Bac à sable > One Shot

The punk and the nerd [PV Nao]

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Ryo:
Nao était fasciné par ce ventre dessiné qui prouvait bien la condition physique d'Automne. Elle venait de s'étirer après avoir raconté longuement son histoire, une vie atypique qu'il n'aurait jamais pu deviner. Elle était courageuse d'avoir tout quitté et ce qu'elle venait de raconter attirait d'autant plus la sympathie. Le sujet de leur vie était sérieux mais ils avaient passé un bon moment à discuter. Ensuite il tiqua. Elle venait de prononcer deux fois le mot "sport" en deux phrases. Nao et l'activité physique, c'était bien deux choses différentes et pas vraiment conciliables. Il ne faudrait pas non plus qu'elle vienne le contaminer avec l'idée saugrenue d'aller courir ensemble par exemple. Il répondit néanmoins à son grand dam car une salle de sport, il y en avait une juste de l'autre côté de l'immeuble et il devinait déjà qu'il aurait à y descendre pour aider Automne avec les papiers d'inscription. Il se morigéna quand même. Hey gros bêta! t'as la chance de pouvoir te sociabiliser un peu et en plus, avec un joli brin de fille ... et toi tu ne penses qu'à ton gros cul? Et oui, il fallait prendre les choses à bras le corps parfois.

"Ah  oui je veux bien! Ce serait cool ça! Je pourrais doubler ma production et toi, te faire un peu d'argent aussi."

Monter un ordi avec elle, ça devait être aussi emballant qu'un rendez vous galant dans un endroit romantique. Ils manipuleraient des cartes mères et souderaient des composants ensemble, le pied! Et avec peut être un peu de chance, par mégarde, ils pourraient s'effleurer les doigts ...

"Oh oui c'est vrai pardon, tu dois être fatiguée non? On va virer tout ça et tu pourras t'installer."

En fait, il leur fallut une bonne heure de tri et de rangement pour finalement libérer l'espace qui redevenait une chambre. Les rares placards de la cellule qui n'étaient pas comblés le furent et le point d'orgue fut quand il demanda à Automne de bien vouloir ranger un tas de boites de cartes graphiques sous son lit à lui. Elle y était déjà quand il s'aperçut avec horreur qu'il devait y avoir laissé deux magazines un peu osés et qu'il avait oublié depuis la veille au soir. L'un des deux était plutôt du genre revue de charme spécialisée dans les "suicide girls" (hasard) et le deuxième plus cochon, traitait principalement de sodomie (chacun ses trucs hein) ... Nao était figé dans la chambre d'Automne, attendant un retour orageux de la jeune femme mais il n'en fut rien. Ou elle n'avait pas fait gaffe ou elle s'en foutait et tant mieux pour lui. Du coup, malgré la honte, il décida de faire comme si de rien n'était et la polonaise eut enfin son petit espace à elle.

"Et bien voilà, bienvenue chez toi!! Tu peux te reposer, moi je suis crevé, je vais faire une sieste. Si tu veux, pour fêter ton arrivée, on peut sortir boire un coca ce soir?"

Euh ... non mais ça va pas ou quoi? Tu invites cette nénette à sortir? Toi? Le geek incurable qui n'est jamais allé dans un bar où il y a du monde? Elle vient à peine d'arriver et tu lui sautes déjà dessus, laisse la vivre.

Nao ne le savait pas mais de grands changements allaient bientôt venir perturber la monotonie numérique de son existence.

Le garçon débarrassa ce qui trainait encore, fit un peu de vaisselle qu'il essuya et rangea. Peut être qu'Automne allait passer en petite culotte pour aller à la salle de bain? mais non, il l'entendit farfouiller dans sa chambre et il s'éclipsa pour aller siester.

