis-à-vis de ses propres attentes dans la vie future. Pourrait-elle s'éloigner de Tekhos pour vivre dans le calme ? Aurait-elle besoin d'un peu plus de contact, de reconnaissance ? Elle n'avait pas encore les réponses, mais la découverte de ces questionnements fut un premier pas pour la jeune chercheuse, un salvateur premier pas !

   En tout cas, Luxienne put au moins profiter des lieux et du temps qui lui était alloué, et ne manqua guère d'en faire le plus grand des usages, car si elle n'était pas encore forcément dans l'esprit de se mettre au travail, chose compréhensible au vu de ses difficultés à trouver un moyen de se concentrer sur les différentes études qu'elle pouvait mener, elle préféra en profiter pour trier un peu l'ordre de ces dernières, essayant tant bien que mal de trouver l'unique sujet qui ferait autant son plaisir que sa gloire. Mais bon, il n'y avait rien dans les projets d'androïdisation qui pouvait se trouver intéressant à son regard, rien non plus dans les nouvelles recherches chimiques, qui se trouvaient actuellement passablement stagnantes à cause du problème formien, sans parler des différentes propositions d'amélioration technologique, où la progression constante ne saurait être influencée par la présence de la génie. Non, aucun de ces sujets ne trouvait grâce aux yeux de la demoiselle, et plus elle s'octroyait du temps pour y réfléchir, moins elle avait envie de s'attaquer à ce genre de travaux, ayant à chaque fois une petite voix au fond de son cœur lui exprimant à quel point elle se trouverait inutile en entamant une observation précise des données qui lui avaient été confiées, pour finalement trouver la réponse en quelques jours, et recommencer à se faire huer par les quelques personnes dont elle viendrait annihiler des mois, peut-être même des années de recherches complètes et frustrantes. Alors Luxienne tentait tant bien que mal de découvrir son propre sujet, crayonnant des feuilles et des feuilles d'idées plus ou moins folles en espérant avoir le droit à un éclair de génie, et ces dernières finissaient toujours au creux des flammes de la cheminées, laissant la poussière et le charbon accueillir ses dernières pensées.

   Chaque soir, en se couchant, la jeune femme pensait à cette sœur qui avait fait tant d'efforts pour lui offrir le lieu idéal afin qu'elle puisse de nouveau se concentrer sur ses recherches. Chaque soir, elle repensait à leur dernière discussion, et commençait à se demander si son aînée n'avait pas eu le malheur de placer en elle un espoir trop grand, trop important, qu'elle ne pouvait pas encore réussir à justifier au vu de son état mental. Chaque soir, quand elle fermait les yeux sur son oreiller, et qu'elle se laissait aller à un repos souverain, elle se demandait bien comment elle allait faire pour pouvoir s'en sortir avec cette promesse qu'elle avait faite, celle de revenir avec l'idée du millénaire, celle qui permettrait de tout changer pour le peuple Tekhan, mais finalement se laissait emportée par les souvenirs et les rêves, disparaissant dès lors dans quelque monde merveilleux dont personne ne pouvait la tirer...

   Sauf cette nuit là.

« Aaaaaaah ! »

   Elle ouvrit les yeux. Sur le cadran, plus de deux heures de la matinée, elle avait encore envie de dormir, et surtout ses cheveux étaient tellement en pétard qu'elle avait eu bien du mal à regarder l'horloge électronique au travers des rideaux en désordre de sa chevelure rebelle, l'obligeant finalement à se redresser, et de couper définitivement court à son repos, si le bruit qu'elle avait entendu en bas n'avait pas été suffisant pour justifier son réveil. Elle avait entendu quelqu'un hurler, en bas, et si elle avait eu le don de reconnaître l'une des voix de ses deux propriétaires, elle aurait sûrement sauté du lit pour aller lui offrir une aide des plus appropriées, mais ce qui ce soir la plongeait dans l’effroi, c'est que la voix qui se trouvait aux étages inférieurs n'avait rien à voir avec celles des deux Tekhanes ! Trop grave, trop nasillarde. Ramenant les couettes sur elle, un peu craintive, Luxienne était dans son sommeil quand elle avait entendu ce son, si bien que la jeune Tekhane avait été bien loin de pouvoir en comprendre toute la portée : était-ce un cri de douleur, ou l'expression d'une hargne ? Elle ne savait guère, et son esprit tournait à toute vitesse, l'obligeant non seulement à toujours rester éveillée, mais surtout à chercher le courage de quitter ses draps, et s'éloigner du confort chaleureux de ses couettes pour se mettre en marche, en direction de la sortie, afin de découvrir ce qu'il se tramait dans le chalet. Elle espérait sincèrement ne pas avoir affaire à quelques brigands, quelques voleuses malintentionnées, les renégats étant rares dans le pays, mais d'autant plus dangereux du coup, car bien moins prompts à l'écoute et à la camaraderie...

