Ca sera...? ( pv )

Une pièce noire, de grandes baies vitrées. En contre-bas, la ville de Seikusu s'étend, telle une pieuvre étend ses tentacules. Ici, les membres sont les rues et les avenues tenant lieu d'artères à la ville nippone. Eclairées par les réverbères et les phares des quelques voitures qui circulaient encore, ce spectacle paraît beau aux personnes sensibles aux jeux de lumière. C'est une honte et un scandale pour tous ceux qui préfèrent la clarté naturelle des étoiles. Qu'en est-il d'Eric? Lui, il s'en moque. Tout simplement. En même temps, il est quelque chose comme trois heures du matin. Alors que pensez-vous qu'il fait? Il dort? Si seulement...
Une main se tendit à tâtons, pour trouver le contact froid du métal sous ses doigts. Plusieurs essais furent nécessaires cependant, puisque les yeux du corps auquel appartenait cette mains refusaient de s'ouvrir. Un seul fit cet effort d'ailleurs, quand enfin la montre de luxe d'Eric fut captive de ses doigts. Le cadran indiquait trois heures huit du matin. Il soupira d'agacement. Inutile d'espérer, quand c'était comme ça, il ne pouvait plus fermer l'oeil. Soupirant d'agacement, il reposa sa montre, et passa de la position allongée sur le ventre à allongé sur le dos. Dans son grand duplex vide, sa voix résonna. Il baillait.
Une main large se glissa sous sa tête en oreiller,, l'autre sur son ventre qui le démangeait. Il resta là, étendu pendant une dizaine de minutes, à ne penser strictement à rien, avant de repousser ses draps et de quitter son lit. La télé? Non. Cet objet c'est pour les abrutis. Il s'orienta plutôt vers son Mac et consulta ses mails. Rien d'urgent. Normal. A cette heure là, tout le monde dormait. Tout le monde. Sauf lui.
Direction la cuisine, autant se faire un bon p'tit dej'. Eric avait ça pour lui qu'il ne se débrouillait pas trop mal en popotte. Ce matin donc, il se ferait un déjeuner de roi. Pancakes, oeufs brouillés, et tout le tintouin. Ca l'a occupé de tailler des tomates en rose. Pendant un bon moment.
Il devait être environ cinq heures quand il eut terminé de faire mumuse. L'heure à laquelle il devait se réveiller en temps normal, faute de pouvoir dormir plus tard. Le conditionnement à l'armée, ça avait fait des merveilles. Ironiquement bien sûr. Alors à partir là, la journée normale a pu commencer.

Direction la salle de bain, pour une longue douche. Eric aimait la sensation de l'eau chaude qui atterrit sur sa nuque et glisse, dans le dos, le long de sa colonne vertébrale et plus bas encore. Un moment privilégié pour lui. Peut-être un des seuls durant lesquels il éteint son portable. Après ça, c'est le choix du costard. L'embarras du choix même. Entre Calvin Klein et Pierre Cardin, on ne peut pas dire qu'il soit à plaindre.

Il opta pour une chemise noire, une veste noire, des chaussures noires... Bref, le total look black. Chacun son truc. La journée à venir ne serait pas trop chaude, autant en profiter donc. Pas de cravate, ça donnait l'air trop stricte. Eric voulait avoir l'air cool, relax. Abordable, même si ça n'était pas forcément le cas.

Et finalement, il devait être environ 8 heures quand il avait finit par quitter son appartement. Evidemment, il avait rangé toute sa cuisine, ça lui avait pris du temps. Il avait bien des employés, des techniciens de surface comme on dit poliment pour ne plus dire hommes et femmes de ménage. Mais il avait ce qu'on appelait des TOC. Pas au point de lui gâcher la vie, heureusement, mais quelques tics développés en même temps que son incapacité à avoir droit à une grasse mat'.

Lunettes de soleil en place, chauffeur qui lui amène sa berline juste devant la porte. Berline grise, pour casser le noir. Et hop, direction le centre des affaires de la ville de Seikusu. Journée chargée? Pas vraiment. Juste quelques rendez-vous.

Une fois de plus, Marine avait passé une nuit de blanche. Ces cauchemars l’avaient tenue éveillée. D’habitude, elle arrivait à dormir au moins deux ou trois heures mais pas cette nuit. Ce n’était d’ailleurs pas la première fois, loin de là, depuis quelques semaines maintenant, elle faisait une à deux nuits blanches par semaine. Une vraie catastrophe. Elle arrivait toujours à tenir le coup grâce au café et à l’entraînement qu’elle avait reçu mais cela finissait quand même par la fatiguer.

Arrivée à quatre heures et demi du matin, elle décida de se lever. Cela ne servirait à rien de rester couchée entre ses draps. Elle ne dormirait pas davantage et risquait surtout de s’énerver. Mieux valait se lever. Elle alla se doucher rapidement en faisant le moins de bruit possible pour ne pas réveiller son colocataire qui lui devait dormir du sommeil du juste. Elle s’habilla rapidement. Elle comptait sortir et aller se balader. L’air frais lui ferait du bien.

