C'est un soir comme beaucoup d'autres, il fait froid, le monde va mal et le boucan assourdissant des cris de joie, de peine et celui des pièces qui croulent et roulent vous agresse probablement les tympans. Oh, s'il fait froid, c'est uniquement dehors, cela dit, car ici, la chaleur est étouffante ou peut-être est-ce simplement parce que vous avez un peu trop bu ces cocktails, espérons d'ailleurs que vous soyez fort riche car dans le cas contraire, vous devrez probablement vendre un rein pour payer la note. Et si ce n'est l'alcool, c'est peut-être le stress de tout perdre, celui pour lequel vous êtes venu, cette sensation de risquer sa vie, l'histoire de la roulette russe, tout ça.
Quoiqu'il en soit, ça se passe dans un casino, peut-être un peu trop bruyant.
Notre ami Lucien est debout l'une de ses adorables machines à sous, rouge pétante. Ce n'est pas vraiment un détail important à vos yeux, peut-être mais le rouge est la couleur du sang, de la passion et aux yeux de notre dieu démoniaque, celle de la haine et de la destruction. Charmant. Et il fixe cette machine depuis déjà trop d'heure à échanger les échecs et pour chaque pièce que la machine avale, elle n'en recrache aucune. Depuis des heures. Et, alors qu'il replace son chapeau sur sa tête pour la centième fois, la colère et l'irritation peuvent aisément se lire sur son visage, le dieu amateur de jeux d'argent semble perdre patience avec cette machine, une machine. Oui, c'est bien là le problème à ses yeux, nul moyen de rendre les coups, nulle possibilité de renvoyer la pareille. Une machine ne souffre pas, elle ne supplie pas, elle ne peut même pas mourir.
"Machine, petite machine... Tu ne comprends pas, hein ? Tu ne comprends pas qui je suis, n'est-ce pas ? Je suis Lucien. LU-CIEN. Pauvre... pauvre... truc avec des boulons ! Tu vas me faire gagner ou je vais t'étriper et répandre... Ah... oui..."
Sa voix est criarde, désagréable et stridente, comme toujours, frottant son menton, il semble chercher une solution à ce problème qui commence à lui miner son moral pourtant joueur du début de soirée. Il finit par hausser les paroles et reprend à voix haute comme il l'aurait fait dans une discussion tout à fait normale avec un être humain.
"Bon, voilà le deal. Si je gagne... je tue la personne de ton choix. Ah ! Tu ne peux pas parler, c'est vrai, quelle stupide machine... Ah ! Voilà l'idée. Je gagne, je me retourne et la personne la plus prooooooche... je la tue !"
Fort de ce pacte de sang avec la terrible machine rouge, Lucien actionne à nouveau le levier, plein d'assurance et le coeur léger. (S'il en possède un...) Avec quelques interminables secondes, la machine semble se plier aux désirs du dieu et affiche trois magnifique septs avant de déverser un flot de pièces auxquelles le dieu ne prête pas attention, que ferait-il de vulgaires pièces ? Il se retourne dans un large sourire, ses yeux se figeant sur sa proie.
"There you are, Darling... ~"