Il dormit deux très grosses heures. Il avait enfin pu se dévêtir et se mettre à l'aise et avait pioncer comme une souche, nu comme un ver. Au cas où Automne serait entrée dans sa chambre, elle aurait été frappée par la taille de son sexe. Gros ventre, petit zizi? Hanhanhan ... pas vrai ... Son énormité ne se mesurait pas qu'à sa panse ... Nao émergea au salon, reposé, et passa à la salle de bain pour se rincer dans la douche. Il s'assura en sortant que pas un poil ne trainait derrière lui (de toute manière, il était quasiment imberbe) et galéra pour s'habiller dans le local exigu. Il allait falloir qu'il s'y fasse.
18 heures approchait et s'il voulait être revenu à temps pour son tournoi nocturne de League of Legends, ils allaient devoir sortir assez vite. Pour la première fois depuis une éternité, il choisit ... un pantacourt noir un peu style militaire et de marque connue, et un t-shirt à l'effigie d'un groupe de métal qu'il avait découvert récemment, Meshuggah, un groupe suédois. Il ne le montrait pas mais Nao était un grand fan de métal, yeah!

"Je te propose qu'on tarde pas trop?"

Automne Maleki:
Automne, fatiguée ? Oh non, pas à cette heure en tout cas. Les siestes de l’après-midi ne faisaient pas partie de son planning, et elle se savait chanceuse de ne pouvoir se contenter que d’une poignée d’heure de sommeil chaque jour. Et les nuits blanches, fut une époque, elle pratiquait beaucoup. Elle en enchaînait parfois deux ou trois par semaine, et restait fraîche comme la rosée. Serait-elle encore capable aujourd’hui, à bientôt trente ans, de réitérer ces prouesses ? Encore faudrait-il qu’elle se sociabilise pour ne pas passer ces nuits blanches seule. Il n’y a pas grand-chose de plus déprimant. Non, si elle voulait débarrasser tout de suite sa chambre, c’est parce qu’elle craignait que l’opération prenne plus de temps que prévu. Au final, tout se passa bien, les placards encaissant ras-la-gueule le nombre impressionnant de composants et de cartons qui traînaient dans la pièce, à l’exception de trois d’entre eux. Elle eut comme mission d’aller les ranger sous le lit de Nao, ce qui ne paraissait pas, à première vue, trop compliqué.

La pièce était aussi exiguë que sa jumelle de l’autre côté du mur, et agencée à l’identique. La décoration se résumait au minimum, tout autant que l’ameublement. Le garçon n’avait sans doute pas besoin de plus que pc et consoles pour égayer ses journées. En glissant les boîtes sous le lit, elle eut la surprise de tomber sur deux magazines, qu’elle feuilleta avec curiosité. Mais qui, à l’ère d’internet, du porno gratuit et facile d’accès, achetait encore des bouquins du genre ? Voilà qui n’était pas commun. Si l’un d’entre eux (celui axé sur la porte dérobée) ne l’intéressait guère, le second, lui, trouvait grâce à ses yeux. Ainsi, Nao était attiré par ce genre de filles ? C’était plutôt flatteur. Elle reconnut en un coup d’oeil quelques modèles sur lesquelles elle s’était déjà masturbée, et décida d’emprunter temporairement ce magazine à son propriétaire. Le glissant dans son pantalon, et le masquant avec son t-shirt, elle retourna dans sa chambre, ni vu ni connu, puis le glissa à son tour sous son lit une fois à l’abri des regards.

Elle se servit un deuxième verre de Coca pour se féliciter du dur travail accompli, et gloussa à la proposition de Nao. Elle n’était jamais contre l’idée de sortir boire un verre. Ca lui permettrait aussi de découvrir un peu la ville, et peut-être une adresse sympa, qui sait ?

« Ca me va, mais perso si je prends un Coca dans un bar, c’est juste pour rallonger mon whisky. Je préfère les boissons de grandes personnes. »

C’était rigolo, parce qu’elle n’était vraiment pas grande. Pas peu fière de sa blague (entre nous, elle n’est vraiment pas terrible), elle pouffa avant de finir son verre.