Vêtue de sa jupe longue en satin, de son chemisier à jabot blanc enserré de son corset noir brodé, chaussée de ses bottines en cuir noir, elle attrapa sa cape de velours sombre et, ainsi vêtue, quitta l’appartement à pas feutrés. Elle ne prit pas sa serviette de cuir noir qui l’accompagnait d’habitude en cours car ce jour-là, elle n’avait aucun cours à dispenser au lycée.

La jeune femme descendit rapidement les marches et se mit à déambuler dans la ville encore endormie et plongée dans le noir. Elle n’avait aucune destination précise, elle errait dans les rues désertes, profitant du silence de la nuit. Elle regarda le jour poindre au dessus des tours du quartier des affaires. Elle préférait regarder le jour se lever sur la mer mais, une fois n’est pas coutume, le levée de soleil serait vu sur une mer de béton et de verre.

Marine continua sa promenade, observant toujours la montée de l’astre solaire qui réveillait peu à peu la ville. Bientôt, les gens commencèrent à affluer dans les rues. L’activité de la cité renaissait au soleil levant. Marine soupira. Elle avait toujours du mal avec la foule même si elle commençait à s’y faire. Elle préférait encore et toujours la solitude et le silence.

Il était presque huit heures. La jeune femme se dit que sa chère bibliothèque allait bientôt s’ouvrir et qu’elle y trouverait le calme auquel elle aspirait tant.

Son ventre se mit alors à gargouiller lui rappelant qu’elle n’avait encore rien mangé. Se trouvant dans le quartier des affaires, elle n’aurait aucun mal à trouver de quoi se restaurer. Elle avança donc dans la foule de plus en plus compacte des gens qui se rendaient à leurs bureaux. Elle dénotait grandement dans le paysage. Sa tenue était en complète opposition avec les vêtements de toutes les personnes présentes qui, pour beaucoup, ne se gênaient pas pour la dévisager. Il faut dire qu’avec sa tenue, on aurait pu la croire d’un autre siècle, du XIXe siècle. Néanmoins, la jeune femme s’en fichait bien et continuait sa marche, cherchant des yeux un café ou quelque chose comme ça où elle pourrait prendre un petit déjeuner.

Quelques embouteillages, normal en ce matin de semaine. Les japonais partaient travailler, il y avait de l'agitation, du bruit... Des cris, des vélos, des sonnettes. Eric quant à lui savourait l'insonorisation de sa berline. Une magnifique voiture, qui lui avait coûté plutôt cher, comme toutes les bonnes voitures, mais dans laquelle il pouvait écouter la musique de son choix, en l'occurrence Deep Purple, sans être pollué par l'environnement sonore extérieur.
Quelques chansons plus tard, oui il avait utilisé sa voiture alors qu'il aurait pu aller de chez lui à son travail à pieds ou en vélo mais rappelons-le, il n'aurait pas pu alors profiter de l'environnement confiné, privé et insonorisé que lui offrait le luxe de sa voiture. Donc il prenait sa voiture. Quelques chansons plus tard donc, le voilà qui arrive au plus grand building de tout Seikusu. Un gratte-ciel colossal où sont les sièges sociaux des plus grosses firmes du coin, et les pied-à-terre des firmes internationales, comme celles d'Eric. Après avoir donné ses clefs au voiturier, Eric étira son bras, ce qui releva légèrement sa manche et lui permit de consulter sa montre. Son premier rendez-vous n'était qu'à neuf heures et demi, il était un peu plus de huit heures, il avait donc le temps d'aller jusqu'au Starbucks du coin pour se prendre un café. Et un muffin. Moca Vanille, évidemment.

Le truc, c'est que même si le Starbucks était à côté, il y avait du monde. Encore heureux qu'Eric était dans un bon jour, parce que sinon, se retrouver au milieu d'une foule lui aurait d'emblée donné des envies de meurtre. Devoir dire pardon, excusez moi, à tout bout de champ dès qu'on frôle quelqu'un ou marcher sur les pieds d'inconnus... De quoi tomber dingue. Manque de bol, ou coup de chance tout dépend du point de vue, pour Marine, le sort voulu que le trentenaire parvienne à se glisser rapidement jusqu'à elle, mais que dans l'objectif de la dépasser, ses pieds s'empêtrent dans la cape de Marine.
Dans ces cas là, soit on a de la chance, soit on en a pas. Et l'occurrence, Eric en a eu. Il est parvenu à ne pas tomber, donc à ne pas entraîner Marine dans sa chute, en jouant de ses orteils et de son équilibre, mais mieux encore, il eut le réflexe de retenir la jeune femme par le bras, et donc de l'empêcher de tomber également. Quoique la cape avait dû peut-être tirer sur son cou. C'était un moindre mal.