   Mais elle n'avait pas vraiment le choix en tout cas, elle se devait d'aller à la rencontre de cette intrusion. Se mordillant la lèvre dans un simple signe de stress, elle quitta les couettes dans une absolue lenteur, essayant de poser son pied légèrement sur le bois du parquet pour ne pas produire le moindre grincement, et se dirigea tout de même vers le placard avant tout pour quérir au moins un peignoir qui saurait cacher sa nudité. Difficile de l'avouer encore, mais elle avait pris beaucoup de formes ces derniers mois, elle avait atteint la fin de sa croissance, et les quelques tenues qu'elle avait emporté commençaient à être un brin... Petites pour le reste de sa personne, lui écrasant bien souvent la poitrine, ou affichant son ventre sur quelques centimètres. Alors le peignoir était sa seule option pour cacher réellement son corps, sans parler de la rapidité avec laquelle elle pouvait l'enfiler, puis cherchant dans la poche d'une de ses vestes, elle vint à quérir le Lance-dard qu'elle avait emporté, au cas où, petit engin des plus efficace et capable de transpercer de nombreuses couches de vêtements afin de s'assurer d'administrer la dose de calmant suffisant pour se faire s'écrouler la moindre menace. Elle le dissimula dans sa paume, sans l'activer pour ne pas risquer de se planter l'aiguille dans un mouvement sot, et sortit lentement de sa chambre, enfin, la porte ouverte lui offrant la possibilité d'entendre quelques gémissements plaintifs plus bas, ceux de quelqu'un qui retient difficilement ses larmes, et essaye tant bien que mal de ne pas faire plus de bruit. Si c'était une cambrioleuse, ou une renégate, elle n'était décidément pas très douée !

   Ses pas étaient les plus légers possibles, les plus calmes, elle ne voulait pas se faire entendre à cause d'une petite erreur de mouvement, et espérait pouvoir s'approcher rapidement de ce potentiel danger pour pouvoir agir si elle y était poussée. Malheureusement, son moyen de défense, bien caché à l'intérieur de sa main, n'avait pas une grande portée si elle voulait qu'il reste efficace, et il était nécessaire qu'elle soit au maximum à une dizaine de mètres de celle qui geignait pour considérer avoir la moindre chance de mettre cette intruse hors d'état de nuire, alors elle avait tout à gagner en se faisant la plus discrète possible, au lieu de gueuler à l'intérieur de la maisonnée. Un pied après l'autre, descendant les marches une par une, en essayant toujours de ne pas faire crisser le vieux bois du chalet, elle commençait à voir la légère lumière qui s'échappait de la cuisine, se permettant ainsi de découvrir la position de sa potentielle ennemie, l'amenant à raffermir sa poigne sur le Lance-dard avec une certaine volonté de se rassurer, avant de finalement atteindre le sol du rez-de-chaussée. Qu'est-ce qu'elle allait faire ? Bondir dans la pièce pour prendre son attaquante par surprise ? Essayer une approche plus calme et attendre que celle-ci cherche à quitter la pièce pour finalement la prendre à son propre jeu ? Le fait est qu'elle était toujours capable d'entendre le souffle lourd de cette personne, ses tentatives de calmer sûrement la douleur par quelques vains exercices de respiration, alors peut-être était-il plus indiqué qu'elle en profite pour faire quelques approches supplémentaires ? Oui, elle ne devait pas laisser la peur lui indiquer la solution de facilité, elle devait profiter de l'état de l'intruse pour s'y attaquer !

   Elle n'attendit plus, laissa la discrétion de côté, et courut en direction de la pièce légèrement lumineuse pour s'y jeter avec vigueur, connaissant désormais bien les lieux, et se plaçant ainsi de manière à ce que la table soit entre elle et celle qui n'avait rien à faire dans le chalet, mais la soudaine surprise laissa la scientifique en herbe cesser son mouvement dès qu'elle parvint à se faufiler dans la pièce, les yeux grand ouverts...

