La carcasse gisait pathétiquement entre les herbes hautes asséchées par le soleil qui tapait fort depuis quelques jours. Mithra l'avait abandonné quelques jours avant, déjà trop chargée par le stock pesant sur ses épaules, et l'avait facilement retrouvée ce jour-là vu l'odeur qui s'en dégageait. Elle se rapprocha rapidement à quatre pattes, et écarta les fourrés avant d'être surprise par une flopée d'oiseaux noirs qui s'envolèrent en criant, mécontents d'avoir été dérangés dans leur repas. Une fois le dernier charognard passé, la hyène laissa un grognement envahir sa gorge puis s'éteindre. Elle n'appréciait pas que l'on touche à ses repas, ses proies durement capturés. Mais maintenant, piétinée et piquée par ces idiots de piafs, il était hors de question que cette viande rejoigne son garde-manger.
Elle soupira et baissa les oreilles, découragée et couverte de sueur. Les peaux de bêtes qu'elle portait en général sur elle avaient valsées dans la nature depuis longtemps, mais le soleil semblait toujours aussi agressif. Ça faisait un petit bout de temps que la hyène cherchait son butin complètement nue, et au moins les épines ne s'accrochaient pas à ses habits en les arrachant par la même occasion (quelque chose qui l'agaçait au plus haut point).
Mais si elle se moquait complètement que les écureuils puissent voir ses fesses, elle n'aimait pas transpirer. Non pas par coquetterie, mais parce que l'odeur de la sueur trompait ses sens en un rien de temps. Un rapide bain avant de rentrer à la maison s'imposait donc. Les haies qui contenaient la carcasse précédaient un petit étang que Mithra connaissait, et sans demander son reste, elle activa ses jambes puissantes et traversa les herbes avant de se laisser tomber dans l'eau fraîche.
Sa tête ressortit peu après et elle frémit de plaisir en barbotant au fond de l'eau. Cela dit, elle n'eut que peu de temps pour profiter de son oasis avant que l'évènement ne survienne.
Les pupilles de ses yeux se contractèrent soudain en deux fines fentes noires lorsqu'elle repéra l'ombre qui fonçait droit sur elle et elle évita de justesse l'énorme projectile qui s'enfonça dans l'eau en projetant des gerbes autour de lui. La terranide resta un petit moment tapie dans les roseaux avant de sortir, convaincu que quelque chose de vivant n'aurait pas tenu aussi longtemps sous l'eau. Elle plongea et saisit l'objet compromettant avant de le balancer sur la rive pour pouvoir l'analyser.
Ses yeux ronds contemplèrent la jambe qui trainait dans les fourrés, de bonne taille et d'une étrange couleur bleue.
Effectivement, une analyse s'imposait, et pas que du projectile, mais bien de l'endroit d'où l'on avait pu le balancer, volontairement ou non. C'est sous ces pensées que Mithra se redressa au bord de la rive et s'accroupit, avant de se nicher entre les herbes hautes en tentant de flairer une piste inconnue.