Evidemment, Eric avait commencé par être surpris. Et puis, en voyant les raisons pour lesquelles il avait manqué de saloper son costard, son visage s'était durci, ses sourcils s'étaient froncés. Encore une excentrique, fan de jeux de rôles et autres grandeurs natures. On se demandait ce qu'elle pouvait bien foutre dans le quartier des affaires à cette heure là, et pourquoi, comme par hasard, sa maudite cape s'était-elle prise dans ses foutus pieds. Il ne voulait pas hausser le ton, mais il fallait qu'il exprime son agacement.

"Hé, Irène Adler... Ça a pas été trop dur de passer les années 90 en velours?..."

Il passa une main dans ses cheveux diaphanes, un sourire mesquin étirant ses lèvres. Elle avait failli bousiller sa journée à cause de son accoutrement ridicule. Heureusement qu'elle était jolie, parce que sinon Eric aurait été capable de bien pire.

Marine finit par repérer un café mais elle faillit renoncer en constatant la foule qui s’y engouffrait. Alors qu’elle allait passer son chemin, son estomac émit une nouvelle protestation comme s’il refusait qu’elle quitte l’endroit sans avoir prit quelque chose à manger. La belle se décida donc à pénétrer dans l’endroit et prit son mal en patience en faisant la queue comme tout le monde.

Elle avançait à pas comptés, ne progressant que de quelques centimètres à chaque fois que quelqu’un passait commande. Alors qu’elle progressait, elle fut brutalement tirée en arrière et faillit tomber mais un bras secourable la retint. Quand elle se remit sur ses pieds, elle passa sa main sur sa gorge. L’attache de sa cape s’était portée à son cou et lui avait un peu fait mal mais au moins elle n’était pas au sol.

En relevant la tête, elle comprit qu’un individu avait du se prendre les pieds dans son vêtement. L’individu était un homme de belle allure, très grand mais avec un air suffisant qu’elle détesta tout de suite. D’ailleurs, il ne mit guère de temps avant de l’apostropher.

« Hé, Irène Adler... Ça a pas été trop dur de passer les années 90 en velours ?... »

Marine haussa les sourcils. Pour qui la prenait-il donc ?

« Et vous ! Si vous regardiez où vous marchiez et que vous n’étiez pas aussi pressé de passer devant tout le monde, ça ne vous serait pas arrivé ! Quand à Irène Adler je prends ça pour un très grand compliment. Il y a peu de femmes qui ont réussi à impressionner le grand Sherlock Holmes ! »

Elle lui lançait un regard assassin. Ce genre de comportement l’insupportait énormément. Elle ne dit rien concernant le commentaire sur sa tenue. Elle aimait ce style et ça n’avait rien à voir avec un mouvement gothique quelconque. La jeune femme aurait pu faire une remarque désobligeante sur les cheveux blancs de l’homme mais elle se retint. Inutile d’en rajouter.

Dans l’absolue, elle aurait pu quitter le café mais ça aurait été accordé la victoire à l’homme au combien désagréable qui avait piétiné son manteau. Elle se retourna et resta sagement dans la file attendant son tour pour atteindre le comptoir.

Et bien et bien et bien... Cette petite demoiselle n'était pas à prendre avec des pincettes. Mais elle avait le mérite d'avoir du tempérament. Quoiqu'il ne fallait pas pousser la chose trop loin, sinon ça en deviendrait plus chiant qu'attirant. Il fallait savoir se trouver au juste milieu. Qu'en était-il de la rouquine, Eric l'ignorait encore. Il ignorait même s'il aurait l'occasion de le découvrir ou non. Quoiqu'il en soit, il n'allait certainement pas passer à côté d'une occasion de s'amuser. Aussi prit-il à peine la peine de cacher le large sourire amusé qu'avait fait naître chez lui la réaction de Marine, le rendant peut-être plus antipathique encore aux yeux de cette dernière, mais c'était un maigre prix à payer comparé au divertissement qu'il lui offrait. D'une certaine façon, plutôt péjorative d'ailleurs, on serait tenté de transposer le comportement d'Eric à celui d'un roi et celui de Marine à celui du bouffon... Non, c'est un petit peu trop violent comme image, surtout que le joli visage de Marine la préservait de ce genre de parallèle peu flatteur. Assurément, si la jeune femme avait dû être imaginée en des temps moyenâgeux, elle aurait été une princesse et pas un vulgaire ménestrel à grelots. Quoiqu'avec ce tempérament, il y avait fort à parier qu'elle se serait fait rosser par Messire le seigneur du château. A moins qu'il n'ait été réduit à sa merci, plus difficile à imaginer dans des sociétés qui étaient misogynes au possible. Mais revenons-en à nos moutons, en l'occurrence à notre rouquine. Qui pensait l'avoir mouché. A tort.

