Je secoue la tête à la dernière question.
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Non, non... Je n'ai plus de questions votre honneur, réponds-je alors que Mélinda me fait un dernier Câlin.
Je la serre aussi un peu contre moi. Ironiquement, être dans un hôpital me fait presque me sentir chez moi. Je suis dans un environnement familier entre le personnel de soin, les odeurs et le blanc omniprésent. Mélinda dit que j'ai besoin de me reposer, mais je sais déjà que je ne vais pas réussir à beaucoup dormir. Même si j'en ai peu l'air, je suis toujours assez nerveuse avant une intervention pour ne pas bien réussir à trouver le sommeil.
Mélinda me laisse seule au bout d'un moment et je me contente de rester allongée et de réfléchir en regardant le plafond. Honnêtement, mes pensées tournent en rond et j'en reviens presque tout le temps à ce que je ferais une fois que l'opération sera terminée, si elle réussi.
Avoir un avenir qui va au-delà de mes études reste décidément un sujet nouveau et plein de controverses... Avoir un avenir où je pourrais me préoccuper de ma sexualité l'est encore plus ! Je n'ai jamais envisagé la possibilité d'avoir un compagnon, ou une compagne, de tomber amoureuse, ou même d'avoir des enfants... Et surtout, je me suis toujours fixé pour but de faire des études, mais je n'ai aucune idée de ce que je voudrais en faire au bout... Je ne pensais qu'à avoir un diplôme à emporter dans ma tombe histoire que mes parents soient fiers de moi et parce que j'avais besoin d'un objectif pour continuer d'avancer.
Mais tous mes plans sont en train de partir en lambeaux. Si l'opération est un succès, je vais vraiment devoir me questionner sur qu'est-ce que j'aimerais faire de ma vie. Et aussi comment la gagner... Même si ce dernier point a l'air d'être plutôt en suspens tant que je reste auprès de Mélinda...
J'aimerais être une bonne personne... Mais est-ce que je pourrais jamais oser dire que je travail dans un Harem sans avoir honte que les gens commencent par penser que je me prostitue ? SOnge-je entre-deux question.
Je sens que je n'ai pas fini d'en avoir des maux de tête.Il me faut très longtemps pour m'endormir, comme je le soupçonnais. Et je ne dors ni bien ni longtemps. Je suis réveillée par les infirmières qui viennent me préparer pour l'opération. Il n'y a pas grand-chose à faire en réalité à part me poser les cathéters pour pouvoir ensuite y brancher les perfusions de liquide physiologique contenant les nano-machines de ce qu'on m'explique.
La doctoresse repasse me voir plus tard pour m'expliquer la suite des opérations, ajoutant que je peux être éveillée ou endormie pendant l'opération. Elle sera assise derrière un pupitre et supervisera le travail des nano-machines pendant la durée de l'intervention. Être endormie est plus simple pour les nano-machine car mon corps travaille au ralenti, mais si quelque-chose se passe mal, être éveillée peut me permettre de le remarquer plus tôt et de le signaler si je sens une gêne trop forte car normalement l'intervention est non-douloureuse.
Je décide d'être endormie. Déjà de un parce que j'ai encore sommeil. Ensuite, ça ne m'a jamais branchée des masses de papoter avec une personne qui est occupée à me découper, même si là ce ne sera pas vraiment le cas. Et puis, comme ça au moins si quelque-chose se passe mal et que je me réveille pas, ben je n'en saurais jamais rien et j'aurais éviter de stresser ou souffrir jusqu'à la mort dans mes derniers instants.
Je suis endormie à l'aide d'un cachet. La doctoresse me parle de la pluie et du beau temps pendant que je sombre et ce jusqu'au moment où je ne peux plus tenir debout et ferme les yeux.
Sauf que je me réveille en sursaut, comme si j'avais été réanimée par défibrillation et inspire difficilement l'air qui semble vouloir me brûler les poumons. Je suis couchée sur une surface ferme, mais pas dure dans une autre pièce, elle est super sombre. Il y a des objets au plafond qui laissent aléatoirement tomber des pluies d'étincelles et qui lancent un éclairage approximatif autour de moi. Je reconnais vaguement une salle d'opération. Mais on dirait qu'une guerre est passée par là. Les rares meubles sont renversés, leur contenu éparpillé par un impact ou une onde de choc. Toutes les lumières ont l'air d'avoir éclaté et il y a des débris de verre qui scintillent au sol comme s'il était couvert de diamants quand les étincelles crachotent. Un bureau au style très moderne est toujours debout, mais comme il a l'air d'être fixé au sol, c'est probablement la raison pour laquelle il n'est pas renversé.
L'ouïe me revient par étapes. J'entends une sirène d'alerte qui sonne, puis des bruits de voix étouffés. On appelle quelque-part. Je ne reconnais ni les voix ni ce qu'elles disent. Mais un bruit plus proche me fait tourner la tête. Un bruit de verre qui crisse contre le sol. C'est la doctoresse qui se relève, je n'avais pas remarqué qu'elle était allongée au sol. À côté d'elle, une autre femme se lève à son tour. Elle porte des lunettes, mais un verre s'est cassé. Toutes deux ont des coupures sur le visage et les mains. La doctoresse pousse un juron en se relevant, le genre plutôt imagé.
