Il lisait bien plus en Kamui que Kamui lui-même n’aurait pu le croire, être imbécile issu d’une race éphémère ! La manière dont le jeune humain protégeait ces renards était dérisoire. Pourtant Meisa Kamui lui-même avait pu avoir un aperçu de la manière dont les neuf pouvaient tenter de pousser à la folie les êtres qu’ils avaient sous la patte avant de se repaître de celle-ci et de leur chair. Et qu’est ce que ce jeune idiot aurait-il ressenti, dans ce cas, s’il venait à se trouver devant celui qui se cachait dans l’ombre des neuf ? Car si l’illusion de l’Izuna Kumiho était tentante, jamais autre légendes que celle de la mystique jeune fille n’avait franchi les lèvres du monde, car la véritable part de cette légende de furie et de destruction était oubliée depuis trop longtemps pour qu’on puisse s’en rappeler. Il y avait encore avec ces renards anguille sous roche, un poisson dissimulé dans les ombres qu’ils formaient, car lorsque les neuf sont exorcisés et que leurs pouvoirs rejoignent leur unique origine, le renard sort de sa tanière. Il projetait donc de montrer à Kamui ô combien les apparences pouvaient l’avoir trompé, et ce dans l’unique but qu’il cesse de se mettre des stupides idées en tête alors que sa connaissance de Lui était totalement inexistante. Il n’agissait jamais inutilement, et Meisa Kamui finirait par s’en rendre compte, au fond, ce n’était qu’une question de temps. Mais une autre carte pouvait être posée sur la table ; lorsque Kamui sera occupé à rédiger une longue liste d’équations compliquées qui lui prendront au bas mot six heures, et qu’un Izuna s’en viendra renverser l’encre et déchirer le papier parce qu’il jouait sa se ruer sur un de ses congénères sur la table de travail, ce qui était courant, qu’est ce que l’impatience de ce jeune homme produira ? Un coup de pied, de point, de stylo, plume ou autre ? Ce n’était qu’une partie du sujet ; l’autre partie était que l’assistant venait de dépeindre le profil de la femme parfaite selon lui en précisant qu’elle aurait très bien pu être une Neko. Cette donné le fit réfléchir ; Il n’y avait jamais pensé, les Terranides ne l’ayant jamais vraiment intéressé, et la seule qu’il pouvait se vanter de connaître était Sekhmet, qui, il fallait l’avouer, était vraiment jolie. Mais il n’accordait pas de crédit à la beauté, simplement à l’intelligence.
Bref, il se mit à décrire des cercles. Du poil de Neko, c’était réalisable, il pouvait aller en chercher facilement, mais il n’avait pas très envie de sa taper un voyage à nouveau alors qu’il y avait à domicile tant de choses à faire. Il semblait donc plongé dans une intense réflexion. Et c’est qu’il l’était, le bougre ! Ramener les neuf imbéciles plus tôt que prévu n’était pas un problème d’autant plus qu’ils ne dureraient pas une éternité en face d’eux. Il poussa ce qui pourrait s’apparenter à un soupir. Son laboratoire allait très sûrement finir en miette, mais bon, il passerait. Il dégaina de nouveaux Asura, leva la main, et refit le même geste qu’autrefois lorsqu’il avait appelé les neuf. Qui ne manquèrent pas de revenir dans leurs habituels concerts de ricanements, intacts, et leur punition n’empêcha pas l’un de détruire l’ensemble du contenu d’un plan de travail en effectuant une roulade.
Xatiav disparut instantanément.
