La bonne humeur de Mary Jane était quelque chose contre laquelle il était difficile de lutter, contre une sorte d’inébranlable mur qui se dressait fièrement contre l’amertume et le désespoir. Malgré tout ce qu’elle avait vécu aux États-Unis (l’incident d’avion, sa capture par un maniaque se prenant pour Peter, l’échec de sa carrière à Hollywood, la destruction de son club, l’attaque du Bouffon Vert sur elle et ses amies), Mary Jane restait une femme très optimiste. La Rousse laissa donc Kikuchi Makoto entrer, cette dernière répondant sur un ton calme, posé, presque détaché ; à ses invectives. MJ referma la porte derrière elles, et laissa le soin à Makoto de voir l’ensemble de la pièce. Elle venait d’arriver dans le cœur du Japan Broadway : le restaurant, faisant office de night club le soir, avec une mezzanine à l’étage, et une piste de danse. Ce qui était bien au Japon, par rapport aux États-Unis, c’est que le disco n’était pas encore totalement mort, tout comme la techno. Si les discothèques occidentales allaient parfois jusqu’à vous balancer du rap, ou, en tout cas, des musiques plus modernes, comme Miley Cirus, et souvent du Daft Punk, au Japon, on pouvait opter pour les classiques des Eighties et des Seventies, comme Boney M. La pop music était en train de faire un grand retour en Asie du Sud-Est, comme une sorte de second souffle, et il fallait se rendre place pour constater le phénomène, ce que MJ avait eu l’occasion de faire.
Après avoir observé les lieux, l’ancienne starlette se retourna vers MJ, qui, elle, était toujours en pleine réflexion. Qu’avait-il bien pu arriver à cette jeune femme ? Elle ne parlait pas tant de ses problèmes de croissance que de sa carrière brisée... Le monde du showbiz était un monde dur et cruel, où on ne brillait jamais longtemps au firmament, et où, dès qu’on commençait à devenir un has been, on disparaissait des radars. C’était sans doute le mieux, car ceux qui duraient ne finissaient pas vraiment bien. Nicholas Brendon, l’un des héros des Nineties pour avoir joué dans « Buffy contre les vampires », était maintenant un vieil alcoolique dépressif. Justin Bieber, le chanteur canadien, était un toxicomane qui, s’il ne faisait pas une overdose, finirait en prison. Le mythe d’Icare continuait à se confirmer, et, pour ces stars qui avaient volé trop près du soleil, l’atterrissage était parfois sans retour.
La question de Makoto tira alors la jeune New-Yorkaise de ses pensées :
« Avant de commencer, je voulais préciser que je n'ai pas vraiment l'habitude des cabarets... Plus celle de chanter pour des ados à vrai dire... Aussi, je voudrais en savoir plus sur ce sujet... »
MJ hocha la tête, et sourit à nouveau :
« Ça tombe bien, tu ne chanteras pas pour des adolescents. Vois-tu, j’essaie de diversifier mon club, de le rendre... Plus cosmopolite. Oh, je ne m’attends pas encore à ce que les aristocrates de Seikusu viennent y descendre... Mais je sais que la législation japonaise est stricte sur les boîtes de nuit, et je me suis dit que ça pourrait être bien d’avoir un système permettant aux parents d’être dans le club en même temps que leurs enfants, sans leur coller sur le dos. C’est pour ça que, parallèlement à mon night club, j’ai utilisé une autre partie de mon espace pour faire un restaurant-cabaret. »
La gérante s’avança, et montra à Makoto de quoi elle parlait. Elles traversèrent un couloir, longeant la salle d’arcades, et, au fond du couloir, une autre porte menait sur le restaurant-cabaret. Il y avait un bar dans un coin, et une série de tables avec, au fond, une estrade et des tapis rouges. En chemin pour s’y rendre, il y avait une petite plateforme qui descendait, séparant ainsi le cabaret en deux : une partie surélevée, et l’autre.
« J’envisage de permettre à des humoristes de se produire, à des artistes itinérants... Et aussi à des chanteurs comme toi. »
On pouvait encore sentir l’odeur de peinture fraîche, mais, au moins, les bâches avaient été retirées.
« Tu en penses quoi ? »