Alice savait que Nanami lui cachait des choses. Elle savait que la jeune femme traînait avec une bande, et qu’elle ne faisait pas des trucs qu’on pouvait mettre sur un CV. Là, dans le Saint des saints, au cœur du Sanctuaire des Dragons, à l’endroit précis où Alice était devenue une Korvander, Nanami se confessa. Non seulement elle trempait dans divers trafics, mais elle était aussi sur la mauvaise pente. Elle enchaînait les viols, les crimes, et envisageait même de commettre des meurtres. Des aveux glaçants, à n’en pas douter, qui auraient pu amener Alice à fuir rapidement… Mais, ici, elle ne craignait rien. Les dragons étaient là. Ils avaient beau détester les humains, ils savaient qu’elle était l’héritière du Premier, de la lignée d’Erwan Korvander. Elle n’avait donc rien à craindre ici, et elle avait envie de considérer Nanami comme son amie… Même quand cette dernière alla jusqu’à lui dire qu’elle avait comme fantasme de commettre un viol et un meurtre simultanément… Violer un cadavre ? Ou tuer une femme violée ? Alice resta silencieuse, songeuse.
« Ce ne sont pas des saines pensées, Nanami. »
Elle ne pouvait décemment pas prétendre l’inverse. Certes, Alice aimait le sexe violent, elle aimait que Mélinda la brusque, qu’on la prenne pendant des erreurs, mais… À la base, elle était toujours consentante. Ce que Nanami avouait équivalait à de nombreuses années de condamnation dans les geôles sylvandines, si ce n’est une mise à mort. Alice se pinça les lèvres, et fléchit les genoux, se mettant à hauteur de la jeune femme, et posa ses mains sur ses épaules.
« Je ne sais pas quoi te dire, Nanami… La seule personne que je connaisse bien qui se rapproche de toi, c’est une femme dont tu n’aimes pas que je parle. »
Mélinda, encore ! Évitant de prononcer son nom, Alice poursuivit :
« C’est une esclavagiste, une femme qui capture, séquestre et viole des femmes. Un monstre, tout comme toi… Mais j’ai appris à l’apprécier. J’ai vu ce qu’elle faisait vraiment. Elle… Elle est autoritaire, elle est dirigiste, mais elle aide ses proies à se sentir mieux. C’est paradoxal, mais… Elles s’épanouissent à son contact. Sincèrement. Je pense que, si tu la détestes autant, c’est parce que, au fond de toi, tu la vois comme une rivale potentielle, vu que vous êtes similaires… Si ce n’est qu’elle a un manoir, et toi un entrepôt. »
Alice sourit doucement à Nanami, et glissa sa main, attrapant son visage, et empoigna son menton. Là, elle s’en servit pour relever la tête de Nanami, croisant son regard. Ses yeux croisèrent les siens, et Alice reprit :
« Je ne suis pas idiote, Nanami. Jadis, j’étais une jeune femme naïve, mais j’ai toujours su, pour paraphraser l’un de vos penseurs, que l’Homme est un loup pour l’Homme. Il y a du mal en chacun de nous, tout simplement, y compris en moi. Ce qu’il faut, Nanami, ce n’est pas de vouloir éteindre tes pulsions… Mais les contrôler, les rationaliser. »
La Princesse se tut pendant quelques secondes, et reprit ensuite, soucieuse, et finit par poser la question qui lui brûlait les lèvres :
« Tu… Tu n’as quand même pas tué, hein… ? »