   Devant elle, à coté du réfrigérateur, se tenant une main en sang à cause de nombreux débris d'assiette tranchants à souhait, se trouvait non pas un membre du sexe féminin, mais un homme, un vieillard même, aux cheveux ébouriffés, à l'air malade, qui non content de se tenir la main de manière bien inutile, laissait de grosses larmes couler sur son visage ridé. Elle en était tellement stupéfaite qu'elle n'en remarqua même pas que celui-ci, à l'heure actuelle, portait une épaisse blouse comme celles qu'elle pouvait elle-même arborer quand elle se trouvait dans les labos de Tekhos Metropolis, mais surtout elle put bien remarquer que ce misérable, s'il se trouvait en effet chez elle, et au beau milieu d'un pays où son simple sexe pouvait lui valoir bien des soucis, n'avait pas la moindre condition physique d'un renégat, avec ses membres malingres, et ses joues creusées. Et tout comme la scientifique avait eu le don de le remarquer, ce fut réciproquement le même résultat pour le vieillard, qui n'ayant pas loupé les sons du déplacement de Luxienne, se détourna lentement de la lumière du réfrigérateur pour la regarder, les yeux rouges, et les lèvres mordues dans un fin espoir de ne pas faire plus de bruit qu'il n'en avait déjà fait. Le silence s'était installé, l'un comme l'autre des partis semblait attendre l'explication de cette rencontre presque incohérente, au vu des événements, mais surtout, le temps s'étant arrêté, l'une se demandait comment elle devait réagir face à ce bonhomme pitoyable, et l'autre ce qu'il allait faire maintenant qu'il avait été repéré, après tant de temps à se dissimuler. Et finalement, ce fut à la jeune femme en peignoir de lever la voix, son arme toujours en main, au cas où son intrus se metrait soudainement à agir de manière belliqueuse !

« Qu-Qui êtes vous !? Que faites-vous ici !?
 -  P-pardon je... je... Je m'appelle Hatashi Kirosu. Je vous en prie, je me suis juste caché ici... je pensais la maison abandonnée... Je ne savais pas qu'elle vous appartenait...
 -  Vous pensiez que... Depuis combien de temps vous trouvez vous ici ?
 -  Quelques mois... Je suis apparu dans ces montagnes, sans savoir pourquoi... J'ai cherché le premier endroit où me protéger du froid... Et quand vous êtes arrivée, je n'osais faire preuve de ma présence... Voyez j'ai... J'ai vu vos émissions et...
 -  C'est bon, c'est bon, j'ai compris. »

   L'homme se tut. En effet, s'il avait vu les quelques émissions Tekhanes, il avait dû vite comprendre qu'il n'était pas foncièrement le bienvenu dans ce pays, où les femmes n'ont que peu tardé à traiter le cas masculin pour ce qu'il était, à savoir une nuisance, incapable de maîtriser ses pulsions, et qui ainsi ne devait pas se voir accordé les privilèges de la citoyenneté, ou le confort que l'on offre naturellement à celles qui savent réfléchir sans s'en laisser conter par leur instinct. De là, ayant compris son statut de criminel, il avait préféré rester dissimulé dans le chalet, surtout qu'avec le système d'approvisionnement naturel du réfrigérateur, et les stocks de bois, il devait parfaitement avoir de quoi se chauffer, et manger, sans jamais craindre de se faire attraper pour quelques raisons... Et puis bien sûr, voilà qu'elle était arrivée en louant le chalet, et ainsi avait eu le don de perturber le train-train de l'homme, l'obligeant à se cacher de jour quand elle était active, tandis que lui restait debout la nuit, profitant de son repos, pour manger quelques morceaux. Elle se disait bien que, parfois, certains des aliments qu'elle commandait n'arrivait pas à bon port, mais elle ne s'était pour autant jamais doutée qu'un autre qu'elle en faisait son repas, et en profitait plus ou moins pour survivre malgré sa présence. Comment avait-elle fait pour ne pas remarquer qu'une autre présence que la sienne se trouvait dans les environs, franchement ? Luxienne n'en avait guère idée, mais rien que pour cela, elle s'en voulait un peu, se jugeant presque reine de la sottise par ce biais ! Mais bon, il y avait une question désormais plus importante que son aveuglement, ou son manque de lucidité : qu'allait-elle faire de lui ?

   Parce que oui, elle  avait beau le regarder sous tous les angles, elle ne voyait en lui rien qui ne puisse fondamentalement lui porter préjudice de quelque manière, ni même être le moindre des dangers, surtout qu'il semblait bien plus apeuré par sa présence qu'elle-même l'était de la sienne ! L'homme tremblait un peu, et si on ôtait l'idée que les quelques soubresauts de son corps pouvaient provenir des blessures qu'il s'était maladroitement infligé, il ne manquait guère le fait que l'idée d'être emportée par quelques-unes de ces Tekhanes un peu particulières, un peu fortes d'esprit, et prêtes à ne pas laisser la moindre seconde chance à un membre de sexe masculin, était foncièrement une des possibilités de la terreur de cet homme, et du fait qu'il s'était caché auparavant sans jamais tenter de s'en prendre à elle, malgré son sommeil. Peut-être devait-elle simplement choisir de lui faire confiance ? Ce n'était pas simple, après tout il y avait là toute une éducation de sa part pour lui faire comprendre que l'entité masculine était dangereuse, viciée, vorace, mais pour autant est-ce que l'intégralité de l'humanité qu'elle avait connue n'avait jamais eu la moindre once de délicatesse envers elle, hormis sa famille ? En quoi pourrait-il être différent de ces camarade de travail qui l'avaient proprement abandonnée, puis lynchée, rependant sur elle les pires rumeurs et les plus innommables marques de vice morale ? Non, pour être tout à fait honnête, elle comprenait ce que ce vieil homme ressentait dans l'instant, et rien que pour cela, elle ne voulait tout simplement pas lui faire du mal. Aussi étrange cela puisse être pour une Tekhane... Elle voulait en savoir plus sur lui, et surtout, lui permettre d'enfin ne pas se sentir mal à l'idée de rencontrer une des femmes de ce peuple matriarcale et sexiste :

« Relevez-vous donc. Prenez une chaise aussi, et maintenez votre plaie, je vais prendre des pansements. Je m'appelle Luxienne au fait, autant que nous nous connaissions un brin si je vous héberge. »

. . . . .