« Je te charrie, bien sûr. Je vais descendre fumer une clope, toute cette activité m’a donné chaud, j’ai besoin de prendre l’air un petit peu. »

Malheureusement, il ne faisait pas plus frais à l’extérieur, au contraire. La chaleur ne battait pas des records, mais l’atmosphère était lourde, orageuse. Des nuages gris, bien chargés, s’amoncelaient à l’horizon, leur profil menaçant surplombant les grues du port industriel. Elle se laissa glisser le long du mur jusqu’à se retrouver assise par terre, et porta sa clope à sa bouche. Nao lui avait pour le moment fait bonne impression. Bon, il n’avait pas l’air du genre extraverti, ni même particulièrement actif, mais c’était peut-être ce genre de colocataire dont elle avait besoin. Quelqu’un qui pourrait canaliser son trop-plein d’énergie, et l’empêcherait de retomber dans ses travers. Elle tira sur cigarette jusqu’au filtre, puis balança le mégot dans le cendrier placé à quelques mètres de là. Trois points. Sa main plongea dans la poche de son pantalon, tâta son couteau papillon. Elle n’en aurait sans doute pas besoin, finalement. Tant mieux. Planter des gens ne faisait pas partie de ses passions.

De retour à l’appartement, elle entendit la mélodie caractéristique d’un diesel au ralenti. A moins qu’il ne s’agisse que des ronflements de Nao, qui était sans doute parti se reposer de tout ce dur labeur. Il fallait le comprendre, débarrasser une pièce c’est une chose, mais le faire en compagnie d’une fille en est une autre. Curieuse, elle fouilla dans les placards, et dans le frigo. Bon point, c’était presque l’abondance. Mauvais point, la malbouffe régnait en maître ici. Elle qui comptait rééquilibrer quelque peu son alimentation, c’était raté. Vu les saloperies qu’elle ingurgitait, heureusement qu’elle passait son temps à faire de l’exercice, sinon elle rivaliserait rapidement avec son colocataire niveau tour de taille.

Elle s’éclipsa dans sa chambre le temps de ranger ses affaires. Elle n’avait pas grand-chose, mais c’était suffisant pour finir de bourrer les placards et les étagères. La statuette religieuse trouva une petite place sur une étagère au dessus du lit, et elle parvint même à se réserver un petit espace sur ce qu’il restait du semblant de bureau. Lorsqu’elle sortit enfin, elle tomba nez à nez sur Nao qui apparemment s’était changé entre temps. Il lui semblait bien avoir entendu le bruit de la douche pendant sa session rangement. Elle leva un sourcil à la vue de son t-shirt. Elle ne l’aurait pas imaginé comme ça, mais ça ne la dérangeait pas.

« Meshuggah ? Bon choix. Attends deux secondes. »

Elle farfouilla dans l’armoire méthodiquement rangée, et en tira un débardeur noir, plié en quatre, apparemment banal. Tournant le dos à la porte ainsi qu’au garçon, elle retira son t-shirt, dévoilant son dos musculeux, tatoué et surtout nu. Il est vrai qu’Automne n’avait pas besoin de soutien-gorge, au vu de son absence presque totale de poitrine. Et la pudeur ne faisait pas partie de son vocabulaire. Lorsqu’elle se retourna, après avoir enfilé son débardeur, elle arborait un sourire satisfait. Celui-ci était aussi à l’effigie du groupe suédois.

« Tadaaaa ! Bon, on y va ? »

Elle passa à côté du garçon, dont le teint avait viré au pourpre, quasi fluorescent, et dont la bouche semblait ne plus être capable de se fermer. Apparemment, cette simple vision du dos nu de la polonaise lui avait fait de l’effet. Ca ne lui déplaisait pas. Elle n’avait jamais été dérangée par le fait d’être matée, désirée. Même par quelqu’un comme Nao. Elle y trouvait même un côté touchant.

