Le moment était, c’était le cas de le dire, divin. Les sens du Dieu s’éveillaient, Alana pouvait le sentir, autant que les seins par ces contacts entre sa peau de Dieu, huilée et parfumée sans doute par ses prêtresses, et la sienne à elle, juste douce et onctueuse au toucher. Elle l’entretenait elle-même, bien que n’ayant pas beaucoup de travail. Les mains par contre lui demandaient plus d’attention vu qu’elles étaient plus sollicitées que les autres partie de son corps. Aussi, afin de les garder les plus lisses et satinées que possible, Alana se préparait-elle un baume très efficace pour les mains à base de décoction de pétales de rose. C’était, à sa connaissance, le remède le plus efficace contre le dessèchement des mains, auquel il pourrait lui arriver d’être soumise vu qu’elle cuisinait beaucoup.
Quoiqu’il en soit, on peut facilement concéder à la prêtresse d’Aphrodite une peau aussi agréable au toucher que pourrait l’être celle d’un bambin.
Malheureusement pour elle, la toge de tissus du Dieu de la Guerre faisant barrage, elle ne pouvait faire éprouver à sa peau les délices de contacts prolongés avec celle d’Arès. Ces brefs moments où il la touchait, que ce fut avec ses mains, sa bouche ou ses bras, réveillaient chez elle des envies de luxure et de plaisirs. Réveillaient n’était cependant pas le terme adéquat, la libido d’Alana n’étant jamais en sommeil. Non, ces attouchements exacerbaient plutôt ses envies, leur donnaient une dimension nouvelle, merveilleusement agréable et inédite car attendues, désirées. Et la toge agaçante qui faisait barrage entre l’épiderme du Dieu et le sien, jouant le rôle insupportable de chaperon quand d’un côté et de l’autre, ils n’attendent que le moment de se réunir leur rendait finalement le service de ne pas les laisser céder immédiatement à la tentation des plaisirs de la chair, toujours plus enivrante et insidieuse pourtant.
Fallait-il l’écouter ? Devait-ils se laisser aller à lui céder, à cette vile tentation qui avait pris possession de leurs corps et de leur sens, les faisant oublier, à Alana surtout, tous les préceptes de bonne conduite qu’ils étaient censés observer l’un en face de l’autre ? Mais avaient-ils seulement la possibilité de refuser, de se soustraire à l’influence de ces pulsions qui semblaient les assaillir et les faire se montrer toujours plus entreprenants l’un envers l’autre, plus empressés ? En ce qui concernait la Prêtresse, la réponse était simple. Non. Elle ne pouvait, voulait, pas, en aucun cas, refuser de céder à la tentation. « Le meilleur moyen de résister à la tentation, c’est d’y céder », disait Oscar Wilde. Comme il avait raison… Et à moins que le Dieu ne rejette cette prêtresse hors de son temple avec pertes et fracas, elle poursuivrait le jeu si délectable auquel ils s’adonnaient tous les deux depuis un long et agréable moment déjà.
Peut-être aussi était-elle seule à jouer, peut-être le Dieu était-il égal à lui-même, ainsi avec toutes les femmes qui foulaient le sol de son temple. Mais comme il était plaisant de se penser unique, juste une fois… Ca pouvait bien être faux, Alana n’en avait rien à faire. C’était vrai tant que personne ne trouvait rien à y redire, et qu’elle voudrait que ce soit vrai. Aussi choisit-elle de profiter de l’instant présent, et de ne plus se perdre en réflexions purement féminines, qui avait le don, de surcroît, de l’agacer.
Les murmures de la voix d’Arès s’infiltraient comme un venin dans son esprit et lui embrouillaient la tête. La morsure réalisée dans son cou n’arrangeant rien, elle mit bien plusieurs secondes pour apprécier la justesse des paroles du Dieu, temps qu’il mit à profit pour disparaître et, comme elle l’avait fait avant lui, rompre tout contact charnel entre eux deux. Bien qu’ayant les joues rosies, Alana mit également ce temps à profit. Pour rassembler ses idées et retrouver un semblant de clarté dans son raisonnement. Clarté qui lui faisait tellement défaut lorsqu’elle se retrouvait esclave de ses envies. Ou presque.