   La rencontre de cet homme fut une bouffée d'air frais pour la jeune femme, en bien des sens. Choisissant de l'accueillir, et ne l'invitant à se dissimuler que lors des quelques éventuels passages du couple qui lui avait loué la bâtisse, elle commença lentement à entrer dans une dynamique de longues discussions à ses côtés, d'échanges, de banalités sincères et agréables où l'un comme l'autre purent se permettre de comprendre un peu mieux l'univers dont chacun provenait, et la manière dont ils comprenaient dès lors les mœurs de leur interlocuteur. Kirosu, ou plus simplement Kilosse dans sa langue, étant donné que la prononciation et l'écriture différaient selon les standards Tekhans, était tout comme elle un homme de science, qui à l'occasion de travaux semblait avoir connu une incohérence, un loupé, qui l'avait finalement envoyé au beau milieu des terres enneigées des environs, l'obligeant à trouver rapidement l'abri qui le laisserait en vie et capable de se renseigner sur les erreurs qui l'avaient mené jusqu'ici. Son lieu de vie originel s'appelait Terre, et s'il exprimait assez simplement que son monde se trouvait bien différent du sien, notamment sur le plan de la position des sexes, les hommes ayant encore chez lui des avantages par rapport aux femmes malgré de nombreuses tentatives de tous de réduire ces inégalités, il avait eu le temps d'observer les astres, et avait remarqué que si ceux-ci se trouvaient en des emplacements tronqués, ce n'était pas pour autant qu'il ne retrouvait pas de nombreuses formes astronomiques remarquables qui lui offraient une théorie intéressante : Terra devait se trouver dans la même composition astrale que la Terre, sûrement bien éloignée, mais présente.

   Et en retour, Luxienne lui exprima ce qu'elle savait de Terra, de ses voisins, de ses conflits, lui montrant notamment la différence entre son pays natale, Tekhos, et les autres pays l'environnant, précisant non seulement leur retard technologique, mais aussi à quel point ceux-ci semblaient être proches de ce que le scientifique exprimait comme étant le Moyen-Âge dans son monde d'origine. Finalement ce furent de nombreuses journées d'échange, un confort renouvelé pour l'homme perdu, et surtout la première véritable occasion de Luxienne de se défaire de son manque d'aisance en compagnie d'autrui, découvrant autant son talent pour l'échange, pour l'expression de ses connaissances, mais surtout, le fait qu'il était nécessaire qu'elle explique, qu'elle détaille, qu'elle offre à ceux avec qui elle se trouvait l'intégralité de son savoir afin de leur en offrir le sens. Plus de réponses toutes faites, mais des heures et des heures de présentation afin de s'assurer que l'autre parti puisse comprendre l'intégralité de son propos. Et cela fonctionna, cela lui permit non seulement de voir que le vieil homme ne rejetait pas sa compagnie, mais surtout qu'étant à l'écoute, il pouvait lui-même se permettre de développer certains points de ses théories, de ses observations, de ses travaux, au point même où ils purent finalement se tourner vers des sujets plus complexes, plus profonds, plus sinueux : les travaux de la jeune femme, qui trouvèrent enfin une ligne directive, et un moyen pour que l'homme, malgré le manque clair de ses outils de recherche, puisse rentrer chez lui sans craindre de faire face aux Tekhanes, et à leur prévisible manque de tolérance.

   Les deux penseurs avaient trouvé quoi faire, et les prochains mois furent longs, intenses, mais pour l'un comme pour l'autre, une source infinie de satisfaction, la chercheuse trouvant de l'affection et de la reconnaissance en cette compagnie, et le terrien de l'espoir.

   Et le point commun fut que tous deux, pour poursuivre leur travaux, se mirent à regarder les étoiles.


~ ~ ~ ~ ~

Chapitre 2 : Au-delà d'un projet catastrophe.