"Et je me serai privé du délicieux éclat de votre voix tempêtant à mon encontre? A non, ça je ne peux le concevoir. Quant à mon commentaire, vous pouviez le prendre comme un compliment, vous êtes suffisamment jolie pour cela. Je croyais néanmoins qu'Irène n'était pas l'une des seules femmes mais bien la seule et unique femme à avoir pu troubler l'opioman qu'était le grand Holmes. Néanmoins, vous esquivez volontairement la pique. Elle visait vos vêtements qui sont complètement inappropriés ici et non le reste de votre personne."

Venant d'un anglais, parler de Sherlock ça revenait au même que de parler de Molière à un Français. Ou quelque chose du genre, ça n'était pas tout à fait les mêmes genre littéraires évidemment, mais on pardonnera ce petit écart. Enfin j'espère. Il regarda de nouveau sa montre. Une montre au bracelet de métal, aux maillons larges et chromés, striés de noir. Une de ces montres qui valent une fortune, au cadran noir et aux aiguilles blanches. Il avait encore le temps. Un peu de temps. Beaucoup. Autant qu'il le voulait en fait, il était patron. Ca n'était pas pour rien qu'il en avait chié jusqu'à maintenant.

"Alors, mademoiselle Adler va-t-elle prendre du thé? Ou bien une boisson plus forte?"

Puisqu'ils étaient coincés dans cette fille, lui derrière elle, autant en profiter pour s'amuser un peu non? Quoiqu'Eric était peut-être bien le seul à s'amuser, allez savoir...

Marine ne releva pas la nouvelle allusion à Irène Adler et surtout à ses vêtements. Qu’il pense d’elle ce qu’il voulait, elle s’en moquait bien. Les gens étaient bien libres de s’habiller comme ils voulaient et elle comme les autres. Elle avait passé sa vie à entendre des ordres, elle n’allait pas changer de tenue juste pour une remarque stupide d’un homme bien trop imbu de lui-même.

« Alors, mademoiselle Adler va-t-elle prendre du thé ? Ou bien une boisson plus forte ? »

Marine secoua la tête et leva les yeux au ciel, enfin au plafond plutôt, en entendant la question du malotru.

« Mademoiselle Adler ne voit pas bien pourquoi elle devrait vous répondre et mademoiselle Adler aimerait bien que vous la laissiez tranquille, merci d’avance ! »

Elle détestait vraiment ça. Cette façon d’aborder les gens et de discuter pour ne rien dire mais quelle horreur ! La jeune femme avait ça en horreur. Occultant l’homme impoli derrière elle, elle poursuivit sa progression dans la file. Au bout de quelques minutes, elle parvint au comptoir où la serveuse lui demanda sa commande.

« Un café noir et un muffin au chocolat, merci ! »

Marine fouilla dans sa poche et extirpa la somme demandée avant de se saisir de son gobelet et de son gâteau et de chercher à rejoindre la sortie. Elle voulait quitter au plus vite cet endroit trop plein de monde. Elle revit alors le visage honnis et lui jeta un léger sourire.

« Adieu Von Ormstein ! »

Elle se dirigea alors vers la porte vitrée et respira à nouveau une fois dehors.

Ahlalalalalala les femmes... Toujours à dire quelque chose, à le prétendre, et à vouloir le contraire. Eric était certain que Marine n'avait pas la moindre envie qu'elle le laisse tranquille, autrement elle l'aurait ignoré, comme certains ignorent les clochards qui pavent les rues. Là, non seulement elle lui répondait mais en plus, elle l'obligeait à éprouver quelque chose pour lui. Même si c'était de la colère, de l'antipathie, de la haine, allez savoir, il était loin de la laisser indifférente. Et le plus important, c'était que Marine le savait aussi. Mais Eric n'était pas du genre à insister lourdement. Aussi préféra-t-il continuer à rire dans sa barbe des réactions de la jeune femme plutôt que lui dire ouvertement les évidences. Peut-être qu'elle serait déçue d'ailleurs de voir qu'il n'insistait pas plus. Mais à la limite, ça n'était pas important. Le trentenaire avait l'habitude de décevoir. Une fois de plus, une fois de moins... Ca n'était qu'une femme après tout. Il y en avait des milliers, pas vrai? Celle-ci aura eu le mérite de le distraire pendant qu'il attendait son tour pour commander son petit déjeuner. Marrant qu'elle prenne un muffin aussi d'ailleurs. Au chocolat. Eric se permit un nouveau petit rire dans le dos de la rouquine en entendant sa commande. Ce fut à son tour de regarder vers le plafond. Il se serait bien montré désobligeant une fois encore, mais elle l'avait prié de la laisser tranquille. Alors. Ce fut ensuite à son tour à lui de commander.

"Un frappé vanille s'il vous plaît.... Et un muffin à la myrtille tiens. Merci."