« Ici la Terre. Tu m’entends ? »

Ryo:
Nao avait l'impression de faire tâche au milieu de son salon. Habillé tout en noir avec sa sacoche fourre tout battant sa hanche, il se sentait différent. c'était les cas, il allait sortir accompagné d'une fille. pas pour faire les courses ou acheter un manga mais bien pour aller boire un verre en ville. Mais que lui prenait-il? Il s'emballait. Si la coloc avait été un type comme lui, ils seraient déjà avachis face à la télé à malmener leurs manettes de jeu.
Bien sûr, avec son look, Automne devait baigner dans le même style musical que lui, il aurait dû le deviner. Elle n'était pas du genre à écouter l'autre tanche de Bieber que Nao honnissait autant que les légumes. Elle le surprit par son naturel décomplexé et quand elle ôta son t-shirt après s'être retournée, il vécut un moment de panique au niveau de l'entre-jambe. Bon sang qu'elle était canon. Petite mais ... et alors? Et joliment tankée comme ces profs de fitness qui s'exhibent sur le net. Elle était taillée harmonieusement et ses muscles saillants ajoutaient un charme fou. Quand aux tatouages, il les aurait léchés.

"Tadaaaa! Bon, on y va ?"

Rhoooo ... quelle indécence, épaules nues, nombril exposé, la poitrine dessinée sans le soutien d'un soutif ... Qu'importe qu'elle ne fasse pas un 95D, ce qu'il voyait était une petite merveille à laquelle il eut subitement envie de faire un gros câlin. La chaleur lui monta aux joues, et pas que ... Tu veux bien être ma copine? Question de bac à sable du primaire mais c'est la seule qu'il eut été capable de poser à ce moment-là.

"Ici la Terre. Tu m'entends ?"


"Hein? Euh ... Quoi ? Oui oui bien sûr, on y va, on y va."

Il reprit conscience, le champ de vision envahit par l'image ultra sexy et ravageuse de sa nouvelle coloc. Ces rêves érotiques allaient changer d'intervenants ce soir.


"Et avant que j'oublie, tiens, voilà un jeu de clé complet pour accéder à l'immeuble et à la cellule."

Ainsi prêts, ils quittèrent l'atmosphère paisible du quartier résidentiel pour se diriger vers le centre-ville. Nao avait tout d'abord pensé éviter de prendre des risques et l'emmener dans un endroit où lui ne serait pas dépayser, comme un bar à otaku ou un fast food pas trop cher mais de peur de passer pour un médiocre, il avait préféré opter pour une solution plus "normale". Il allait faire un trou dans son budget mais au moins il s'en sortirait dignement. Et puis ... il voulait montrer à Automne qu'il n'était pas aussi nul que son physique pouvait laisser penser. Ils marchèrent une dizaine de minutes, côte à côte alors qu'il la guidait en lui montrant les points à connaitre. Une fois traversée la dernière rue de cette zone calme, l'environnement changea du tout au tout. Les trottoirs étaient bondés de passants et les devantures de tout un tas de boutiques et échoppes meublaient les rez de chaussée des immeubles. Tout était couleurs chatoyantes et tape à l’œil. Les odeurs de cuisine creusaient l'estomac et la jeunesse de Seikusu se hâtait en quête d'une table sympa à occuper pour profiter de ce début de soirée. Plus d'une fois, ils faillirent être séparer par des groupes de braillards et à chaque fois, ils durent se tirer l'un à l'autre par la main. Le contact d'Automne était électrisant. Elle avait la poigne ferme mais douce et Nao s'enivrait de ces secondes où il pouvait la toucher. Heureusement, avec sa tignasse bleue, il ne pouvait pas la perdre de vue. Le soleil avait commencé sa lente descente et les derniers rayons irradiaient autour de la polonaise comme pour l'auréoler d'une sainte lumière. Le geek n'en pouvait plus de se perdre dans sa contemplation et imaginait tout un tas de stratagème pour ne pas se faire gauler. Maintenant, il était assez mauvais en dissimulation ...


"Argh! On y est !!"

Un type venait de le percuter de plein fouet sans pour autant faire dévier Nao. L'autre s'excusa, très poli et disparut, happé par la foule.