Une porte s'ouvre, une lumière crue m'aveugle. Je lève un bras pour protéger mes yeux, mais je n'en ai pas la force. Je réalise seulement que je me sens épuisée. Quelque-chose passe dans mon champ de vision, je réalise que ce n'est pas un être vivant, c'est une machine. Une bande au niveau de sa tête s'illumine au même rythme qu'elle me parle.
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Madame, est-ce que vous m'entendez ? Vous êtes blessée ? Me demande-t-elle d'une voix synthétique sans émotions.
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Je ne crois pas... Réponds-je d'une voix faible.
Je sens que quelque-chose se glisse sous mes jambes et mes épaules, puis je suis soulevée et emmenée hors de la pièce par le robot. Il y a d'autres personnes sur le chemin, des agents de sécurité, des pompiers, du personnel soignant, j'ai l'impression de sortir tout droit d'une zone sinistrée, pourtant je reconnais rapidement le même hôpital que je suis entrée. Je reconnais même la chambre où on me ramène.
Je suis prise en charge par du personnel soignant une fois arrivée, je suis déshabillée et lavée, on se concentre surtout pour chasser de mes cheveux les débris de verre afin d'éviter que je ne me blesse. Une infirmière vient découper à l'aide d'un scalpel une forme de platique et de métal fondu sur mon poignet, mais c'est quand elle le retire et que je vois les aiguilles que je comprends que ce sont les cathéters qu'on m'a posé pour les injections de nano-machines. On me pose une bande, mais je ne comprends pas ce qu'il s'est passé. Suis-je guérie ? C'est bon ?
Les personnes autour de moi n'ont pas la réponse, la seule chose que j'apprend c'est qu'un événement imprévu s'est produit durant l'opération. Je suis séchée, rhabillée et remise au lit. Je dois me reposer. Je suis tellement épuisé que je ne me fais pas prier.
C'est le lendemain que la doctoresse repasse finalement me voir. Elle a demandé la présence de Mélinda. Quand tout le monde est là, elle lâche sa petite bombe, l'air pincée, j'ai l'impression qu'elle est vexée.
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Votre protégée a une protection magique. Et pas une petite. Qui plus est, capable de se déclencher de manière inconsciente pour réagir à une menace interne au corps. Elle a détruit toutes les nano-machines que nous lui avions injecté et nous a soufflé tout un bloc opératoire, provoquant des fissures jusque dans les structures porteuses de la pièce. La choc a même défibrillé la patiente pour forcer le retour à un état conscient. Si le bâtiment avait été de plus piètre qualité, la salle se serait probablement effondrée. Les dégâts sont très conscéquents, précise-t-elle en rajustant ses lunettes.
Heureusement, j'ai eu notre assureuse au téléphone et tout ceci sera couvert par l'assurance accident de l'hôpital, car personne n'était au courant du risque de cette possibilité, continue-t-elle en se tournant vers Mélinda.
Du moins, j'ose espérer que vous n'étiez pas au courant... Ni votre protégée... Car il vas y avoir enquête vu que le bilan se chiffre en centaines de milliers de crédits de dommages et de destructions, sans compter les blessures que moi-même et mon assistante avons subies.Je deviens toute pâle à cette mention parce que je ne suis plus sûre si nous avions précisé à la doctoresse que c'était mon potentiel magique qui avait provoqué mon état. Mais Mélinda n'a pas l'air inquiète. Elle n'était pas au courant et moi non plus, l'enquête ne réussira qu'à prouver que c'était un simple accident magique.
La doctoresse s'explique ensuite avec Mélinda, lui expliquant que l'opération peut quand-même être pratiquée, mais que vu la réaction magique, me placer un collier en obsidienne sera le minimum pour éviter une réaction similaire à une deuxième tentative. Elle serait même plutôt partisante d'une ingestion d'obsidienne avant celle-ci afin que mon potentiel magique soit neutralisé en profondeur et pas juste en surface, arguant que la réaction était plutôt conséquente pour quelque-chose d'inconscient, plus que tout ce qu'elle a croisé jusque-là en tout cas. Elle ajoute même qu'elle s'estime chanceuse d'être encore en un seul morceau et qu'elle et son assistante n'aient été que légèrement commotionnées alors que la réaction était clairement prévue pour être létale. Elle remercie pour cela une sorte de dispositif d'urgence qui les aurait protégées mais aurait été détruit dans l'opération.
Je cramoisi sur mon lit, sentant mes oreilles chauffer énormément et ma figure aussi. J'ignorais vraiment que j'avais ça en moi et ça continue de me jouer des tours ! Pour le coup, je me sens nulle et inutile. Pire, je suis une perte de temps et d'argent. Si ça continue comme ça même la patience de Mélinda va finir par s'épuiser.
Je souhaiterais être née sans aucun traits particulier… J'aurais été tellement plus heureuse… Songe-je particulièrement peu fière de moi.