Il était bien élevé quand même. Il était anglais. Il laissa quelques yens pour payer sa consommation et allait pour s'installer en terrasse, mettant ses lunettes de soleil sur son nez avec l'assurance de celui qui ne doute pas de ses capacités de séduction, quand les verres de ses lunettes croisèrent le bleu des yeux de la rouquine. Et un sourire. Tiens donc, elle lui souriait maintenant? Il avait donc raison, elle était loin de lui rester indifférente, quoiqu'elle en dise. La bouche d'Eric s'étira en un sourire au surnom dont elle l'affubla.

"Abschied"

Il la gratifia d'un clin d'oeil et finit par s'installer tranquillement à une table libre en terrasse pour profiter du soleil et de l'air frais. Son café et son muffins posés sur la petite table, quelques yens glissés au marchand de journaux et voilà son petit déjeuner qui peut commencer. Bruit de froissement, Eric qui disparaît derrière, cherche son gobelet à tâtons, le trouve, en boit une gorgée. Ses yeux parcourent le papier. Quoi de neuf à Seikusu?

La jeune femme ne fit pas cas du clin d’œil, ni du mot qu’il lui lança. Elle quitta la terrasse, elle ne tenait pas vraiment à déjeuner en sachant cet homme agaçant dans les parages. Et puis, il y avait trop de monde. Elle s’éloigna donc et alla jusqu’à une grande esplanade qui était un peu la place centrale du quartier des affaires. La place était bordée de nombreux arbres et de banc.

Marine alla se poser sur l’un d’entre eux. Juste avant de s’asseoir, elle se débarrassa de sa cape, qu’elle plia et posa près d’elle. Une fois assise, elle enleva l’opercule du gobelet de carton qui recouvrait son café. Elle souffla un peu dessus pour le refroidir et en avala une gorgée. Elle grimaça. Le café était vraiment très chaud. Elle choisit de le laisser refroidir et s’attaqua à son muffin.

Depuis son arrivée dans cette ville, elle avait découvert le chocolat. Et elle adorait ça. Cela semblait certainement puérile mais elle n’en avait pas mangé pendant près de dix-huit ans, elle avait donc beaucoup à rattraper. Elle mordit avec plaisir dans le gâteau largement enrichi de cacao sucré.

Son regard se porta sur les gens qui traversaient dans tous les sens le parvis de la place. Leur nombre commençait à décroitre au fur et à mesure que l’heure avançait. Les personnes gagnaient progressivement leurs bureaux.
Involontairement, l’esprit de Marine se reporta sur l’homme agaçant du café. Elle devait lui reconnaître une bonne culture et c’était quelque chose qui trouvait toujours grâce à ses yeux. Il était exact qu’Irène Adler avait été la seule femme ayant réussi à trouver grâce aux yeux du célèbre Sherlock Holmes. C’était un grand compliment même s’il ne lui avait dit ça qu’à cause de ses vêtements. Elle secoua la tête comme pour chasser l’image de cet homme étrange aux cheveux de neige.

Cachés derrière ses verres teintés, les yeux d'Eric parcouraient le journal avec flemme. Une main relâcha son emprise sur le morceau de papier et se tendit pour attraper son muffin cette fois. Enfin, pour en arracher une partie. Myrtille cannelle. Vraiment, Starbucks savait créer des goûts très agréables pour le palais. Avec un café à la vanille en plus, niquel. Dans le journal, les nouvelles n'étaient pas sensas. On parlait d'untel qui avait tué un autre, d'une fuite de gaz qui aurait pu faire ci ou ça... La rubrique des chiens écrasés quoi, tant qu'ils trouvaient la place de parler de ça, c'est soit qu'il n'y avait rien de plus important à traiter, soit qu'ils étaient censurés. Dans un cas comme dans l'autre, Eric finirait bien par le savoir. Inutile donc de se mettre en rogne dès le matin.

Il reposa la feuille de chou et fit légèrement glisser ses lunettes vers le bout de son nez, afin d'observer les demoiselles passantes à la dérobée. Sa tête s'inclinait en suivant, dans leur dos, le mouvement régulier de leurs déhanchés. Il y avait les prudes et les garces. Celles qui se cachaient derrières leurs fringues, et celles qui en mettaient pour ne plus laisser de place à l'imagination. Généralement, c'était ces dernières qui s'insurgeaient le plus qu'on les mate. C'était ridicule vu qu'elles faisaient tout pour ça. Ca faisait bien rire Eric ça aussi. Il secoua négativement la tête une fois s’être rincé l’œil et fit remonter ses lunettes correctement sur ses yeux. Il termina ensuite son café et quitta la terrasse qui commençait lentement à se vider. Alors qu’il prenait la direction de l’immeuble dans lequel il travaillait, son téléphone vibra dans la poche de sa veste. D’un geste rendu habile par l’habitude, Eric dégaina le combiné.

"Allô ? Oui. Oui. Non. Non je te dis. J’ai dit de ne pas faire baisser les prix de plus de 15% ! J’en ai strictement rien à foutre, tu te démerdes. Soit tu t’arranges pour arranger ça, soit vendredi t’es viré. T’as intérêt à te magner le tronc."