Le Black Dog, l'antre des métalleux, le trou sombre d'où s'échappait un son tonitruant dès que la porte d'entrée s'ouvrait. Les deux vigiles baraqués qui poireautaient devant les dévisagèrent sans sourire et l'un d'eux leur fit signe qu'ils pouvaient y aller. Nao poussa la porte en se faisant violence. Il entrait en territoire inconnu, avec pleins de gens dedans. Et effectivement des gens il y en avait. Des japonais pour la plupart dont beaucoup sortaient du boulot et avaient tombés la veste et déboutonnés le col de leur chemise. On était loin des bars à barbus occidentaux mais la décoration était sympa et l'ambiance assez sombre. C'était du Megadeth qui sortait des caissons et Nao valida le choix du responsable. Une serveuse cool pleine de piercings les installa là où il y avait de la place, sur une banquette devant des petites tables hautes.


"On va prendre deux whiskies et du coca pour les noyer! Et des chips! Beaucoup ..."

Le geek était fier d'avoir eu l'air masculin et viril pour commander. Il n'était pas à l'aise du tout avec beaucoup de monde à sa gauche et encore plus à sa droite. Mais chaque situation désagréable peut avoir son avantage, et celui du moment était qu'Automne était collée à lui. Il pouvait mourir à présent, il partirait heureux. De la même manière, le vacarme était tel que pour s'entendre, ils devaient se pencher l'un vers l'autre et le pli qui se créait dans le léger décolleté de la jeune femme le laissait entrevoir quelque chose de super mignon.

La commande arriva vite et conformément aux pré-requis, il noya de coca son verre d'alcool.


"A ta venue! A ton installation! A nous et vive le métal!!"

il s'envoya son verre d'un coup et la brulure qui suivit l'incita à être beaucoup plus confiant en lui!

Automne Maleki:
Sortir en fin d’après-midi était une bonne idée. La chaleur était redescendue, les ombres s’étiraient et l’atmosphère avait perdu de sa lourdeur. Le ciel orageux avait laissé place à quelques cumulus de beau temps qui se baladaient mollement au gré d’un vent léger. Automne, qui avait l’habitude de marcher longtemps et à un rythme soutenu, devait ralentir le pas pour que Nao puisse la suivre. Celui-ci, bien content de trouver quelqu’un avec qui sortir (encore plus en sachant que cette personne était pourvue d’un vagin), lui montrait toutes les adresses et curiosités sur le chemin. Ce petit train touristique s’arrêta net lorsqu’ils arrivèrent dans les artères principales. Noyés dans le monde, ils ne pouvaient communiquer et devaient batailler pour rester en contact. Après quelques minutes de lutte contre la masse grouillante, qui lui parurent des heures, nos deux protagonistes trouvèrent enfin un peu de calme à l’écart des passants.

« Du coup, la surpopulation dans les villes japonaises, c’est pas une légende. »

Elle resta debout à regarder le flot de badauds qui se pressaient dans les grandes rues, le soleil bas l’illuminant telle une déesse. Au bout d’une petite dizaine de secondes, elle s’aperçut que Nao la regardait, ou plutôt la contemplait. Etait-il ébloui par sa beauté et son charisme, ou l’adulait-elle simplement parce qu’elle lui accordait un peu d’intérêt ? Elle gloussa et passa sa main dans sa tignasse. Si elle avait besoin d’un boost de confiance en elle, il lui suffirait de demander à son colocataire, qui se ferait un plaisir de l’admirer comme si il s’agissait d’un être supérieur. Elle reprit la route, ce qui le força à stopper sa délectation visuelle.