   La réunion avait été précipitée, pour ne pas dire carrément poussée en tête de liste des actions que se devait d'accomplir la compagnie pour sa survie, et ce sans que personne ne comprenne pourquoi, n'ayant pas du tout été préparés à un tel revirement de situation, et un tel chamboulement de leurs horaires, voyant soudainement leur emploi du temps s'alourdir de plus de deux heures d'échange en fin de soirée, sous l'ordre du patron. Enfin, pour quelques-uns seulement, la grande majorité du groupe se trouvait bien éloignée de tels actions de la part de la grande chef de direction, mais en revanche les principaux dirigeants des différentes études manquèrent de peu d'exprimer un certain mécontentement, même si aucun ne se le permit en imaginant à quel point la colère de leur supérieure saurait se faire implacable si l'on venait à contester ses ordres. Alors les heures filèrent rapidement, chacun se demandant bien pourquoi une telle rencontre avait été mise en place, quel genre d'idées farfelues étaient venues en tête d'Alista Marovik, grande directrice de la filiale de production améliorée des technologies de guerre Tekhane, mais chaque supposition finissant bien rapidement par faire frémir les différentes hauts-placées de la compagnie, finissant de les dégoûter de la future rencontre qu'elles allaient devoir mettre en place dans la soirée. Mais, étant donné que rien ne semblait leur être offert pour trouver un moyen de se défiler au dernier moment pour trouver le confort d'un chez-soi agréable, chacune dut traîner les pieds dès la sonnerie de fin de journée, et prendre l'ascenseur central, se dirigeant vers le quatorzième étage, tout en échangeant de manière plus ou moins aisée sur les différents, mais probables, sujets de discussion qui allaient être engagés !

« Vous croyez qu'elle va encore gueuler sur les chiffres de la compagnie ?
 -  J'en doute. L'avantage avec l'attaque formienne, c'est que l'armée a toujours besoin d'approvisionnement en armes, ou en chair à canon. Résultat, les chiffres sont bons.
 -  Pour autant, ça ne l'empêche pas de se mettre en colère de temps à autre. Je ne sais jamais ce qui lui passe par la tête.
 -  Personnellement, je crois qu'elle aura un nouveau projet à nous sortir. J'ai entendu parler d'une découverte étrange par un groupe de soldates il y a peu, c'est peut-être lié ?
 -  La rumeur sur cette excavation qui avait été abandonnée ? Voyons, vous ne pouvez pas croire pareilles foutaises, tout le monde se doute qu'il s'agit simplement d'une manière de légitimer un peu les forces armées, alors que nous n'arrivons pas à progresser face aux formiens. Un espoir pour la masse...
 -  C'est possible. Je ne saurais exposer un avis sur le sujet. Pour moi, tout est bon à prendre, s'il y a possibilité de mettre en place quelques recherches à ce propos. »

   Le tintement de l'ascenseur vint à faire cesser la moindre parole, le silence s'installant alors que les quatre femmes quittèrent enfin l'habitacle de fer pour se diriger rapidement vers la grande salle de réunion, dossiers à la main, et inquiétude sur le visage, cherchant encore quel genre de sujet avait bien pu les réunir toutes en cette soirée. Au moins, à se déplacer dans les riches couloirs du quatorzième, elles avaient un peu moins d'appréhension, la moquette rouge et or qui se trouvait sous leurs pieds illuminant les lieux d'une teinte luxueuse tandis que les lustres offraient à chacune ce scintillement chatoyant, cette bénédiction silencieuse du domaine de l'armement et de la guerre, leur montrant une fois encore que si, pour la grande majorité du monde, les affrontements et le sang étaient des calamités, il se trouvait toujours des personnes qui en tiraient profit. Et dans ce genre de cas, mieux valait être ce genre de personnes, histoire de pouvoir éponger larmes et souffrances par le biais de quelques aisances monétaires des plus agréables. Et puis, en toute honnêteté, il n'y avait pas non plus de meilleur outil pour soutenir la recherche que le besoin d'éliminer un ennemi national, rendant les aides bien plus aisées à quérir, alors pourquoi s'empêcheraient-elles de profiter d'une telle mine d'or pour de simples raisons morales ? Non, tandis que chacune passait les portes qui menaient au lieu de leur rendez-vous, elles savaient peut-être que beaucoup les jugeraient immorales, mais elles n'en avaient tout simplement que faire. Seule comptait la réussite, et le luxe qui y était affilié. Et leur dirigeante, assise déjà en bout de table, était parfaitement d'accord avec un tel dogme.

« Bonjour à toutes. Je vous en prie, asseyez-vous, nous allons avoir besoin de discuter sur un sujet d'une importance cruciale, et je vais ainsi avoir besoin de votre pleine concentration. »

   Quelques regards se croisèrent, mais personne ne vint faire cas de la moindre petite réticence face à ce comportement bien civil de la part de la directrice de la compagnie. L'une après l'autre, elles firent lentement le chemin menant vers la chaise la plus proche, et commencèrent peu à peu à s'installer avec calme, tout en observant devant elles la femme qui se tenait bien droite, mains croisées devant son visage dans une position qui lui permettait de poser son menton sur celles-ci, tandis qu'elle observait ses subordonnées derrière des lunettes en demi-lune. Les assises s'écartèrent de la table, puis se rapprochèrent, et finalement, quand les scientifiques et autres dirigeantes de secteurs humains eurent toutes pris place autour du large rectangle de bois, il ne resta qu'à la directrice de se relever, austère, froide, avant de prendre une télécommande, et d'appuyer sur deux de ses boutons pour abaisser l'écran d'affichage, puis l'allumer de manière à ce que toutes puissent voir ce dont elle s'apprêtait à parler.