Et il raccrocha. Vraiment les techniciens commerciaux étaient des incapables… Et ce week end, pendant qu’il sauterait, il aurait autre chose à faire que de se préoccuper pour un marché qu’ils étaient censés remporter sans avoir même besoin de baisser les prix.
Alors qu’il traversait la cours, une sorte de patio central piégé entre d’innombrables grattes-ciel, Eric aperçu au loin une crinière rousse. Irène Adler. Marrant. Il pouffa en secouant la tête, se disant que le hasard était bizarre des fois, et s’engouffra dans l’immeuble de bureau chronophage.

Une fois son café terminé et son muffin dévoré, Marine se releva et jeta ses détritus à la poubelle. Elle entama alors le chemin qui la mènerait à la bibliothèque mais s’arrêta devant un kiosque à journaux. Lire les nouvelles ne la passionnait pas plus que ça mais quelque chose d’autre avait attiré son regard.

Le kiosque proposait bien sûr tous les types de journaux et de magasines possibles mais il présentait également des livres de poche. L’un d’entre eux avait attiré la curiosité de la jeune femme. Assez naturellement, en amoureuse des livres qu’elle était, elle ne put résister à la tentation du livre. Elle le paya et alla s’installer à la terrasse du Starbucks qu’elle avait quitté une demi-heure plus tôt. Elle s’octroya un nouveau café et se mit à lire l’œuvre qu’elle venait d’acheter « les aventures de Sherlock Holmes » dont la première nouvelle s’intitulait Un scandale en Bohème.

Marine perdit alors la notion du temps, passionnée qu’elle était par l’ouvrage dans ses mains.

Quand Eric passa la porte des bureaux, la journée s’était déjà emballée et tout le monde bossait. Au moins jusqu’à l’heure de la pause café. A ce moment là, sa secrétaire lui avait apporté un café bien corsé. Eric n’aimait pas le café trop fort, il était obligé de le noyer dans le sucre pour le faire passer, mais c’était encore ce qui le boostait le plus pour se mettre à bosser. Ses rendez-vous s’enchaînèrent, tous passèrent comme des lettres à la poste. Il avait convenu avec certains constructeurs d’appareils aéronautiques la pose d’appareils de sa société sur certains modèles à venir, ainsi que négocié sa participation à un banc d’essais. Il allait voler sur un tout nouveau genre d’hélico, ça allait être le pied intégral. C’était top d’être polyvalent, quelque chose de mignon.
Il avait le sourire quand le combiné fut reposé sur son socle. Eric fit pivoter la chaise en cuir sur laquelle il était assis et glissa ses mains derrière sa tête. Dans la vitre de la grande baie-vitrée, son reflet lui renvoyait un sourire de conquérant. Et en dessous, Seikusu vivait.
Et puis les gargouillis de son ventre cassèrent un peu l’ambiance de « Je réussis tout ce que je fais ». Un coup d’œil à sa montre… L’heure de déjeuner. Pas de repas d’affaire ce jour là, mais il avait envie de se faire plaisir. Aussi se leva-t-il et quitta-t-il l’immeuble. A pieds, les meilleurs restau étaient dans les environs de toutes façons. Son chemin le contraignit à repasser devant le Starbucks.
L’un de ses sourcils se haussa en voyant qu’Irène Adler était encore là. Son sourire se fit plus large encore, lorsque les pupilles vertes se posèrent sur la couverture du livre, dont elle était presque arrivée à la fin. L’envie de la taquiner fut trop forte. Il vint s’intercaler entre elle et le soleil, la privant de la lumière de l’astre diurne, l’ombre de sa stature l’englobant toute.

"Je vous ai tellement tapé dans l’œil que vous vous êtes sentie obligée de lire un livre que me rappellerai à votre bon souvenir. Vous n’étiez pas obligée d’en arriver là vous savez, vous n’aviez qu’à m’inviter à boire un café !"

Ses paroles étaient humoristiques évidemment, Eric était prétentieux mais pas à ce point là. C’était un genre qu’il aimait se donner évidemment. Sûr de lui, il ne demanda même pas l’autorisation à Marine et s’assit en face d’elle, se laissant aller contre le dossier de sa chaise, sortant ses Ray Ban pour les poser sur son nez avec la flemme de l’homme qui suinte l’élégance, et la prestance par tous les pores de sa peau.

"Alors ? Vous avez passé la matinée à lire ? Vous n’avez pas de travail ?"

Taquin, il s’empara du livre de la rousse, glissa discrètement son doigt à la page à laquelle elle avait arrêté sa lecture, et se mit à le feuilleter avec les autres. Il choisit de faire le pitre, et le tourna dans tous les sens.

"Comment pouvez-vous lire ça ? Il n’y a même pas d’images !"

Venant de la part d’un ingénieur et pilote, la plaisanterie avait de quoi être appréciée. Mais encore fallait-il savoir ce qu’il était, ce qui n’était pas le cas de Marine.

