Personne ne le suivait. Les seuls bruits de pas qu’il entendait étaient les siens, tapant sur le sol à un rythme qui allait ralentissant à mesure qu’il s’éloignait. Puis il marcha tranquillement sur quelques mètres pour reprendre son souffle, sans pour autant s’arrêter. Il savait que s’il s’arrêtait ses jambes réclameraient une pause plus longue, et c’était une mauvaise idée. Donc il marchait. La nuit lui permettait d’être discret, et il redoublait d’attention pour ne pas faire une deuxième mauvaise rencontre.
"Et maintenant, le grand jeu, ça va être de me renseigner sans attirer encore l’attention… Oh, à moins que… Oui, ça peut être amusant. À nous deux, commissaire cadet ! Je n’ai pas encore fini de vous embêter."
Erwan devait cependant encore chercher, puisqu’il ne connaissait que le nom de celui qui l’avait menacé, et il mit plusieurs heures de recherche à trouver son adresse, apprenant dans le même temps qu’il était justement rentré chez lui un peu plus tôt. Quand on sait écouter les bonnes personnes, on trouve plus rapidement ce qu’on cherche.
Après ces quelques heures, donc, l’espion se dirigea le plus naturellement du monde vers l’adresse qu’il avait réussi à se faire donner, à grand renfort de pièces, seul détail qui l’agaçait. Déjà, il trouvait assez consternant que des gens comme ça soient corruptibles, mais en plus il n’aimait pas trop l’idée d’avoir presque entièrement vidé sa bourse juste pour cette recherche.
"Non mais sérieusement… C’est à se demander comment ce pays est encore debout… Enfin ! Monsieur le nerveux saura peut-être m’expliquer."
Quand il arriva, la première chose à laquelle il pensa, c’est frapper à la porte, histoire de bien le provoquer. Mais non, mauvaise idée, ça ne l’avancerait à rien sinon à se prendre une balle dans le crâne. Il écarta donc cette idée et regarda plutôt du côté de la fenêtre. Beaucoup mieux, déjà. Il examina un peu ladite fenêtre, jusqu’à trouver un moyen de l’ouvrir discrètement, et entra de cette façon. Il prit le temps de refermer la fenêtre mais pas celui d’observer les alentours. Il marcha seulement jusqu’à une pièce voisine où il voyait de la lumière. Et pour cause : le commissaire cadet y était. Il lui tournait le dos. Parfait… Erwan sortit son poignard, juste au cas où, et s’approcha sans un son. Quand il fut à quelques centimètres derrière l’autre, il prit la parole d'une voix douce, mais où on pouvait déceler une pointe de menace :
« Je vous conseille de ne pas bouger, commissaire cadet, il me faut moins d’une seconde pour vous égorger. Mais ce n’est pas mon but, je voudrais simplement vous poser quelques questions. »