   Sur l'image, de manière un peu mystérieuse pour les femmes en présence dans la pièce, se trouvait afficher un nom de code, sous lequel avait été placé deux photographies d'une enfant qui ne semblait guère avoir plus de huit années, aux cheveux couleur de sang, à l'air farouche, et au regard presque déstabilisant.

« Connaissez-vous ce visage, mesdames ? »

   Une rapide vague de négation vint lui répondre, sans que cela ne la surprenne. Elle-même avait eu grand mal à quérir les informations et les documents sur cette apparition étrange, et il n'avait guère été aisé de comprendre les cryptages qui avaient été utilisés pour protéger les informations concernant cette bien particulière jeune femme se trouvant actuellement affichée sur le large écran bleuté.

« Il s'agit de la dernière découverte de l'armée, le projet 37-C-Delta. Pour les quelques femmes ici présentes il y a de cela plus d'un an, ce qui vous exempt, madame Jeruss, sachez que cette entité à été retrouvée dans l'excavation catégorisée Y-45, qui avait été fermée il y a de cela de nombreux mois, pour cause de danger trop important. Ne vous attardez pas sur son apparence de jeune fille, elle n'est non seulement pas humaine, mais surtout cette chose a eu le don d'éliminer des dangers que nous, Tekhane, n'avions même pas la plus petite chance de soumettre, sans que nous n'ayons jamais su pourquoi. »

   Elle appuya sur un nouveau bouton, et l'affichage passa sur l'un des cadavres qui avait été retrouvé autour de l'objet appelé « Oeuf », ne manquant pas d'ailleurs de rendre mal à l'aise ses subordonnées, dont l'une eut bien du mal à ne pas laisser échapper un haut-le-cœur, tout autant à cause de la monstruosité de ces bêtes, mais aussi de l'état terrible dans lequel se trouvait sa chair, des éclats se trouvant partout sur le sol des environs, non sans parler des trous béants se trouvant sur la carcasse. Alista Morovik, bien peu prompte à se laisser aller à de telles tendresses de cœur, ne fit rien d'autre que reprendre tranquillement la suite de son exposé, l'image en fond derrière elle, et ne prit même pas la peine de passer à la prochaine présentation pour alléger un peu la conscience de ses collègues, jugeant qu'elles devraient sûrement accepter de voir bien pire avec les plans qu'elle avait en tête :

« L'une de ces choses, à elle seule, suffisait à éliminer plusieurs bataillons de nos unités, et le projet 37-C-Delta a été capable de toutes les éliminer avant même que notre armée n'ait eu le temps de se déplacer en direction de l'excavation, si bien que nous n'avons même pas d'image de ce qu'il s'est exactement passé. Tout ce que nous savons, c'est qu'une fois sur place, les forces Tekhanes ont pris soin de rapatrier l'enfant, si je peux oser l'appeler ainsi, et l'ont amenée à l'intérieur de la capitale, dans un labo sécurisé. À partir de là, elle est intraçable...
 -  Pardonnez-moi cette remarque, mais pourquoi nous parler de cela. Car si cet exposé est ma foi fort intéressant sur l'évolution de la situation des armées Tekhanes, je ne vois guère en quoi l'apparition d'une forme de vie humanoïde sur nos terres va changer grand chose à nos propres recherches en armement.
 -  J'y viens. »

   Un nouveau clic, et voilà que l'affichage se fait sur un tableau, accompagné de quelques photos prises durant le rapatriement du projet, mais surtout, de nombreuses données d'évaluations sur l'évolution de celui-ci, notamment dans les premiers mois de son observation, ce qui était relativement facile à lire pour quiconque ayant un minimum de connaissances en terme d'observation scientifique. Une rapide perte en force, en pouvoir, en puissance y était visible, une certaine forme de dégénérescence qui n'était tout simplement pas explicable du point de vue des données vitales de 37-C-Delta, mais qui toutefois semblaient avoir toute leur importance du point de vue de la directrice de la compagnie, qui laissa même le temps à ses subordonnées de lire l'intégralité des notes, comme s'il fallait absolument qu'elles se les mettent en tête pour les futures explications. Peu étaient de celles capables de comprendre les pensées d'Alista, mais là, elle était tout simplement en train de les perdre, et aucune d'entre elles ne voulaient l'exprimer à haute voix, même si la femme était largement capable de le voir au travers de leurs prunelles emplies d'incompréhension. Il était donc temps qu'elle leur explique son but, SON projet, ce qu'elle avait vu dans l'arrivée de cette humanoïde à l'intérieur des labos Tekhans, et tout particulièrement comment elle comptait en faire usage, de la plus savante des manières. Elle se racla donc la gorge, et avec un sourire dont l'assurance n'avait d'égal que l'inquiétant sadisme qui s'y découvrait, elle reprit son propos, appuyant particulièrement sur le moindre détail qui lui semblait capital.