Il ne lui restait plus que quelques pages avant d’arriver à la fin de son livre quand le ciel s’obscurcit brusquement. En levant les yeux, Marine constata que son nuage n’était autre que l’homme horripilant de ce matin. Sa haute stature lui cachait complètement le soleil.

Il se mit à commenter son livre et sa présence avant de s’asseoir juste en face d’elle. L’homme continua ses commentaires et finit par s’emparer du livre, se mettant à le feuilleter et à décréter qu’il n’y avait pas d’images comme s’il n’était qu’un enfant.

Marine soupira et haussa les sourcils devant son comportement désagréable et sans gêne.

« Pour répondre à vos questions. Oui, j’ai passé ma matinée à lire. Oui, j’ai un travail mais je ne travail pas aujourd’hui. Ce n’est pas vous, ne vous en déplaise, qui m’a attiré dans cet ouvrage mais sir Arthur Conan Doyle et je suis certaine que vous êtes quelqu’un de très cultivé. Ne jouez donc pas les gamins ! Voilà ça vus suffit ? »

Elle s’empara à nouveau de son livre et attrapa son gobelet dans le but d’avaler son café et de quitter la terrasse mais à la première gorgée, elle se rendit compte que ce dernier était totalement froid. Totalement prise dans sa lecture, elle en avait oublié de boire son breuvage maintenant froid et au goût détestable. Elle grimaça.

« Quand à vous inviter à boire une café, vous êtes bien assez grand pour vous l’offrir vous-mêmes ! Sur ce vous m’excuserez, mais je dois y aller ! »

La jeune femme se leva et attrapa sa cape qu’elle déposa sur son bras. Il faisait bien assez chaud. Elle n’avait pas besoin de s’en couvrir. Avant de s’en aller, elle ne put s’empêcher de déposer le livre devant le trentenaire.

« Un petit souvenir d’une fille d’un autre temps ! La prochaine fois j’essaierai de vous en trouver un avec des images ! »

Elle sourit avant de quitter la terrasse. C’était étrange. Cet homme l’insupportait car il était trop imbu de lui-même mais il l’amusait aussi. C’était un mélange inhabituel et intriguant.

Plus Marine parlait, et plus le sourire d'Eric s'élargissait. C'était amusant de voir comment il parvenait à susciter l'antipathie des gens, sans même avoir à se montrer vulgaire ou insultant. Il était juste désobligeant dans une certaine mesure. Il faut dire qu'il avait le don de mettre le doigt sur des choses qui fâchent relativement. En même temps, quand on avait comprit la technique, rien n'était plus facile. En général, les gens mettaient  en avant toujours quelque chose chez eux. Soit c'était physique, soit c'était accessoire. Mais il y avait toujours un petit détail qu'ils aimaient mettre en avant. Dans le cas de Marine, Eric aurait hésité, en temps normal, entre les cheveux et les yeux. Mais il avait suffit qu'il voit ses habits pour être certain que c'était ça, la petite subtilité à saisir du personnage. Et le ticket gagnant pour attirer son attention. Et maintenant, les voilà qui discutaient presque. presque, puisque Marine s'en allait. Mais le jeune homme ne l'entendait pas de cette oreille. Qu'on se le dise, il ne courait jamais après les filles. Il avait autre chose à faire. Et c'était un véritable enfoiré dès lors qu'il les avait eues. Mais avant, il était relativement bien élevé. Aussi rattrapa-t-il Marine et lui rendit-il son livre.

"Vous êtes bien aimable, mais j’ai bien peur que les mystères de Sir Arthur Conan Doyle n’aient plus aucun secret pour moi."

Il avait déjà lu tous les Sherlock Holmes, ainsi que Le Monde Perdu, et toutes les autres œuvres connues du grand écrivain. Rieur et toujours aussi taquin, il se pencha à son oreille et lui chuchota avec un air de conspirateur

"Si vous vouliez me faire plaisir avec un livre d’images, je vous conseille La Terre vue du Ciel, de Yann Arthus Bertrand."

Il se recula ensuite et enfouit ses mains dans ses poches.

"Vous avez raison cependant, je peux m’offrir un café tout seul. Mais c’est moins drôle qu’accompagné et vous allez sans doute dire que je suis un mufle mais je pars du principe que si vous les femmes avez milité pour avoir l’égalité des sexes, vous devez l’avoir aussi bien pour les bonnes que pour les mauvaises choses. Donc je ne vous offrirai pas plus un café que je ne l’offrirai à un collègue. Quant à la galanterie, si vous le permettez, vous avez craché dessus en voulant porter des pantalons mesdames. Quoiqu’à voir votre tenue, on serait tenté de faire un bond de deux bons siècles en arrière. Sauf que… C’est pas le cas."