Le bar où il l’amenait ne ressemblait pas à ce à quoi elle s’attendait. Nao aurait plus eu sa place dans un bar à jeux vidéos, à jeux de rôles, ou un maid café. Elle avait toujours voulu tester un maid café. La décoration kitsch, la bonne nourriture, les boissons rafraîchissantes, et surtout les serveuses qu’elle aurait maté pendant des heures en sirotant un bubble tea. Cringe à souhait certes, mais c’est ce qui rend l’expérience encore plus sympa. Bref, le bar où nos deux zinzins entraient. Le Black Dog. Ca ressemblait à un troquet de métalleux comme elle en avait fréquenté pas mal, avec de la musique trop forte, des cheveux trop longs et des odeurs corporelles trop désagréables. A l’heure de la sortie des bureaux, les salarymen investissaient le lieu, toujours dans leur chemise bien repassée mais avec la cravate dénouée. Ils étaient accompagnés des habituels déchets que l’on rencontre dans tout festival, ceux avec les cheveux encore plus gras que longs, ce qui n’est pourtant pas une mince affaire, déjà bourrés avant le repas du soir, que tout le monde tente d’ignorer avec plus ou moins de succès. Bien sûr, on pouvait aussi croiser les curieux, ceux qui avaient envie de changement, qui étaient entré ici sans savoir ce qui les attendait, et qu’on ne reverrait pas de sitôt. Automne était en terrain connu, avec en plus une petite pointe de dépaysement bienvenu.

La serveuse qui s’occupa d’eux lui tapa immédiatement dans l’œil. Une métisse aux cheveux colorés, totalement consciente de son sex-appeal. La polonaise se demanda si ses piercings s’arrêtaient à son visage, ce qui aurait tout de même été dommage. Elle reviendra ici, plus tard, à une horaire plus propice à la discussion, pour tenter de gratter son numéro et plus si affinités. Une fille comme ça, c’est pas hétéro, ou pas totalement. Mais pour le moment, elle devait se contenter de rester collée à Nao, qui vivait actuellement le plus beau moment de sa vie. Lorsqu’il commanda en japonais, elle ne comprit que 3 mots : whisky, coca, chips ; ce qui suffit à la rendre heureuse. Quand les verres arrivèrent, les deux larrons trinquèrent, et Automne manqua de s’étouffer en voyant la tête du japonais lorsqu’il sirota sa première gorgée. Pour sûr, ce n’était pas un expert en alcool fort. Sa tentative de paraître plus viril qu’il ne l’était réellement était mi-touchante, mi-ridicule. Ridichante. Ou touchicule. C’est bien, touchicule.

« Amateur ! Prends ma dose de coca. » Elle leva son verre et le porta à ses lèvres. « Moi, je le bois pur » Le liquide de couleur bronze s’infiltra entre ses lèvres, enveloppa sa langue et se glissa dans sa gorge en prenant soin de tout anesthésier sur son passager. Le breuvage puissant à l’odeur caractéristique se distinguait par ses arômes boisés et un arrière-goût de vanille qui s’effaçait pour laisser la place au feu de l’alcool. « Un Nikka ? J’aime beaucoup. Ils se foutent pas de notre gueule, ici. » Elle tourna le regard vers Nao et lui lacha un sourire amusé. « La première fois que j’ai bu un whisky, c’était un bourbon dégueulasse, du genre à faire passer du Jack Daniel’s pour un cru d’exception. J’ai détesté, mais y avait que ça, alors j’en mettais un fond, puis je remplissait le verre de coca jusqu’au bord. C’était pas terrible, mais ça passait. A la fin de la soirée, j’étais tellement bourrée que je me souviens plus de rien. A part une chose. Le moment où j’ai dégueulé. Crois-moi, le whisky-coca, ça passe à l’aller, mais c’est horrible au retour. »

Automne gloussa, et porta à nouveau le verre à ses lèvres. Elle pouvait boire ça comme du jus de fruit. Le whisky, elle l’adorait autant qu’elle le détestait. Il avait été son meilleur ami lors de ses meilleures fêtes, et son pire ennemi lors de ses périodes les plus sombres. Mais tout ça, c’était du passé. Et le passé, elle le laissait derrière. C’était aussi pour ça qu’elle avait tout quitté pour venir au Japon. Pour fuir. Pour se reconstruire. Pour revivre.