« Cette découverte aurait pu être un véritable cadeau pour l'armée Tekhane, mais malheureusement, comme vous le voyez, il semble que depuis sa sortie de « l'Oeuf », elle n'ait plus la capacité de conserver ses forces. Ce que je souhaite, désormais, c'est que nous nous penchions sur une reproduction, que nous pourrions produire en masse, une autre forme de vie, identique à la sienne, mais qui ne subisse pas cette régression, et pour cela, sachez que j'ai investi en contacts, et en connaissances, pour obtenir des échantillons de son corps. De la peau, du muscle, prélevés en toute honnêteté pour des recherches, mais dont nous allons user pour mettre en place une certaine forme de culture, de clonage, et dont je souhaite le résultat particulièrement probant. Vous toutes allez me constituer une équipe, solide, compétente, et je veux que désormais le tiers de vos différents budgets soit alloué à la création d'une entité guerrière sans limite, du niveau premier du projet 37-C-Delta, qui sera de toutes manières inutilisable bientôt, j'en ai bien peur. Et surtout, je veux que ça avance, rapidement, quitte à ce que des échecs soient inévitables. Torchez-vous avec l'éthique, le simple but est de créer l'entité ultime de la défense Tekhane, et qu'elle soit opérationnelle ! Vous avez compris ?
 -  Madame, ce n'est en rien pour vous contredire, mais rien que pour créer un être viable par clonage, le procédé est complexe, surtout pour une entité humanoïde dont nous ne connaissons ni la croissance, ni l'évolution...
 -  Et j'ai dit que je m'en battais de l'éthique. Que les sous-sols deviennent un charnier si nécessaire, si elles ne parviennent pas à maturation, ces projets ne seront même pas humains à mes yeux. Je ne veux que du résultat, et rapide, aussi vous avez tout intérêt de choisir des personnes de confiance, qui n'auront pas besoin d'être tenues au silence !
 -  Ces échantillons que vous avez obtenu, où se trouvent-ils ?
 -  Au sixième étage, dans les compartiments à risque. Il vous sera délivré un laisser-passer vous permettant d'y accéder une fois que vos équipes auront été mises sur pied.
 -  Eh bien... de combien de temps disposons-nous pour choisir nos coéquipières ?
 -  Je vous laisse trois jours. »

   Les mots qu'elle avait prononcé avaient laissé dans la salle une impression glauque, où chaque personne autour de la table sentait déjà retomber sur elle les conditions particulières de l'éthique Tekhane sur leurs épaules, mais malheureusement il était proscrit de résister à la directrice, malgré le trouble, malgré les peurs, malgré les doutes. Elle avait fait le choix de constituer une nouvelle entité, une force armée sans égale qui deviendrait bientôt la principale source de défense en Tekhos Metropolis, et pour elle le sujet était déjà une réalité, lui assurant soutien lucratif d'abord, mais surtout l'une des plus grandes réussites du monde scientifique, et de celui de l'armement. A bas les règles et les codes, rien ne saurait lui faire croire que son projet n'est pas viable, elle comptait bien prendre tous les risques pour se permettre de devenir la première ressource de force du pays, et ainsi, elle ne laissait nullement le choix à ses subordonnées, soit elles la suivaient sans broncher, soit elles finiront évincées, pour qu'elle mette à la tête de ses industries des gens possédant un brin moins de scrupules, ou de capacités à lui résister. Maintenant qu'elle y avait pensé, le projet se devait de se mettre en marche, le plus rapidement possible, et elle n'allait pas faire la moindre concession. Et ça, elles le savaient toutes, se regardaient parfois rapidement, en coin, pour jauger le degré de réticence de chacune, mais aucune n'allait avoir la force de lui faire face, de s'opposer à ses projets de grandeur, de suprématie sur le marché... Alors, rapidement, et dans un silence complet, chacune acquiesça, et toutes commencèrent rapidement à traiter des potentielles membres de leurs équipes, ainsi que des moyens par lesquels elles allaient procéder.