Il haussa les épaules avec nonchalance et arrêta là son petit monologue. Qu’on remette les choses dans leur contexte. On ne peut pas dire qu’il draguait ouvertement, il trouvait juste ça plus intéressant de débattre avec quelqu’un qui s’emportait relativement facilement. C’était plus haut en couleur. Plus animé. Surtout comparé à une tasse à café inanimée. Et puis, Eric n’en avait pas l’air comme ça mais il était moins ingrat et rustre que ce qu’il laissait paraître. Si Marine lui offrait un café, il lui offrirait le resto en compensation. Mais c’est donnant donnant, et toujours les autres en premier. Jamais lui.

"Donc sur ce madame, puisque vous semblez si pressée de me quitter malgré que vous ne m’ayez pas donné mon image pour avoir été sage, je vais vous laisser. Bonne journée et au plaisir!"

Eric ne se prenait pas la tête. Jamais. La vie était trop courte. Donc si Marine l’invitait, cool. Sinon, tant pis. Une autre le ferait. C’était moins par fierté que par flemme envie. Pas envie de s’impliquer ni rien.

Marine fut surprise de le voir revenir à la charge et lui rendre son livre décrétant qu’il l’avait déjà lu. Cela ne surprit pas beaucoup la jeune femme, elle se doutait bien qu’il devait connaître l’ouvrage en long et en large ou presque.
 
Quand à son discours sur l’égalité homme-femme, il n’avait pas tord. Certaines femmes voulaient l’égalité sexuelle mais n’exigeaient que les bons côtés. Ce que l’on appelait les pratiques de gentleman n’étaient que le côté positif d’une certaine infériorité féminine. Quoiqu’il en soit, Marine était partiellement d’accord avec lui.

A mots semi-couverts, il lui demandait de lui payer un café pour discuter. Le plus étonnant était que la jeune femme était très prête de le lui offrir. Le personnage l’intriguait.

« A cette heure-ci, je pense que le café est obsolète. Par contre le déjeuner est plus d’actualité. A défaut d’une image ou d’un café, je peux vous proposer de déjeuner avec moi, si cela vous tente, bien sûr »

Elle gratifia l’homme d’un charmant sourie. Elle ne s’offusquerait pas s’il refusait. Elle avait juste envie de discuter avec quelqu’un.

Eric n’en demandait en fait, pas plus. Il mourrait de faim, et n’allait certainement pas laisser Marine se ruiner pour lui payer tout ce qu’il comptait commander pour satisfaire son appétit gargantuesque. Aussi lui rendit-il son sourire et sortit l’une de ses mains de ses poches pour l’inviter à prendre la direction d’un restaurant italien tout près. Une espèce de gargote, petite d’apparence, mais chaleureuse et dont les plats étaient succulents.

"Je vous en prie, après vous."

Il lui emboîta le pas tout en remettant sa main dans sa poche. Il n’y avait pas tellement de monde que ça dans les rues, d’une part parce que c’était l’heure de déjeuner, mais aussi parce que dans le quartier des affaires, soit on mangeait au bureau sur le pouce, soit on déjeunait de midi à quatorze heures avec des gros bonnets de l’industrie. La demi mesure n’existait que peu malheureusement dans ce milieu.

Le restaurant n’était pas loin, il lui indiqua l’entrée et la laissa pousser la petite porte qui tinta à son passage, avant de se refermer derrière Eric. Le patron, qui connaissait bien le trentenaire, se mit à lui parler en italien. Eric lui répondait dans la même langue, quoiqu’avec un accent anglais qui ressortait assez. Ils échangèrent des banalités, quelques nouvelles de la famille de l’italien et des affaires du jeune homme, avant qu’il ne lui demande une table pour deux. Il y avait quelques clients, mais pas foule.

"Vous pouvez vous installer où vous le voulez. Je reviens."

Il adressa un sourire à la rouquine et disparu aux petit coin des hommes. Qu’y fit-il ? Il se lava les mains. Avant de manger, c’était mieux il paraît. Un toc encore, développé à l’armée ? Non, celui-là il le tenait de sa mère. Bref, quelques minutes plus tard, il rejoignit Marine et s’assit en face d’elle, prenant son propre menu.

"J’espère que vous aimez la cuisine italienne Miss Adler. D’ailleurs, il serait peut-être mieux que je commence à vous appeler par votre nom ou votre prénom véritable, non? En ce qui me concerne, je m’appelle Eric Carter. Evidemment, vous pouvez m’appeler comme bon vous semble. Quoique le Von Ormstein de tout à l’heure a un peu entamé mon orgueil. Ai-je une lèvre inférieure protubérante ?"

Encore dans l’attitude du clown, il tira une moue destinée à arracher un rire, si ce n’était un « oui » à Marine. Néanmoins, il semblait appliqué et minutieux dans chacun de ses gestes. Si Marine était attentive, elle pouvait voir qu’aucun geste n’était inutile et que chacun était très précis. Dans le but de dépenser un minimum d’efforts pour une efficacité optimale. Un vieux réflexe.