D’abord, sa main droite fut captive. S’en suivit d’une façon prévisible, mais dont Alana pu se délecter, sa main gauche. Quand enfin il réapparu devant elle et que ce fut au tour de la taille et du cou de la prêtresse d’être captifs, elle ne comprit que trop tard le geste qui suivrait et avant qu’elle n’ait eu le temps de protester, ses lèvres se virent captives à leur tour. Que de zones de son corps qui venaient de se retrouver prisonnières, en l’espace d’un si court instant, de la bouche du Dieu… De toutes ces zones, la bouche était la plus sensible, les baisers n’étant pas ce à quoi s’adonnait le plus. Pour la simple et bonne raison qu’ils représentaient quelque chose pour elle. C’était quelque chose ne faisait jamais, à moins d’y être contrainte. Elle n’y prenait qu’un plaisir limité, n’étant souvent tombée en fait, que sur des hommes ou des femmes friands de baisers où la langue jouerait presque le rôle d’un étouffe chrétien… Et puis en dehors de ça, malgré sa petite vertu, Alana était très romantique, et espérait que lorsqu’elle donnerait sciemment un baiser à un homme, ça serait parce qu’il est important pour elle, pour autre chose que ses aptitudes sexuelles.
Cela dit, le baiser que lui donna Arès était très loin de la dégoûter. Bien au contraire, elle se laissa très agréablement surprendre par ce contact et se surprit même à fermer brièvement les yeux afin de mieux en apprécier la douceur.
Elle ne souleva ses paupières que lorsqu’elle sentit plusieurs mains en plus de celles du Dieu la toucher, se demandant qui les interrompait ainsi. Elle se trouva bien idiote en voyant le Dieu, répliqué à trois exemplaires, et leurs quatre paires de mains s’occuper d’elle en caressant chaque partie de son corps. Les orgies, ou même rapports à plusieurs n’étaient pas méconnues d’Alana, mais avoir plusieurs hommes pour elle seule, ça c’était inédit. Voilà qu’elle ne savait plus vraiment où donner de la tête avec toutes ces mains pour stimuler son désir et ses envies… Cela dit, ce manège ne dura pas longtemps. Trop peu de temps au goût de la jeune femme en réalité. Lorsque les clones disparurent, son cœur battait vite, trop vite, et à peine s’étaient-ils évaporés qu’Alana cherchait à reprendre une contenance, et un souffle si elle y arrivait.
Arès reprit la parole, la sauvant de devoir le faire. Il la laissa cependant interdite. Si elle n’avait pas été tellement excité, elle aurait ri de nervosité. Comment pouvait-elle être comme il voulait qu’elle soit s’il lui laissait la possibilité d’être rebelle et soumise ? Elle devait lui prouver qu’elle le connaissait, le problème étant qu’elle ignorait tous ses goûts personnels. Elle connaissait son histoire, les faits marquants de sa vie. Mais jamais elle ne se serait permis de s’interroger sur son ressentit et ses préférences… Pour la simple et bonne raison que, jusqu’à ce que la voix du Dieu ne tonne à ses oreilles pour la première fois, elle n’espérait pas même le rencontrer… C’était un défi de taille qu’il lui imposait, mais le jeu en valait la chandelle. Elle allait devoir se montrer imaginative.
Ses mains frappèrent doucement l’une dans l’autre et la robe que le Dieu avait fendue lui-même revint habiller la prêtresse, qui renvoya sa longue chevelure rousse dans son dos. Elle lui laisserait cependant l’initiative du lieu, ce parterre froid de temple n’étant pas l’endroit adéquat selon la prêtresse. Elle glissa une main dans ses cheveux, se recoiffant un peu, alors que le sourire qui avait tenu ses lèvres depuis le début réapparaissait. Elle dû se retenir de ne pas ironiser la demande d’Arès, non pas pour se moquer mais pour faire de l’humour et dédramatiser la situation. Plus que son entraînement, c’était sa réputation de prêtresse de l’Amour qui était en jeu. Elle aurait pu être stressée, nerveuse, mais non. Elle savait qu’elle ferait ce qu’il faut, dut-elle y passer des jours entiers, afin de porter le Dieu de la Guerre au paroxysme de son plaisir.
« Si vous consentiez à me faire le privilège de me suivre… »
Le sourire de la Prêtresse se fit un peu plus énigmatique alors qu’elle prenait la direction de la sortie du temple. Si elle devait faire l’amour à Arès, elle refusait que cet amour soit sacrifié sur l’hôtel de la Guerre. Pas encore pour le moins. Elle voulait d’abord qu’il goûte à sa peau, et elle-même goûter à la sienne. Ensuite, si l’envie plaisait au Dieu, ils pourraient choisir d’en faire don à qui en voudrait.