   Et chacune sortit de la salle de réunion avec le poids de nombreux remords, celui de n'avoir pas résisté, celui d'avoir abandonné l'idée de continuer les recherches de manière éthique, mais surtout, celui d'avoir laissé Alista s'enfoncer rapidement dans sa folie, celle de constituer cette arme humaine sans jamais se remettre en question quant aux risques encourus. Aucune des quatre femmes ne se sentait le courage de regarder les autres, et de manière presque étrange, elles ne partirent guère ensemble, acceptant la longue attente de l'ascenseur pour finalement partir une par une, dans un silence de mort, avec en tête le projet qu'elles allaient bientôt mettre en place, au delà de toute morale. Pour l'une d'elles, dernière encore en présence dans les couloirs, le départ fut d'autant plus complexe qu'elle ressentait au plus profond d'elle que malgré ses hésitations, sa couardise, elle était en accord avec la vision des choses de la dirigeante. La scientifique voyait ce qu'elle comptait faire, l'opportunité qu'elle avait remarqué dans la présence de l'entité 37-C-Delta, et comprenait aussi que même si elle allait s'avancer bien au delà de ce que les valeurs Tekhanes acceptaient comme « correct », cela ne serait que pour un bien supérieur de la patrie. Seule, et silencieuse dans les couloirs vides, elle vint se gratter compulsivement la joue, réfléchissant encore et encore aux différents procédés de synthèse d'une entité à partir de simples échantillons de peau, ou de muscles, et si la directrice n'était pas sortie de son bureau pour elle aussi quitter les lieux, il était bien possible qu'elle reste encore longtemps dans cette transe réflective...

« Alexandra Purelle, que faites-vous encore ici ?
 - Hum... Oh pardonnez-moi directrice, je réfléchissais à votre projet.
 -  Nous en avons déjà bien discuté, non ?
 -  Bien entendu, mais certains points me restent en tête. J'aimerais évaluer dès maintenant l'un des échantillons, madame, et je souhaiterais que vous me meniez jusqu'aux compartiments à risques.
 -  Il est bien tard, et je suis loin de désirer vous payer des heures supplémentaires Alexandra, vous savez ?
 -  Il ne s'agit guère d'argent, madame. Considérez cela comme... de la curiosité. »

   Un éclat dans le regard de la fameuse Alexandra fut tout ce qu'il était nécessaire pour convaincre la directrice... Cette femme, malgré sa présence relativement récente dans la compagnie, avait compris ce qu'elle désirait, ce qu'elle cherchait, et ne comptait pas remettre en cause ses méthodes, ou sa vision des choses. Non, apparemment, en présentant un projet aussi dangereux, aussi étrange, elle venait de se faire une alliée de poids, une personne qui serait capable de maintenir le cap lors de ces recherches inexorablement épuisantes moralement, et ce fut donc avec un grand sourire qu'elle accueillit autant de bonne volonté de sa part, finissant par... glisser sa main en direction de son sac, et de tirer un dossier de recherches, qu'elle ouvrit pour en sortir une carte magnétique au contenu particulier. Et cette dernière, Alista la tendit à cette femme de bonne foi avec toute la confiance du monde, prête à lui offrir même bien plus !

« Tenez... Ici se trouvent toutes les informations que j'ai pu obtenir sur 37-C-Delta, ainsi que le laisser-passer nécessaire pour pouvoir obtenir quelques uns des échantillons de peau que j'ai pu recueillir... madame Purelle, je vais placer ma confiance en vous. Faites tout ce qui est nécessaire pour que ce projet soit un franc succès !
 -  Entendu, madame. »

   Et elle vint prendre la carte, juste avant qu'Alista ne se tourne vers l'ascenseur, et le prenne, quittant définitivement les lieux, et laissant à nouveau la scientifique en chef auprès de ses pensées, contemplant d'un air avide l'outil de savoir se trouvant entre ses doigts, n'osant imaginer le tout des informations qu'elle venait ainsi d'obtenir. Quand elle se décida enfin à bouger, à appuyer sur le bouton d'appel pour que son moyen de déplacement vienne la quérir au quatorzième, elle attendit calmement, puis s'engouffra dans la cage de fer aux portes rutilantes avec un sourire profondément malsain, ne lui laissant dès lors que l'occasion d'appuyer sur le joli chiffre en surbrillance pour l'aider à se diriger vers le cœur de sa recherche. Elle posa les pieds sur le seuil du sixième étage avec une impression tenace, celle de fouler un interdit, puis se glissa dans la pénombre des bureaux, et des pièces de test, pour finalement parvenir au cœur des lieux, devant la zone des échantillons, et continua dès lors sa progression dans cette poix sombre jusqu'à parvenir au point crucial, la zone des éléments à risques. Un bip sonore, des lettres et des chiffres lumineux dans une teinte verdâtre se reflétant dans l'un des optiques perchés sur son front, et le lent déroulement d'un casier réfrigéré devant son regard piqué par un intérêt des plus inexpugnable. Lentement, elle vint à quérir les quelques menues restes d'une peau blanche se trouvant entre deux fines lamelles de verre, et l'observa avec un air aussi froid qu'analytique...

   Elle avait entre les mains l'élément qui allait changer la face du monde.

. . . . .

Pages: [1] 2