« Pour moi, les meilleurs whisky sont faits ici. Les américains ne sont bons qu’à être coupés. Les écossais et les irlandais sont parfois excellents, mais un peu bruts, et souvent hors de prix. Les japonais, par contre, sont plus fins et plus complexes, et leur prix reste correct. Je n’avais pas pensé à ça en venant au Japon, mais ça me fait plaisir. »

Elle posa son verre vide sur la table, et se plongea dans l’observation de la salle. Il y avait encore tous les types d’énergumènes cités précédemment, il y avait toujours la jolie serveuse au cul absolument parfait, le barman qui n’aurait pas dépareillé dans un groupe de thrash au milieu des années 80. Mais il y avait autre chose, qu’elle aimait moins. Un mec en particulier, qui la regardait avec insistance. Bien sapé, bien coiffé, mais qui dégageait une aura sombre. Malsaine. Presque dangereuse. Il allait leur causer des emmerdes, c’était certain. Dans sa poche, toujours le petit couteau, au cas où. Les rares fois où elle avait dû l’utiliser, c’était dans ce genre d’endroit. Un bon coup bien senti, dans la cuisse, ça calme. Même si elle préférait en général faire parler ses poings.

« Nao, je crois que ce mec va nous faire chier. »

Ryo:
Le deuxième effet kisskool après avoir ingurgité son verre d'une traite fut une quinte de toux abominable qui leur valut le bénéfice d'un peu d'espace tant les personnes autour s'écartèrent en faisant les gros yeux. Grand bien leur fasse! La lumière tamisée de la salle permit à Nao de conserver le peu qui lui restait de dignité en évitant de montrer qu'il était rouge tomate. Mais c'est dégueulasse le whisky! Comment elle peut aimer ça? Et pur en plus?  Le pauvre jeune homme renifle et accepte avec empressement le coca que lui propose Automne et lui fait subir le même sort que son verre précédent. La jolie polonaise se lança dans une explication de ce qu'était un bon whisky et même en l'imaginant dégueuler, comme elle venait de l'exprimer, elle serait encore surement sexy. En vérité, quelque soit la situation dans laquelle Automne pourrait ou aurait pu se trouver, Nao l'aurait trouvé désirable. Badass girl en tenue de combat, majorette en jupette et ponpons, femme de la haute en tailleur et escarpins, il était sûr que tout lui allait à merveille. Sans aller aussi loin, le petit bout de nénette qu'il avait en face de lui s'apparentait déjà à un rêve qu'il n'aurait pas cru possible. Est-ce que bourrée, elle se trimballerait à poil dans l'appartement? Mystère ...

Autre mystère, quel âge pouvait-elle bien avoir? Sa taille et son look  la catégorisait ado rebelle en recherche d'elle-même mais dès qu'il l'observait plus précisément, il pouvait remarquer qu'elle avait déjà bien entamée la vingtaine. Son histoire, qu'elle lui avait racontée, laissait entendre qu'elle pourrait avoir ... trente ans? Noooon ... pas possible ça. A trente ans, normalement, on est casé avec une vie de famille, un job stable et un avenir tout tracé. Il faudrait qu'il lui demande mais actuellement, il était trop tôt pour se lancer dans ces détails là. Et puis ... il ne saurait pas comment formuler sa question.

Il lui souriait sincèrement car ce qu'elle disait l'intéressait mais il ne pouvait s'empêcher de jeter des coups d'œil circulaires assez fréquemment. Ca ne se voyait peut être pas mais il faisait un effort magistral pour paraitre sociable et avenant dans ce milieu hostile. La ventilation dans ce bouge tournait au max mais ne suffisait pas à rafraichir l'atmosphère ni à la purifier. L'odeur âcre de la sueur commençait à prédominer alors que les clients s'agitaient après leur journée de travail. Maniaque de la propreté, Nao haussa un sourcil et jeta un regard mauvais au type le plus proche qui devait être aussi le plus odorant.

"Hein? Quel mec? Pourquoi?"

