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Auprès de mon arbre je vivais heureux... [PV Kyô]

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Itami no Kyô:
Un animal sauvage se précipitait vers eux à toute allure. Kyô se sentait balloté au milieu des ténèbres. Elles étaient familières, c'était une sensation qu'il avait déjà connu un bon nombre de fois auparavant. Souvent, et pendant des siècles. Il voyait son corps flotter dans l'obscurité, mais il n'avait plus aucune sensation. Aucune réponse à ses mouvements. Si cette incapacité de faire quoi que ce soit l'avait effrayé par le passé, elle ne lui faisait plus rien désormais. La bête au pelage noir se rapprochait, l’œil éclatant. Il fallait juste attendre. Attendre que ça passe. Ça finissait toujours par passer. Chacune de ses foulées était vive et énergique. Bientôt, la créature serait là.
En un instant, sa passivité disparut. Seul dans le noir, il avait ressenti une rage indescriptible. Il ne comprenait pas. C'était comme un appel. La voilà maintenant au bord du trou. Son regard oscille entre les deux corps inanimés. Elle observe. Il fallait revenir. Il fallait revenir, maintenant. Il fallait se réveiller.

Lumière du jour. Malgré les feuillages, elle est agressive. Mais très vite, elle devint le cadet de ses soucis. Il fut secoué d'une toux violente, laquelle le fit redresser légèrement la tête et contracter quelques muscles: la réaction fut immédiate. Toutes les douleurs musculaires reparurent, les os brisés de son cou ne semblaient pas avoir apprécié le redressement, et son rythme cardiaque qui s'était emballé par le retour de la douleur lui provoqua quelques tiraillements. Le bon côté, c'est que cela signifiait qu'il s'était régénéré. Le reste suivrait bientôt s'il se fiait au mana qui recommençait à le parcourir. Il manquait juste une chose. Une chose qui semblait n'être rien, mais qui lui était absolument nécessaire. Il tendit une main au ciel -ce qui fut assez difficile tant il lui semblait pesant et douloureux-, et articula d'une voix faible:

"v... Viande..."

L'animal qui observait depuis son arrivée se saisit de cette occasion. Guidé par son instinct, il sauta sur cette main tendue, plaquant son petit ventre duveteux sur la paume du Dieu. Kyô utilisa sa seconde main pour le manipuler, l'approchant de son visage, et le regarda droit dans les yeux. C'était un magnifique lièvre noir, au pelage soyeux , la musculature correcte, et en parfaite santé. Il ne tremblait pas. Il ne faisait que fixer le divin en remuant son petit nez. Il était venu lui donner sa vie comme si ce devoir était inscrit dans ses gênes. Kyô le regarda encore un peu, lui caressa la tête, et le remercia avant de lui rompre le cou. Il planta ensuite ses dents dans son flanc, et commença à dévorer l'animal qui lui avait fait don de sa vie. La viande crue avait ce gout fort et assez désagréable qu'ont les bêtes sauvages, mais c'était une chair nutritive et Kyô avala chair et organes sans broncher, par respect pour le sacrifice de la petite bête.
Pour clarifier son esprit, il passa en revue tout ce qu'il s'était passé depuis son incarcération. Et sa seule conclusion fut un rire. Perdre connaissance plusieurs fois, se retrouver couvert de blessures et le pousser à consumer jusqu'à la dernière parcelle d'énergie qu'il avait, seul les Dieux en avaient été capables, surtout ses combats fréquents avec Arès. La différence, c'est qu'aucun Dieu n'avait vraiment eu envie de le tuer. Les Mortels étaient capables de choses stupéfiantes.

En parlant de Mortel stupéfiant...

Il avait recouvré assez de force pour se redresser, et se préoccuper de l'E.S.Per inconsciente. Elle semblait toujours en vie, et cette simple idée le réconfortait. Au fond, sa ténacité l'impressionnait. Elle l'avait supporté, assisté et soigné au détriment de sa propre santé, et avait même affronté une Déesse à ses côtés. C'était pas une chose qu'aurait fait le premier abruti venu, même avec de la bonne volonté. L'idée lui vint d'utiliser son mana pour l'aider à guérir, mais il n'était pas très certain de la façon dont il pouvait faire ça. Et il avait l'impression qu'ils tomberaient dans un cercle vicieux.
Il se contenta de sortir du trou, et partit les jambes branlantes vers le couvert des arbres pour ramasser des branches, des brindilles et des feuilles sèches. Son égo en prit un sacré coup quant à la difficulté qu'il eut à briser en buches de fortunes le maigre tronc d'un arbre mort, mais il en récolta suffisamment de bois d'allumage et de buches pour faire tenir un feu. Il disposa le tout à un mètre d'Enora avant de se rendre compte que ses vêtements étaient en partie trempés. Attends, elle est sortie du trou, elle a été jusqu'au ruisseau et elle est revenue vers Moi? Il parvenait à se donner une idée approximative de ce qu'il s'était passé depuis le crash. Et il était... Oui, il était impressionné. Il fallait qu'elle vive, ne serait-ce que pour le surprendre davantage. Il aimait ça.
Il s'accroupit à ses côté et lui caressa la joue avec tendresse, puis fouilla la poche arrière de son pantalon pour lui reprendre son paquet de cigarettes. Putain, tu nous en auras causé des emmerdes, toi., avait-il pensé. Parce qu'il préférait se dire que c'était de la faute des clopes, pas la sienne. Il l'ouvrit et en sortit le briquet, qu'il utilisa pour démarrer son feu dans un premier temps. Puis il vola à nouveau une cigarette à Enora. Comme un connard.

La chaleur du feu leur ferait du bien et permettrait à l'organisme d'Enora de tenir un peu plus longtemps tout en tenant éloigné les prédateurs: Kyô ne se sentait pas en assez bon état pour affronter un ours brun affamé. Dans l'immédiat, un humain bien constitué aurait pu le mettre au tapis sans problème. Il se sentait frêle, et chétif.
Il profita de l'inconscience de la mercenaire pour s'occuper de son épaule déboitée. Il avait quelques notions en médecine comme toute autre chose, mais il n'avait pas d'outils et n'avait aucune envie d'aller se paumer en forêt pour trouver des herbes aux vertus curatives, encore moins s'il fallait en faire du baume ou les pilonner. Il ouvrit donc son kimono sans cérémonie et s'attela à nettoyer ses blessures à l'eau avec minutie, en faisant attention de ne pas trop appuyer sur un os cassé sous la peau, ne pas ouvrir une plaie plus qu'elle ne l'était déjà. Elle se soignerait elle-même plus tard. Elle se débrouillerait mieux que lui. Les longs soupirs sifflants le dérangeaient un peu, mais tant qu'elle respirait, ça restait un bon signe. Ils avaient tous deux besoin de repos. Il s'allongea à ses côtés et ferma les yeux. Pas question de dormir maintenant, mais il devait reprendre des forces.

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