Ils se regardèrent longtemps. Aucun d’eux n’aurait pu dire combien de temps, mais ils ne dévièrent pas leurs regards pendant un long moment. Ce que Kamui voyait dans les yeux de Marine, ce n’était pas ce regard lubrique qui faisait de Mélisende une femme facile (oui, il ne la respecte pas, et alors? ^^) mais un regard plein de tendresse, qui ne veut aucun mal à celui qui s’y plonge, mais qui le réconfortait et qui le rassurait. Malgré lui, il s’approcha d’elle puis il lui ouvrit les bras, bras où elle s’enfouit pour parvenir à l’embrasser sur les lèvres. Il la serra bien fort alors qu’il se laissait tomber sur le sol, alors qu’un de ses mains remonta son dos à toute vitesse pour venir s’emparer de l’arrière de son crâne en s’infiltrant dans son épaisse chevelure rousse et la garder contre lui, l’embrassant avec toute la passion d’une vie de misère et de solitude refoulée au fond de lui-même depuis tant d’années. Ses bras la serraient désespérément et il se surprit à penser que s’il la renvoyait chez elle et qu’elle lui refusait le privilège de la suivre, il allait faire une crise cardiaque. Il caressa doucement le dos de sa belle, savourant le grain de sa peau alors qu’il faisait glisser sa main perdue dans ses cheveux sur sa nuque. Après ce baiser, il raffermit sa prise sur elle et il embrassa la peau dénudée de la gorge de la rouquine, ses yeux de chirurgien y ayant découvert une impressionnante quantité de fibres nerveuses qui lui signalèrent que cette partie de son anatomie était très sensible aux caresses des lèvres et des mains.
Il s’arrêta néanmoins en sentant qu’il allait étrangement trop loin. Ils ne se connaissaient qu’à peine, et même s’il avait vu un échantillon de sa personnalité, il savait qu’elle avait énormément été marquée dans ses rapports avec les hommes par les maltraitances de Don et il ne voulait pas rajouter à sa souffrance. Il la regarda dans les yeux, doucement, et il l’embrassa une nouvelle fois, tout doucement, mais de sa propre initiative. C’était un baiser doux, rassurant, comme celui qu’on donnerait à une enfant en peine, mais avec un petit quelque chose de plus, soit la chaude caresse d’une langue douce contre la sienne. Il ne savait pas vraiment s’y prendre avec les femmes de la Terre, mais il faisait au mieux. Avec elle, il se sentait si bien, si serein, si calme, qu’il croyait que son cœur allait cesser de battre alors qu’il se débattait à plein régime tant il était heureux. Il aimait Marine. Au fond de lui, il le savait déjà. Il venait de la rencontrer, il venait de vivre une toute première expérience avec elle, mais il était déjà amoureux d’elle. C’était incompréhensible, il n’arrivait qu’à peine à croire à une telle… sottise, c’est le mot exact.
Il caressa doucement la joue de cette femme qui faisait « battre » le cœur glacé que sa poitrine cachait sous un amas de chair que la vie avait quitté depuis des années, brisant de ce fait ce baiser qu’il venait de lui offrir. Il n’arrivait pas à croire qu’il soit encore une fois sous l’emprise de cet amour qui n’avait jamais rien fait d’autre que lui apporter de plus en plus d’ennuis. Il se perdit un long moment dans les beaux yeux de Marine. Comme il aurait aimé ne pas être immortel à ce moment-là, abandonner tout ce qui faisait de lui-même l’être qu’il était pour donner tout le reste de sa vie à cette femme, quitte à devenir son chevalier servant pour le reste de ses jours. Son regard se décala des siens pour descendre doucement le long de son cou et de ses épaules pour revenir vers son buste. Il décida de faire taire sa conscience qui lui rappelait sans cesse que, comparé à lui, elle n’était encore qu’une enfant, une enfant qui avait besoin d’être rassurée et cajolée après les terribles épreuves qu’elle venait de subir, s’abandonnant plutôt à son raisonnement. Elle était une jeune femme mature pour sa race et elle voyait en lui l’humain qu’il n’était pas avec son regard doux.
-Marine…
Il voulut l’embrasser une nouvelle fois, mais il se ravisa au dernier moment, la faisant doucement reculer, sans pour autant la forcer à le faire. Il avait simplement besoin qu’elle le regarde dans les yeux. Sa main quitta la joue de la rouquine pour replacer une mèche de cheveux roux qui était tombée sur son beau visage et un sourire étira doucement ses lèvres. Elle était belle, et pas seulement parce qu’elle avait des atouts physiques. En elle, il voyait une énorme gentillesse, une patience et une compréhension que nulle ne pouvait se vanter d’avoir, une compassion qui n’avait rien à voir avec de la pitié. Il savait qu’il pouvait avoir confiance en elle, même s’il venait tout juste de la rencontrer. Il l’attira ensuite à lui, l’incitant à poser sa tête contre son torse où aucun battement n’était audible. Elle devait comprendre la réalité de sa situation; il n’était pas un prince charmant sorti d’un monde féérique, il n’était pas humain comme elle et même qu’il était probablement l’un des pires prédateurs de ce monde; même les vampires s’éclipseraient s’il s’abandonnait à sa faim du sang, sa faim de la vie, il était un monstre, un monstre qui éprouvait pour elle des sentiments contre nature, un monstre de la nuit qui serait peut-être une menace pour sa pérennité.
Il la fit doucement reculer, malgré la tristesse et le désir qui habitait son regard. Il avait si mal de la repousser, de la faire reculer, de ruiner leurs efforts respectifs à néants. Malgré sa tentative de vivre avec sa différence et essayer de la séduire, c’était définitif; il n’y arrivait pas. Il n’arrivait pas à outrepasser son scrupule; l’âge, la race, le mode de vie, la personnalité, l’époque, tous les séparaient et les empêchaient d’être un jour ensemble. Il baissa honteusement la tête. Comment avait-il pu avoir cette audace et oser ensuite la repousser? N’était-ce pas ce qu’il désirait, au fond de lui-même? Être aimé d’elle? Elle lui offrait pourtant ce qu’il désirait, et néanmoins, il n’arrivait pas à se faire à l’idée qu’il y avait peut-être quelque chose qui leur permettrait d’être ensemble.
-Je suis navré… tellement navré… supplia-t-il, impuissant.
Il se défit d’elle et il retourna au campement, en proie d’une vive douleur. Ses dents étaient si serrées qu’il en avait mal et ses ongles s’enfonçaient dans sa chair alors qu’il s’éloignait toujours de Marine. Il devait la faire rentrer chez elle avant de perdre le contrôle. Il ne devait et ne pouvait pas se laisser à nouveau aller à cette sorte de folie. L’amour entre un Immortel et une Mortelle était tout simplement impossible, peu importe la volonté qu’il pourrait bien y mettre.
[oui, je sais, il sait pas ce qu'il veut xD]