Pas discrètement, Nao se retourna et identifia aussitôt l'homme dont la tête, en effet, ne lui disait rien qui vaille. Les occidentaux voyaient le japon comme une société moderne mais intimement liée à ses traditions dont l'application poussée jusqu'à l'extrême de la politesse et du respect. Les yakuzas étaient des gangsters au code d'honneur réputé qui œuvraient pour leur compte mais en respectant ces traditions. C'était faux. La délinquance au Japon était aussi violente qu'ailleurs et souvent bien plus cruelle. L'usage d'armes blanches était fréquent et meurtrier et la police ne pouvait rien contre les gangs qui faisaient publiquement pignon sur rue. le blanchiment de l'argent sale passait par les salles de jeux, l'ouverture de casino et l'investissement dans les activités de nuit. il était d'ailleurs fort possible que le Black Dog ait été monté par un criminel. C'était une probabilité. En revanche, c'était une certitude pour Nao que le gus qui les matait ne faisait pas partie de la catégorie saine et exemplaire de la population. Pourquoi en avait-il après eux? De voir une étrangère, pas mal de surcroit, avec un mec insignifiant comme lui l'énervait? Il n'en savait rien mais quelque chose lui intimait de vite se barrer. Il attrapa Automne par le poignet et la tira derrière lui. Elle avait eu le nez fin.

"Viens, faut qu'on parte!"


Il paya en sortie sans même relever que c'était vachement cher quand même. Dans la rue, il inspira un grand bol d'air pollué.

"Ce mec était flippant, on va aller ailleurs, où ça craint moins. On va couper par là."


Il connaissait la zone puisqu'il empruntait cette rue transversale peu animée pour rejoindre le quartier des otakus où fleurissaient les bars et boutiques à dominante plus folklorique. Maids, Bunnies, cosplayers en faisaient un territoire original.

Il n'entendit pas la baffe venir. Le coup assené derrière sa tête l'assomma presque et il tituba en avant.

"AÏE! HEY !!"


il se retourna et se pétrifia. Trois connards les dominaient de toute leur agressivité. Ils étaient envoyé par l'autre ou c'était juste pas d'bol? Qu'importe, ils étaient massifs, arrogants et voulaient quelque chose d'eux. Le plus petit des trois, fringué à l'italienne, les apostropha, utilisant un vocabulaire des rues propre à la région, particulièrement vulgaire.

"Hey gros tas! Tu promènes ton p'tit frère?"

Les deux autres ricanèrent comme des abrutis. Instinctivement, Nao se déplaça devant Automne. Ces enfoirés devaient être traités par la négociation. A la moindre étincelle, les deux tourtereaux se feraient rétamer.

"On a pas d'argent, s'il vous plait, vous pouvez nous laisser partir?"

Nao avait la voix qui chevrotait, trahissant sa peur. Du coup, l'autre s'approcha, moqueur.

"Hey mais c'est pas un mec! C'est une étrangère! Tu t'es levé une meuf mon gros? Tu vas la déglinguer cette nuit cette pupute? Comment on dit en anglais? YOUR BITCH?

Paume de la main bien ouverte, doigts écartés, sans élan mais avec plus de 100 kilos de barbaque derrière, la gifle que Nao délivra claqua fort dans le calme de la rue. La tête de "l'italien" fit un 90° bien marqué et le type tangua avant de tomber à genoux. Il vomit aussi, inondant ses cuisses de sa propre crasse.

"TU NE LA TRAITES PAS DE PUTE!"

Nao était overdosé par l'afflux d'adrénaline qui montait en lui. Tout son corps pétillait d'énergie et 3 secondes après, l'audace de son geste le mortifia. L'un des autres idiots se jeta sur lui et lui décocha un crochet à abattre un ours. Nao eut juste le temps de lever les bras, ce qui affaiblit très légèrement l'impact. Le choc fut brutal et l'envoya à terre. Il crut que sa tête allait exploser. Il prit deux coups de lattes dans les côtes, un dans les burnes et il hurla de douleur.



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