Aemiliane se rapprocha de Jessica pour récupérer la peluche, et les deux femmes, lentement, se regardèrent. Ce fut l’occasion pour Aemiliane de s’exprimer, de se mettre à parler, et de lui confier tout ce qu’elle avait sur le cœur. Et, le moins qu’on puisse dire, c’est que ses aveux furent... Aussi inattendus que surprenants. Jessica ne l’avait pas vu venir. Aemiliane était une véritable groupie, mais cette attirance avait quelque chose de plus profond... Et d’assez incroyable. Elle, un modèle ? Jessica ne pouvait sérieusement y croire ! Elle n’avait tout simplement rien d’un modèle ! Elle n’était rien de plus qu’une adolescente timide qui s’était prise pour une super-héroïne à force de lire des romans d’aventure et des bandes dessinées. Jessica en devint toute rouge, tandis qu’elle comprit que son rôle avait été assez psychologique. Aemiliane avait perdu l’une de ses mères, et, en désespoir de cause, avait vu Spider-Woman, et s’était mise à l’idéaliser, à voir en elle un modèle de vertu, de bravoure et de force. Jessica était effectivement sincèrement touchée, et elle ne savait tout simplement pas quoi dire. L’aveu d’Aemiliane l’avait émue, et en parler avait aussi ému l’ingénieure de GeoWeapon Corp. C’était vraiment curieux. Jessica avait toujours compris que le personnel de GWC ne regroupait que des trentenaires, des femmes comme Maman Carol, fortes et indépendantes, qui ne craignaient rien, et qui étaient influentes. Aemiliane lui semblait étonnamment fragile et sensible... Tout en faisant aussi preuve d’une intelligence redoutable, suffisamment pour bidouiller chez elle une combinaison de combat. Une espèce de génie en informatique qui était bien résolue à devenir la partenaire de Jessica, et ce malgré tous les risques qu’une telle association engendrerait.
Pour Jessica, le véritable problème était davantage que, avec cette association, Spider-Woman allait prendre encore plus d’importance chez elle, alors que, maintenant, elle avait toujours vu ce costume comme une sorte de passe-temps, de loisir à faire le soir, après les cours, pour se détendre. Petit à petit, ce phénomène avait pris de l’influence, car elle n’était pas la seule à errer dans les rues de Tekhos Metropolis. Il y avait aussi cette mystérieuse femme chauve-souris, cette Batgirl, dont certaines légendes urbaines parlaient, et dont Jessica était maintenant plus habilitée à croire l’exactitude. Elle sourit ensuite quand Aemiliane lui avoua qu’elle était presque une Déesse vivante, la meilleure chose qui ait pu arriver dans cette ville, ce quine manqua pas, bien évidemment, de la faire rougir confusément.
*La vache, elle en fait pas un peu trop, là ?*
Jessica en avait perdu sa salive, et, muette, elle finit par entendre Aemiliane lui demander un « câlin ». Elle le demanda d’une voix toute basse, et Jessica fit alors un sourire, retrouvant étrangement un peu d’aplomb au fur et à mesure que l’ingénieure rougissait furieusement, toute gênée devant sa demande. Spider-Woman se contenta de hausser les épaules.
« Bien sûr, Aemiliane... Et, en toute honnêteté, c’est à moi de te remercier. »
Elle la prit alors dans ses bras, et plaqua son corps contre le sien, puis ferma les yeux, en sentant plusieurs frissons la traverser.
« Tu sais... Ce costume, ces joutes dehors... Je... Je n’ai pas fait ça par conviction profonde. J’agissais juste parce que... Ben, j’avais des pouvoirs, et que je trouvais ça cool d’aider les gens. J’ai mis une combinaison parce que je ne voulais pas que mes mères me grondent, mais... Quand j’ai vu les médias commencer à conspuer contre moi, et la police aux fesses, je me suis dit que c’était trop dangereux d’être... D’être Spider-Woman. Je faisais juste ça pour me détendre et aider un peu les autres, je ne voulais pas être l’objet d’une vindicte populaire. »
Jessica embrassa Aemiliane sur la joue, en sentant également une vague d’émotion la traverser.
« C’est... C’est grâce à des filles comme toi, Aemiliane, que... Que je me dis que, finalement, ce que je fais n’est pas si inutile que ça. Alors, tu vois, si j’hésite, c’est... C’est parce que je... Parce que j’ai peur que Spider-Woman prenne une place trop importante dans ma vie... Mes résultats scolaires ont baissé dernièrement, et, quand Maman Carol le saura, je... »
Jessica écarquilla soudain les yeux devant l’énormité de ce qu’elle venait de dire.
*Oh mon Dieu, j’ai vraiment appelé ma mère par son prénom ?! Oh-mon-Dieu-mon-Dieu-mon-Dieu... !!*
Dans le corps de Jessica, la machine « Panique à bord » s’enclencha subitement, et elle papillonna des yeux à toute allure en relevant sa tête.
« Je... Oublie ce que je viens de dire... Enfin, non, oublie juste le... Le dernier passage, je... Ma mère s’appelle pas comme ça, et... Ohlàlà, la boulette, mince ! »
Et dire que c’était ça qui avait charmé Aemiliane. La pauvre, elle devait bien déchanter, maintenant...