Après un bruit de coups de pied, un renard qui décrivit un arc de cercle pour aller s’écraser au sol dans le concert de ricanement des autres qui, pour utiliser une expression familière, se foutaient de sa truffe, il reparut à sa place initiale. Il ne pouvait expliquer à neuf renards en train de jouer l’étendue et la perfection de ses plans, étant donné que les neuf passaient plus de temps à se ruer l’un sur l’autre qu’à prêter attention à Kamui ou à Lui. Il leva donc Asura, se servant de sa capacité de frappe à distance. Un Izuna poussa un cri déchirant et son masque lui fut arraché, scindé en deux ! Les autres comprirent ce qu’il se passait tandis que leur congénère était consumé par un feu bleu et finissait en feu follet et, ne comprenant pas le but de la manœuvre, engagèrent une procédure de repli stratégique ; En vain. Asura se leva de nouveau et s’abaissa de nouveau neuf fois, de sorte à détruire les masques des neuf, et d’avoir neuf feux follets résultant des neuf âmes mortes. Ensuite de quoi mit-il la main dans la poche et sortit t’il un flacon tandis qu’un phénomène difficilement explicable se déroulait : les neuf flammes devinrent plus intense, et le temps qu’on ne comprenne quoi ce soit, c’est-à-dire aussi rapidement que la lumière, une onde de choc dont l’impact maléfique n’avait rien à envier à Son aura déferla dans la pièce, réduisant en miette plus d’une moitié des plans de travail. Une ombre quatre fois plus grande que le plus grand homme était apparu dans les flammes devenues d’un noir de jais et, autour de ce brasier des ténèbres, s’avançait. C’était un renard gigantesque aux pupilles écarlates, dont la lueur maléfique était perceptible à travers son masque fissuré et entaillé par endroit. Son pelage était d’un blanc adoré et ses neuf gigantesques queues fouettaient l’air, allant détruire un pan des murs ou d’autres plans de travail, aléatoirement. Son aura n’avait rien à envier à l’aura de mort du Seigneur de l’Alchimie, car elle n’était que cruauté, désirs meurtriers, furie et ombres ! Ainsi poussa-t-il un long rugissement d’une rage incontrôlée qui résonna dans les murs de pierre et, se plaça face à Xatiav comme un renard s’apprêtant à bondir et à déchiqueter de ses crocs, crocs qui étaient d’ailleurs à ce qu’on pouvait voir, longs et acérés.
Xatiav sourit. Non seulement c’était rare comme une chute de neige dans le désert un jour sans nuages, mais en plus ce n’était même pas un sourire de joie ; c’était un sourire aussi maléfique de le propriétaire du château. Il parla avec force au renard à neuf queues et dit :
« Il y avait longtemps, Kyuubi, mon vieil ami ! Depuis trop longtemps te caches-tu dans l’ombre et je t’ai rappelé au monde car j’aurais besoin de ton concours cette fois-ci encore. »
Et le renard répondit d’une voix dure, sombre et caverneuse, amplifiée par une ire divine :
« En effet, il y avait longtemps, Seigneur Alchimiste Xatiav, très longtemps… Et ne m’appelles-tu donc que pour concourir à tes expériences ? Voila la seule utilisation de mon pouvoir que tu me demanderas, alchimiste ? »
Et l’alchimiste en question répondit :
« Va en régions du nord, Kyuubi, et laisse libre cours à ta furie. Qu’importe le pourcentage de tes destructions, ramène moi un poil de Neko, ou ne reviens guère bredouille. Je récompense l’acte, et non l’absence de résultat. Les neuf, si petits et utiles soient-ils, ont été plus une absence d’acte qu’un apport de résultats ces cent dernières années. Quant à sa forme d’Esprit des Neuf, elle ne m’a été utile qu’en très peu de choses. »
Le renard à neuf queues éclata d’un rire ténébreux.
« Bien, maintenant, va. » continua Xatiav, cessant de sourire.
Le Neuf Queue se dressa sur ses pattes arrières et effectua un bond tellement rapide que l’alchimiste lui-même le vit à peine ; Le voila déjà tournant le dos à l’assemblée et il disparut dans une rapide course vers la porte. Xatiav dirigea son regard vers son assistant et s’avança vers lui. Il passa auprès de lui en lui lançant les mots suivants, avec dans sa voix suffisamment d’indifférence pour qu’on se demande s’il était autre chose qu’une intelligence artificielle fichtrement bien programmée.
« Vaque à tes occupations et fait ce que tu veux jusqu’à ce que ne revienne le démon Renard à Neuf queue. Il devrait rapidement trouver une Neko, mais s’il laisse libre cours à sa colère, non content de dévaster la moitié du continent, il pourrait très bien prendre plusieurs jours. Quant à tes neuf amis, donc en gros à ta femme, elle reparaîtra quand le renard retournera dans les ténèbres. Va donc. »