D’une démarche souple et fluide, ses reins ondulant, Alana sortit dans la clarté du début d’après-midi. Elle avait passé plus de temps que prévu dans le temple du Dieu. Une fois qu’ils furent à l’extérieur, Alana se retourna face au Dieu, ancrant son regard dans le sien.
La prêtresse avait quelques pouvoirs, dont elle n’abusait jamais. Aussi pouvait-elle faire ce qu’elle voulait, même si ça lui demandait une grande quantité de magie. Les utilisations qu’elle en faisait étaient tellement espacées qu’elle ne souffrait pas de ces utilisations. Les déplacer dans le temps et l’espace, Arès et elle, consomma une grande partie de ces réserves. Mais soit, elles auraient le temps de revenir d’ici à sa prochaine utilisation.
L’instant d’avant, ils étaient devant le temple du Dieu de la Guerre. L’instant d’après, ils se retrouvaient dans une sorte de cocon de verre et de bois mêlés, un espace rond où une dizaine d’adultes pouvaient se tenir debout sans inconfort mais… Où être assis était tellement plus plaisant. En effet, l’intérieur de ce drôle d’espace rond, un peu comme un chalet de verre, était décoré avec soin d’étoffes colorées en tous genres, qui allaient du jaune ocre au violet nuit, en passant par le rouge lit de vin et l’orange œillet d’Inde. C’était un mélange de couleurs particulièrement chaud et vivant. Dans un coin de la pièce au toit rond se trouvait un canapé dans les mêmes tons, large, il avait l’air particulièrement moelleux. Et un peu plus loin, de l’autre côté, il y avait un lit. Un lit grand, rond encore pour rester dans le ton de la pièce. Et encore dans un autre coin de cet espace, relativement grand, des livres. Beaucoup de livres. Rangé dans une bibliothèque de taille modeste. Où étaient-ils exactement ? Quelque part sur Terra, perchés à une dizaine de mètres d’altitude, en plein milieu d’une dense forêt. Cet endroit, c’est Alana qui l’avait fait, comme elle avait pu. Et dès qu’elle avait un peu de temps, elle y venait. Elle y amenait quelque fois quelqu’un avec elle, quand elle ne voulait pas aller au temple où elle ne jouissait pas toujours de l’intimité chère à certains de ses partenaires. Aujourd’hui, c’était plutôt elle qui avait envie d’intimité. Elle n’avait, en l’occurrence, pas la moindre envie d’être lynchée en place publique pour avoir fait des avances à un Dieu.
Cela dit, c’était trop tentant. Aussi, à peine furent-ils dans les lieux que la prêtresse avança de quelques pas, réduisant l’espace qui la séparait d’Arès à néant, fixant son regard dans le sien. Il y resta alors que les doigts rendus habiles par l’habitude de la jeune femme commencèrent à défaire la toge du Monarque des arts de la Guerre avec une minutie et une dextérité digne des plus grands virtuoses. La toge tomba au moment où le contact visuel s’interrompit, les yeux d’Alana s’étant fermés alors que sa bouche s’était glissée dans le cou d’Arès.
La peau de l’Homme aux cheveux bleus se retrouva alors la victime d’assauts multiples. Les mains d’Alana entamaient en effet des gestes lents et caressaient avec lenteur et douceur la taille, le dos du Dieu ainsi que son torse, ses pectoraux et abdominaux. Quant à son cou… Alana y faisait évoluer sa bouche comme sur un terrain de jeu qu’elle maîtrisait à la perfection. La peau subissait de multiples traitements. D’abord elle n’était que caressée par le souffle chaud de la prêtresse, qui y apposait ensuite ses lèvres, charnues, lisses… Elle la faisait aller et venir, du creux de l’épaule jusqu’au carré de la mâchoire avec sensualité, afin de réveiller le sens du toucher du Dieu. Ces caresses jointes à celles de ces mains se voulaient plus comme un éveil au désir, qui s’était vu interrompu de par le changement de lieu, que comme de véritables gestes lubriques.
Elles étaient un petit stimulis qu’elle espérait très prometteur pour la suite…